21
La deuxième semaine de vacances de Coline se résume à ne rien faire en regardant des séries et sortir de temps en temps avec Angèle. Netflix français est tellement pauvre qu'elle se retrouve à pomper des sites de streaming remplis de pubs louches chaque matin.
Isidore n'ayant pas de réseau dans sa maison de campagne l'a appelée en FaceTime quand il trouve un réseau wifi gratuit dans les cafés. Soit une fois et demie un mercredi matin.
Le blond rentre ce soir, un peu avant sa famille et Coline décide de lui faire une surprise en allant le chercher. Après tout, il ne reste plus que quelques jours de vacances et puis... dès la rentrée, ils n'auront plus vraiment le temps de se voir comme ils le font dernièrement.
En plus, il lui manque. Elle se l'avoue. La disparition des conversations de routine avec lui a créé un petit gouffre au sein d'elle-même. La blonde a tellement besoin d'écouter le blond blaguer et faire le con que, quand elle voit sa touffe à la sortie de la gare, elle n'attend pas pour crier son surnom :
« Trouduuuuuuuuc ! »
Des gens se retournent sur leur passage et Coline réalise trop tard ce qu'elle a fait. Mais Isidore la remarque d'emblée et s'empresse de la rejoindre.
— J'étais pas au courant que tu venais me chercher ! Les autres t'ont contacté ?
Coline fronce les sourcils, mais retrouve son sourire quand le blond ouvre grand ses bras pour lui offrir un câlin. Elle recule de quelques pas pour jouer avec sa patience, un sourire au coin à la bouche, avant de fondre dans ses bras.
— Les autres ?
— Y a l'anniversaire d'Anatole ce soir, explique Isidore.
Ah. Coline est déçue. Elle qui pensait passer du temps avec lui.
— Bon, à ce que je vois, c'était pas prévu dans tes plans. Je t'incruste ?
La blonde hésite.
— Bah, c'est que ce sont pas trop mes potes... et tu sais, le truc du « mieux vaut pas traîner avec moi et eux en même temps » qu'on avait convenu avant les vacances...
Isidore lève les yeux au ciel.
— Je m'en fous, tu viens. Je te fous dans ma valise s'il le faut.
Coline regarde la pauvre petite valise orange qui mérite mieux qu'être un réceptacle de sa personne.
— Et j'ai besoin d'une amie avec qui ne pas fumer. Alleeeeez, insiste Isi'.
La blonde cède finalement et le sourire du blond resplendit. Cinq jours sans signes de vie et Coline cède à tous ses caprices.
— Tu m'as manqué, lance Isidore en faisant rouler sa valise devant lui.
Co' lève les yeux au ciel.
— Un peu de pudeur, mon cher !
Il rit et elle tente de lui faire un croche-pied. Croche-pied qu'elle réussit dès le premier essai.
— Aaaaaahhh ! Coline, je vais te tuer ! menace-t-il en tombant sur les fesses alors que la blonde, hilare, s'enfuit devant, avec sa valise.
*
La dernière fois que Coline a croisé Anatole, c'était quand il était venu chercher Isidore avec toute sa bande de potes devant le lycée. Anatole est grand, gigantesque, avec des cheveux de jais très décoiffés et des yeux très bleutés. S'il ne connaissait pas le personnage, il aurait carrément pu plaire à Coline. Avec son apparence de beau gosse parfait.
Ce soir, c'est son anniversaire et elle se sent de trop dans son énorme pavillon. Pour ne pas trop coller Isidore, elle s'est calée sur un fauteuil vide du salon, où elle sirote un cocktail qu'elle s'est préparé tout en scrollant son fil d'actualité.
Ce qu'elle n'avait pas prévu, c'était : d'un, la future présence de Selim et de deux, le fait qu'Anatole la drague, ouvertement.
— Donc, t'es la nouvelle meilleure amie de mon meilleur poto ?
Elle acquiesce, gênée et intimidée par la présence du garçon.
— Joyeux anniversaire sinon, lance-t-elle pour ne pas laisser planer la gêne.
Il décoche un sourire. Toutes ses dents alignées constituent un sourire parfaitement parfait. Quel genre d'ovni a un sourire pareil ? Il pourrait même rentrer en compétition avec Selim sur le coup. Coline aimerait se frapper le crâne : faut qu'elle arrête à tout prix de comparer Anatole avec son ancien crush raté.
— Merci... Tu veux danser ? propose-t-il en entendant une chanson qu'il a l'air de bien aimer.
Coline ne sait pas trop si elle devrait refuser parce que c'est Anatole et qu'elle ne danse jamais, ou plutôt céder à ses hormones qui lui conseillent sincèrement de profiter de l'occasion pour danser avec un mec trop beau. Elle n'est attirée par lui que sur le plan physique et ça ne la dérange pas tant que ça sur le coup.
— Je sais pas danser, avoue-t-elle en buvant un peu de sa boisson.
Il sourit. Encore. Bon dieu, ce qu'il ressemble à un acteur hollywoodien de près. Isidore aurait dû le lui présenter plus tôt.
— Comme si je savais danser, moi, réplique Anatole en riant.
Elle est sur le point de céder quand Isidore apparaît dans son champ de vision. Coline reste estomaquée quand elle le voit pécho une petite brune. Alice. C'est un peu bizarre de le voir embrasser quelqu'un. Elle ne se sent pas à l'aise. L'image est plus violente que les mots.
— Bon, je vais devoir te quitter deux secondes, annonce Anatole.
Coline lève la tête, intriguée, et jette un regard qui signifie « pourquoi ? ».
— Je vais aller gérer un peu Alice foncedée. Elle est en train de lui dévorer la bouche et il arrive pas à l'arrêter, explique-t-il.
Quand la blonde se concentre un peu mieux, elle voit clairement maintenant ce qu'Anatole lui raconte. Alice embrasse le blond de tout son soûl, alors qu'il pose ses mains sur ses épaules pour la repousser. Anatole intervient et Coline les regarde de loin.
Une minute plus tard, Isidore vient la retrouver, la bouche entrouverte et le souffle saccadé.
— Je me déteste.
Coline est surprise par sa confession.
— Comment ça ?
— Il se déteste parce qu'il est toujours en train de la repécho à chaque soirée, alors qu'il ne l'aime plus vraiment, intervient Anatole, de retour.
La blonde arque un sourcil, étonnée de voir qu'il le connaît par cœur. Finalement, ce n'est pas Alice sa rivale d'amitié, mais plutôt cet Anatole charmant qui lui fait les yeux doux.
— Je vais rentrer, annonce Coline en voyant l'heure.
Isidore, agacé, se plaint :
— Mais on a presque rien fait ensemble de la soirée !
— Je te vois demain ?
— Tu vas pas rentrer seule. Non c'est mort, dors chez Anatole... Comme tout le monde !
Coline pèse les pour et les contre. Finalement, c'est l'arrivée de Selim qui fait peser la balance pour les contre. Leurs regards se croisent et la blonde se remet à jouer leur baiser dans sa tête. Même si, elle n'est plus aussi stressée de le voir. Elle est juste gênée de savoir que ce gars lui a brisé le cœur une fois.
— Je vais rentrer, assure-t-elle.
Et elle veut juste vraiment les laisser s'amuser. Anatole s'abonne à elle sur ses réseaux sociaux devant elle après avoir demandé un pseudo et elle ne peut s'empêcher de se rendre compte qu'il va sûrement lui reparler. Dehors, Co' essaye de ne pas penser à la mine dépitée d'Isidore quand elle est partie, comme si elle l'avait abandonné.
Elle n'a pas osé lui dire au revoir.
C'est le bruit d'une valise qui tombe dans les escaliers derrière elle qui la surprend. Isidore apparaît tout sourire et fatigué.
— Dors chez moi, annonce-t-il quand leurs regards se croisent intimement.
Seulement, pour la première fois pour Coline, cet ordre semble ambigu. Très ambigu. Il la regarde intensément et elle sait qu'elle le fait tout autant. La blonde n'a pas envie de dire non. Et ça l'effraie.
Elle avait oublié à quel point Isidore était un garçon et elle, une fille. Elle sait que les amitiés marchent très bien si l'attirance ambiguë n'existe pas.
Elle le regarde se rapprocher. Isidore. Son meilleur ami. Quelqu'un qui ne veut pas la laisser partir. Quelqu'un qui tient à elle de manière mutuelle. Elle sent son cœur faire des choses bizarres dans sa poitrine, lui retournant son ventre dans tous les sens.
Alors la blonde reste silencieuse face à lui. Car oui, lors de cette soirée d'avril, elle est obligée de s'avouer qu'elle est attirée, là tout de suite, par son meilleur ami.
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