Dangereuse alliance
« Bonjour, je m'appelle Lila Rossi. »
Félix dévisagea la jeune fille qui lui tendait la main. Elle était différente, mais il n'arrivait pas à déterminer en quoi. En tout cas, elle lui donnait envie de la découvrir.
« J'ai beaucoup apprécié ton numéro qui a conduit à la réakumatisation d'Alya, Rose et Juleka. C'était vraiment pas mal...
— Une alliée ? C'est peu courant, répondît-il d'un ton vaguement narquois.
— Oh, c'est parce que les gens normaux ne savent pas apprécier la valeur de la douleur et du désordre. Mais avec toi, je suis sûre qu'il y a moyen de trouver...
— Autre chose ? »
La brune acquiesça, un léger sourire aux lèvres. Le cousin d'Adrien la comprenait manifestement très bien. Il y avait vraiment moyen de rendre la soirée amusante.
Le blond jaugeait la situation. Il était moins enclin à faire confiance. Mais il sentait que cette fille avait un certain talent, peut-être même plus que lui. Lui, il effrayait. Mais elle se fondait parfaitement dans la masse, elle était manifestement acceptée.
Du bon matériau, à voir ce qu'on peut en tirer.
Lila l'entraîna vers les autres, expliquant qu'elle allait le présenter, et surtout les lui présenter. Pour elle, la phase des présentations était particulièrement importante. Gagner la confiance de l'adversaire était vital, ainsi on pouvait le tromper et connaître chacune de ses faiblesses.
Elle lui expliquait tout cela en marchant vers le groupe. Pour lui, ça n'était pas gagné, puisqu'il avait joué l'intéressant et gâché son image. Il fallait qu'il se repente sincèrement, ou au moins fasse semblant d'être sincère.
« C'est très simple, lança-t-elle joyeusement, tout est une question d'illusion. Pour faire croire que tu regrettes, il faut baisser les yeux. Mais s'ils t'accusent, tu croises leur regard directement. C'est un signe de sincérité, si tu as tes yeux dans les leurs, ils goberont tout ce que tu leur raconteras. Après, il faut travailler la voix. Marmonner, ne pas parler clairement. Comme si tu étais accablé par la gravité de tes actes. Puis, le dos un peu courbé, mais discrètement : tu es sous le poids de tes crimes et de la culpabilité.
— On dirait que tu fais ça tout le temps.
— Absolument. Je les fais tourner en bourrique, avec quelques phrases bien placées, quelques preuves falsifiées. Tout le monde me croit, c'est fascinant.
— Mais tu ne t'ennuies pas ?
— Souvent si. C'est là que je crée mes plus belles histoires, les mensonges les plus importants. Après, je les raconte et je m'amuse de leurs réactions.
» Mais j'ai un autre jeu si je m'ennuie. Comme je déteste Ladybug, le Papillon m'a fait l'honneur de m'accorder sa confiance, et il me demande de l'aide dans ses plans. C'est très divertissant.
— J'imagine, oui, répondît-il avec un sourire carnassier sur le visage.
— Tu n'as jamais eu de vrai contact avec lui, n'est-ce pas ?
— Non, en effet, et c'est regrettable. Il a l'air intéressant.
— Il l'est. Un peu naïf parfois, et moins amusant. C'est un adulte, après tout. Il ne suppose même pas que je puisse être plus maligne que lui.
— Tu es assez surprenante, il faut le reconnaître.
— Merci, lança-t-elle en balançant ses cheveux dans un grand mouvement d'épaule. »
Le jeune homme resta bouche bée. Décidément, cette fille n'était pas commune. Elle semblait déterminée à mettre le plus de bazar possible dans la vie des autres, sans aucunement bouleverser la sienne. Elle agissait comme une reine dans sa Cour, ou mieux encore, comme un prédateur sur son terrain de chasse.
Elle était effrayante.
Elle était passionnante.
Elle était captivante.
Et alors qu'elle commençait à lui désigner chacun des camarades d'Adrien, donnant leurs noms, leurs caractéristiques marquantes et les faiblesses qu'elle avait identifiées chez chacun, Félix sût qu'il ne pourrait jamais trouver quelqu'un de semblable. Lila était absolument unique. Elle était la seule au monde à être comme lui, à penser comme lui, à réagir comme lui, à calculer comme lui.
Et il regretta de ne pas l'avoir rencontrée plus tôt, ne doutant pas que sa vie eût été mille fois plus excitante et heureuse avec une camarade de son type.
Quand elle eût fini, il lui murmura :
« Et toi ? Qui es-tu ? Quelles sont tes caractéristiques et où sont tes faiblesses ?
— Lila Rossi, reine de l'illusion et du mensonge. Je n'ai qu'une faiblesse, mes parents. Et je suis impitoyable.
— Enchanté, je suis Félix Graham de Vanily. Illusionniste à mes heures perdues, voleur en herbe, j'ai ce que je veux. Quant à ma faiblesse, elle réside dans ma jalousie envers Adrien. Parfois, j'ai l'impression qu'il a tout eu dans sa vie et que je n'ai rien. Mais je me domine.
— Parfait. Je t'apprendrai à faire disparaître cette jalousie, il ne la mérite pas, et c'est un trop gros point d'accès à tes sentiments. N'oublie jamais : nous sommes des renards dans une basse-cour. Nous devons être discrets, rapides et intouchables.
— Je n'oublierai pas, votre Majesté. »
Lila lui adressa un clin d'œil. Il comprenait vite, c'était bien. Avec lui, elle savait qu'elle pourrait faire de grandes choses.
Elle se réintégra dans le groupe, entraînant Félix avec elle, se félicitant de voir qu'il appliquait parfaitement ses conseils, et que ça fonctionnait à merveille. Seule Marinette était encore perplexe face à Félix, mais c'était Marinette. La seule à ne pas croire ce que prétendait Lila.
Enfin, presque la seule. Le second était en retrait, un peu plus loin. Il savait que Félix n'était pas un bon garçon, qu'il aimait faire du bazar. Et il connaissait par cœur la manie de Lila à semer la pagaille. Une alliance entre ces deux-là n'était pas bon signe.
Les mauvais pressentiments d'Adrien se confirmèrent plus tard dans la soirée. Après s'être rapprochés des élèves, les deux machiavéliques lancèrent une sorte d'attaque synchrone. Lila fît semblant de se sentir mal, Félix joua la panique à merveille, créant un mouvement de peur chez les autres.
Marinette leur ordonna de se calmer, gardant son calme comme une cheffe. Elle demanda à tout le monde de s'éloigner, s'approcha de Lila, vérifiant son état.
Mais la Franco-Italienne était maligne, et elle détestait la jeune Eurasienne presqu'autant que Ladybug elle-même. Alors elle saisît brutalement le poignet de sa camarade, menaçant de le tordre. La bleutée retînt son geste instinctif de rejet, et commenta que Lila s'était foulé le poignet en tombant.
Mais il ne fallait surtout pas s'inquiéter, ils allaient lui faire un solide bandage, éventuellement appeler les secours et ça irait. Lila était déjà remise de son malaise de toute façon.
Cependant, la brune était déterminée à pousser le plan jusqu'au bout. Il fallait que les autres aient peur, s'inquiètent pour elle. Et qu'éventuellement, ils soient en colère contre une Marinette qui minimiserait la situation.
Alors elle se tourna vers son complice, qui demanda à vérifier les dires de la jeune fille. La bleutée sentait le piège, mais elle ne voyait pas comment y échapper. Alors elle laissa faire.
Félix se rapprocha de Lila, toujours allongée au sol. Il jouait encore le jeune homme très inquiet. Du bout des doigts, il fît éclater une petite poche de peinture rouge sang sur la veste de Lila, extrêmement discrètement.
En la « remarquant » , Félix s'écria d'un air paniqué :
« Regardez, elle saigne ! Ça a l'air grave en plus ! Et vu l'endroit... Peut-être que c'est dangereux ! Elle s'est coupée !
— Comment j'ai pu louper ça ?! Bon, ça suffit. Dispersion ! J'appelle les secours, décréta Marinette.
— Je peux le faire, si tu veux, proposa Adrien.
— Oui, merci. »
Le choix était stratégique : Marinette comptait appeler ses parents, sachant pertinemment que Lila mentait, encore. Mais il y avait toutes les chances que Gabriel Agreste ne réponde pas, et ainsi, Adrien pourrait expliquer l'histoire.
Mais leur tentative pour calmer tout le monde échoua, surtout que Chloé s'était faite exaspérante, réclamant à tout le monde d'arrêter de crier et de courir dans tous les sens.
Aussi, le plan de Lila et Félix réussît parfaitement : bientôt, une dizaine d'akumas écarlates envahissait l'espace, touchant tous ceux qui ne portaient pas encore de Magical Charms. Et Alya leur échappa, se cachent derrière un arbre.
Marinette et Adrien filèrent des cacher derrière les arbres, se transformant en même temps.
Ladybug et Chat Noir se précipitèrent vers le groupe d'akumatisés, se demandant quel était l'ordre de priorité.
« Horrificator, lança Ladybug, il faut la neutraliser en premier. Si des passants l'aperçoivent... C'est qui celui-là ? Une illusion de Volpina ?
— Le cousin d'Adrien Agreste, je crois. Fais attention, il est de la même trempe que Lila.
— Noté. »
Ladybug maintînt cependant sa stratégie de défaire Horrificator en premier. Puis Chat Noir se lança contre le Bulleur, qu'il libéra rapidement. Puis ils battirent Inverso, trop rapidement pour qu'il utilise son pouvoir, le Dessinateur, Chronogirl, Miraculeur. Ils s'attaquèrent ensuite à Cœur de Pierre, qui leur donna plus de fil à retordre que les autres. Heureusement, ils s'en sortirent finalement.
Restaient le Dislocœur, Volpina et Félix.
Chat Noir lança l'assaut sur le mauvais ange, s'appuyant sur les arbres, évitant les flèches de son mieux, agilement. Étrangement, Kim ne s'était pas envolé, paraissait plus balourd que d'habitude, un peu perdu et déphasé.
Ladybug fronça les sourcils. Ce n'était vraiment pas normal. Il y avait un problème.
« Chat ? Fais attention à toi. L'attitude de Dislocœur est vraiment trop étrange.
— Peut-être qu'on a réussi à sonner le Papillon ? Après tout, on vient de défaire huit akumatisés en moins de vingt minutes et sans utiliser nos pouvoirs.
— J'espère que c'est ça. Vraiment.
— Tu crois que ça vient de lui, ma Lady ?
— Il y a des risques, Chaton. »
Le héros hocha la tête. Il y avait des risques, en effet. Comme il y en avait toujours après tout. Mais l'idée de devoir se battre contre son cousin le dérangeait. Et bien sûr, il ne pouvait pas l'expliquer à sa partenaire. Il écrasa la broche du Dislocœur, faisant disparaître ce dernier adversaire « facile ».
Maintenant, ils devaient se confronter à Volpina et son allié. Et ça n'allait sans doute pas être aussi simple que les affrontements précédents.
Déjà, il faudrait comprendre le pouvoir exact de Félix. Mais il semblait déterminer à le cacher, à ne pas le révéler. Il était immobile, fixant les héros d'un regard vide. Son costume s'était métamorphosé en une combinaison blanche éclatante, un masque de tragédie grecque tout aussi blanc lui couvrait le visage. Dans sa main, le jeune homme tenait une sorte de baguette, longue et fine, avec un bout étrangement rectangulaire.
« Je crois que nous allons devoir casser un téléphone, commenta Chat Noir.
— S'il reste immobile comme ça, ça risque de ne pas être trop compliqué...
— Effectivement. Mais c'est chat-crément bizarre...
— Peut-être que c'est une... »
Ladybug fît soudain volte-face, et assomma de son yo-yo l'adversaire qui s'était silencieusement approché derrière son dos pendant qu'elle observait la création, la distraction qu'il avait fabriquée alors que Chat Noir et elle combattaient les autres akumatisés. Ainsi se révélait la nature du pouvoir accordé à Félix : en bon illusionniste, il avait obtenu la capacité de créer la distraction parfaite.
Mais les sens de Ladybug, augmentés par le Miraculous, avaient pu la prévenir à temps. Et maintenant qu'ils connaissaient le pouvoir de leur adversaire, ce serait sans doute plus simple. Encore fallait-il réussir à éviter d'être trompés, et espérer que Volpina ne doublerait pas Félix d'illusions.
Chat Noir hocha la tête, comme s'il avait lu les pensées de Ladybug et déclara qu'il s'occupait de la Renarde.
Il jeta son bâton sur un arbre voisin, pour vérifier qu'il était bien réel, puis se précipita pour escalader et tenter de repérer Volpina.
Il se tourna tout autour, examinant le parc dans les moindres détails. Il ne la repéra cependant pas, mais évita plusieurs fois à Ladybug de se faire avoir par les « distractions » de Félix. Grâce à Chat Noir, elle parvînt même à le claquer au sol et à détruire sa baguette, purifiant l'akuma.
Un tonnerre d'applaudissements résonna autour d'eux, poussés par tous les autres élèves du groupe, akumatisés précédemment libérés ou porteurs de Magical Charms. Ladybug s'approcha de Félix, encore au sol.
Elle lança son Lucky Charm, afin de créer le bijou magique nécessaire à la protection de Félix, tout en espérant secrètement que la lampe torche serait utile contre Lila.
Elle sortît un bijou gris et blanc de son yo-yo et le tendît au blond, lui en expliquant le rôle. Il hocha la tête et le mît dans sa poche, avec un sourire.
Puis il commenta que l'héroïne ferait mieux de trouver Volpina rapidement, ou elle risquait d'avoir un sérieux problème avec la durée de transformation.
La jeune fille hocha la tête, puis fila sous les arbres, la lampe-torche allumée. Elle débusqua Lila assez facilement. Celle-ci ne se débattît étrangement pas et l'héroïne pût briser son pendentif et purifier l'akuma sans problème. Puis elle lança son « Miraculous, Ladybug ! », obtenant un deuxième Magical Charm, orange et blanc, qu'elle confia à son adversaire.
Lila remercia d'un hochement de tête et fila en direction de Félix pendant que Ladybug retrouvait Chat Noir pour leur « bien joué ! » habituel.
Le héros semblait triste, déçu. L'héroïne lui fît signe de l'attendre un peu, fila derrière un arbre pour nourrir Tikki et revînt rapidement vers son partenaire.
Elle l'entraîna à l'écart, voulant savoir s'il allait bien.
« Chat ? Qu'est-ce qu'il y a ?
— Rien, ne t'inquiètes pas. J'ai juste l'impression d'être de plus en plus inutile, de ne servir à rien, de te laisser te débrouiller seule...
— Je n'aurais pas pu les battre sans toi, Chaton. Et tu t'es extrêmement bien battu avant, quand on ne savait plus où donner de la tête tant il y avait d'akumatisés. Merci.
— De rien, ma Lady. Je suis content de voir que tu me trouves utile.
— Chat, sérieusement ! Je n'irais pas loin sans toi ! Heureusement que tu es là !
— A votre service, votre Miajesté.
— Bon, je dois y aller. Bonne soirée mon Chaton !
— Bonne soirée ! »
Les deux héros se séparèrent, se détransformèrent et retrouvèrent leurs camarades, qui débattaient de ce qui s'était passé.
Alya, n'ayant pas été akumatisée, avait pu filmer tout le combat et finit par craquer et montrer la vidéo. Les autres ne voulaient pas la croire quand elle disait que presque tout le monde avait été akumatisé.
« Et toi, demanda Kim, comment ça se fait que tu n'aies pas été prise ? Tu n'as pas de Magical Charm pourtant !
— Je fais confiance à Marinette. Puisqu'elle disait que ce n'était rien, j'ai considéré que Lila et Félix devaient mentir ou jouer la comédie. Je vous rappelle que la bataille du jour des Héros a sans doute été causée par Volpina. J'ai donc évité l'akumatisation pour cette fois.
— D'accord, fît Alix, mais t'es super-forte de garder ton calme face à Chloé.
— Je l'ignore, c'est tout. Sa voix est comme le bourdonnement d'une abeille pour moi. Désagréable et entêtant, mais se battre contre ne sert à rien !
— Eh ! »
Marinette sourît. Manifestement, confier son identité à Alya ne se révélait pas une si mauvaise idée, puisque cela donnait plus de force à son amie face aux émotions négatives.
Elle se tourna alors vers les deux jeunes à l'origine de la réakumatisation de masse. Ils discutaient à l'écart comme de vieux amis, riant ensemble, semblant fiers de leur coup.
La bleutée les fît même échanger une poignée de mains complice et se faire une bise très amicale.
« On remet ça, lança Lila.
— On remet ça, approuva Félix. »
Ils venaient de sceller une alliance dangereuse, une amitié risquée qui pourrait les mener loin, ils le savaient.
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2659 Mots.
Ne nous mentons pas, c'était kiffant à écrire. J'ai juste adoré !
Parce que Lila et Félix, je les vois vraiment bien ensemble, à vrai dire, mais je préfère me tenir à une première rencontre... Et donc à de l'amitié.
(Je viens d'avoir une idée de génie !! Je vous dit pas, mais il y aura de nouveau du Lilix, promis !)
A part le Lilix, je trouve que je me suis pas mal sortie du combat, et franchement, l'akumatisation de Félix, c'est de l'or !!
Pour ceux qui auraient des doutes : le ralentissement du Dislocœur, c'est effectivement lié à Félix. Dans l'objectif de "distraire", il a pu influencer les autres akumatisés...
Bref, assez discuté ! Qu'en avez-vous pensé ? C'était bien ?
Bises,
Jeanne.
(30/06/2021, 02h14)
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