Version audio illustrée par Aletheia2112 disponible dans le média ci-dessus

 – Ma Lady... ?

Elle est immobile...Figée dans le temps et l'espace.

Je me lève péniblement, le regard bloqué sur la jeune fille.

– Ma Lady ?

Un pas en avant. Puis un autre. Le paysage s'est couvert de blanc, et le corps de Ladybug de gris. Un gris cendré et poussiéreux.

– Princesse ? Réponds-moi...

Le masque et la chair réduits à l'état d'une poudre aux couleurs effacées. Figée, le bras tendu en avant, comme dans un désir de me protéger jusqu'à la fin.

Le silence est pesant, le ronronnement des voitures effacé, le brouhaha et les rires envolés. La seule chose qui parvient à mes oreilles est le vrombissement d'une chose indéterminée. Un simple regard vers mon père me signifie qu'une fois de plus, c'est à lui qu'il a pensé, recroquevillé sur lui-même.

Un nouveau pas vers la coccinelle, la main tendue en avant, dans un désir d'effleurer une nouvelle fois sa peau. Un soupir m'échappe et je me recule, elle paraît si fragile ainsi, comme si la moindre caresse pouvait l'effacer en un instant. Alors je me rétracte, je ne veux pas qu'elle disparaisse.

Je baisse les yeux, ma tenue est trop claire, elle aurait pu renvoyer la lumière si la poussière n'était pas restée en suspend dans les airs pour l'empêcher d'arriver. Simplement en observant le décor, je sais que j'ai détruit mon monde. Silhouettes bloquées dans le temps, sons bloqués dans l'espace, vies bloquées à jamais, je suis à l'origine de tout ça.

Un pas en avant. Vers un inconnu, son enfant dans les bras, arrêté dans son mouvement. Je tends la main, je l'effleure, et son existence part en poussière.

J'ai fait ça...

Le vrombissement s'intensifie. Autour de moi, tout est désertique, pourquoi ai-je fait cela, déjà ? Je prends mon bâton à la main, il est blanc comme neige, alors qu'il devrait être gris, à l'image de toutes les vies que j'ai enlevées.

Le vrombissement serait audible par n'importe qui à présent. Mais aucun cri de panique ne résonne.

Tout est effondré autour de moi. Je lève les yeux au ciel, mais ne parvient qu'à voir une épaisse brume, peut-être qu'elle partira un jour...

Le vrombissement devient insupportable.

Et j'en comprends maintenant la source. Des trombes d'eau qui se déversent, mon pouvoir ayant détruit toute forme de contention de celle-ci. Je regarde la statue figée de mon aimée, va-t-elle se briser sous la pression ?

Est-ce que mon pouvoir aura détruit jusqu'à la preuve de son existence ? Ou alors ce monde acceptera de garder une trace de l'héroïne qu'elle a été ?

Le liquide est là, il frappe les murs, emporte la poussière, défonce les ombres des vivants, Ma Lady va être effacée...Je m'approche d'elle, je ne veux pas qu'elle s'envole...

Dans une tentative peut-être désespérée, je retiens l'eau comme je peux à l'aide de mon arme, pour limiter la pression qu'elle recevra, pour que son être soit figé à jamais et qu'un jour on puisse la retrouver, la sacrer pour ses exploits, reconnaître qu'elle a existé. Cependant, après une longue résistance, mes forces s'amenuisent et je ne peux que me laisser emporter par le courant, espérant qu'elle restera là.

Je flotte, pendant je ne sais quelle durée, entre les débris de bâtiments et les morceaux de personnes figées ayant survécu à l'inondation. Ne serait-ce pas Nino et Alya, que je vois assis-là, partageant une glace ? Probablement pas...Jamais je ne les reverrais.

Et dire que tout avait si bien commencé, Marinette, la plus belle et adorable fille que je connaisse, Ma Lady, la plus courageuse et déterminée, n'étaient qu'une seule et même personne. Une personne éperdument amoureuse de moi. Nous aurions pu vivre heureux, si mon...Si Gabriel Agreste ne s'en était pas mêlé.

Enfin, le temps n'est pas au passé...Mais s'il n'est pas aux souvenirs, alors à quoi puis-je le dédier ?

– Dé-transformation.

Je murmure cela, sans trop d'attentes, dans l'espoir de pouvoir entendre une voix amicale, celle de Plagg, mais c'est vain. Après tout, je ne suis pas Chat Noir. C'est étrange que je garde toute ma lucidité alors qu'un papillon violet est censé me contrôler.

Le temps passe.

...

Et je passe et repasse, par des lieux que j'ai connus, mais qui sont méconnaissables.

...

Le temps file...Mais à quelle vitesse ? Sans jours ni nuits pour me repérer, je n'ai que la pénombre constante pour essayer de connaître la date.

...

Je n'ai pas faim...

...

Ni soif...

...

Ma Lady me manque un peu plus chaque jour...

...

Marinette...Ma princesse...

...

J'ai envie de la revoir...

...

Je saute à l'eau, mon bâton pour respirer, et mes yeux qui piquent. La vision brouillée par les cendres restées en suspension dans les lacs improvisés. J'arrive à voir sa silhouette au loin. Elle n'a pas bougé...Mais comment aurait-elle pu ?

Le Papillon est à côté...Sa statue a été conservée également. Je m'en approche, la main tendue, j'ai envie de la détruire mais...Il reste mon père...alors je me rétracte.

J'observe ma bien-aimée, privée de toutes ses couleurs, puis je remonte. Je remonte. Je remonte. Je remonte. Plus loin. Plus haut. Loin de ce passé que je veux oublier.

...

Assis au bord du vide, le regard perdu à l'horizon...Je vois un rayon de soleil...

Un rayon de soleil ? Ah...Cela faisait longtemps...Mais il n'est pas celui que je cherche. Le mien s'est éteint il y a...Bien longtemps...

...

Bien trop longtemps.

...

Je n'avais pas vu que mes yeux étaient bleus...Pas d'un bleu profond et chaleureux comme ceux de ma Lady, mais plutôt glacial. Dois-je devenir comme eux ?

...

– Un petit chat...

...

– Sur un toit...

...

– Se languit...

...

– Sans sa Lady...

...

Deux mille trois cent cinquante-deux fois. C'est le nombre de fois que j'ai chanté cette chanson depuis qu'elle est le seul son que je peux entendre. Cela reste moins que le nombre de fois que j'avais relancé le temps pour sauver ma Lady...En vain.

...

Même les animaux ne sont plus là. Mais je vois des insectes qui se promènent par-ci par-là.

...

– Un petit chat...

...

– Sur un toit...

...

– Se languit...

...

– Sans sa Lady...

– Chat ?

Cette voix...Est-ce mes oreilles qui me jouent des tours ?

– Chaton ?

Je me tourne, et je la vois, belle comme au premier jour. Elle me sourit, elle brille. Je souris, je me lève, je m'approche.

– Ma Lady ?

Un pas en avant, la main tendue en avant, dans un désir d'effleurer une nouvelle fois sa peau...Et comme si elle avait été la statue sous-marine, elle s'évapore.

...

Quatre fois. Cela fait quatre fois que je la vois, sans qu'elle ne soit véritablement là.

...

Je me demande à quel point j'ai détruit le monde. Jusqu'où mon pouvoir a-t-il fait effet ?

...

Je vois les étoiles...Je ne les avais vues que rarement à cause de la lumière, et maintenant à cause de la poussière...C'est beau...J'aimerais que ma Lady soit là pour les voir.

...

Je vois à nouveau la lune...Je l'ai brisée en deux.

...

La lune est brisée...Est-ce que mon esprit l'est aussi ? J'ai vu ma Lady une cinquième fois aujourd'hui...

...

...

J'entends des voix derrière moi...Des illusions encore une fois ?

– Un petit chat sur un toit...Se languit sans sa Lady...

– Chat Noir... ? Chat Noir !

Je me retourne, voilà la voix de ma Lady...Elle est revenue une nouvelle fois. Peut-être que cette fois c'est la bonne ?

– Ma Lady ? Je croyais t'avoir perdue...Comme j'étais chagriné que tu ne sois plus là.

Elle recule...Elle a peur de moi ?

– Mais qu'est-ce qui t'es arrivé ? Non...Euh, surtout, ne me dis rien !

Elle ne veut pas que je lui parle ? Mais pourquoi ? Qu'est-ce que j'ai fait de mal ?

– On va tout réparer !

Elle est là pour m'aider ?

– Bien sûr qu'on va tout réparer ! Maintenant que tu es revenue !

Je me rapproche encore plus d'elle et lui tourne autour, pourquoi semble-t-elle déstabilisée ? Elle a peur de moi ? Elle ne veut pas de moi ?

Pourquoi cette voix me chuchote de...

Elle me murmure de prendre ses boucles d'oreilles ?

Je le dois ?

Probablement...Si la petite voix me le dit...Peut-être que je pourrais tout réparer avec un vœu après tout.

– Et que tu vas...Me donner ton Miraculous !

Je lui agrippe les oreilles, et elle crie, mais pourquoi ? Je vais tout réparer, et on sera heureux...Pourtant, elle me donne un coup pour que je recule.

– Mon Miraculous ? Qu'est-ce qu'il te prend Chat Noir ?!

Peut-être que je lui ai juste fait peur ? Après tout c'est pour notre bonheur...

– Je suis désolé, je ne voulais pas me montrer malpoli, donne-moi ton Miraculous. S'il te plaît, Ma Lady. Chat Blanc a...Fait quelques petites bêtises...

C'est vrai que je ne suis pas Chat Noir...Je suis Chat Blanc...

– Tu as été akumatisé Chat Noir, au fond, tu ne veux pas mon Miraculous. Tu as besoin que je te libère du mal.

Est-ce qu'elle me dit la vérité ? Ma Lady ne m'a jamais menti mais...La petite voix me dit que j'en ai besoin...Du Miraculous...

– Laisse-moi te venir en aide.

Elle a l'air tellement sincère...Tellement réelle...Est-elle réelle d'ailleurs ?

Je sens une larme couler sur ma joue, puis son doigt passer au même endroit pour l'effacer...Est-ce que si elle me libère du mal, elle sera avec moi ? Parce que si c'est le cas...

– Sauve-moi...

– Oh, mon pauvre Chaton...Dis-moi, tu te souviens où est allé l'Akuma ?

L'Akuma ?

Où est-il allé ? Je ne sais plus...Je ne sais pas...

Cela fait si longtemps...

D'ailleurs...Pourquoi a-t-elle pris si longtemps à revenir ? Pourquoi n'est-elle pas revenue avant ? Quand j'avais besoin d'elle...

La petite voix me murmure que c'est sa faute...La petite voix prend le contrôle...

Je m'efface, et j'entends la petite voix dire avec mon corps.

– Là, sur mon cœur, mais tu l'as déjà brisé.

Puis...plus rien...

Je n'arrive plus à penser...

Je m'efface...Et je suis loin de tout.

De ce monde, des douleurs...Et de ma solitude.

Eh bah, je suis actif aujourd'hui. (Je devrais aller bosser à la place. Genre, vraiment, mais bon. (Je devrais faire de même, mais je tiens à tout republier au plus vite...). Enfin, je suis plutôt fier de celui-là, parce que c'est vrai que Chat Blanc a passé des mois tout seul... Le pauvre... En vérité, je pense que c'est plus la solitude que l'akumatisation qui l'a rendu fou (même si ça a dû jouer).

Enfin, parler d'isolement en cette période de quarantaine, c'est ironique, nan ?

Bref, qu'avez-vous pensé de cet OS (et de ce pauvre petit Chat Blanc ;-;).