Chapitre 29 : Je te déteste...?


- Monsieur Glassman a dit que nous pouvions manger dans le resto' de l'hôtel, c'est compris dans le tarif de la nuit. Informé-je April en lui donnant un coup dans la jambe pour l'inciter à bouger son cul.


April –


Cameron et moi descendons au petit restaurant de l'hôtel, à ce que je vois, beaucoup se sont fait directement livrer dans leur chambre, mais manger en tête-à-tête avec Cameron ne me disait vraiment rien.

- Bonsoir. Nous accueille un vielle homme avant de nous dire de nous placer là où nous voulons.

Peu de temps après, les cartes des plats nous sont donnés.

- On doit choisir dans les menus spéciaux. M'informe Cameron en tournant les pages de ma carte. Ce sont les seuls compris dans le tarif. Il poursuit.

J'acquiesce en silence.

Je ne l'avouerai jamais à voix haute, mais Cameron est bien plus attentif aux explications que moi, ce qui le rend bien utile.

- Il faut que j'appelle ma mère. Dis-je en sortant mon téléphone de ma poche arrière. Tu pourrais commander pour moi ? Je lui demande en me levant.

- Ouais, tu veux ?

- Je prends comme toi. Dis-je en haussant les épaules avant de quitter la pièce.

Je fais défiler les numéros dans mon répertoire jusqu'à trouver celui de ma mère, quand je suis passée chez elle pour lui rappeler mon voyage, il n'y avait que Charlie.

- Quoi ? Demande froidement la voix de ma mère à l'autre bout du fil.

- Salut..

- Tu veux quoi ?

Je ne m'attendais pas à ce qu'elle saute de joie en voyant mon prénom – si c'est vraiment mon prénom et pas un surnom – s'afficher sur l'écran de téléphone.

- Je... tu te souviens que je suis à Paris ?

- Si je m'en souviens ? Évidemment, j'ai dû payer une fortune pour ton stupide voyage.

- Je... je suis désolée pour ça, je te rembourserai quand j'aurai de l'argent.

- Ouais, c'est ce que tu dis.

- Je ne voulais pas te déranger, juste te dire qu'on est bien arrivé à Paris.

- ...

- Maman ?

Plus aucune réponse, elle a raccroché.

Je ris d'un rire nerveux en clignant plusieurs fois des yeux pour ne pas laisser de larmes humidifiées mes joues.

- Hé, on a été servie.

Je retiens un hoquet de peur en entendant la voix de Cameron sortir de nulle part, je me tourne vers lui, la main sur le cœur. 

- Tu m'as fait peur enfoiré.

Il sourit, fière de sa plaisanterie. Je lève les yeux au ciel et passe à côté de lui, retournant à nos places. 

Il a commandé des frites avec du poulet frit, premier repas français inoubliable !

Je ne fais aucune réflexion et m'assois, nous mangeons dans le plus grand des silences, nous devons être une petite dizaine dans la pièce, dont des terminales principalement. 

Nous remontons dans la chambre pas moins de vingt minutes plus tard, ma petite voix dans ma tête m'a soufflé de répondre à Cameron que « non, je n'avais plus la carte magnétique » lorsqu'il m'a posé la question, mais flemme ce soir.

Plus vite on sera couchés, plus vite on découvrira notre famille d'accueil pour les prochains jours ! Me dis-je en prenant une rapide douche. 

Le voyage et le décalage horaire m'ont crevé, je suis super stressée de passer la nuit dans la même chambre que Cameron, parce que j'ai peur de faire un cauchemar... Et je me connais assez pour savoir que pire, je suis stressée, pire est mon cauchemar, ce qui me stresse encore plus... C'est une boucle infernale. 

- J'ai mis un réveil. J'informe Cameron quand il revient de la salle de bains.

Il acquiesce avant de s'asseoir sur le bord de son lit. 

- April ? M'appelle-t-il, presque timidement.

Dans la pénombre de la chambre, je ne distingue que sa silhouette, dos à moi. 

- Quoi ?

- Je sais que ce que je vais te demander va te sembler culotté, vachement culotté même mais... Je te propose un truc pour les prochains jours qu'on va passer ensemble, oublions, oublions la merde qui se passe entre nous.

- C'est culotté, effectivement. Je lui réponds d'office.

Il se tourne vers moi dans un soupir. 

- Je sais que je suis le principal responsable de ce que je te demande d'oublier, mais c'est juste pour pouvoir profiter du séjour, on a su le faire le soir de ton agression, on a su le faire pendant la bataille de peinture, pendant tout le voyage d'aujourd'hui...

J'envisage vraiment sa proposition, parce qu'il n'a pas tort dans le fond, mais toutes les choses qu'il me dit, je ne peux pas passer outre, si nous avons pu, oublier comme il dit. Ça s'est fait naturellement, je ne sais pas si c'est vraiment mieux, mais c'est différent, parce que si j'accepte ce qu'il dit, alors ça serait une sorte de victoire pour lui, nan ?

- Cameron, je ne peux pas faire ce que tu demandes, on peut juste se contenter de... s'ignorer ? Faire bonne figure devant la famille qui va nous accueillir et c'est tout.

- On peut faire ça aussi... Il répond d'une voix basse avant de se glisser sous la couverture.
Après ça, nous n'avons plus échangé un mot et nous avons fini par nous endormir après cette longue journée.


« Assise à l'avant de la voiture, je ne peux pas le prévenir, c'est comme si ma bouche était cousue.

Moins vite ! Moins vite... ai-je envie de lui hurler. Le prochain virage, fais attention !

Mais ma bouche est scellée et j'ai beau essayer d'attirer son attention pour lui faire comprendre de ralentir, Jackson regarde droit dans le vide en répétant les mêmes mots que ceux de ce soir-là.

- Je suis désolé April.

- Tu m'as oublié. Prononce ma bouche alors sans que je ne le décide.

Je comprends alors que je ne peux ouvrir la bouche que pour répondre mot pour mot ce que j'ai dit ce soir-là, ces mêmes mots qui m'ont hanté pendant des nuits et des nuits, et qui me reviennent me hanter ce soir, sans aucune explication...

- Je m'occupais de Charlie et je n'ai pas vu le temps passer mon trésor.

- Tu m'as oublié pendant deux heures pour Charlie, je croyais que j'étais ta fille aussi ! Lui hurlé-je à pleins poumons en réponse.

Là, maintenant, ce que j'ai envie de lui hurler à pleins poumons, c'est de ralentir, de s'arrêter.

- Tu es ma fille autant que Charlie. Essaie-t-il de me rassurer.

- Tu n'oublierais jamais Charlie. Lui reproché-je à contre-cœur, les larmes aux yeux.

- Je t'ai dit que j'étais désolé, trésor.

Non. Je ne veux pas dire la suite, je ne veux pas. C'est la phrase de trop ! Mais pourtant...

- Tu m'oublies et c'est quoi la suite ? Tu m'abandonnes comme mon père l'a fait avant toi ?

Là, Jackson tourne la tête vers moi, le regard meurtri.

Mon cœur commence déjà à se briser parce que je sais... je sais.

- Non ! Bien sûr que non, mon trésor !

J'essaie de fermer les yeux parce que je ne veux pas voir ce qui va se passer, mais impossible de le faire, Jackson perd le contrôle de la voiture et je vois sa tête heurtée contre le volant, encore et encore...

La voiture se stabilise enfin, et le silence s'installe, mais je sais très bien ce qui va suivre, l'odeur d'essence devient forte puis... Boum. La voiture explose avec Jackson à l'intérieur. »

Je me réveille dans un bon, ma poitrine pèse une tonne, l'air devient hors de ma portée.

Je ne vois rien à part le brouillard causé par mes larmes. Je n'entends rien d'autre que ce bourdonnement, le même que j'entendais après l'explosion. Je ne sens rien d'autre que l'essence et l'odeur du brûlé.

Je crois distinguer une voix qui perce le bourdonnement, mais je ne parviens pas à comprendre, je ne parviens pas à me concentrer sur lui.

- Ap...sui... là..

Si, je n'avais pas dit toutes ces choses... maman le sait et c'est pour ça qu'elle me déteste.
Elle a bien raison.

J'ai l'impression d'exploser de l'intérieur quand soudain tout s'arrête, je me reconnecte à la réalité peu à peu.

La première chose que mon cerveau retient, ce sont les mains froides posées sur mon ventre, légèrement remontées vers mes côtes. Puis mon cerveau comprend que je suis assise entre les jambes de quelqu'un et que mon dos repose contre le torse de cette même personne.

- Comment tu sais ? Je demande d'une voix affreusement pâteuse.

Cameron met plusieurs secondes à comprendre le sens de ma question.

- Max.

Max... Qui d'autre ? 

Depuis petite, la seule chose qui est capable de me reconnecter à la réalité lorsque mon cerveau est mon propre ennemi, c'est le froid. Bien souvent, Max courait au lavabo le plus proche pour pouvoir passer ses mains sous de l'eau froide avant de les mettre en contact avec ma peau. C'est ce que Colleen fait aussi maintenant et ce soir, c'est ce que Cameron a fait. 

Je ferme les yeux et laisse ma tête reposer contre Cameron, je pose ma respiration encore saccadée sur celle de Cameron, lente et contrôlée, en parfait désaccord avec son cœur que je sens battre à mille à l'heure contre mon dos. 

- Tu as dit que tu allais mieux.

La voix légèrement endormie de Cameron résonne en moi d'une façon étrange qui me fait rouvrir les yeux.

- J'ai menti.

Mon cœur a parlé plus vite que mon cerveau.

- Pourquoi ?

- Je te déteste. Je te déteste Cameron et tu m'as vu dans des états pitoyables bien trop de fois, j'ai menti parce que je ne voulais pas que tu saches à quel point ce soir-là m'a affecté.

Je suis tellement fatiguée que tu sois toujours là aux mauvais moments.

- Peu importe que ce soit moi qui sois là, le principal, c'est que tu ne sois pas seule.

- Tu dis ça parce que je ne t'ai jamais vu aussi faible que tu m'as vu.

Ses bras se referment autour de ma taille et sa tête se sur mon épaule, je le regarde du coin de l'œil, surprise par son geste. Il a fermé les yeux et prend une grande inspiration. 

- Si, quand je t'ai parlé de mon frère.

Ok, ça n'a pas été facile pour lui de me parler de son frère, d'autant plus qu'il n'en a même pas parlé à Milo et Adrien... 

- Je te déteste.

- Tu détestes que j'ai raison, mais tu ne me détestes pas tant que ça.

- Je...

- Te déteste. Fini-t-il pour moi dans un soupir.

Je tourne la tête vers lui, sa respiration est régulière, son cœur calme et son corps détendu, il s'est endormi. 

- Merde... Juré-je dans un murmure.

Ce con a raison, je déteste qu'il ait raison, mais lui. Lui, je ne suis plus aussi sûre de le détester comme je le faisais avant. Je n'arrive pas à croire ce que je pense, qu'est-ce qui cloche chez moi ? Il m'a fait un tas de crasses, il m'a humilié, il a dit un nombre de choses dégueulasses à mon sujet. Et moi ? Je ne suis plus capable de le détester. 

Je suis maso, ma parole ?

Je soupire avant d'enlever délicatement les mains de Cameron de ma taille, je me glisse en dehors de son étreinte avec le plus de délicatesse possible pour ne pas le réveiller puis je l'installe plus confortablement dans mon lit. Il s'est endormi dans mon putain de lit.

Je passe par la salle de bain pour me rincer le visage et boire un peu d'eau avant d'aller me glisser dans les couvertures de son lit. 

Je vais mettre un temps fou à m'endormir, parce que les images de mon cauchemar refont surface dans le calme de cette nuit, et parce que l'odeur de Cameron est partout autour de moi. Mais je parviens tout de même à tomber dans les bras de Morphée.


À suivre... 


******

Bonsoir ! 

Ce chapitre est important puisqu'on apprend une partie du passé d'April à travers son cauchemar qui retrace son accident de voiture avec Jackson, son beau-père. 

Il y a aussi le fait que Cameron a été présent pour la rassurer et la sortir de son cauchemar toujours présent même une fois réveillé.

On se retrouve bientôt pour la suite !

<3


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