Sans défense
Gabriel regardait le coucher de Soleil qui enflammait les toits de Paris. Les rayons qui se déposaient sur les nuages leur donnaient une étrange couleur de sang.
Le styliste secoua la tête. Il ne faisait que projeter ses états d'âmes sur un simple ciel rouge, avec des traînées de nuages magnifiques.
Il n'avait manifestement pas la possibilité d'y échapper. Il soupira. Il se rendait compte que sa vie avait de moins en moins de sens, et il se demandait si elle valait vraiment la peine d'être vécue.
Depuis quelques temps, Nathalie était guérie. Et leur relation s'était brusquement altérée.
Gabriel s'était rendu compte de ce qu'il éprouvait pour son amie, au cours de ces semaines où elle avait été entre la vie et la mort.
En fait, ce n'était plus une amie. Il l'aimait.
Il ne savait pas lui dire. Il savait qu'elle n'y croirait pas. Et il était presque sûr qu'elle le rejetterait.
Depuis sa guérison, elle s'était rééloignée de lui, au moment où il désirait le plus sa proximité.
Il en aurait pleuré, s'il n'avait pas refusé ses émotions. Nathalie ne le laissait plus approcher. Elle ne s'ouvrait plus du tout. Elle était redevenue cette sorte de statue de marbre insensible et inébranlable qu'elle avait été avant.
Sauf que cet avant-là, Gabriel le voulait définitivement révolu. En secret, il avait renoncé à son vœu. Il avait cessé d'être vraiment le Papillon.
S'il akumatisait encore de temps à autre, environ toutes les deux semaines, c'était pour qu'elle ne s'inquiète pas de son changement.
Il gardait le masque sur ses sentiments, comme elle sur les siens.
Mais il en souffrait. Il avait tellement besoin d'elle, même s'il détestait le reconnaître.
Et face à l'attitude glaciale de Nathalie, il était totalement sans défense. Chaque fois qu'elle lui adressait la parole, c'était sur le ton le plus professionnel qui soit. Elle ne l'avait plus jamais appelé par son prénom, alors qu'il l'avait autorisée à le faire.
Parfois, il s'était inquiété d'elle, il lui avait demandé si elle allait bien, si elle voulait quelque chose. Mais c'était sans résultat. Il était arrivé qu'elle sourie, qu'elle laisse ses barrières tomber un instant. Avant de se réacharner à les dresser, à le rejeter, disant qu'elle allait bien et n'avait besoin de rien.
Seul dans son observatoire, Gabriel retournait ses réflexions encore et encore. Il se sentait seul, terriblement. Parce qu'il devinait que l'amour qu'il éprouvait pour Nathalie était une mine sous leur relation, pouvant exploser à tout instant. Il devenait urgent de la désamorcer, de crever l'abcès.
Il redescendît dans son bureau, nerveux. Il avait un plan pour expliciter ses sentiments, mais c'était un plan plein de failles.
Et si elle le rejetait ? Et si elle refusait d'écouter ? Et si...?
Gabriel secoua la tête. Ce type de panique ne lui ressemblait pas. Il se sentait complètement perdu face à ce sentiment, face à ses propres hésitations, face à tout ce qu'il risquait.
En l'entendant arriver, il se mît à trembler. Le plan qu'il avait en tête lui semblait d'un coup irréalisable, mais il refusait d'abandonner.
« Nooroo, je renonce à toi. »
Et il ôta son Miraculous.
Quand elle entra, Nathalie haussa un sourcil. Elle ne s'attendait pas à trouver son patron avec son Miraculous à la main, semblant heureux. Elle ne s'attendait pas au sourire chaleureux qu'il lui adressa. Elle ne s'attendait pas à sentir son cœur accélérer encore.
« Bonsoir, Nathalie. Comment allez-vous ?
— Je vais bien, merci. Et vous, Monsieur ?
— Ça va...Pour la millième fois, Nathalie, appelez-moi par mon prénom. S'il vous plaît.
— On n'appelle pas son patron par son prénom.
— Je vais vraiment finir par regretter l'époque où vous étiez Mayura, murmura-t-il en faisant tourner la broche entre ses doigts, au moins il vous arrivait de m'appeler Gabriel, de vous approcher de moi...D'accepter cela.
» Est-ce que je ne suis vraiment que votre patron, à vos yeux ? »
Nathalie sentît son cœur s'emballer en entendant la tristesse dans la voix de Gabriel, et retînt la grimace qui lui montait aux lèvres.
Je croyais en avoir enfin fini avec ça, mais me revoilà à réagir comme une adolescente énamourée. Mais je ne dois pas le laisser abattre mes défenses, le laisser me voir.
Elle se contenta de hocher la tête. Ce n'était pas vrai, il était encore bien plus que ça pour elle. Mais elle ne pouvait pas l'admettre.
Gabriel se détourna alors, et regarda le tableau de sa femme. Il aurait tant voulu pouvoir avoir ses précieux conseils encore une fois.
« Je n'aurais pas dû renoncer au Papillon. Même si mon vœu a bien changé depuis le début, je désire toujours quelque chose d'impossible. »
Il avait dit cela d'une voix froide, distante, vide. Ce n'était qu'un constat, rien de plus.
« Et que voulez-vous donc ?
— Simplement que vous m'aimiez. »
Elle écarquilla les yeux. Cette fois-ci, elle était certaine qu'il n'allait pas bien. Comment leurs deux vœux pouvaient-ils être devenus les mêmes ? Ce vœu, il ne pouvait l'avoir que si le désir qu'elle avait eu pendant si longtemps était réalisé. Et elle n'y croyait pas une seule seconde.
Mais comme d'habitude, elle empêcha son trouble d'être visible. Tandis que Gabriel continuait à parler, du même ton froid, de la même voix désincarnée.
« Je vous aime. Tout ce que je désire aujourd'hui est que vous éprouviez la même chose. Je veux juste être aimé de vous. Mais je vois à quel point c'est impossible.
» Je passe mes nuits à retourner mes pensées, à chercher la formulation correcte, le bon moyen de le dire. Je ne sais pas pourquoi je suis si peu sûr de ce que je dis alors que c'est seulement la vérité.
» Je n'ai jamais été aussi perdu, aussi sans défense.
» Mais vous continuez sans cesse de dresser des barrières, de faire comme si vous n'éprouviez rien, comme si vous deviez être forte pour nous deux.
» Mais vous n'avez pas à faire ça. Vous n'avez pas à faire comme si vous ne ressentiez jamais aucune douleur alors que vous savez que je sais que ce n'est pas vrai.
» Et je ne peux rien faire quand vous êtes perdue dans cette espèce d'orgueil.
» Et je me perds à mon tour, je me perds dans mes sentiments et mes interrogations, à me demander ce que tout ça veut dire. Et à chaque fois que je m'approche, vous me renvoyez cette même indifférence qui semble vous servir de bouclier. »
Il se tût un instant, se perdant à nouveau dans ses pensées. Puis il ajouta quelque chose, dans un murmure.
« Je dois vraiment avoir l'air idiot...
— Non, Gabriel. C'est moi qui suis idiote. Je n'aurais pas dû vous repousser ainsi ces deux derniers mois. J'aurais dû voir que vous aviez changé. Je n'aurais pas dû croire que ma maladie ne laisserait aucune trace. Mais je ne pensais pas entendre ce que vous m'avez dit. Et j'ai encore du mal à y croire.
» Parce que vous n'avez pas besoin de Miraculous pour que votre « vœu » soit réalisé. Même si j'ai tout fait pour, persuadée que j'étais que ça n'arriverait jamais. Je vous aime aussi, Gabriel. »
Un instant, le styliste douta de ce qu'il avait entendu. Mais il savait que Nathalie ne lui aurait pas menti ainsi.
Il traversa la pièce à grandes enjambées, et la serra dans ses bras, tendrement, avant de la saisir à la taille et de la faire tournoyer en l'air, dans une danse de joie.
En la reposant au sol, il lui sourît, ne pouvant exprimer autrement l'immense bonheur qu'il éprouvait.
« Ne me refais plus quelque chose comme ça, murmura-t-elle, j'ai eu très peur.
— Et si je te préviens ? Refuserais-tu que je te fasse danser ainsi ?
— Non, bien sûr. Mais préviens-moi.
— Tout ce que tu veux. »
Il se pencha vers elle et l'embrassa avec ferveur, laissant exploser en lui le bonheur qui avait fui pendant si longtemps.
En répondant à son baiser, Nathalie se sentît enfin complète, heureuse, et elle sût que, dorénavant, elle arriverait à être elle-même.
Quand ils se séparèrent, le bonheur brillait dans leurs yeux. Tout était bien.
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1374 Mots, écrit en une journée. (24/04/2021)
Remerciez @rara_2560 parce que c'est un peu grâce à elle. J'avais l'idée en tête depuis à peu près une semaine, mais pas de plan vraiment précis et d'organisation.
Et @rara_2560 s'est montrée très enthousiaste à la lecture de mes OS, elle m'a demandé avant-hier, avant la publication de "Pourquoi ne nous voient-ils pas ?" et hier, en l'ayant terminé, quand paraîtrait le prochain. Et c'est incroyablement motivant.
De voir que ce que je fais vous plaît, c'est vraiment du bonheur. Parce que je suis entièrement heureuse que quand j'écris, sauf que j'ai toujours un peu l'impression que c'est du bonheur égoïste. En voyant que ce que je fais vous plait, que j'arrive à vous faire passer de bons moments, je suis en quelque sorte rassurée.
Fin bref...
Vous avez aimé ?
Bises,
Jeanne.
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