Chapitre 7

Si la journée d'hier m'a paru éprouvante, il n'en était rien à côté de la nuit que j'ai passée. J'ai écouté Mégane sangloter durant des heures. J'ai fini par craquer et lui apporter une tasse de thé ainsi que des mouchoirs avant de ressortir de la chambre. J'aurais aimé faire bien plus, mais je ne pouvais pas. Je ne peux pas lui dire que tout s'arrangera parce qu'elle a déjà vécu un drame et qu'il n'est pas nécessaire de lui mentir. C'est difficile à encaisser mais je dois me contenter de la laisser pleurer, encore et encore. Je dois la laisser s'effondrer et toucher le fond avant de l'aider à remonter la pente. Elle ne pourra débuter cette ascension qu'une fois que toutes ses larmes seront tombées, qu'une fois qu'elle se sentira complètement vide. À ce moment-là, je devrai encore attendre un peu. Je devrais patienter jusqu'à ce qu'elle se sente prête à avancer. Et si c'est trop long, je la pousserai un peu mais tant qu'elle n'aura pas décidé de poursuivre sa vie, je ne pourrai rien faire pour elle. Heureusement, elle a encore quelqu'un pour qui se battre : Eliott a besoin de sa mère et Mégane le sait.
Et justement, c'est ensuite Eliott que j'ai entendu pleurer. Il a fait de nombreux cauchemars cette nuit, s'est réveillé en sanglotant à de multiples reprises. J'ai tendu l'oreille toute la nuit, prête à monter pour le prendre dans mes bras et le consoler. Je me suis allongée dans son lit une dizaine de fois pour l'aider à se rendormir.

Cette nuit m'a fait réaliser que d'ici quelques jours, je devrai faire un choix. Soit je rentre à New Paltz pour poursuivre mes études, comme je l'avais prévu, soit je reste ici autant de temps qu'il le faudra, quitte à mettre mes projets en pause. Parce que la seule chose dont je sois certaine, c'est qu'à la rentrée, Mégane ne sera pas encore prête à tenir cette maison et à prendre soin d'Eliott. Elle sera épuisée moralement et elle aura besoin d'aide pour s'occuper de son fils. Mes études ou ma famille. Ce pour quoi je me suis battue ou ceux qui se sont battus pour moi. Celle que j'ai toujours voulu devenir ou ceux qui m'ont poussée à devenir celle que je suis.

Entre deux cauchemars d'Eliott, je me suis souvent approchée de la chambre de Sophia, juste pour garder un œil sur Chase. Lui aussi, son sommeil a été agité. Il s'est endormi très tardivement et s'est réveillé très tôt, comme souvent, mais il n'a pas bien dormi. L'enterrement a certainement fait remonter des souvenirs désagréables. Je n'ai pas la moindre idée de la personne qu'il a perdue, mais elle devait lui être très chère. Il s'est montré fort et courageux pour m'épauler, moi, mais aussi Mégane et Eliott, durant cette journée éprouvante. Je devais m'assurer qu'il allait bien. Je voulais être là pour mon ami au cas où il aurait eu besoin d'une épaule sur laquelle s'appuyer cette nuit.

C'est donc avec une grosse couche d'anti-cerne que j'ai essayé de rattraper les dégâts causés par mes pleurs de la veille et par mes insomnies ce matin. Puis j'ai emmené Eliott au magasin et, en compagnie de Chase, nous avons choisi la nouvelle peinture pour sa chambre. Du violet, comme il nous l'a demandé. Nous étions tous les trois fatigués, mais bien décidés à transformer la pièce. Après avoir réglé nos achats, peinture, pinceaux, rouleaux et décorations, nous sommes rentrés pour commencer les travaux.

- Il faut qu'on vide la chambre, déclare Chase.
- Sans faire trop de bruit, si possible. Mégane dort enfin.

Il hoche la tête et nous nous mettons au travail. Eliott nous aide du mieux qu'il le peut, le sourire aux lèvres. Je suis heureuse de le voir prendre part aux travaux malgré les circonstances. Cela lui permet de se changer un peu les idées et cette nouvelle chambre sonnera comme un nouveau départ pour lui. Du moins, je l'espère.

Nous entassons les jouets, les peluches, les figurines et les livres dans des cartons. Nous vidons tous les meubles pour les transporter plus facilement et petit à petit, la pièce se vide. Je passe la majorité de mon temps à traduire les conversations entre Chase et Eliott. Malgré la barrière de la langue, les garçons s'entendent à merveille. Chase se comporte comme un grand frère et je suis touchée qu'il s'investisse autant pour mes proches. Chaque jour, il me prouve que j'ai eu raison de lui faire confiance et de lui donner une chance. J'ai conscience qu'il fait tout cela pour m'aider, mais également pour me prouver qu'il n'est pas quelqu'un de mauvais et cela, en dépit de tout ce qu'il a pu faire ou fait encore.

Dans un coin de ma tête, les informations qu'il m'a données il y a deux nuits tournent en boucle. J'attends patiemment qu'il se livre un peu plus à moi, mais je ne veux pas le bousculer et je sais qu'il prend son temps, aussi bien pour lui que pour moi. Il veut que je sois prête à l'entendre et avec les événements récents, les moments où nous pouvons discuter sont rares.

- Ton téléphone n'arrête pas de sonner, soupire Eliott en le désignant du doigt.
- Je vais l'éteindre.

Je jette un coup d'œil aux textos. Toujours les mêmes.
J'essaye de rester joignable pour mes proches en France mais les nombreux messages et appels venant de New Paltz ne cessent d'envahir mon téléphone. Mes colocataires s'inquiètent et demandent de mes nouvelles, au même titre qu'Ethan. Ils attendent de savoir quand je reviendrai, si je serai là pour le nouvel an et hormis quelques mots pour les rassurer, j'ignore la plupart de leurs messages. Mais ceux qui m'ont le plus intriguée sont ceux de James, Joe et Adrian. Depuis trois jours, ils ne cessent d'essayer de me joindre. J'ai d'abord été tentée de leur répondre, un peu soucieuse, avant d'apprendre, grâce à leurs textos, que Chase avait subitement disparu et qu'il était injoignable. Il est évident qu'il ne les a pas prévenus de son voyage en France. Je ne sais pas pourquoi il ne leur a rien dit mais j'ai choisi de garder le silence. Il doit avoir une bonne raison de ne pas avoir allumé son téléphone depuis tout ce temps et je finirai par lui poser la question s'il ne me révèle pas la vérité de lui-même mais pour le moment, je le laisse aller à son rythme.

- Ce sont les filles ? Lexie est bien du genre à te harceler comme ça, se moque Chase en déplaçant la commode.
- Pour être honnête, ce sont plutôt tes colocs qui me harcèlent mais Lexie rivalise avec Joe sans problème.
- Mes colocs ?

Il fronce les sourcils et lâche le meuble. Son regard se plante dans le mien et son angoisse soudaine se répercute sur les murs de la chambre. Pourquoi panique-t-il ainsi d'un coup ?

- Ils s'inquiètent juste pour toi, le rassuré-je.
- Mais ils vont bien ?
- Je suppose que oui. Ils ne savent pas que tu es ici et je n'ai pas répondu pour ne pas avoir à leur mentir. Pourquoi tu ne les appelles pas ?
- Parce que j'ai laissé mon téléphone là-bas.

Je hausse un sourcil, surprise. C'est vrai que je ne l'ai pas vu utiliser son smartphone une seule fois depuis qu'il est arrivé mais j'ai stupidement cru qu'il avait choisi de le garder éteint pour être tranquille.

- Pourquoi ?
- Je l'ai... oublié dans la précipitation. Je suis parti un peu vite.

Menteur. Je hoche la tête et note mentalement de remettre le sujet sur le tapis lorsque l'occasion se présentera. Il ne l'a pas oublié. Il l'a délibérément laissé chez lui. J'en suis convaincue. Mais pourquoi ?

Je laisse mes interrogations de côté et me concentre sur les travaux. Je refuse d'aborder ces sujets en présence d'Eliott. Il ne comprend pas un mot de nos conversations mais il est jeune et à cet âge-là, les enfants ressentent les émotions. Il n'aura aucune difficulté à comprendre que la discussion n'est pas sans intérêt, bien au contraire. Il est préférable que je laisse mes proches en dehors des histoires de Chase.

- On peint quand ? soupire Eliott.
- On sort les meubles, on protège le sol et on peint. Ok ?
- Ok.

Il me sourit et donne un coup de main à Chase pour sortir la commode. Suivent la table de nuit, l'armoire, la caisse à jouets, le petit bureau et les étagères. Nous sommes contraints de démonter le lit pour le faire passer par la porte et je grimpe sur les épaules de Chase pour décrocher les cadres et retirer les différents stickers du mur.
Une fois la chambre entièrement vide, nous protégeons le plancher avec une bâche et récupérons les pots de peinture aussi violette que Holley Shiftwell, la voiture apprentie espionne du dessin animé Cars. Et pendant que je retire le couvercle du premier pot, je traduis les explications d'Eliott qui tente de convaincre Chase qu'il a raté le meilleur dessin animé de sa vie, ce qui nous fait beaucoup rire tous les deux.

- T'as jamais tenté une soirée Cars pour draguer des filles ? Je suis sûre que ça fonctionne à tous les coups, me moqué-je.
- Non mais ça peut s'arranger. Dès que tu as deux heures à m'accorder, on met Cars et on verra où ça nous mène. Je ne suis pas contre voir ce dessin animé si tu finis dans mes draps juste après.
- Je n'ai jamais ramené un mec ici, tu ne seras pas le premier. Désolée de te décevoir mais il va falloir attendre un peu pour vérifier cette hypothèse.
- Je suis patient.

Il m'accorde un clin d'œil et je souris, amusée. Eliott tire sur mon pull pour attirer mon attention et je me concentre sur le pot de peinture. Nous enfilons des vêtements auxquels nous tenons un peu moins avant de nous munir de nos pinceaux. Nous commençons par faire les angles des murs. Chase porte Eliott sur ses épaules pour qu'il puisse nous aider un peu et, discrètement, je le vois repasser derrière le frère de Sophia pour rattraper les grosses gouttes de peinture qui coulent.

Mégane passe la tête par la porte au même moment. Des cernes tombent sous ses yeux rougis par les pleurs mais elle semble un peu plus reposée que tout à l'heure.

- Qu'est-ce que vous faites ?

Eliott gesticule pour que Chase le repose sur le sol et il s'empresse d'expliquer à sa mère qu'il repeint la chambre pour faire plaisir à son père. Elle serre son fils contre elle, les larmes aux yeux. Ce sera dur, mais elle y arrivera. Je le sais. Elle se montrera forte pour Eliott.

- Je vais préparer à manger. Continuez sans moi en attendant, soufflé-je en posant mon pinceau.

Eliott se remet au travail et je descends dans la cuisine, en compagnie de Mégane. Il est l'heure de déjeuner mais je lui sers une tasse de café. Elle me remercie d'un sourire et je me mets aux fourneaux.

- Merci pour tout ce que tu fais. Tu n'imagines pas à quel point ça compte pour moi, déclare-t-elle.
- C'est normal. Vous avez fait tellement pour moi et j'ai merdé la première fois.
- Tu n'as pas merdé ma belle. Tu étais bouleversée, tu avais besoin de changement et de toute façon, tu voulais poursuivre tes études à l'étranger. On ne t'en a jamais voulu. Pas une seule seconde.
- Peut-être mais moi si. C'est douloureux pour moi d'être là mais j'ai remonté la pente à New Paltz et aujourd'hui, je veux être votre pilier en attendant que tu te sentes capable de reconstruire les fondations de cette maison.

Elle me sourit et la discussion s'arrête là. Elle m'observe préparer à manger avant de rejoindre sa chambre, son refuge. Je ne pense pas qu'elle se rendormira mais elle a besoin d'être seule et elle peut se permettre de prendre du temps pour elle. Chase s'occupe d'Eliott, moi de la maison et du repas. Je ferai tout ce que je pourrai pour elle tant que je serai là.

Après le déjeuner, nous retournons dans la chambre. Pendant mon absence, Eliott a fait de jolis dessins sur le mur avec la peinture. Il s'amuse encore un peu avant de tomber de fatigue. Il n'a pas très bien dormi, il s'est levé tôt et l'activité l'a probablement épuisé. Avec un peu de chance, il va faire une longue sieste qui lui permettra de récupérer ses heures de sommeil perdues.
Chase se charge d'aller le coucher dans la chambre de Sophia. Je suis encore incapable d'y mettre les pieds. J'espère pouvoir le faire avant de repartir, mais je ne suis pas certaine d'y parvenir. J'ai l'impression qu'à New Paltz, je réussissais à faire mon deuil plus facilement qu'ici. À Paris, c'est comme si je faisais un pas en arrière chaque jour. Je me sens encore incapable de faire des tas de choses. Je suis toujours bloquée. C'était bien plus simple à l'étranger. Voilà pourquoi j'avais choisi de fuir.

- Il s'est endormi, m'annonce Chase en fermant la porte.
- Tant mieux, il va pouvoir se reposer.

Nous attrapons chacun un rouleau, chacun un pot de peinture et poursuivons notre travail. Chase termine de repeindre le mur en face de la porte et moi, j'entame celui contre lequel se trouve normalement le lit. Nous commençons dans le silence, lui perdu dans ses pensées, moi attentive au moindre bruit dans la maison. Et plus le temps passe, plus je sens Chase s'agiter. Il peint un peu plus vite, moins précisément. Il jette parfois des coups d'œil dans ma direction et j'ai comme l'impression qu'il hésite à lancer la conversation. D'habitude, les seuls moments où nous nous retrouvons en tête à tête, c'est la nuit. Mais ici, dans cette maison, après cet enterrement, il est évident que nous n'aurons plus beaucoup d'occasions de nous retrouver seuls durant des heures. Cet instant est parfait, propice aux confessions et je ne suis visiblement pas la seule à le penser. Cette fois-ci, je décide d'entamer la discussion moi-même. Si je veux des réponses, je ne peux pas attendre qu'elles tombent du ciel. Il tergiverse beaucoup trop, il ne fera jamais le premier pas.

- Tu veux bien me dire pourquoi tu joues à la roulette russe ? demandé-je d'une voix douce et calme, sans quitter des yeux mon rouleau.

Je l'entends retenir sa respiration une brève seconde. Troublé, il choisit de se concentrer pleinement sur son travail et d'éviter mon regard. S'il a besoin d'intimité pour se confier, je ne vais pas l'obliger à me faire face, même si j'aurais préféré le voir pour m'assurer qu'il ne me mente pas, une fois de plus.

- Tu vas me détester.
- Je te détesterai encore plus si tu ne me dis pas la vérité.
- T'es pas prête à l'entendre, la vérité, soupire-t-il.
- Alors pourquoi t'es encore là ? Pourquoi t'es venu, Chase ?

Il repose son rouleau et cette fois-ci, il me fait face. Il secoue la tête, comme s'il se sentait coupable. Pourquoi ai-je le sentiment qu'il se sent contraint de me révéler ses secrets ? Pourquoi a-t-il subitement décidé de prendre l'avion pour me parler de lui, de sa vie, alors que cela fait des mois qu'il me repousse ? Ce n'est pas logique.

Il est évident que s'il est encore ici, c'est parce qu'il n'a pas le choix. S'il le pouvait, il garderait tout pour lui. Le fait que j'ai découvert ses armes n'a rien à voir là-dedans. Il aurait pu attendre mon retour, m'offrir un tissu de mensonges si bien ficelé que je n'y aurais vu que du feu. Mais non, il est venu jusqu'à moi. Il n'a pas pris son téléphone. Et il n'a aucune envie de me parler mais il doit le faire.
Je sens que je vais détester la suite de cette conversation.

- Ok... Si je joue à ce jeu, c'est parce que je dois...

Il marque une pause. Son regard se voile de culpabilité, d'excuses et de honte. Les battements de mon cœur s'accélèrent, ma respiration s'emballe. Je crains le pire. Mais je veux savoir.

- Tu dois ? insisté-je.
- Je dois tuer certaines personnes, débite-t-il si précipitamment que je doute avoir compris ses paroles.

Aussitôt, il me tourne le dos et se remet à peindre, comme si de rien n'était. Moi, je reste là, fixant son t-shirt noir, le souffle court. Au fil de nos conversations, j'avais compris qu'il ne jouait pas seul et qu'il y avait forcément des morts. J'avais envisagé et commencé à encaisser le fait qu'il provoque des décès, qu'il était peut-être étroitement lié à l'augmentation des suicides des derniers mois. J'étais prête à recevoir ses mots, à accueillir ses secrets. Mais j'avais espéré qu'il n'engendrait pas toutes ces morts volontairement. J'avais enfoui au fond de moi cette pensée parce que je refusais de croire que Chase était... ce genre de personne. Je n'arrive toujours pas à y croire et pourtant, je ne doute malheureusement pas de sa sincérité.

- Tu obliges des inconnus à jouer avec toi ? résumé-je afin d'être certaine d'avoir bien compris.
- Oui...

Je hoche la tête même s'il ne peut pas me voir. J'essaye de garder mon calme, d'encaisser les informations sans faire de vagues. Si je veux qu'il continue à se livrer, je ne peux pas lui montrer que ses confessions me rendent nerveuse. Pourtant, je sens toute ma confiance en lui s'effriter au fil des secondes. Elle me glisse entre les doigts comme des grains de sable, elle se dissipe dans l'air comme de la buée, elle se consume comme une cigarette. Trop vite.

- Comment tu les choisis ?
- Je ne les choisis pas. On me donne leurs noms.
- Quelqu'un te demande de tuer des gens et tu le fais en jouant à ce jeu ?
- Hum hum...

Mon rouleau me glisse des doigts et tombe sur le sol. Je me redresse, un peu perdue et très inquiète. Est-ce que je suis sur la liste des personnes à tuer ? Moi ou mes proches ? Mais pourquoi me le dirait-il dans ce cas ?
Il se retourne pour me faire face, alerté par le bruit, et à en croire son regard, je ne suis sûrement plus en mesure de cacher mes émotions. J'ai peur de m'être trompée sur son compte. En a-t-il après moi depuis le début ? Je n'ai pas pu me laisser avoir à ce point.

- Harmonie, s'il te plaît... Je ne te veux pas de mal, ok ? Je te le jure.

Il se sent démuni face à ma réaction et je m'en veux de me montrer méfiante, de reculer à chaque fois qu'il fait un pas dans ma direction, mais c'est plus fort que moi. Je peine à croire que celui qui me regarde actuellement, celui qui m'a dragué pendant des mois, qui m'a aidée à faire mon deuil, à repousser mes limites, celui qui prend soin de mes proches depuis quelques jours, est en réalité un criminel. Je ne peux pas croire que cette personne adorable, bienveillante et respectueuse s'en prenne à des innocents, les obligeant à jouer à un jeu de hasard mortel et tout cela, pour le plaisir de quelqu'un d'autre. J'ai du mal à réaliser que je ne connais pas du tout mon ami et cette vérité est sûrement la pire de toute : je n'ai pas la moindre idée de qui est réellement Chase Scott.

Je secoue la tête, complètement effarée par ce que je viens d'apprendre et m'empresse d'ouvrir la porte pour sortir. Chase me rattrape dans les escaliers et sa main agrippe mon poignet. Je fais volte-face et plante un doigt dans son torse, les larmes aux yeux. J'ai couché avec un criminel. Parce que oui, je ne peux plus me voiler la face, Chase est un criminel, que je le veuille ou non. Je me suis confiée à lui, je lui ai offert mon corps, je lui ai donné une partie de moi, je l'ai laissé entrer dans ma vie et je lui ai tendu la main, pensant pouvoir l'aider, persuadée que je pouvais avoir confiance en lui. Mais il semblerait que je me sois trompée !

- Lâche-moi ! Et ne jure plus jamais que tu ne me veux pas de mal alors qu'en réalité, si on te demandait de me descendre, tu hésiterais !
- Ne dis pas n'importe quoi ! Jamais je ne m'en prendrais à toi et c'est bien pour ça que je suis là !

Je secoue encore la tête, empêchant ses mots de m'atteindre. Comment puis-je encore le croire ? Tout se mélange dans ma tête. Il faut que je parte, que je m'éloigne pour réfléchir. Fuir est ma meilleure option, comme toujours.

- Je ne suis pas sûre de réellement comprendre pourquoi tu es venu ici, Chase. Pourquoi m'offrir soudainement tes secrets sur un plateau d'argent alors que tu m'as traitée comme une moins-que-rien lorsque j'ai voulu connaître la vérité ?
- Parce que t'es en danger et que j'essaye de te protéger putain !

Son aveu me heurte de plein fouet. Tous mes neurones se déconnectent quelques secondes, mon cerveau disjoncte et si Chase ne me tenait pas, j'aurais sûrement dévalé les escaliers sur le dos. Un poids immense me comprime la poitrine et l'information se répète en boucle dans ma tête. Parce que t'es en danger et que j'essaye de te protéger putain !

T'es en danger.

Je suis en danger.

Et si je suis en danger, tous les gens qui m'entourent le sont peut-être aussi.

- Laisse-moi t'expliquer, me supplie-t-il, profondément touché par ma réaction.

Je m'écarte vivement de lui, sous le choc. Cela fait des jours, des mois même, que je prends des pincettes avec lui. Deux nuits plus tôt, j'ai pris sur moi et j'ai coupé les premiers fils pour commencer à désamorcer la bombe à retardement qui menaçait de détonner. Je me croyais sur la bonne voie, je pensais pouvoir l'aider et lui, il vient de me balancer sa bombe au visage, sans penser à y mettre les formes. Il vient de la partager avec moi et la seule chose dont je sois à présent certaine, c'est qu'elle va finir par nous exploser à la figure. Parce que si je suis en danger, je ne pas vois pas ce que Chase pourrait faire pour moi avec son maudit jeu de hasard. Comment veut-il me sauver alors qu'il ne parvient même pas à se protéger de lui-même ?

J'avais raison. Je ne serai jamais tranquille. Chaque fois que la lumière apparaît au bout du tunnel, une nouvelle ombre s'ajoute au tableau, me plongeant un peu plus dans l'obscurité. Et cette fois, je crois que je suis définitivement en train de toucher le fond. Je suis peut-être en train de vivre mes derniers jours sur Terre. Je vais sûrement bientôt rejoindre Matthieu et Sophia, laissant derrière moi Eliott et Mégane que j'avais promis de soutenir. C'est un enfer.

- Laisse-moi tranquille, soufflé-je, presque à bout de souffle. Laisse-moi de l'espace.

Je dévale les escaliers en courant et m'éclipse dans le jardin afin d'être seule, loin de lui. Je rêve que ce retour en France soit irréel, que je sois en train de faire un long cauchemar. Je veux me réveiller dans mon lit à New Paltz, descendre prendre le petit-déjeuner avec mes amies. Je veux croiser Chase à la fac, me rouler dans la neige avec Joe ou encore jouer au golf avec James. Je veux retrouver ma vie d'avant, vivre mon rêve américain. Pourquoi chaque fois que je suis en France, une multitude de drames me tombent dessus ? Chase était l'ami parfait en Amérique, pourquoi faut-il que tout bascule une fois à Paris ? Il vient de passer d'ange protecteur à démon offensif. Cette ville est maudite, j'en suis certaine. Et à présent, je suis en danger. Moi et Dieu seul sait combien d'autres personnes encore.

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Hello ! 👋🏻
Comment allez-vous ? 😁

On savait tous que ce moment allait arriver... mais je ne l'avais pas imaginé comme ça. Je voyais plutôt Chase révéler ses petits secrets au fur et à mesure avant d'annoncer à Harmonie qu'elle était dans le viseur de Tom. Mais comme d'hab, ça ne s'est pas passé comme prévu et la bombe a explosé d'un coup.

Comment pensez-vous qu'Harmonie va prendre la nouvelle ? S'éclipser l'aidera-t-elle à prendre des décisions ?
Et comment Chase va s'en sortir pour la convaincre de revenir à New Paltz ?

Rendez-vous mercredi (ou jeudi ?) pour le découvrir. 😘
Bonne semaine ! 💙

Instagram : mllejustine28_

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