Chapitre 3 - FIN

Passée une certaine période de gêne que Marinette assimilait définitivement à un choc post-traumatique, les deux adolescents avaient rapidement fini par reprendre leurs vieilles habitudes.

Chat Noir s'était arrêté chez Marinette une fois de plus, histoire de bavarder un peu. Puis était resté pour la nuit. S'était de nouveau attardé chez elle trois jours plus tard.

Et ainsi, petit à petit, les routinières nuits qu'Adrien passait chez sa charmante partenaire avaient fait leur réapparition. La jeune fille ignorait si ses parents soupçonnaient la fréquence des incursions de son coéquipier sous leur toit. Mais à son grand soulagement, si parfois Tom ou Sabine haussaient un sourcil soupçonneux en la voyant descendre un peu trop tardivement le matin, plus jamais ils ne lui avaient imposé une aussi embarrassante conversation qu'ils ne l'avaient fait la première fois qu'ils avaient surpris Adrien dans son lit.

Le jeune homme avait quant à lui mit plusieurs semaines avant de trouver de nouveau le courage de mettre « officiellement » les pieds dans la boulangerie et de croiser le regard inquisiteur des parents de Marinette.

Mais à présent, tout semblait être retourné dans l'ordre, et les innocentes soirées que Marinette passait avec Adrien continuaient à se dérouler sans le moindre heurt.





Puis il y avait eu la sortie de Mecha Ultima Strike IV.

L'idée de pouvoir y jouer sur l'écran de télévision indécemment grand d'Adrien avait été bien, bien trop tentante. C'est ainsi que les deux jeunes héros avaient décidé d'un commun accord de faire une exceptionnelle entorse aux prudentes règles qu'ils avaient établies, et pour une fois, c'était Ladybug qui s'était glissée dans la chambre de son partenaire.

Juste pour la soirée.

Juste le temps de tester ce jeu tant attendu, d'écraser Adrien à plate couture à chaque combat, après quoi la jeune fille rentrerait discrètement dormir chez elle.

C'était le plan.

Mais Mecha Ultima Strike IV s'était avéré prenant.

Terriblement, dangereusement prenant.

Les graphismes étaient superbes, les arènes de combat surprenantes, les nouvelles fonctionnalités complètement addictives. Ce jeu que les deux adolescents attendaient depuis des mois tenait glorieusement toutes ses promesses et les heures filèrent sans que l'un ou l'autre n'ait la moindre envie de lâcher sa manette.

Tout était prétexte repousser l'instant où ils devraient abandonner leur passionante passe-temps.

Encore quelques dernières minutes. Une partie de plus. La revanche. De malicieux « Prêt à te faire écraser une fois de plus, chaton ? », assortis de très optimismes « Pas cette fois, ma Lady ». Tester un nouveau personnage fraîchement débloqué. Essayer une attaque inédite. Jouer la revanche de la revanche. Encore cinq minutes, juste cinq, pas plus...

Complètement absorbés par leur jeu, les deux adolescents ne remarquèrent pas que le ciel nocturne commençait à pâlir délicatement à l'horizon, annonçant ainsi l'arrivée imminente de l'aube nouvelle. Pas plus qu'ils ne notèrent que leurs propres baillements se faisaient de plus en plus fréquents, ou qu'ils ne se dirent qu'au vu de leur état de fatigue, se peletonner douillettement sur le lit d'Adrien pour continuer à jouer confortablement était probablement loin d'être une excellente idée. Chaque moment qui passait rapprochait dangereusement Marinette et Adrien de l'instant où leurs corps épuisés demanderaient grâce.

Jusqu'à ce qu'enfin, sans même qu'ils ne s'en rendent compte, les deux jeunes héros ne glissent doucement dans le royaume des songes.





Un bruit sec sortit brutalement Marinette de son bienheureux sommeil.

La jeune fille se redressa d'un geste vif, son corps réagissant instinctivement alors que son cerveau peinait quant à lui encore à analyser ce qu'il se passait.

Une douce lumière innondait une chambre qui n'était pas la sienne, tandis que la couette sur laquelle elle était assise était d'une toute autre couleur que le doux rose dont elle avait l'habitude. Alors que les yeux de la jeune fille erraient machinalement sur le lit sur lequel elle était tombée endormie, son regard tomba sur une forme pelotonnée à ses côtés.

La silhouette d'Adrien, baignée par des rayons de soleils parant ses cheveux de reflets d'or.

Le réveil du jeune homme était manifestement tout aussi laborieux que celui de sa coéquipière. Se redressant sur un coude, il battit péniblement des paupières avant de diriger un regard interloqué vers elle.

- « Que... », commença le jeune garçon en fronçant légèrement les sourcils, avant de brusquement s'interrompre.

Ses yeux verts s'écarquillèrent, et la bouche de Marinette forma un « Oh » muet alors que les événements de la veille revenaient en mémoire des feux adolescents avec autant de violence qu'un coup de poing.

Mecha Ultima Strike IV.

La soirée.

Les innombrables heures passées devant l'écran.

La fatigue.

La partie de trop.





Avant que Marinette et Adrien n'aient le temps de dire quoi que ce soit, le bruit qui les avait réveillés quelques instants plus tôt se répéta une fois de plus.

Des coups, brefs et insistants, frappés du bout des phalanges contre la porte de la chambre d'Adrien.

Les deux adolescents échangèrent aussitôt un regard horrifié.

- « Sûrement Nathalie », murmura Adrien d'un ton alarmé, tout en se redressant aussi vivement que s'il avait été propulsé par un ressort. « Vite, elle va rentrer ! », rajouta-t-il précipitamment.

- « Il faut que je file d'ici ! » approuva Marinette d'une voix paniquée.

La jeune fille amorça un mouvement pour sortir du lit, tandis qu'Adrien posait sa main sur le dos de sa coéquipière pour l'aider à se relever plus rapidement. Hélas, dans sa hâte à s'extraire du lit de son partenaire, Marinette se prit malencontreusement les pieds dans les draps.

Interrompue dans son élan, l'adolescente bascula maladroitement sur le côté.

Ses bras décrivirent vainement toutes sortes d'absurdes circonvolutions dans les airs dans une vaine tentative d'interrompre sa chute, avant que Marinette ne s'écrase finalement avec un peu gracieux « Ouuuuups ! » sur le malheureux Adrien.

Par réflexe, le jeune homme tendit les mains vers elle pour amortir le choc, comme il l'avait déjà fait des dizaines de fois pour Ladybug. Mais cette fois-ci, ce n'était pas une héroïne en costume qui lui tombait dessus, et quand les doigts d'Adrien s'enroulèrent instinctivement autour de la taille de Marinette, le T-shirt de l'adolescente remonta légèrement pour dévoiler quelques centimètres de peau.

- « Oh non, je suis désolée », s'exclama aussitôt la jeune fille rougissante, « Je- »

- « Adrien ? » les interrompit soudain une voix incrédule.

Les deux jeunes gens se figèrent, pétrifiés d'horreur, avant de tourner lentement la tête vers l'entrée de la chambre d'Adrien.

Debout au niveau du chambranle de la porte, Nathalie les fixait avec stupéfaction. Derrière ses lunettes, ses yeux étaient écarquillés de surprise, tandis que ses doigts s'étaient crispés avec tant de force autour de sa tablette tactile qu'il était étonnant que cette dernière ne se soit pas brisée en deux.

Le regard d'Adrien alla de l'assistante de son père à sa partenaire, puis le jeune homme s'empourpra furieusement en réalisant à quel point la situation dans laquelle il se trouvait pouvait aisément paraitre beaucoup, BEAUCOUP plus compromettante qu'elle ne l'était en réalité.

A cette heure matinale, il aurait dû être seul. Et là, non seulement Marinette était chez lui, mais en raison de sa malencontreuse chute, elle était également SUR lui.

Sur lui. Dans son lit. Et le T-shirt de la jeune fille était légèrement relevé au-dessus de sa taille, laissant apparaitre une zone de peau nue sur laquelle étaient fermement agrippés les doigts d'Adrien.

Le blond jeune homme retira les mains aussi vivement que si la peau de sa partenaire l'avait brûlé et les deux adolescents s'écartèrent l'un de l'autre avec un glapissement effrayé. Alors que Nathalie fronçait sévèrement les sourcils, le jeune héritier de la famille Agreste se redressa maladroitement sur son lit.

- « Je vous assure que ce n'est pas DU TOUT ce que vous croyez ! », s'écria Adrien avec un sincère désespoir, tandis que son interlocutrice portait machinalement la main à son oreillette.

- « Je suis désolée, mais ça sera à votre père d'en juger », répliqua implacablement l'assistante de son illustre géniteur. « Restez-ici », ordonna-t-elle en pivotant rapidement sur ces talons. « Je reviens tout de suite. »





Alors que Nathalie s'éloignait d'un pas vif, Adrien tourna son regard vers sa coéquipière. Les yeux de la jeune fille reflétaient la même horreur incrédule qui devait très certainement se lire dans les siens, et son visage était devenu d'une pâleur de craie.

- « Oh non non non nononononononon... », balbutia Marinette, tout en passant machinalement ses doigts tremblants le long de ses joues. « Ce n'est pas possible. Ce. N'est. Pas. Possible. »

- « Mon père. Elle va prévenir mon père », renchérit Adrien, aussi sonné que s'il avait reçu un violent coup sur le sommet du crâne.

C'était une catastrophe.

Se sentant submergé par une nouvelle vague de panique, le jeune garçon jeta un regard éperdu vers l'une des fenêtres de sa chambre. Peut-être n'était-il pas trop tard pour s'enfuir. Partir vite, loin, et redémarrer une nouvelle vie. Ou alors, il pourrait tout aussi bien utiliser Cataclysme sur les murs de sa chambre afin de barricader sa porte, et rester ainsi enfermé à jamais dans la pièce.

Tout plutôt que d'affronter la froide colère de son père, qui ne manquerait certainement pas de s'abattre sur lui et sur Marinette.

Alors que ses pensées le menaient vers sa coéquipière, Adrien leva un regard angoissé sur elle.

Toujours aussi livide, Marinette semblait à présent être dans un état second. Son regard restait fixé dans le vague tandis que les pupilles de ses immenses yeux bleus étaient désormais dilatées d'horreur. Assise au bord du matelas, Marinette se balançait d'avant en arrière tout en marmonnant quelques mots en boucle, que l'ouïe fine d'Adrien parvint à saisir sans peine. « Une mouette sur l'océan... Je suis une mouette sur l'océan... », répétait sans cesses la jeune fille, dans une tentative désespérée de conserver un semblant de maîtrise d'elle-même.

Soudain, le bruit d'une porte qui s'ouvre fit sursauter les deux adolescents aussi sûrement que ne l'aurait fait une violente décharge électrique.

- « Venez avec moi », leur lança Nathalie d'un ton ferme. « Tous les deux. »






Les adolescents résignés suivirent Nathalie dans un pesant silence que troublait seulement le bruit de leurs pas résonnant sur les dalles de marbre.

Ils avançaient avec autant d'enthousiasme qu'une paire de condamnés menés à l'échafaud, n'osant échanger ne serait-ce qu'un seul regard. Finalement, l'assistante de Gabriel Agreste s'arrêta devant le bureau de son illustre employeur, avant d'en ouvrir la porte toujours sans mots dire. Tandis que Marinette répétait une dernière fois « Une mouette... Je suis une mouette... », Adrien prit une profonde inspiration, puis Marinette et lui entrèrent dans la pièce où les attendaient le célèbre père du héros de Paris.

Alors que Nathalie s'éclipsait discrètement, la porte se referma sur les collégiens avec un claquement qui sembla à Adrien aussi lourd que celui d'une porte de prison. D'un geste, Gabriel Agreste invita les deux adolescents à prendre place sur deux chaises disposées face à lui, tandis que lui-même restait assis derrière son bureau.

Plus morts que vifs, Adrien et Marinette d'exécutèrent sans mot dire. Tentant d'ignorer le frisson d'horreur qui traversa sa colonne vertébrale, le jeune garçon fit appel à toute son expérience de mannequin pour essayer d'afficher une expression sereine sur son visage.

- « Ecoutez, Père, il ne s'agit que d'un terrible malentendu », commença péniblement Adrien en jetant un regard d'excuse à son illustre géniteur. « Je vais-»

- « Un malentendu ? », le coupa sévèrement Gabriel. « Es-tu en train de me dire que Nathalie n'a pas trouvé Mademoiselle Dupain-Cheng dans ta chambre ce matin ? »

- « J-Je... », balbutia le jeune homme. « S-Si, mais... »

Adrien laissa le reste de sa phrase mourir sur ses lèvres quand son père l'arrêta d'un bref geste de la main.

- « Et Nathalie m'a également signalé qu'il lui semblait qu'elle avait... interrompu quelque chose », reprit Gabriel après une légère pause.

- « Là, c'est un malentendu ! », s'écria Adrien d'une voix désespérée.

Si le jeune homme se sentait à deux doigts de la crise de nerfs, Marinette semblait quant à elle être tombée dans un état de profonde catalepsie sous l'effet de la panique. L'adolescente était à présent si livide et si immobile que sans sa respiration à peine perceptible, elle aurait parfaitement pu être confondue avec une statue de marbre personnifiant la terreur la plus absolue.

- « Je vous assure, Père », reprit Adrien d'un ton suppliant. « Il ne... On n'a... Enfin, il ne s'est vraiment rien passé. Absolument rien. Marinette était juste venue jouer à un jeu vidéo hier soir... »

- « Sans que j'en sois informé », ajouta Gabriel en fronçant sévèrement les sourcils.

- « ... sans que vous en soyez informé », confirma son fils en déglutissant péniblement. « Ce qui est contraire à toutes les règles que vous m'avez inculquées et qui ne se reproduira plus jamais », compléta-t-il d'une voix mécanique sous le regard inquisiteur de son père.

Satisfait, Gabriel hocha brièvement la tête avant de faire signe à son fils de continuer son discours.

- « E-Et on n'a pas vu l'heure passer », poursuivit le jeune homme. « On s'est endormis tous les deux devant la télévision et on s'est réveillés quand Nathalie est venue ce matin. O-On a eu peur, Marinette s'est levée un peu précipitamment et elle m'est tombée dessus. Et c'est là que Nathalie est rentrée. C'est tout. C'est vraiment tout, vous devez me croire ! », conclut Adrien d'une voix aussi désespérée que sincère.

Le célèbre styliste posa un regard incisif sur son fils, avant de laisser échapper un lourd soupir. Il ôta brièvement ses lunettes pour se passer la main sur le visage d'un geste las, puis les remit en place.

- « Je te crois », répondit-il enfin. « Mais il n'en reste pas moins que ton comportement et celui de Mademoiselle Dupain-Cheng sont inacceptables », poursuivit-il en jetant un bref coup d'œil à la jeune fille. « Je m'attendais à une attitude plus mature de ta part. »

Adrien baissa honteusement la tête, rougissant sous le reproche. Dans le coin de son champ de vision, il vit Marinette crisper ses mains autour de ses genoux, au point que ses articulations étaient devenues blanches.

En temps normal, il aurait posé ses doigts sur son bras en signe de réconfort, mais là, il n'osait plus faire un geste. Tout aussi pétrifié de terreur que Marinette, il serrait les dents en attendant que la froide colère de son père passe, espérant de toutes ses forces que sa partenaire et lui s'en sortiraient intacts.

- « Bon », reprit finalement Gabriel d'un ton résigné, « Je me doute que vous n'avez certainement pas envie d'entendre ce que je vais vous dire... »

- « IL NE S'EST RIEN PASSé DU TOUT ! », le coupa Adrien d'une voix horrifiée.

A ses côtés, sa partenaire émit un gargouillis inintelligible, tandis que ses yeux bleus étaient à présent tellement écarquillés d'effroi qu'ils semblaient prêts à jaillir de leurs orbites.

- « Il ne s'est JAMAIS rien passé », insista fébrilement Adrien, sans laisser à son père le temps de placer le moindre mot. « Et les parents de Marinette nous ont déjà fait tout un discours sur le fait de prendre ses précautions, donc sincèrement, ce n'est pas la peine de vous inquiéter. VRAIMENT pas la peine. »

- « J'allais te dire que ton garde du corps va chaperonner tous tes rendez-vous pour les trois prochains mois », répliqua Gabriel en haussant un sourcil circonspect. « Mais maintenant que tu abordes le sujet... «

Un gémissement de désespoir s'échappa des lèvres d'Adrien.

C'était un véritable cauchemar.

Rougissant jusqu'à la racine des cheveux, le jeune homme se pencha en avant, enfouissant son visage entre ses mains.

- « Père, s'il vous plait... », supplia-t-il d'une voix à peine audible.

Il n'était pas prêt à ça.

Il n'était définitivement pas prêt à ça.

Le cuisant souvenir de LA conversation qu'il avait eu avec les parents de Marinette dansait encore dans sa mémoire, et il n'était pas sûr de survivre à une pareille discussion avec son propre père.

- « Ecoute, Adrien », reprit Gabriel d'une voix patiente. « Je me doute bien que tout ceci doit être pénible pour toi, mais tu es à un âge où l'on commence parfois à avoir envie de se lancer dans des explorations... »

- « JE N'EXPLORE RIEN DU TOUT ! », s'exclama le jeune homme en bondissant de sa chaise, horrifié. « NI PERSONNE ! »

Gabriel fronça les sourcils d'un air réprobateur mais décida d'interrompre sa tirade, prenant manifestement pitié de l'embarras manifeste de son fils.

Adrien laissa échapper un nouveau gémissement de désespoir, tout en jetant un bref coup d'œil à Marinette. La jeune fille n'avait pas bougé un cil depuis l'instant où elle s'était assise, et son silence crispé commençait à devenir inquiétant.

Semblant suivre les pensées de son fils, Gabriel se pencha légèrement en avant pour dévisager l'adolescente avec une attention renouvelée.

- « Mademoiselle Dupain-Cheng ? », demanda-t-il d'une voix soucieuse. « Vous allez bien ? »

- « JE SUIS UNE MOUETTE ! », glapit fébrilement Marinette, sursautant violement sur son siège.

Surprit, le styliste releva vivement la tête avant d'échanger un regard interdit avec son fils. En cet instant précis, les deux héritiers de la famille Agreste n'avaient pas besoin de mots pour deviner qu'ils partageaient tous deux de vives inquiétudes quant à la santé mentale de la jeune fille.

- « Marinette ? », murmura Adrien d'une voix douce, tout en posant une main apaisante sur son poignet. « Est-ce que ça va ? »

Semblant enfin sortir de sa torpeur affolée, sa coéquipière tourna les yeux vers lui.

- « Oui, oui, oui, ça va », balbutia-t-elle. « J-Je... Je suis calme. Parfaitement calme. Comme une mouette sur l'océan. Tout va bien. Tout. Va. Bien. »

Le jeune homme nota avec inquiétude que loin d'être « parfaitement calme », Marinette semblait au contraire à présent au bord de la crise de panique. Maintenant qu'il était sorti de sa paralysie angoissée, le corps de la jeune fille semblait décidé à se rappeler aux bons souvenirs de sa propriétaire. Les mains de Marinette tremblaient, ses paupières battaient un peu trop vite, et sa poitrine s'abaissait et se soulevait à un rythme bien trop rapide.

- « Marinette... », reprit le jeune homme avec inquiétude. Détends-toi. Il faut que tu respires. »

- « Oui, ok, je respire », approuva-t-elle d'une voix suraiguë. « C'est bien de respirer, il faut respirer. Parce que sinon on est morts et c'est tout de suite moins pratique alors c'est bien de respirer et je vais arrêter de parler tour de suite en fait », conclut-elle en s'empourprant devant l'expression abasourdie de Gabriel Agreste.

Jamais la jeune fille n'avait souhaité aussi fort disparaître de la surface de la Terre tant elle se sentait mortifiée d'être dans une pareille situation, face à celui qui était à la fois son idole et le père de son partenaire et grand amour.

Si elle avait pu soulever l'une des dalles de marbre qui ornait le sol de la pièce pour se dissimuler en dessous ou aller s'enfermer dans un placard voisin, elle l'aurait fait sans hésiter. Tout plutôt que de rester ici à se ridiculiser devant Gabriel Agreste.

Marinette se sentait tellement honteuse qu'elle aurait presque été tentée de se transformer en Ladybug pour s'enfuir par la fenêtre du bureau.

Presque.

Béni soit son instinct de conservation qui la préservait de cet ultime geste de panique.





Gabriel laissa passer quelques secondes, le temps aux deux adolescents de retrouver un semblant de contenance. Ces derniers se surprirent même à espérer que leur supplice ait prit fin, mais le célèbre styliste n'en avait manifestement pas tout à fait terminé avec eux.

- « J'ose espérer que ce type d'incidents ne se reproduira plus », lança-t-il en braquant un regard sévère sur Adrien. « Vous avez commis une erreur, soit. Mais à présent, je ne tolèrerai plus ce genre d'attitude. »

- « Vous avez ma parole », répondit fébrilement Adrien. « Et... Et ce n'est pas la peine de faire surveiller tous mes rendez-vous par le Go-... , heu , par mon garde du corps », renchérit-il en échangeant un bref coup d'œil avec sa coéquipière. « Je vous promet que Marinette ne viendra plus ici sans votre permission. »

Alors que Marinette hochait vigoureusement la tête en signe d'approbation, Gabriel haussa un sourcil sceptique. Il jaugea un instant les adolescents du regard, ses yeux bleu-gris s'arrêtant tout d'abord sur Marinette avant de s'attarder sur Adrien.

Finalement, Gabriel se pencha vers eux en laissant échapper un profond soupir.

- « Écoutez », reprit-il d'une voix lasse. « J'ai été jeune avant vous, je sais ce que c'est. »

Ignorant l'expression dubitative qui se peignait sur le visage des deux adolescents, le styliste poursuivit.

- « J'ai eu votre âge », reprit-il. « Et j'ai été à votre place, je sais parfaitement comment les choses se passent. »

Réalisant soudain la tournure que s'apprêtait à prendre la conversation, Adrien jeta un regard horrifié à son père.

- « On est jeune, on est amoureux », poursuivit implacablement Gabriel. « Et malgré les promesses, on peut être amenés à se fréquenter quand même. Surtout que le fait que ce soit interdit peut ajouter un certain... attrait à la situation », ajouta-t-il avec un peu trop de certitude pour le confort d'Adrien.

Non.

Non non non.

Le jeune homme refusait catégoriquement d'imaginer son père adolescent en train de s'introduire subrepticement dans la chambre de sa petite amie.

Petite amie qui pouvait par ailleurs très bien être sa mère.

Non non non et définitivement NON.

Gabriel se redressa en clignant légèrement des paupières, semblant réaliser soudainement que ses pensées s'étaient égarées.

- « Bref », conclut-il avec une quinte de toux embarrassée. « Adrien, tu es puni. Pas de rendez-vous sans supervision pour les trois mois à venir. Mademoiselle Dupain-Cheng », poursuivit-il en braquant son regard Marinette, dont les grands yeux bleus furent aussitôt traversés par une nouvelle lueur de panique. « J'espère pouvoir compter sur vous également. A partir de maintenant, votre présence n'est autorisée dans cette maison que si j'en ai été préalablement informé. Dans le cas contraire, je me verrai obligé de renouveler la punition d'Adrien autant que fois que nécessaire. Est-ce que j'ai été suffisamment clair pour vous deux ? »

Déglutissant péniblement, les deux adolescents hochèrent timidement la tête.

Manifestement satisfait, Gabriel tendit silencieusement la main vers son agenda pour le consulter rapidement. Marinette et Adrien échangèrent un regard chargé d'espoir, devinant que le célèbre styliste s'apprêtait manifestement à mettre fin à ce pénible entretien.

Leurs soupçons furent confirmés à peine un instant plus tard.

- « Bon, vous pouvez y aller », les congédia pensivement Gabriel.

Les deux adolescents bondirent de leur siège avant de se diriger d'un pas rapide vers la sortie de la pièce.

Adrien se mordait violement l'intérieur de la joue, luttant contre le fou-rire nerveux qui menaçait de s'emparer de lui. Sa situation était loin d'être glorieuse, mais au moins, son père avait renoncé à leur faire subir LA conversation qui les avait tant humiliés chez les parents de Marinette.

Et cette simple constatation emplissait l'adolescent d'un soulagement indescriptible.

Alors qu'il s'apprêtait à franchir la porte du bureau, un sourire aux lèvres, Adrien entendit la voix de Gabriel s'élever soudain derrière Marinette et lui.

- « Adrien ? Mademoiselle Dupain-Cheng ? », leur lança-t-il d'une voix qui sonna le glas de tous les espoirs de son fils. « Encore une chose : faites en sorte d'être ici samedi prochain, à 15h. Nathalie vous donnera un cours d'éducation sexuelle. Je ne tiens pas à devenir grand-père avant l'heure », conclut-il enfin.

Ignorant les regards horrifiés des deux adolescents, le célèbre styliste se replongea dans son agenda en affichant la plus parfaite indifférence.

Trop abasourdi pour réfléchir, Adrien ferma machinalement la porte avant de jeter un coup d'œil à Marinette. Manifestement tout aussi sous le choc que lui, sa coéquipière fixait un mur voisin sans réellement le voir.

LA conversation.

Elle et Adrien allaient de nouveau avoir droit à LA conversation.

La jeune fille peinait encore à réaliser non seulement ses propres parents lui avaient infligé une lente et cuisante humiliation quelques semaines plus tôt, mais que Gabriel Agreste en personne s'en mêlait à présent, tout en invitant au passage son assistante à réitérer la chose d'ici quelques jours.

- « Tu sais, chaton », articula-t-elle finalement. « Il y a des jours où je me dis que nos parents nous en veulent vraiment. »

Poussant un lourd soupir, Adrien saisit sa main dans la sienne pour y puiser un semblant de réconfort.

- « Je crois que tu as parfaitement raison, ma Lady. »




*** FIN ***






Note : 

Oups, un chapitre 3 ^^ . Pour être honnête, j'avais commencé à l'écrire plus ou moins au même moment où j'écrivais le chapitre 2 de cette fic, mais je l'avais laissé de côté par manque de motivation. Mais voilà, j'ai fini par en avoir assez de voir le chapitre "Gabriel" traîner sur mon ordi alors qu'il y avait déjà les 3/4 d'écrit, donc voilà, je m'y suis remise :) !

Maintenant cette fic est bel et bien finie, il n'y aura pas de chapitre 4 avec l'intervention de Nathalie ^^ (ayons un peu pitié de Marinette et Adrien, je ne les épargne pas trop dans cette histoire x) ) . J'espère que ça vous aura plu et merci de m'avoir lue jusqu'ici :) . 

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