& 23 ; Les derniers préparatifs
Magnus a été obligé de mettre Alec dehors pour pouvoir finir de préparer ses biscuits. Déjà qu'il n'a pas réussi à s'empêcher de rougir en les décorant, s'il avait dû, en plus, supporter le regard d'Alec, il n'y serait jamais arrivé. Enfin, ça ne veut pas dire que la séparation à la porte n'a pas duré dix bonnes minutes, alors même qu'Alec est celui qui est censé emmener Magnus chez Izzy et Simon. Mais Magnus n'y pense pas. Quand ils sont seuls tous les deux et qu'il n'y a personne pour les observer et commenter, il n'y pense pas.
Il termine de nouer le ruban autour de la boîte en métal garnie de dentelle en papier et contenant ses œuvres de la journée, quand son portable sonne dans sa poche. Il l'attrape pour voir que c'est un appel d'Alec et répond. Il entend tout de suite les bruits de la circulation derrière lui.
— Me dis pas que tu m'appelles en conduisant.
— Hm pas vraiment, je suis pratiquement à l'arrêt depuis cinq minutes parce qu'il y a des bouchons sur le pont de Brooklyn.
— Donc tu m'appelles parce que tu t'ennuies.
— C'est ça !
En l'entendant rire, Magnus ne peut s'empêcher de sourire. Quel idiot. Il part dans sa chambre pour choisir ses bijoux tout en discutant avec Alec. Quand il raccroche, après qu'Alec lui ait dit qu'il serait bientôt en bas de chez lui, il se concentre sur son poignet. Il a changé son bracelet. Bien sûr, l'ancien reprendra sûrement sa place dans les prochains jours mais, pour une fois, il l'a changé. C'est toujours un bracelet large en cuir, mais orné de lanières rouges pailletées. Il a un peu peur que ça attire l'attention. Mais il sait déjà que l'autre attire l'attention. Et s'il n'en avait aucun... Il passe machinalement un doigt sous la bande de cuir un peu plus lâche et un frisson de dégoût le traverse quand il sent ses cicatrices. Il retire son doigt et soupire. Ce serait bien de ne pas associer un autre bracelet à son dégoût de lui-même. Pour tout le monde, ce ne sera qu'un accessoire assorti à l'occasion.
Il passe une main dans ses cheveux coiffés en pics, ses mèches pourpres refaites quelques jours avant. Pour son maquillage, il a gardé son éternel trait d'eye-liner noir mais a échangé son fard à paupière noir pour une teinte plus rouge et vaguement pailletée. Même son vernis est rouge à présent. Son dernier Noël remonte à six ans, il a envie de bien faire les choses, de marquer le coup, et modifier un peu son maquillage lui semble un bon début.
Sa tenue est plus habituelle, mais il n'a pas vraiment de vêtements de fête, enfin plus maintenant. Connaissant Alec et ses goût sobres, il a opté pour une chemise argent et un pantalon noir, sa taille fine mise en valeur par une ceinture blanche. Si, à une époque, il aurait adoré se démarquer des autres convives, c'est aujourd'hui une perspective qui l'effraie. Il en est même à un point où il se demande ce qui ne l'effraie pas, socialement. Il lui arrive d'avoir des angoisses rien qu'en repensant aux fêtes qu'il organisait avec Camille et aux nombreuses personnes qui gravitaient autour d'eux.
Son portable sonne une nouvelle fois, l'empêchant de se perdre dans des souvenirs qui l'obligeraient à refaire son maquillage. Alec l'attend en bas. Il sort quelques minutes plus tard, emmitouflé dans son manteau, la boîte en métal et une poche dans les bras. Quand il arrive en bas, Alec est appuyé contre la voiture et le débarrasse pour l'aider à s'installer. Il met la poche dans le coffre, un peu intrigué.
— Je croyais qu'on avait acheté tous les cadeaux ensemble, dit-il en reprenant sa place derrière le volant.
Magnus lui lance un regard éloquent. Comme s'il avait pu tout acheter en présence d'Alec ! Bien sûr, pour les parents d'Alec ou encore pour Jace, qu'il connaît peu, il s'est rangé à l'avis de son amant. Pour les filles et Simon, il s'est débrouillé, même s'il a fait les achats la même journée. Mais aurait-il pu acheter le cadeau d'Alec avec lui dans les pattes ? Certainement pas !
Les lèvres d'Alec forment un « oh » silencieux qui fait rire Magnus alors qu'il attache sa ceinture. Durant le trajet, un peu long vu l'heure et la date, le brun ne peut s'empêcher de jeter des regards vers l'indonésien.
— Qu'est-ce qu'il y a ? Finit par demander Magnus, en se rendant compte de son manège.
— Excuse-moi bébé, c'est juste... Je te trouve superbe.
Cela faisait longtemps qu'il ne l'avait pas vu avec des paillettes, même juste un peu. Le rouge monte rapidement aux joues de Magnus qui se détourne, à court de mots. Alec rit doucement.
— C-c'est vraiment pas une bonne habitude que tu as, de m'appeler « bébé », se contente-t-il de dire pour cacher sa gêne et le fait que son cœur bat trop vite à son goût.
— Pourquoi ? Je croyais que tu aimais que je t'appelle comme ça.
— Oui, mais... Tu penses pas que ça va leur paraître bizarre que tu m'appelles comme ça alors que tu as précisé à ta mère qu'on n'est pas ensemble et que je bataille avec ta sœur depuis deux semaines ?
Nouveau « oh » silencieux et cette fois ils se mettent tous les deux à rire. Peut-être passent-ils trop de temps ensemble pour prendre ce genre d'habitude ? Peu importe. Alec hausse les épaules et passe doucement sa main sur la cuisse de son amant.
— C'est vrai. Je me contenterai de « Mags », alors, si cela sied à Monsieur.
Magnus lève les yeux au ciel, amusé, et pose sa main sur celle d'Alec avant que celui-ci ne l'enlève pour se concentrer à nouveau sur la route. Il leur faut un peu plus de trente minutes pour rejoindre l'immeuble où vivent Izzy et Simon.
Alec finit par garer la voiture sur le bord de la route, derrière celle de Jace et Clary. Mais avant de descendre, il se penche vers Magnus et pose une main sur sa joue pour tourner son visage vers lui. Il capture sa bouche avec un soupir. Passer la soirée près de lui sans même pouvoir le frôler, au risque que sa sœur se fasse des idées, ça va être un calvaire. Et, en même temps, ne pas passer cette soirée ensemble serait pire. Il lèche tendrement les lèvres qui bougent contre les siennes pour pouvoir enfin caresser sa langue. Mais il se force à rompre le baiser quand il sent le désir poindre dans son ventre. Sa bouche glisse le long de sa mâchoire. Pourquoi est-ce si dur de ne pas le toucher ?
— Si tu continues, je ne suis pas sûr de pouvoir me lever, souffle Magnus, un sourire dans la voix.
Le brun se redresse après un dernier et chaste baiser sur la bouche rose et beaucoup trop tentante de Magnus. Il essaie de faire disparaître l'étincelle de luxure qui doit déjà luire dans son regard. Quand Magnus parle comme ça, il ne répond plus de rien.
Ils sortent enfin, autant parce qu'ils doivent se rendre chez Izzy et Simon que pour se rafraîchir les idées. Ils récupèrent la boîte de biscuits et les cadeaux et entrent dans l'immeuble. Une fois dans l'ascenseur, Magnus fait part de sa surprise.
— Elle ne m'avait pas dit qu'ils vivent dans l'Upper East Side.
— Elle ne s'en vante pas spécialement, même si elle adore leur appartement, explique Alec. Il appartenait aux parents de mon père et ils nous l'ont légué à leur décès. Avec Jace, et l'accord de nos parents, on l'a offert à Izzy et Simon en cadeau de mariage.
— Oh, c'est adorable.
— Hm. E-en fait, on ne voulait pas le vendre et... vivre tous les trois plus Simon et Clary aurait été compliqué.
— Oui, bien sûr.
Un petit sourire se glisse sur les lèvres de Magnus. La promptitude d'Alec a ajouté des arguments terre-à-terre pour cacher sa gêne est vraiment adorable. L'indonésien dépose un baiser sur la joue de son ami alors que l'ascenseur s'ouvre à l'avant-dernier étage. Bien, maintenant, c'est ce qu'ils doivent être.
Clary, vêtue d'un legging rouge et d'une robe-pull dorée, vient rapidement ouvrir et lâche un long soupir de soulagement en voyant les deux hommes plutôt que ses beaux-parents. Elle les fait entrer et referme derrière eux.
— Tout va bien, Biscuit ? Demande aussitôt Magnus.
— Si on veut. Toi, lance-t-elle en pointant Alec du doigt, va dans le salon, Jace et Simon sont encore en train de se chamailler. Et toi, continue-t-elle en désignant Magnus, tu viens avec moi.
— Content de te voir aussi, Clary, grogne Alec.
Il se débarrasse de son manteau, révélant sa tenue entièrement noire, juste éclairée par sa cravate blanche. Il reprend les poches et obéit à sa belle-sœur. Magnus suit Clary, après avoir également déposé son manteau.
— Désolée pour l'accueil, dit-elle en soupirant. C'est un peu la folie, ici.
— Qu'est-ce qui se passe ?
— Izzy boude parce que Jace s'est moqué d'elle quand elle a proposé son aide à Simon en cuisine. C'est pour ça qu'ils se chamaillent, d'ailleurs, et j'ai dû les pousser dans le salon pour qu'ils ne se battent pas avec les spatules en bois.
Malgré la situation apparemment délicate, Magnus ne peut s'empêcher de pouffer de rire, et il est rapidement suivi par Clary. Après s'être arrêtés à la cuisine pour déposer les biscuits, ils montent à l'étage. La rouquine se tourne vers lui, sur le seuil de la salle de bain.
— Je te jure, ils vont me rendre folle tous les deux. Je dois retourner m'occuper du repas, je te la laisse.
Elle frappe doucement à la porte et un bruit étouffé qui ressemble un peu à la voix d'Izzy leur parvient. Clary s'éloigne en lui faisant un signe d'encouragement. Magnus ouvre la porte et trouve Izzy, assise par terre dans sa belle robe bleue, en train de pleurer. L'homme referme la porte et se précipite vers elle.
— Hey Princesse ! Pourquoi tu pleures ?
Que peut lui avoir dit Jace pour la mettre dans un état pareil ? La jolie brune relève les yeux, son maquillage coule sur ses joues, entraîné par ses grosses larmes. En voyant son ami, elle se met à pleurer encore plus fort.
— J'ai une crampe à la jambe et j'arrive pas à me relever toute seule !
Oh Seigneur ! Il passe ses bras autour d'Izzy en cachant son soulagement et l'aide à se lever puis à s'asseoir sur la chaise installée dans le coin. Il s'agenouille devant elle en lui demandant, d'un regard, quelle jambe la fait souffrir. Il commence à la masser doucement.
— Qu'est-ce que tu faisais par terre alors que tu as du mal à te relever ?
Ce n'est pas exceptionnel, avec ses douleurs dans le dos en ce moment, il lui arrive même d'avoir du mal à se lever des banquettes un peu basses du café.
— Je sais pas, j'étais fâchée ! Je sais même pas comment j'ai réussi à m'asseoir sans rouler.
Ils se regardent une seconde et se mettent à rire. Isabelle passe ses mains sur ses joues en râlant après les hormones qui la font tourner en bourrique puis se laisse aller au massage de Magnus.
— Jace se moque tout le temps de moi à cause de ma cuisine, soupire-t-elle avec juste un peu trop de satisfaction dans la voix pour que ce soit cohérent avec ses propos.
— Pourquoi tu ne prends pas des cours ? Ça lui clouera le bec.
— J'en sais rien. Simon dit que ce n'est pas grave que je ne sache pas cuisiner et puis... Si je suis vraiment nulle, ça m'embêterait de faire perdre son temps à quelqu'un.
— Moi, je peux t'apprendre si tu veux.
— Arrrgh... C'est quand j'ai dit que je suis nulle ou que je ne veux pas faire perdre son temps à quelqu'un que tu n'as pas compris ? Rétorque-t-elle, agacée.
— Ouuuh miaou ! Sors pas les griffes, j'essaie de t'aider !
— Pardon, Mags...
Sans cesser de sourire, il secoue la tête. Il a eu le temps de s'habituer à ses humeurs changeantes, autant que les autres, ces derniers mois et n'y fait pas attention. Il préfère même prendre ça à la légère pour ne pas la culpabiliser quand elle se reprend.
Après avoir soulagé la crampe, Magnus se relève et attrape la trousse à maquillage de la future maman pour cacher son chagrin passé qui ne manquera pas d'inquiéter son mari. Il commence par nettoyer son visage avec un linge froid puis il attrape les pinceaux.
— Ça fait des lustres que je n'ai pas maquillé un autre être humain.
— Parce que tu as maquillé autre chose que des êtres humains ?
— ... certains de mes exs ?
La mine interrogative de Magnus fait éclater de rire Izzy. Bien. Il préfère la voir comme ça, même si c'est le genre de blague à ne pas faire devant Alec. Leurs relations ont beau s'être largement améliorées depuis deux semaines, il évite en général d'évoquer ses anciens partenaires pour ne pas s'attirer les foudres d'Alec qu'il craint toujours, soyons honnête.
Au bout d'une vingtaine de minutes, des petits coups sont frappés à la porte qui s'ouvre doucement quand Izzy en donne l'autorisation. Derrière, Jace. Un peu penaud, il triture la pointe de sa cravate noire et rouge puis remet en place les manches de sa chemise dorée. Mal à l'aise de devoir s'excuser, d'autant plus en présence de Magnus.
— Excuse-moi Izzy, je ne voulais pas être méchant.
— Je sais, ce n'est rien.
Isabelle s'approche de son frère et qui la prend dans ses bras pour se faire pardonner. Magnus range le maquillage et repousse la trousse sur le comptoir, entre les deux vasques. Décidément, rien que cette salle de bain est plus classe que tous les appartements qu'il a pu avoir. Même quand il avait les moyens et l'envie de décorer.
— On devrait redescendre avant que les autres s'inquiètent, souffle-t-il après quelques instants.
— Oui. Allons-y.
Ils repartent au rez-de-chaussée et cette fois, Magnus prend le temps d'observer l'appartement. Et on dirait qu'un père Noël et ses lutins ont vomi partout, tellement il y a de décorations. Des guirlandes sur la rampe de l'escalier, des décorations accrochées aux murs, des tapis avec des sapins ou des flocons de neige dessus et, bien sûr, un superbe sapin de Noël dans le salon. Une grande pièce, un peu moins tape-à-l'œil que la salle de bain, plus à l'image du couple qui vit ici. D'ailleurs, une fois la visite du rez-de-chaussée terminée, en dehors de la salle de bain et de la cuisine qui, pour Magnus, ressemble à un rêve éveillé, l'indonésien se dit qu'Izzy et Simon ont dû faire de nombreux aménagements pour s'approprier un tel endroit.
— Oh mon Dieu, ils ont l'air tellement bons ! S'exclame la brune en ouvrant la boîte en métal.
— On va enfin avoir l'occasion d'en goûter, ajoute Simon, de retour aux fourneaux.
Il porte une chemise du même bleu que la robe d'Izzy et un jean noir. Magnus le regarde en haussant un sourcil, surpris.
— Sérieux ? Pourtant Izzy...
Il s'interrompt devant le regard alarmé de sa patronne. Pourtant Izzy a plusieurs fois ramené des gâteaux pour son époux... mais apparemment ils ne sont jamais arrivés jusqu'à lui.
— Pourtant quoi ? Insiste Simon en se retournant.
— Euh... je sais plus.
Isabelle pouffe de rire et Magnus s'empresse de changer de sujet pour ne pas avoir à expliquer son soudain trou de mémoire.
— Vous avez besoin d'aide pour quelque chose ?
— Non, non ! S'exclame Clary en posant ses mains sur ses épaules pour le diriger vers la porte de la cuisine. Allez dans le salon tous les deux, on arrive !
Mis dehors avec Izzy, ils rejoignent Jace et Alec, installés dans le salon après avoir fini de disposer les cadeaux en dessous du sapin.
— Tu te rends compte que l'année prochaine, il y aura peut-être un mini-Simon qui va courir partout, souffle Jace, d'un ton entre l'extase et l'horreur.
— Il aura pas un an, il courra pas partout, répond Alec en riant.
— Est-ce que tu as déjà vu un enfant, Jace ? Se moque gentiment l'indonésien en s'approchant.
Alec et Isabelle se mettent à rire et Jace râle un peu, pour la forme. Les deux nouveaux arrivants prennent place sur le second canapé, d'une jolie couleur crème. Magnus fait comme s'il n'avait pas eu envie d'aller s'asseoir à côté de son amant. Pendant qu'ils discutent, il passe machinalement sa main sur le coussin à côté de lui, du même bleu que le canapé sur lequel sont Jace et Alec.
— Izzy, tu vas bien ? Demande Alec, décidant de ne pas croire sur parole son idiot de frère.
— Oui. Je pense qu'entre la préparation du réveillon et les hormones, ça a fait un peu trop pour mes nerfs. Magnus a été parfait, désolé de t'avoir inquiété.
L'aîné Lightwood lève les yeux au ciel. Sa sœur aime bien trop le taquiner sur sa soi-disant jalousie envers Magnus. Malgré la plaisanterie, Isabelle pose sa main sur celle de son ami, pleine de gratitude. Il a l'habitude de la voir craquer au café de temps en temps. Enfin, moins ces dernières semaines puisqu'il y a moins de clients du fait des rumeurs. Clary et lui savent comment s'occuper d'elle pour la soulager et ils anticipent, la plupart du temps, mais Izzy est quelqu'un d'actif. Ne pas pouvoir faire tout ce qu'elle veut est déjà un poids en soi.
Il est environ 20h, quand la sonnette de l'appartement retentit. De la cuisine, Simon lance qu'il va ouvrir, pour que sa femme ne soit pas tentée de le faire. Les quatre amis se lèvent néanmoins et sont vite rejoints par Clary, puis par Simon et un couple. Magnus inspire discrètement et sent les doigts d'Alec effleurer les siens. Allez, inutile d'angoisser.
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