~7~

               

Colin

Derrière la porte, j'entends des éclats de voix. 

— Pourquoi acceptes- tu ? Le patron est cool, je suis du même avis que toi mais accepter toutes les lubies du grand chef devient malsain. 

— Je ne valide rien du tout. Colin est un bon élément qui n'aura aucune difficultés à s'intégrer ici. Mais si le grand chef, comme tu l'appelles, n'entérine pas l'évolution de Johan, nous pouvons tous dire adieu à notre emploi. Le vieux vendra tout. 

Je ne sais pas si je prends la bonne décision mais puisque je fais, a priori, partie du plan, il me semble normal d’être informé. Mon retour inattendu provoque un grand silence. 

— Partir ainsi était une réaction stupide et je venais m’en excuser, dis-je d'une voix que j'espère ferme.

— Et tu as entendu notre échange, je suppose, commente Guillaume. Je vous propose d’en discuter ce soir après le travail. Qu’en penses-tu, Colin ?

— Ça me convient. 

Assimiler de nouvelles informations me pompe de l’énergie mais à la pause, je prends le temps de tout noter dans mon calepin. Comprendre les consignes n’est pas un problème, pas plus que de les assimiler. Mon principal souci est de maintenir cette concentration sur la durée. Mon esprit a tendance à s’échapper très vite. Cela avait peu d’incidence lorsque j’étais déménageur. Porter, lever du poids ne me gêne pas. Il arrivait à mon esprit de s’échapper mais sans grandes conséquences. Là, la plus petite déconcentration peut entraîner une erreur dans l’entrée du code. La journée se termine et j’attends avec Jean que Guillaume nous rejoigne.

— Tu sembles fatigué, s'inquiète-t-il.

— Je le suis. J’ai peu dormi la nuit dernière. 

— Tu ne seras pas chez toi tard, tu pourras récupérer. 

— Me voici, annonce Guillaume en nous rejoignant. Jean et moi avons cette habitude, en fin de semaine,  de nous retrouver pour discuter un peu de tout. Bon, c’est aussi une bonne excuse pour prendre le temps de boire une bière. Le café est un peu plus loin et très tranquille. Ta voiture est garée loin ?

—Je n’en ai pas. J’ai toujours vécu en ville, j’ai donc suffisamment de possibilités pour me déplacer. 

En vérité, je n’ai jamais réussi à obtenir mon code de la route. Il m’est difficile d’en parler sans passer pour un idiot. La raison que je donne est tout à fait crédible. A peine quelques mètres, et nous entrons dans un petit café. Guillaume se dirige vers une table un peu à l’écart et une jeune femme vient prendre la commande.

— Bonjour les gars. Comme d’habitude ?

— Exactement Martine. Deux pressions. Colin, tu nous accompagnes?

— Un Coca-Cola pour moi, s'il vous plaît. L’alcool et moi ne faisons pas bon ménage. 

Dès que nos boissons sont servies, Guillaume entame la discussion. 

—Ta remarque m’a troublé tout à l’heure Colin. Johan, monsieur Tiroulet n’est pas un calculateur. Jean peut te le confirmer, il bosse dur afin d’obtenir enfin la place qui lui revient. 

— Il ne m’a aucunement fait penser à ce genre de bonhomme. Bien au contraire, mais savoir que je suis une sorte d’enjeu entre lui et Mr Forp, j’avoue que ça me refroidi. 

— Je comprends tout à fait. Mais, ne mets pas le neveu et l'oncle sur le même niveau. 

— Je parle de mon ressenti. Lors de l'entretien que j'ai eu avec tonton, j'ai eu la sensation d'être la souris et lui, le chat qui jouait avec moi. Je n'ai pas ressenti ceci avec le neveu, bien au contraire. C'est peut-être pour cette raison que j'ai réagi de façon un peu brusque. Découvrir que je suis une sorte de trophée pour celui qui gagnera le match ne me plaît pas vraiment. 

— Concernant Johan. Excuse-moi j’ai beaucoup de difficultés à l’appeler monsieur Tiroulet. 

— Ce n’est pas un problème, je ne me tromperai pas en l’appelant par son prénom. 

—Tu sais, après le départ de son oncle, nous nous sommes retrouvés ensemble avec lui et quelques employés de la boîte. Il avait des bagages scolaires, nous , nos connaissances sur le travail. Son oncle ne désirait pas qu'il soit un manager mais quelqu'un qui comprenne les atouts de la boîte et trouve des moyens pour la faire fructifier. Nous avons dû apprendre à échanger nos compétences. Crois-moi, expliquer avec des mots ce que tu fais machinalement n’est pas si évident. Ensuite, nous avons travaillé ensemble afin d’améliorer certains points.

— Pour la rentabilité ? 

— Pas forcément non. L'amélioration des postes de travail, utiliser des logiciels plus simples il y a une quantité assez importante d'options qui ont été ou changées ou améliorées. 

Guillaume fixe Jean, j'ai l'impression qu'il attend une sorte d'accord. 

— Johan a besoin de nous. Tonton semble malsain mais il faut le comprendre, c'est de sa boîte dont il s'agit. 

Comme prévu je ne suis pas rentré tard. Je n’étais pas spécialement fatigué mais en découvrant le message de Tom, la mémoire me revint. Dans un peu plus de quinze jours, c’est la Pride. 

— Pardon d’appeler tard mais je viens juste de lire ton message.

— Aucun souci, Colin. Je fais le tour pour prévoir, certains ne préviennent pas et je dois me débrouiller pour les remplacer à la dernière minute. 

—Tu peux compter sur moi, dis-je alors que j'avais zappé la date. Tu m’envoies les consignes ? 

— Il n’y a aucune consigne, Colin. Nous serons dix en surveillance ce qui implique une certaine mobilité durant le défilé. J’aimerais bien, si c’est possible que tu sois à l’adresse que je t’ai donné vers 13 h. Il est important que vous sachiez vous repérer au milieu du défilé. 

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