Souvenirs Et Réflexions
"Deux semaines. Seulement deux semaines que tu étais parti. Et pourtant j'avais l'impression de vivre seul depuis des années. Je me souviens encore de ta touffe blonde que je décoiffais sans arrêt, de tout nos matins d'amoureux à se prélasser sur le canapé, de tout les bons moments que nous avons pu passer ensemble... Mais tu avais décidé de partir. Je ne complétais pas assez ton monde, je n'étais pas assez pour te pousser à rester. J'avais fait de mon mieux pour que tu restes encore un peu, même quand le pistolet était sur ta tempe, j'aurais été prêt à me prendre cette balle qui t'avais fait rejoindre l'autre monde... Si seulement...
Ma vue se brouillait, des larmes coulaient sur mes joues.
Si seulement j'avais pu t'empêcher de partir...
Je me retournais doucement, serrant un coussin dans mes bras. Personne. J'étais seul dans mon lit, ça ne servait à rien d'espérer que tu reviennes d'une minute à l'autre, tu étais mort.
Je me levais difficilement, et me dirigeais vers la cuisine. L'appartement était encore plus silencieux qu'avant. J'aurais tellement aimé essayer de te dire "je t'aime" comme chaque matin. Je ne pouvais pas parler, alors je me contentais de signes, d'expressions faciales et de petite syllabes remplies de bégaiements. C'est ce qui te faisait craquer chez moi. Cette chose qui faisait fuir les autres, ce handicap que je trouvais auparavant insupportable : le fait que je sois muet.
Après avoir préparé notre petit déjeuner et m'être pouponné, je me dirigeais vers l'endroit que tu détestais le plus. Pôle Emploi... Tu avais honte de devoir y aller en disant "Je suis chômeur de longue durée" ou "Cela fait 2 ans que je cherche un emploi"... Je ne sais pas ce qui te gênait autant.
Je n'entrais pas dans le bâtiment, je restais planté devant, à essayer de remémorer tout les meilleurs et les pires moments que nous avons pu passer ensemble. Mais ce jour là j'avais autre chose à faire... À 14h00, je devais assister à ton enterrement. Prendre ta main pour la dernière fois, et te faire mes adieux... Adieu. Je détestais ce mot. Les au-revoirs font bien plus souffrir que l'amour en lui même. Tu t'es montré extrêmement égoïste en partant, mais je n'arrive pas à t'en vouloir.
Je levais les yeux au ciel. Le soleil brillait et me brûlait la peau, les oiseaux revenaient de leur migrations, les fleurs réapparaissaient et les rues étaient désertes... Tout était présent pour que cette journée soit parfaite. Tout sauf toi.
Après avoir passé quelques minutes à t'imaginer à mes côtés, je rentrais chez nous pour enfiler mes vêtements de veuf. Ton petit déjeuner que j'avais soigneusement préparé était resté sur la table, au même endroit. Je ne pris pas la peine de débarrasser, espérant secrètement que tu viennes le faire à ma place... J'étais maintenant devant mon armoire, attrapant ma tenue et enfilant mes chaussures. Une fois prêt, je couru vers le cimetière. Je n'étais pas en retard mais j'avais besoin de courir pour me défouler et essayer de retenir mes larmes.
Et voilà, tu arrives, accompagnée de ta famille et tes amis. Quelques membres de ma famille sont également présents. Je ne voulais pas entendre les commentaires de tes parents, je savais qu'ils allaient te critiquer, ils ont l'air de te détester depuis ta naissance. "Il n'est pas digne du nom Min" disait ton père avec mépris ... "Il est déjà mort, il t'entends sûrement pas là où il est... Tais toi au lieu de gaspiller ton temps et ta salive" c'est ce que j'avais envie de lui répondre. Mais je ne pouvais pas. Même si j'aurais pu parler, je n'aurais pas eu le courage de le dire.
Je te regarde partir, et te faire ensevelir sous un tas de terre. Je détestais les cimetières. Laisser une personne pourir sous terre, et la représenter par un misérable caillou. Mais de toute façon, c'était la seule chose à faire... Des larmes coulaient sur mes joues. Tu es parti en entraînant mon coeur et ma joie avec toi. Et mon seul moyen de les retrouver était de te rejoindre... Mais je ne voulais pas jouer à ce jeu. Je ne voulais pas partir à mon tour, en brisant le coeur de tout ceux qui m'aimaient. Je tenais trop à la vie pour me laisser tenter...
Et regarde moi maintenant. J'ai réussi. Après des années de combat, je parle enfin, je me suis marié, et j'ai même une petite fille qui illumine ma vie. Si tu aurais gardé espoir, tu serais resté et tu aurais pu apprécier la vie à sa juste valeur... Mais je ne t'en veux pas."
Je détourne le regard vers Sarang. Du haut de ses trois ans, elle ne comprend sûrement pas ce que je fais ni pourquoi je suis ici...
"Allez viens ma chérie, on rentre"
Je la tiens dans mes bras et m'éloigne de ta tombe tout en observant le soleil couchant. Le vent est frais, et les rayons du soleil brûlants.
La vie. La mort.
Deux parfaits opposés.
Mais il est pourtant si facile de mourir, plutôt que faire face à une vie qui devient de plus en plus dure chaque jour.
Tu as fais ton choix. Tu es parti. Et je ne t'en veux absolument pas.
Seulement, ne crois pas que je vais te rejoindre.
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