Une session d'Hypnose pour Keefe Sencen (spoil Unlocked)

 Grady sortît son transmetteur. Il était soulagé que Keefe ait accepté de lui laisser un moyen de le joindre, un moyen de l'aider.

 Parce que le Talent mystérieux du garçon était bien trop semblable à l'Hypnose pour que le père adoptif de Sophie n'ait pas envie de s'en mêler. Sophie avait été brisée par le départ de son ami, elle s'était renfermée, elle avait refusé de parler, refusé d'agir, refusé même de sortir de sa chambre pendant des jours et des jours.

 Grady avait été tenté à de nombreuses reprises de lui donner son transmetteur, pour qu'elle puisse joindre Keefe. Mais le blond le lui avait interdit, et l'Hypnotiseur savait pourquoi.

 Keefe avait peur que Sophie ne fasse appel à Dex pour traquer le signal, et le retrouver. Il ne voulait pas la mettre en danger avec ce Talent qu'il ne maîtrisait pas. Il ne voulait mettre personne en danger.

 Mais depuis quelques temps, Grady avait compris que le seul moyen d'aider Sophie était d'aider d'abord son ami.

 Il n'appréciait pas beaucoup Keefe. Mais il s'était obligé à reconnaître la valeur de ce garçon, qui s'était enfui pour protéger ses amis. 

 Grady s'était alors mis en tête de lui donner des sessions d'Hypnose. En transmettant ce qu'il avait appris sur son pouvoir, il était sûr d'aider à découvrir des pistes.

 Il approcha sa bouche du transmetteur, et murmura la phrase d'appel, prenant bien soin d'être discret, bien que ne risquant pas grand-chose. Edaline était dehors, à s'occuper des animaux, et elle était au courant, de toutes façons. Quant à Sophie, elle était à Foxfire.

 Au bout de deux sonneries, l'Empathe répondît.

  « Monsieur Ruewen ? Pourquoi m'appelez-vous ? Il y a un problème ? Est-ce que Sophie...

 — Sophie va bien, ne t'inquiète pas. Enfin, théoriquement. Elle est à Foxfire. A moins qu'elle n'ait à nouveau décidé de faire sauter l'école, elle est en sécurité.

 » En tout cas, je suis ravi de t'entendre parler. 

 — Il n'y a pas de problème par transmetteur, murmura le jeune elfe, soudain mal à l'aise, j'avais fait le test avec Dex...

 — D'accord. Je voulais te proposer quelque chose. Accepterais-tu mon aide ?

 — Comment pouvez-vous penser que vous pouvez m'aider. Personne ne le peut. Ce Talent est trop particulier pour...

 — Ton Talent reste très semblable au mien, Keefe. Et il a provoqué les mêmes réactions chez toi que celles que j'ai eues. Même si je n'ai pas voulu le montrer. L'Hypnose est effrayante. Et quand on ne sait pas la maîtriser, on peut très vite avoir envie de perdre tout moyen de contact avec les autres.

 — Mais vous n'êtes pas obligé de dire l'ordre, si ?

 — Je n'ai pas besoin de son pour Hypnotiser. Il suffit que j'aie une volonté formulée et que je regarde la personne que je veux Hypnotiser. Et le stade de la pensée suffit largement, tu comprends ?

 — Est-ce que je risque quelque chose ?

 — Je ne sais pas, je n'ai jamais fait le test. Mais je sais me contrôler. Tu n'as aucune inquiétude à avoir.

 — Je suis curieux sur un point. Si vous pouviez, que m'ordonneriez-vous ?

 — De rentrer tout de suite, d'arrêter les bêtises et d'avoir peur pour rien parce que la peur est le meilleur moyen de perdre le contrôle.

 — Vous me demanderiez de rentrer ? Vous ?

 — Pour Sophie, oui. Tu ne peux pas imaginer dans quel état ton départ l'a mise. 

 » Si je ne t'ai pas empêché de partir, si je ne t'ai appelé plus tôt, si je ne lui ai pas révélé que je pouvais te joindre, c'est uniquement parce que je sais que tu as besoin d'être seul, parce que tu te sens dangereux. »

 Keefe grimaça. Un mot s'était mis à résonner dans sa tête, de plus en plus fort, annihilant tout le reste, toute ses pensées. Un ordre qui lui venait, qui faisait écho à sa culpabilité, à sa peur. Grady avait visé tellement juste, c'était insupportable.

 Et cette lutte, cette affreuse lutte pour ne pas être dangereux, pour ne pas causer de dégâts...

 Elle le déchirait, profondément, elle l'épuisait, elle drainait ses forces. 

 « Dis-le, murmura Grady. »

 Keefe secoua la tête, effrayé. Si jamais il arrivait quelque chose, si son pouvoir franchissait la distance, il s'en voudrait à mort. 

 « Keefe, tu es seul, non ? Aux bruits que j'entends autour de toi, tu t'es abrité auprès d'une chute d'eau. N'ai pas peur. Ne lutte pas, ça ne fera que te blesser.

 — Arrêtez, je vous en prie, ne me demandez pas de faire ça, murmura Keefe, le regard suppliant, les lèvres serrées au maximum.

 — Je suis plus têtu que toi. Dis-le. Je ne risque rien. On est par transmetteur, tu m'as dit que ça ne marchait pas.

 — SILENCE

 La chute d'eau sembla se taire, les quelques oiseaux des environs subirent le même sort.

  Keefe eût aussitôt l'air atterré. Son pouvoir s'étendait bien au-delà de ce qu'il croyait, s'il pouvait même agir sur les objets inanimés.

 Grady était impressionné. Il ne s'était pas attendu à un tel phénomène, il se l'avouait. Il n'avait pas été assez attentif, c'était une erreur.

 « Keefe ? Le contraire du silence, c'est le bruit. Essaie. 

 — Vous n'êtes pas en train de m'Hypnotiser ?

 — Je te promets que non. Je n'oserais jamais. Mais il faut que tu me fasses confiance, ou nous n'y arriveront jamais.

 — D'accord. Bruit ?

 — Le ton, Keefe. Si tu es hésitant, si tu poses une question à ton pouvoir, c'est normal qu'il n'obéisse pas. C'est toi le maître. Il faut que tu sois sûr de toi.

 — Bruit, répéta Keefe d'un ton plus assuré. »

 Aussitôt, le vacarme de la cascade revînt en fond sonore. Le blond se passa la main dans les cheveux, soulagé. Si ça n'avait pas marché, il serait probablement devenu fou.

 Grady hocha la tête. Au regard du garçon, il devinait ce qu'il pensait.

 « Je t'aiderai. Si tu ne trouves pas immédiatement, si les premiers mots ne ramènent pas l'ordre, je t'aiderais à trouver la solution.

 » Mais tu dois rester calme. Quand ça t'échappe, ne panique pas, ne sois pas horrifié. Tu dois avoir confiance en toi. 

 — Mais ce Talent, ce n'est pas moi. C'est ce que ma mère a voulu faire de moi. Et cette fois-ci, je n'ai pas vraiment la possibilité de lutter.

 — Tu la laisserais gagner ? Tu laisserais vraiment les Invisibles faire ce qu'ils veulent de toi ? 

 — Je préfère devenir une ombre muette que de mettre mes amis en danger. Ce pouvoir est incontrôlable.

 — Bien sûr que si, il est contrôlable. Gisela est une folle, une psychopathe, tout ce que tu veux.
Mais elle n'est pas idiote. 

 » Loin de là. Elle a réussi à manipuler Brant pour qu'il tue la personne qu'il aimait depuis toujours. Ça prouve assez qu'elle a toujours de quoi répondre à toutes les situations. Et elle est extraordinairement prévoyante. Elle a forcément prévu un moyen de stopper le pouvoir, un moyen auquel tu dois avoir accès.

 — Vous parlez comme si vous la connaissiez...Sauf que personne ne la connaît, pas même son mari.

 — Oh, tu sais, il y a bien des moyens pour ôter leurs masques aux gens. Edaline et moi étions experts dans ce domaine. Et ta mère avait un don pour tomber dans nos pièges.

 — Des pièges ? Et puis quand est-ce que vous auriez pu faire ça sans qu'elle s'en aperçoive ?

 — Ton père ne t'a jamais parlé de ce qu'était Havenfield avant ? Ça m'étonnerait, il adorait venir ici. 

 — Les fêtes ? 

 — Exactement. Tu ne peux même pas imaginer le temps qu'ont pu passer tes parents ici. 
Tout ça pour dire que Gisela était très sensible aux vins de pétillante. On ne la prenait pas au sérieux, bien sûr, quand elle disait qu'elle conquerrait la terre entière, qu'elle aurait l'héritier le plus puissant, qu'elle détruirait les humains.

 » Ce n'était même pas concevable, pour nous. On prenait tous ses propos pour des délires d'ivresse. Mais une fois, elle nous a vraiment fait peur. Elle nous a expliqué qu'elle avait monté une association entière de gens qui partageaient ses idées, qu'elle trouverait le moyen de convaincre les autres de la rejoindre, et que les elfes seraient enfin à nouveau les maîtres...

 — Ma chère maman et sa mégalomanie, commenta Keefe sarcastiquement.

 » Qu'en avez-vous fait ?

 — Edaline a essayé de la faire taire, en lui disant qu'elle était complètement ridicule. Mais Gisela a continué de nous dévoiler un tas de petites mécaniques de ses délires complotistes.

 — Les Invisibles existaient déjà à l'époque ?

 — Oui, d'après ses propos, mais à un stade quasi-embryonnaire. Rien à voir avec ce que nous connaissons aujourd'hui. 

 — Moui. Je suis quand même inquiet d'apprendre qu'elle avait déjà des plans pour moi plus de vingt ans avant ma naissance...

 — C'est pour ça que je dis qu'il y a forcément un moyen de contrôler ton Talent. Vingt ans, c'est long, et pour un esprit pareil, chaque minute de conscience peut être mise à profit.

 — Et vous croyez que je pourrai trouver le bouton d'arrêt d'urgence qui est caché quelque part dans mon cerveau.

 — Seul ? Non. Je vais t'aider. Et en attendant de le trouver, je vais te faire faire les exercices que je faisais à Foxfire, pour que tu apprennes à le maîtriser.

 — Merci, Monsieur Ruewen. Merci beaucoup.

 — C'est normal. »

 Keefe sourît. Et il accepta les exercices que lui proposa l'Hypnotiseur, qui lui semblaient des exercices de théâtre.

 Apprendre à poser sa voix, à respirer, à feindre l'assurance, la peur, la colère. Parce qu'un ordre passe beaucoup par le ton sur lequel il est dit.

 Au bout d'une heure, Keefe salua son nouveau Mentor, et raccrocha. 

 Grady se félicita. Ils avaient bien progressé dans la connaissance de cet étrange pouvoir, et Keefe semblait en avoir moins peur à présent.

 En tout cas, il n'était plus effrayé à l'idée de le travailler. Il avait même accepté que l'Hypnotiseur le recontacte le lendemain, quand Sophie serait à Foxfire, pour une nouvelle session.

 Ensemble, ils n'avaient pas perdu leur journée.

 ************

 1706 Mots.

 Keefe aussi va avoir cours en distanciel, on dirait...

 Honnêtement, je suis sûre que ce fichu Talent est possible à contrôler, si seulement notre cher blondinet arrêtait d'en avoir peur.

 Et je suis à peu près certaine aussi qu'il a une "clé" intégrée, comme l'explique Grady. Gisela est bien trop minutieuse pour laisser un trou pareil dans son plan.

 J'aime beaucoup trop cet OS, d'abord parce que c'est seulement le deuxième hors concours, ensuite parce que...J'ai exploité tous les filons que je pouvais.

 Ces fameuses fêtes qui faisaient qu'Havenfield était le lieu le plus "hype" des Cités Perdues avant la mort de Jolie. Pourquoi on en parle jamais, en fait ? Epoque révolue ? C'est pas une excuse ! C'est le passé qui fonde le présent.

 Et je suis certaine qu'on pourrait trouver des infos intéressantes si on  allait fouiller dans les souvenirs que les gens ont de ces fêtes. 

 Et j'exploite aussi toutes les possibilités de "cours" qu'offre un tel Talent.

 J'espère que ça vous a plus !

 Bises, 

 Jeanne.

 (15/04/2021)



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