Pourquoi ne nous voient-ils pas ?
Marinette était assise sur les marches du musée de l'Homme, elle dessinait une nouvelle tenue.
Elle semblait extrêmement concentrée, mais au fond d'elle, elle était perdue dans un labyrinthe de pensées toxiques.
Elle avait essayé. Mais le destin semblait avoir décidé de l'empêcher d'atteindre son objectif.
Elle avait essayé, encore et encore, depuis une semaine. Elle tentait désespérément d'avouer ses sentiments à Adrien. Mais à chaque fois, quelque chose s'y opposait.
Soit il devait aller quelque part, soit il y avait une akumatisation, soit quelqu'un les interrompait. Et le pire, c'était que Marinette n'arrivait toujours pas à s'empêcher de bafouiller, de rougir et d'avoir l'air idiote.
Si seulement elle avait eu le courage de Ladybug quand elle n'était pas transformée. Si seulement elle avait pu trouver en elle la force, l'habileté et la détermination de son alter-ego. Mais ce n'était pas possible sans le masque, les gens la jugeaient, avaient des idées sur elle, à cause de son passé.
Mais c'est si évident, pourtant. Tout le collège est au courant que je suis amoureuse d'Adrien, je ne le cache pas. C'est même pire que ça, je sais bien que ça crève les yeux. Mais lui ne le voit pas.
Elle secoua la tête, tentant de chasser ces pensées. Si elle était venue ici, c'était pour arrêter d'y penser en se plongeant dans sa passion. Dessiner pour oublier. Mais elle n'y arrivait pas. Tout ce qu'elle créait se ramenait automatiquement à lui, il était son « mannequin », quand elle avait besoin de dessiner une silhouette pour les vêtements c'était sans cesse lui.
Marinette soupira. Autant rentrer chez elle, s'effondrer sur son lit et en discuter avec Tikki. Ça serait un moyen plus rapide de s'en libérer.
Mais elle savait parfaitement que, une fois chez elle, réaliser ce désir de libération serait tout aussi impossible. Où qu'elle soit, quoi qu'elle fasse, elle penserait à son problème. Et même en parler ne la soulagerait pas, puisqu'elle aurait toujours cette blessure en elle.
Marinette soupira. Elle connaissait la solution. Écrire, comme elle avait déjà tenté de le faire. Et créer quelque chose spécialement pour Adrien, qui lui prouverait qu'elle l'aimait. En se débrouillant pour que le cadeau ne soit pas détourné.
Mais elle se rappelait suffisamment ses échecs précédents pour douter d'elle. Douter de sa capacité à réaliser ce plan pourtant simple.
Mais alors qu'elle se posait les questions, qu'elle doutait de son entreprise dans tous les sens, sa main s'était mise à dessiner toute seule, créant un tee-shirt simple, assez semblable à ceux qu'il portait habituellement mais avec des rayures différentes. Au lieu du jaune, du vert et du violet traditionnels, elle inscrivît ses propres couleurs sur les bandes.
Le rouge de Ladybug, le vert tendre des yeux d'Adrien, un bleu-violet qui évoquait un peu ses cheveux.
Dix minutes plus tard, elle s'arrêta de dessiner, pile au moment où elle avait décidé que ce plan était irréalisable. En se rendant compte de ce qu'elle avait dessiné, elle soupira.
Eh bien il semblerait que je n'ai tout compte fait pas le choix. Je déteste ne pas créer quelque chose que j'ai dessiné.
Elle rangea ses affaires dans son sac à main et rentra chez elle. Il y avait au moins une chose de certaine, elle ne pouvait pas coudre là où elle était.
Dès qu'elle fût chez elle, Marinette commença la confection du tee-shirt d'Adrien.
***********
Deux jours après, devant le manoir.
Marinette inspira profondément. Elle tenait son cadeau et la lettre qui l'accompagnait bien serrés contre elle.
Après encore une seconde d'hésitation, elle sonna.
« Qui est là ? Que voulez-vous ?
— Euh...Bonjour, je suis Marinette. Je voudrais donner un cadeau à Adrien, s'il vous plaît.
— Déposez-le et je lui donnerai.
— Non. J'ai besoin de lui parler et puis... la dernière fois que je vous ai confié quelque chose...
— Je sais, interrompît Nathalie. »
Il y eût un moment de silence. Elles hésitaient toutes deux sur l'attitude à avoir.
Mais les grilles s'ouvrirent finalement.
« Venez, ordonna Nathalie à travers l'interphone. »
Marinette avança dans la cour, déjà plus sûre d'elle, ayant gagné la première bataille sur le chemin de sa déclaration.
Elle fût surprise d'être accueillie par Nathalie, qui lui demanda de rester avec elle un instant. L'adulte avait besoin de discuter avec la jeune fille.
« Que voulez-vous lui dire ?
— Il me semble que ce n'est pas vos affaires, si ?
— Pas vraiment, non. Mais...En fait, je sais ce que vous voulez faire...
— Seigneur, dites-moi que ce n'est pas si visible que ça, marmonna la jeune fille.
— On reconnaît ses semblables.
Vous aimez Adrien.
J'aime son père.
» Et j'aimerais seulement savoir où vous avez trouvé le courage de vous déclarer.
— J'ai assez de ma situation. Ça fait plus d'un an que je coure après mes rêves d'être en couple avec Adrien et que je ne les réalise pas, que je n'essaie pas.
» Alors même que je sais qu'il ne m'aime probablement pas.
» Mais je suis fatiguée d'attendre sans réponse. Je ne sais pas si c'est vraiment du courage, et je sais encore moins d'où il vient. Mais j'espère qu'il ne va pas m'abandonner.
— Merci pour votre réponse, Mademoiselle. Et bonne chance. »
Marinette remercia Nathalie d'un sourire puis se dirigea vers la chambre d'Adrien.
Nathalie regarda Marinette s'éloigner, se demandant comment ça pouvait paraître si simple à la jeune fille, qui avait pourtant hésité pendant plus d'un an.
Est-ce que la lassitude, l'agacement face au doute étaient vraiment les seules raisons ?
Peut-être, mais je n'ai pas de doute. Je sais à cent pour cent qu'il ne m'aime pas. Et je crains de m'exposer à lui.
Elle soupira. Elle n'avait pas de réponse, et ça ne servait à rien de se poser des questions sans réponse.
Mais le doute était ancré dans son esprit maintenant. Peut-être que les choses pourraient changer ? Peut-être que toute l'inquiétude que Gabriel montrait à son égard était réelle, peut-être qu'il la considérait plus que comme une simple assistante ? Peut-être que...
Non, elle ne devait pas s'emballer. Elle ne devait pas se laisser croire qu'elle avait une chance. L'atterrissage n'en serait que plus brutal.
Pourtant...Elle se rappelait son attitude quand elle avait eu à recréer Protecteur. Sa panique, son air désolé. Et puis même après, quand il l'avait assignée à résidence et presque confinée dans sa chambre. Comment il l'avait suppliée de ne pas mourir.
Ma vie n'a déjà plus de sens, si vous mouriez...
Elle s'était écrié qu'il ne devait pas dire des horreurs pareilles, que sa vie avait un sens, qu'il l'avait choisi lui-même. Elle avait eu peur pour lui, mais l'avait caché. Comme elle cachait tout.
Soudain, elle se dît qu'il était peut-être temps d'arrêter de se noyer dans son mal-être, d'arrêter de se déchirer, d'arrêter la souffrance volontaire.
Elle décida d'être elle-même, et entièrement. Elle décida de se déclarer enfin.
En pensée, Nathalie remercia Marinette d'avoir permis ses doutes et sa décision.
Puis elle se dirigea vers le bureau.
« Monsieur ?
— Nathalie ? Que faites-vous là ? Vous devriez être en train de vous reposer...
— Je vais mieux. Et puis je ne supporte plus de ne rien faire.
— Pourquoi donc ?
— Je n'ai jamais aimé l'inactivité. Si je n'agis pas, mes pensées ont tendance soit à se taire, ce qui est extrêmement angoissant, soit à tourner en boucle. »
Gabriel s'approcha d'elle et posa les mains sur ses épaules, demandant son attention, lui demandant d'écouter, mais manifestant aussi toute la confiance qu'il lui accordait.
« Je peux comprendre la peur des pensées qui tournent en boucle. Je sais à quel point c'est désagréable. Mais le silence ? Cela fait très longtemps que je ne l'ai plus entendu. Comment cela se fait-il ?
— Vous créez. Vous n'avez jamais cessé de créer. Et l'art, quel qu'il soit, occupe l'esprit. Ça peut paraître très extérieur puisque je ne suis pas une artiste, mais... j'ai toujours eu le sentiment que, même lorsque vous n'êtes pas activement en train de créer, vous inventez quand même. C'était pareil avec Émilie, elle restait actrice, elle continuait d'être dans son monde.
» Je suis complètement incompréhensible, pardonnez-moi, murmura-t-elle.
— Non. Je vois très bien ce que vous voulez dire. Et je pense que vous avez raison.
» Mais ce n'est pas ce pourquoi vous êtes venue, n'est-ce pas, ajouta-t-il en s'éloignant. »
Nathalie hocha la tête. Non, elle n'était pas venue parler de sa perception de l'art et des artistes. Mais elle n'arrivait même plus à penser les mots qu'elle avait voulu dire.
Quand il s'était éloigné, elle s'était soudainement sentie comme vidée, déchirée. Et la seule chose s'articulant encore dans sa tête était un appel, elle voulait juste qu'il revienne.
« Nathalie ? Qu'y a-t-il ? Vous allez bien ?
— Oui, ne vous inquiétez pas. Je viens simplement de comprendre pourquoi vous tenez tant à ramener Émilie.
— Que...que voulez-vous dire ? »
Nathalie se demanda s'il faisait exprès. C'était évident. Et puis, elle s'était trahie tant de fois, elle avait tant laissé paraître ce qu'elle éprouvait par moments. À croire qu'il était aveugle.
Mais on pouvait comprendre qu'il n'y croie pas, tant l'idée de l'aider à ressusciter Émilie paraissait absurde si on prenait en compte que Nathalie aimait Gabriel.
Elle inspira légèrement, tentant de remettre de l'ordre dans ses pensées et d'ignorer le sentiment de vide qui s'imposait en elle.
« Je veux dire que je vous aime. »
Il la regarda avec un air déboussolé. Son cœur s'était accéléré, il ne savait plus où il en était. Il ne savait plus que penser.
Parce qu'il savait qu'il doutait. Depuis des semaines, depuis son sacrifice, en voyant toute son abnégation, toute sa volonté, toute l'énergie qu'elle mettait dans son projet, il doutait.
Il l'avait toujours appréciée. Quand il était devenu le Papillon, qu'elle avait été au courant, qu'elle l'avait soutenu et aidé, il avait appris à la considérer comme une amie, sa meilleure amie.
Et aujourd'hui, face à la déclaration de Nathalie, il sentait qu'il était prêt à la considérer comme beaucoup plus.
Il s'approcha d'elle, hésitant. Gabriel ne savait pas utiliser les gestes, les signes, il n'avait jamais su communiquer sans les mots. Mais il avait besoin d'essayer.
Il lui prît les mains, plongea son regard dans celui de son amie, et répondît enfin.
« Je crois que je vous aime aussi. »
En voyant le bonheur et l'incrédulité se peindre sur le visage de Nathalie, il sût.
« En fait, j'en suis sûr. Je vous aime. »
Il se pencha vers elle, et déposa un baiser léger sur les lèvres de son assistante. C'était à peine une caresse, mais une promesse pour tous les jours à venir.
************
Dans la chambre d'Adrien.
Adrien avait accueilli Marinette avec joie, heureux de pouvoir passer du temps avec une amie. Même s'il avait été étonné qu'elle ait pu entrer sans problème, son père ayant renforcé encore plus les règles d'accès.
« C'est Nathalie qui m'a ouvert. Elle n'a pas fait de difficultés...
— Nathalie ? Mais...Père l'avait quasiment enfermée dans sa chambre pour la forcer à se reposer. C'est vraiment une tête de mule...
— Comment cela ?
— Elle est malade, et nous devons batailler pour qu'elle accepte de faire des efforts pour guérir. Mais elle veut absolument aider, et elle s'épuise à la tâche.
— Elle va aller mieux, j'en suis sûre. »
Adrien sourît. Marinette avait l'air tellement sûre d'elle, ça faisait plaisir. Quand elle s'affirmait, elle ressemblait encore plus à Ladybug et ça lui plaisait.
Il lui demanda pourquoi elle était venue et la jeune fille sembla aussitôt gênée, baissant les yeux et rougissant légèrement.
Allez, Marinette, ce n'est quand même pas si dur ! Et tu n'auras même pas besoin de lui dire, c'est écrit.
« Je voulais te donner ça. C'est quelque chose que j'ai créé moi-même, j'espère que ça te plaira.
— Je peux l'ouvrir maintenant ?
— Oui bien sûr ! »
Adrien déchira délicatement le papier d'emballage, et sortît le tee-shirt, qu'il déplia.
Il écarquilla les yeux. C'était une véritable œuvre d'art pour lui. Les rayures de couleur s'harmonisaient parfaitement, et rendaient magnifiquement sur le fond noir.
« Oh, mon Dieu ! Il est magnifique, Marinette ! Absolument splendide ! Merci beaucoup !
— De rien. Je suis vraiment heureuse qu'il te plaise, je n'étais pas sûre pour les couleurs...
— Ne t'inquiètes pas, elles sont parfaites. Mais en quel honneur m'as-tu créé une telle merveille ?
— Je voulais créer quelque chose spécifiquement pour toi, quelque chose qui te ferait plaisir...
— Je m'en doute, mais...Il n'y a vraiment pas de raison ? »
Marinette sentît ses joues devenir rouge tomate. Elle n'avait pas bafouillé une seule fois depuis son arrivée, mais elle sentait que ça n'allait plus durer.
Elle fixait le sol, gênée.
Adrien posa une main rassurante sur son épaule.
« Tu sais, Marinette, tu es vraiment une très bonne amie. Et tu dois savoir que je ne te chasserai jamais de mon cercle d'amis, quoi que tu me dises. N'aie pas peur de moi.
— Le problème, murmura Marinette, c'est que...Jevoudraisêtrebeaucoupplusqu'uneamiemaisjepeuxpasparcequej'osespas.
— Pardon ? Est-ce que tu pourrais répéter plus lentement s'il te plaît ? Je n'ai pas compris.
— Je t'aime. »
Adrien dévisagea Marinette, légèrement désarçonné par cet aveu. Il savait que c'était la vérité, bien sûr, c'était compliqué de le nier.
Mais ce qui le perdait, c'était l'effet que lui faisait cette déclaration. Son cœur battait à des kilomètres heures, il ressentait un bonheur qu'il mît du temps à analyser.
Et quand il comprît ce qu'il éprouvait, il eut envie de se donner des claques.
Plus aveugle que moi, c'est impossible. D'abord, j'aurais dû me rendre compte beaucoup plus tôt de son amour. Ensuite, j'ai réussi à me tromper sur mes propres sentiments. Je suis un idiot !
« Marinette...Je t'aime aussi. Mais sans ton aveu, je crois qu'on aurait pu se tourner autour pendant longtemps, comme j'étais incapable de m'en rendre compte.
— Heureusement que je me suis décidée alors !
» Tu ne peux même pas imaginer à quel point ce que tu m'as dit me rend heureuse, ajouta-t-elle d'un ton rêveur. »
Adrien lui sourît tendrement, et la prît dans ses bras, lui transmettant dans cette étreinte tout l'amour qu'il lui portait.
Marinette lui sourît. Le bonheur qu'elle éprouvait à cette étreinte était parfait. Et il lui suffisait.
Pourvu que ça dure, je ne supporterais pas une rupture...
Quand ils s'éloignèrent l'un de l'autre, ils laissèrent la place à leurs inquiétudes de super-héros. Mais ils sentirent tous deux, sans le comprendre, qu'ils n'auraient pas de problème.
Ils échangèrent un sourire et se renouvelèrent leur déclaration.
************
2457 Mots.
Quand j'ai écrit qu'Adrien ne comprend toujours pas, j'avais vraiment envie de gifler quelqu'un. Son "mais pourquoi tu voulais me faire un cadeau pareil ? Pourquoi tu voulais me faire plaisir ?"...ARRRRRRRRRGH !!! Je sais que j'ai respecté le personnage, au moins.
Idem pour Gabriel, d'ailleurs. Qui refuse de capter au moment où Nathalie lui dit "Je viens de comprendre pourquoi vous tenez tant à ramener Emilie." La rage...
Par contre, l'inspi je la pêche vraiment n'importe où. Là, je l'ai trouvée dans des commentaires YouTube.
En fait, sous la vidéo ci-dessous, il y avait un commentaire qui m'a donné l'idée. Je mets une photo du fil de commentaires aussi.
https://youtu.be/RZ-0j9c5t0A
(ma vidéo préférée sur Miraculous, accessoirement.)
(Je suis "Paon Discret")
Et je ressassais ma réponse, un peu en boucle. Du coup, je me suis dit que ce serait cool de faire un OS avec de l'Adrienette et du Papyura en parallèle.
Et ça a donné ce que vous avez lu.
Je l'aime bien, parce que les scènes s'enchaînent sans trop de mal, je trouve.
Et vous, vous en avez pensé quoi ?
Bises,
Jeanne.
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