Pour toi

For you
- Liam Payne & Rita Ora

In your eyes, I'm alive

Le garçon aux yeux bleus remit sa mèche brune en place rapidement et se remit sur son lit sans dire un mot. Une larme roula sur sa joue et le seul bruit audible dans la pièce fut le son qu'elle fit en s'écrasant sur son jean troué. Puis une autre suivie, et une autre encore, et bientôt le tissu clair était presque noir. Il avait toujours été émotif, là était sa faiblesse. Johanna, sa mère, lui avait toujours répété que c'était au contraire une force et que personne au monde n'avait le droit de l'empêcher de laisser son coeur parler. Mais voilà, Johanna n'était plus là aujourd'hui, et le coeur de Louis hurlait dans sa poitrine à en faire trembler les murs. Et ses faiblesses étaient là.

Il gardait le souvenir de sa mère au chaud dans son esprit, irradiant de lumière et d'amour. Il essayait coûte que coûte de ne pas oublier la beauté de ses traits, le son de ses éclats de rire qui réveillait l'enfant le matin, la douceur de sa main quand elle la lui tenait dans la rue. Il ne voulait pas oublier, il avait besoin d'elle près de lui à chaque seconde de sa vie. Et encore plus maintenant, à l'âge le plus ingrat de l'existence : l'adolescence. Louis avait besoin des conseils avisés de sa mère face aux insultes qu'il recevait tous les jours, il voulait qu'elle le serre dans ses bras et lui dise qu'elle, au moins, l'aimerait toujours quoi qu'il arrive.

Inside you're beautiful

Louis se remémora les souvenirs qu'il lui restait de sa chère mère en essayant d'oublier les coups qu'il avait reçus dans l'après-midi. Il laissa d'autres larmes mouiller ses joues, ses vêtements, ses draps, la photo de sa famille qu'il tenait dans ses mains. Il pleura pour ce qui lui sembla être une éternité ou peut-être juste une minute, quand la porte de sa chambre s'ouvrit brusquement en lui arrachant un sursaut. Une carrure qu'il connaissait bien prit forme dans l'encadrement de la porte malgré l'obscurité dûe aux volets fermés, et un sanglot étouffé lui échappa. Il ne pouvait pas s'en empêcher : il était faible. Louis ne bougea pas, il resta assis sur son petit lit aux draps bleus, le regard fixé sur son petit-ami.

- Lou? demanda une petite voix.

Le son était rauque et grave, comme Louis l'adorait. D'habitude, son coeur aurait fondu en l'entendant ; il aurait probablement regardé avec amour Harry et lui aurait répété qu'il l'aimait sans s'arrêter, jusqu'à s'étouffer. Harry aurait ri en lui disant de se taire, et ils auraient fini par s'embrasser. Mais la scène était différente de d'habitude. Le tableau semblait décoloré, comme si on avait renversé de l'eau sur les jolies couleurs d'été qui reflétaient leur bonheur. Le tableau de leur insouciance était saccagé, tout comme la chambre de Louis depuis une dizaine de minutes.

- Ha.., commença Louis en étant incapable de dire plus qu'une syllabe.

Il respirait mal, sa gorge était nouée et son estomac retourné. Son coeur broyé, comme passé sous une machine sans pitié qui aurait ignoré ses cris et ses appels à l'aide. Sa fragilité était la première chose qu'Harry avait remarqué chez le petit brun, c'était la chose qui l'avait fait tomber amoureux. Il trouvait ça adorable la manière dont Louis se souciait des autres plus que de lui-même. Le bouclé se rappelait de la première fois où il avait réellement senti des papillons dans son ventre : un simple animal sur le côté de la route avait fait descendre Louis du bus en courant. Johanna était en colère : il n'avait pas de téléphone à l'époque et était arrivé trois heures en retard à cause des bus, sa mère était folle d'inquiétude. Harry était resté avec Louis tout ce temps, de l'école jusque chez lui, il l'avait regardé rassurer le chaton comme si l'animal comprenait ses histoires de contes de fées improvisés. Harry avait su ce jour-là, à onze ans, que c'était Louis qui le rendrait heureux.

- Lou..., souffla Harry une nouvelle fois en essayant de se frayer un passage à travers les débris de bibelots et les livres d'école arrachés sur le sol de la chambre.

Il arriva près du lit et voulut toucher Louis, qui recula d'un seul coup comme si la main du bouclé le brûlerait. Un sentiment étrange traversa Harry, et il lui fallut quelques secondes pour reprendre ses esprits et se rappeler que Louis était dans un état anormal. Il savait comment agir avec lui, il savait que le brun avait besoin d'être serré fort et rassuré jusqu'à s'endormir en tremblant un peu moins qu'avant. Sans faire de geste trop brusque, Harry attrapa doucement la photo des mains de Louis pour la poser sur la table de nuit, puis il le tira pour le mettre debout et enrouler rapidement ses bras autour de lui. Louis détestait se sentir faible, et même s'il avait besoin de cette étreinte, il commença à se débattre pour se donner l'illusion de pouvoir gérer sa douleur seul. Mais Harry connaissait Louis par coeur, alors il ne le laissa pas se dégager bien que les petits bras frêles du mécheux tapaient avec force le torse de son copain. Des mots doux étaient soufflés à l'oreille du garçon qui pleurait et criait des paroles douloureuses et incompréhensibles.

- Je suis là, moi.. T'en fais pas. Je suis là, tout va bien, chaton...

Every tear, every fear,
Gone with the thought of you

Louis, à bout de force, cessa de frapper Harry au bout de plusieurs longues minutes. Ses muscles le lâchaient, il n'avait plus l'énergie de se battre contre qui que ce soit et encore moins contre les bras jeunes mais déjà forts du bouclé qui l'avaient tenu contre lui coûte que coûte. Harry ignorait pourquoi il était là, il savait juste que Louis avait eu un cassage sévère et qu'il devait venir au plus vite. C'était Lottie, sa soeur, qui l'avait appelé en panique en entendant les cris et les bruits venant de la chambre de l'adolescent. Alors Harry avait tout lâché et avait couru jusqu'ici en bravant pluie et vent.

Louis sanglotait toujours presque silencieusement dans les bras d'Harry, quand il releva ses yeux bleus dans ceux, verts, dont il était amoureux. Il avait l'air bête, immature, tout sauf viril. Mais il s'en fichait, parce qu'Harry était cette personne qui vous faisait tout oublier, tout accepter, tout montrer. Il était la seule personne avec qui il pouvait être lui-même, complètement mis à nu sans honte ni gêne. Ces yeux étaient ceux qui lisaient en lui.

- Chaton..., dit Harry presque imperceptiblement en caressant le visage blessé de Louis et en comprenant doucement ce qui s'était passé aujourd'hui.

Les larmes avaient encore plus rougi ses blessures, elles avaient brûlé la peau qui aurait pu cicatriser sans ces perles salées pour la réenflammer. Son arcade était ouverte, son oeil prenait une couleur violacée, sa joue était rouge de coups et sa lèvre fendue. Il était dévisagé et complètement ravagé de l'extérieur, ce qui reflétait assez bien ce qu'il y avait à l'intérieur. Louis savait encaisser. Il avait un don inouï pour le self-control, pas pour la self-defense (malheureusement). Il encaissait toujours, toujours plus d'insultes, d'humiliations, de coups : toujours et toujours plus. Il ne disait rien parce qu'il savait que quand il verrait Harry, toutes ses souffrances s'envoleraient.

In your eyes, I know I am home

Il se sentait tellement en sécurité dans les bras d'Harry, où cette odeur d'eau de toilette boisée s'élevait dans ses narines. Louis avait de la chance de l'avoir ; Harry était la plus belle créature qu'il n'avait jamais vu de toute sa vie et quand il avait posé ses yeux sur lui à onze ans, il comprit qu'il ne serait pas qu'un simple camarade de classe. Il serait plus : il serait son rayon de soleil en hiver, la main qui le remonterait à la surface en mer, la dernière goutte d'eau en plein désert. Il serait plus que tout ce que les pierres précieuses du monde pouvaient bien offrir. Il serait Harry.

And I'm bleeding in love but you're swimming in my veins
You got me now

- Ce n'est pas la première fois, chaton.

Louis ne répondit pas et ferma les yeux, appréciant le souffle chaud d'Harry sur sa peau alors que leurs visages n'étaient qu'à quelques centimètres l'un de l'autre. C'est vrai, ce n'était pas la première fois. Et puis? Louis était heureux, il pouvait encaisser. Il encaisserait jusqu'à son dernier souffle si cela lui permettait d'être avec lui. Il laisserait la douleur lui taillader le coeur à chaque battement si cela voulait dire de porter le nom d'Harry sur chaque parcelle de sa peau. Il laisserait n'importe qui le tremper dans de l'acide s'il pouvait voir les yeux d'Harry avant de mourir. Il subirait n'importe quoi pour un seul sourire.

Il se sacrifierait autant que nécessaire pour sentir les boucles d'Harry glisser entre ses doigts pour le reste de sa vie. Il ferait n'importe quoi pour lui, pour être avec lui, pour ne voir que par lui et pour lui. C'était ça, l'amour. Un sacrifice perpétuel pour une demie-seconde de bonheur étouffé entre deux larmes, une torture infinie pour un toucher caché entre deux regards. L'amour, le vrai, celui qui nous fait le plus souffrir au monde. C'était lui, l'unique possible raison de notre bonheur. Alors Louis encaissait.

I'll be yours for a thousand lives

- Ça ne peut plus continuer, Louis. J'irai les voir moi.

Un sourire triste s'étira sur le visage du mécheux qui regretta immédiatement son geste tant la douleur qui se propagea en lui fut grande. Mais comment ne pas sourire face à ce visage en colère tellement ridicule et adorable? Louis ne pouvait pas s'en empêcher, il sourirait et souffrirait mille fois si besoin. Harry serait toujours aussi beau, et Louis toujours aussi amoureux. Alors la douleur ne cesserait jamais.

- Non, souffla Louis d'une petite voix encore tremblante et les yeux toujours brillants. Serre-moi juste.

Harry ferma les yeux -peut-être de colère, peut-être de tristesse ou d'impuissance. Ils étaient liés : liés l'un à l'autre, et liés à cette vie à recevoir haine et injustice. C'était ainsi. Mais le fil qui les maintenait ensemble était si solide qu'il n'avait rien à craindre face à celui, fragile et léger, qui faisait d'eux des victimes de la société et des autres. Tant qu'ils seraient ensemble, ils n'avaient rien à craindre du monde. C'était eux contre le reste de la planète, et Dieu sait combien ils étaient forts ensemble. La fragilité et la force, le self-control et la self-defense. Ils étaient à la fois opposés et complémentaires, aussi forts qu'une paire de poings entraînés au combat. Ils étaient liés.

Harry finit par baisser le regard vers Louis une nouvelle fois, et se pencha pour embrasser avec délicatesse chacune de ses blessures. Louis retint parfois un petit sursaut de douleur, mais celle-ci faisait incroyablement de bien au petit brun. Elle lui faisait réaliser que seul Harry était capable de tourner n'importe quoi en une chose aussi belle que du plaisir. Parce que chaque toucher, chaque baiser lui procurait un bonheur intense au creux de l'estomac, et la douleur était tellement vite oubliée que c'était comme si elle n'avait jamais existé.

Been waiting for a lifetime for you
Been breaking for a lifetime for you

Toute la douleur du monde n'était rien face aux frissons provoqués par un simple contact. Toute l'éternité ne serait jamais assez longue pour leur amour qui brillait d'une flamme trop forte pour être conditionnée. C'était peut-être juste parce qu'ils n'avaient que seize ans et pensaient que l'amour signifiait souffrir pour l'autre, peut-être que c'était parce qu'ils étaient chacun la première fois de l'autre, ou peut-être que, bêtement, ils croyaient en un avenir plus beau. Peut-être qu'il y avait trop de "peut-être" autour d'eux.

Mais ils n'avaient pas peur. Peu importe la raison de leur assurance, ils n'avaient pas peur. Ni du monde, ni des autres, ni de l'autre, ni d'eux-mêmes. Ils étaient forts, ils feraient n'importe quoi pour un sourire, un mot, un contact, un frisson, une étincelle : rien qu'un petit quelque chose qui effacerait toutes les souffrances encaissées.

I'll be yours for a thousand lives
Been waiting for a lifetime for you
Been breaking for a lifetime for you

Les mains d'Harry tiraient sur les cheveux de Louis, dont les larmes coulaient de nouveau. Il ne savait pas s'il pleurait de tristesse, de plaisir, d'amour. Il pleurait, et les perles salées lui faisaient mal sur ses blessures ouvertes, mais le plaisir était plus bruyant que tout le reste. Leurs baisers étaient plus puissants que n'importe quel ouragan, et ils provoquaient assez d'électricité pour que quiconque s'approche d'eux pour leur faire du mal se retrouve blessé à son tour. La haine ne gagnerait pas, parce que la flamme de leur amour brûlait beaucoup trop fort.

- Je ferais n'importe quoi pour toi, souffla Harry entre deux baisers.

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