Pendant des jours et des jours on venait manger ici. C'était affligeant de voir ce lieu fermé pour raisons budgétaires. Le pire, c'était d'y voir Parker. Croyez-moi, j'étais à deux doigts de l'étrangler.
- Salut.
- Qu'est-ce que tu me veux ?
Il s'adossa au mur tagué du restaurant.
- J'ai fait des recherches sur ces rêves.

Mais je m'en fout, connard ! Moi aussi j'en ai fait. Je n'ai rien trouvé d'exceptionnel alors pourquoi m'avoir fait venir ici ? J'étais en rogne. Chaque seconde qui passait était une occasion de le frapper.
- Je ne sais pas encore tout ce qu'on devrait savoir mais... Ce n'est pas de ma faute.

Je devais le croire en plus ? Il a tué Scott parce qu'il l'a blessé dans son égo ! N'allez pas me dire qu'il est innocent.
- En fait, quand je suis resté plus longtemps, j'ai vu un mur étrange. Une barrière toute noire.

Là, ça m'a intrigué. La veille, je l'ai également vu, mais j'en avais peur. Ça sentait l'arnaque, voyez-vous ?
- On appelle ça une éclipse. C'est l'endroit où le cauchemar peut te prendre en chasse.
- Attends, attends. Si tu sais ça, c'est que...
- Oui. Nous ne sommes pas les seuls à qui c'est arrivé.

Alors pourquoi je n'ai rien vu, moi ? J'étais mauvais en informatique mais là, cela n'avait rien à voir. Je suppose.
- Si tu entre dedans, tu n'en sortiras pas.
- C'est quoi cet autre monde, putain ?
- Si j'ai bien compris, ce serait une autre dimension.

Je voulais m'ouvrir le crâne en deux. Me frapper contre le mur encore et encore afin de laisser couler le sang et de finalement finir brisé comme une pastèque. Je me sentais vraiment mal, j'avais l'impression que le monde se foutait de ma gueule. C'était absolument impossible.
- Enfin, on n'est plus concernés alors ça ne sert plus à rien de savoir ça.
- Au contraire, Parker. J'y suis retourné.

Je lisais la peur dans ses yeux. Ce n'était plus mon ami mais il s'inquiétait encore pour moi. Il ne faisait pas semblant, non. Je ressentais son effroi.
- Si tu peux trouver un moyen d'arrêter ça, je suis preneur.
Il opina du chef et s'en alla en courant, sans me dire au revoir. Comme si j'attendais la moindre forme de politesse de sa part. N'importe quoi...

En robe, Coleen était magnifique. Je la préférais nue, honnêtement mais ces vêtements lui allaient à ravire. Je la voyais bien avec les robes de riche appartenant à Sharon.
- Pourquoi tu me fixes comme ça ?
- Je profite d'avoir une aussi jolie demoiselle à mes côtés. Peut-être que bientôt, je vais mourir.
Elle me gifla si vite que je n'ai pas eu le temps de voir sa main arriver. Je crois bien que ça ne lui a pas plu.

Ce jour-là, on est allés acheter des patates ! J'avais hâte d'être le lendemain pour pouvoir les dévorer. Je vous jure, c'était devenu mon petit péché mignon. En voyant le rayon des aspirateurs, je me suis approché d'un des tubes. J'étais en mode... Détective. J'avais l'impression d'être super intelligent.

Doucement, j'ai touché l'objet et j'ai commencé à le serrer fort.
- Tu veux un tube d'aspirateur ? riait Coleen.
- Non. Mieux que ça.
- Un gode...

Dit-elle avec les yeux grand ouverts et les yeux luisants. Sérieusement, j'aurais pu y passer. J'avais peur, là.
- Arrête tes conneries. Ce matin, Parker m'a parlé des cauchemars.
C'est là que j'ai émis mon hypothèse. Il était peut-être impossible d'en sortir en traversant ces murs. On pouvait y entrer avec facilité comme l'a fait Parker mais...
- Il n'y aurait selon les témoignages, aucun autre moyen.

Alors, j'ai commencé à longer le tube avec mon index et je suis arrivé au gros truc là. Vous savez, là où il y a le sac, le moteur et tout. Le noyau de l'aspirateur... Le noyau du cauchemar.
- En fait, il suffirait de remonter. Ou bien de descendre encore plus bas et... Vaincre le cauchemar.

C'était la plus débile de toute mes idées. J'étais convaincu d'avoir trouvé une solution mais lorsque j'y ai réfléchi un peu plus longuement, j'ai compris que c'était peine perdu. Vous me connaissez, maintenant, hein ? Vous savez bien que j'ai quand même essayé.

Non, non, je ne suis pas retourné dans l'éclipse volontairement. En fait, quand je suis revenu dans le rêve, j'étais avec Jody. On discutait à propos de Marcus. Je disais que son comportement était bizarre et que je préférais me méfier de lui.
- Au fait, tu as des nouvelles de Daniel ?
- Ouais. Apparemment, s'il a fait sa crise, c'est parce qu'il était possédé.

Y a pas à dire, c'était le plus dingue de nos amis. Surtout pour ce qu'il a fait après... Sharon est arrivée en courant.
- On a un souci.
- Quoi ?
- Daniel est entré dans une espèce de mur noir. C'était bizarre. J'ai refusé de le suivre, j'ai peur, moi.

Il y avait de quoi. Le cauchemar était réveillé. On était devenus des proies. L'éclipse allait s'agrandir comme me l'a expliqué Parker. C'était peut-être le début d'une nouvelle histoire. C'était peut-être ma dernière nuit. Je ne savais plus quoi penser. Alors, je me suis levé et j'ai souris.
- Allons chercher Marcus. On va en enfer.

Ouais, j'étais presque fier de moi. C'était stylé comme façon de conclure un épisode de série d'horreur. Le truc, c'est que c'était ma vie qui était en jeu. Quand je m'en suis rendu compte, je suis retourné sur le banc.
- Tu faire quoi ?
- Ta gueule, Jody. Je m'en vais...

Coleen a senti mon appel de détresse. Elle m'a réveillé. Je n'étais pas encore dans l'eclipse alors je pouvais gagner du temps. J'ai lâchement abandonné mes amis mais c'était pour trouver une solution. On devait tout arrêter. Une bonne fois pour toute.

Il était 2h38 exactement. Je me suis habillé et j'ai attrapé mon téléphone. Je vous l'avoue, je n'en avais pas envie, mais je n'avais plus d'autre option. J'ai contacté Parker. Je l'ai réveillé et c'était bien fait ! Un point pour moi !
- Tu es sorti ?
- Je n'étais pas encore dans l'éclipse. Elle va prendre de l'ampleur. Je crois que les autres y sont encore.

À ce moment, je l'ai entendu pouffer légèrement. J'ai compris quelque chose en faisant ça. J'étais comme lui. Moi aussi, je venais de fuir en laissant mes amis face à la mort. Je ne valais pas mieux que Parker. J'étais une merde...
- Tu n'as pas à t'en vouloir. Je sais que tu me déteste et je ne t'aiderais pas pour te récupérer. Je le fais parce que j'en ai envie.

Allez, c'est reparti pour un discours barbant.
- C'est humain d'avoir peur. Toi, au moins, tu fais en sorte d'arranger les choses. C'est ce que je voulais aussi mais je n'avais pas les moyens de le faire. Je n'ai rien tenté à part vous enfoncer encore plus. Toi, tu fais tout pour sauver tes nouveaux amis. Ils ont de la chance.

Son timbre de voix venait de changer. Il était triste de nous avoir perdu. Je me sentais méchant mais il avait besoin de comprendre. Il méritait d'être mon ennemi.
- Parker. Tu ne me trahiras plus, hein ?
- Non, Lukas. Plus jamais.
- Ne vas pas te faire d'idée. Tu n'es plus mon ami et tu ne le seras plus jamais. J'ai juste besoin de toi. Fais le pour alléger ce poids sur ta conscience.

Alors, il est venu à la maison. Je crois bien qu'il était jaloux de notre nouvelle vie. Lui, il s'est fait tromper par Mallaury. Qu'elle traînée. Il ne lui restait plus rien. Plus d'amis, plus de parents... C'était moi avant que tout recommence. Je savais parfaitement ce qu'il ressentait.

On a cherché à en apprendre plus sur cet autre monde. Cette dimension. En fait, c'était une sorte de Ying Yang. Une surface blanche, une surface noir. On était du côté de la lumière alors que les autres étaient dans l'ombre. Ils vivaient la nuit.
- On a tous une âme sœur là-bas, dit Parker. Quand ces personnes s'endorment en pleine nuit parce qu'elles n'ont plus le choix, on les remplace.

C'était la plus grosse des coïncidences mais nos âmes sœurs s'endormaient en même temps que nous. C'était le destin.
- Donc, dit Coleen, lorsqu'ils s'endormaient et qu'on restait éveillés, comment ça se passait ?
- Je n'en sais rien. En tout cas, on aurait dû continuer à vivre à leur place au lieu de faire les cons. On a eu tellement de possibilités dans ce reve qu'on a voulu tout prendre.
- Et c'est ce qui nous a mené à notre perte. C'est ma nouvelle devise.

Je pensais avoir fait le tour mais on a appris autre chose d'important. Lorsqu'on est allés sur les réseaux sociaux afin de nous renseigner sur Marcus, on est tombé sur quelque chose d'incroyable.
- C'est quoi ces conneries ? demanda Coleen.

Chaque publication semblait n'avoir aucun sens mais pour nous... C'était normal.
- Il est déjà allé là-bas, lui aussi. dit Parker, ébahi.