OS5-Le voleur de corps-3

Une première semaine difficile

Il faut que je me raisonne, mes parents ne sont plus mes parents, comme mes copains ne seront plus mes copains !

Les principaux bourreaux d'Alistair sont les garçons qui voyagent avec lui dans le bus scolaire. Le pauvre est déjà arrivé au lycée couvert de peinture ou de boue. Des bizutages que je ne compte pas vivre, donc la première chose à faire, est de ne pas prendre ce foutu bus.

Dire que certains privilégiés viennent avec leur propre voiture comme Damian, ce garçon si beau. Je soupire amer, visiblement toujours amoureux, malgré mon changement de corps.

Damian et ses deux amis sont les stars, admirés par tous. En tant que Barnabé, je n'avais pas réussi à l'approcher, alors inutile de dire qu'Alistair est encore plus mal parti.

En cogitant comme un fou pour le lendemain, j'ouvre la porte de l'appartement. La tante allongée dans le canapé regarde la télévision.

─ Tu étais où ?

─ J'ai été voir un copain.

Elle désigne autour d'elle avec sa main, visiblement satisfaite.

─ En tout cas l'appartement rangé est beaucoup mieux ! Je suis contente. Tu ne trouves pas que ça fait plus grand ?

C'est sûr ! Vu les choses inutiles que j'ai porté aux ordures, les cartons qui cachaient les fenêtres, d'un coup l'appartement est lumineux. Cependant, en comparaison de la maison de mes parents, ça ne le fait pas. Je suis incapable de répondre et me contente d'esquisser un bref mouvement de tête.

─ Je vais lancer une machine. Tu veux que je lave quelque chose pour toi.

─ Non c'est bon ! Mais tu deviens une vraie fée du logis.

Elle rigole amusée.

Les serviettes de toilettes de la salle de bain ne me paraissent pas nettes et surtout je suis plein de sueur, encore. J'ai lancer une machine avant de parler à ma tante du sujet qui me stresse.

─ Comment je peux aller au lycée ?

Elle me regarde comme si j'étais cinglé.

─ En bus, quelle question !

─ Je peux y aller en vélo ?

─ Tu détestes faire de sport et tu vas arriver en sueur à l'école ?

Un plan germe dans ma tête, par chance le lycée ouvre tôt.

─ Je peux me doucher dans les vestiaires de l'école.

─ Madame Rose t'avait proposé son vélo, mais tu n'en as pas voulu. Je ne te reconnais plus !

─ On pourra aller lui demander ? J'ai changé d'avis.

─ Mange d'abord ! Tu n'as rien mangé !

─ On pourrait acheter des fruits et des yaourts ?

─ Ça coute cher.

─ J'en achèterais avec ma paye.

Combien de temps vais-je devoir tenir dans ce corps. Et si c'était définitif ?

─ Bon d'accord, écoute j'ai une amie qui travaille dans le supermarché. Je lui demanderais ses invendus contre des hamburgers. Tu en mangeais trente par jour avant et désormais tu ne manges plus ?

─ Je n'ai pas faim, ma tante.

─ Arrête de m'appeler ainsi ! appelle-moi par mon prénom : Maria ! Tête de mule ! Allons voir la voisine.

Maria m'a accompagné chez la petite vieille qui me surveillait le premier jour.

Madame Rose m'a sorti un vélo rose du sous-sol, rouillé évidemment. Je n'ai pas fait de remarque sur les couleurs et Maria m'a aidé à l'huiler. C'est parfait, il ne paye pas de mine mais il roule bien. Elle est retournée s'allonger dans son canapé et ne sachant que faire de ma carcasse, j'ai décidé de repérer le trajet.

Je tâtonne avec mon GPS, finalement j'ai trouvé un chemin tranquille et rejoint les grilles du lycée en moins d'une heure. Bon c'était à craindre, je suis trempé et rouge, ce qui implique que je vais avoir une sacrée logistique à gérer. Il me faut un sac avec mes cours, un autre avec une tenue de change et une serviette.

Le lundi matin, je me suis levé aux aurores, stressé, déterminé à arriver le premier.

Le trajet est crevant, surtout car j'ai des courbatures de mon sport d'hier et je souffle comme un bœuf. Par chance, les lieux sont déserts et je vais rapidement aux douches du gymnase. Dire qu'avant j'y allais sans m'inquiéter. Désormais, j'ai la trouille d'être surpris et l'impression de ne plus être à ma place.

Lavé et changé, je me dirige vers mon casier avant de réaliser.

Bordel, je me suis trompé ! C'est celui de Barnabé.

Alistair a un casier plutôt isolé. Même son casier pue, ce mec est un cauchemar. Il est dégoutant, encombré de bouffes, des trucs ont coulé que j'ai du mal à nettoyer. Je le fouille minutieusement, cherchant des indications pour savoir comment il a échangé nos corps. Je cherche en vain l'adresse du laboratoire de son père.

Je n'ai qu'un seul indice, sous des tonnes de détritus de paquets de gâteaux et de chips : un ticket de caisse d'une supérette près du port.

Toute la journée, je traine solitaire. J'ai songé à aller rejoindre mes copains jusqu'à ce que je croise leur regard dégouté. Barnabé a failli rester seul, puis il s'est rappelé qu'il est moi et il a rejoint les autres qui l'ont accueilli à bras ouvert.

J'admire en douce Damian qui mange avec ses amis. Le midi au moins j'ai pu bénéficier d'un vrai repas équilibré.

─ Tu ne manges que ça, s'étonne Gisèle la dame de service.

Je regarde mon plateau essayant de comprendre ce que j'ai loupé. Il est normal, une salade, un plat avec légumes et un dessert.

Est-ce que même à la cantine, il était martyrisé ?

─ Normalement tu prends deux repas complets, avec au moins quatre viandes, insiste Gisèle.

─ Non, ça va aller merci.

─ C'est gratuit, tu le sais bien !

─ Merci Gisèle.

─ Je ne savais même pas que tu connaissais mon prénom ! Tu es si sauvage mon pauvre bonhomme.

J'ai mangé rapidement, soucieux de m'éloigner des élèves qui commencent à me regarder moqueurs. J'erre seul, ne sachant que faire et j'atterris machinalement sur les gradins du stade me permettant d'admirer les joueurs qui s'entrainent. Il y a plusieurs groupes, mes anciens amis, un autre groupe plus jeune et celui de Damian. Je mate les cuisses de Damian et à un moment son tee-shirt se soulève me permettant d'admirer ses abdominaux. Il me semble que je bave.

Aye ! Je crois qu'il m'a vu le mater.

Honteux et inquiet, terrifié à l'idée qu'il me frappe, je m'éloigne pour me réfugier dans la bibliothèque.

Les profs ne m'interrogent jamais quand je lève la main, je suis sans doute trop petit ou ma main grassouillette leur répugne.

Sur le trajet du retour, le constat est sévère, je n'ai parlé qu'à la dame de cantine aujourd'hui.

Je pédale, savourant l'air qui fouette mes joues. Quelques larmes d'inquiétudes coulent aussi, j'ai rasé les murs toute la journée.

Quand j'arrive à l'appartement, j'ai l'impression de mieux respirer. Le vélo a au moins l'avantage de me permettre d'être indépendant. Je me doute que quand il pleuvra, je rigolerais moins. Douché et changé, j'ai fait mes devoirs avant de trainer sur internet à la recherche d'histoire de changement de corps, sans rien trouver de concluant. Ensuite, pour me réconforter un peu, j'ai été admirer des photos de Damian sur les réseaux.

Le lendemain s'est écoulé à l'identique, puis après mes cours du mercredi matin, je suis reparti directement pour le centre social pour ma première après-midi de travail.

Dana, la fille qui tient l'accueil, m'explique que je dois plier et trier le linge et inscrire les bénéficiaires. Elle avait raison, car je manipule des tonnes de fringues, vidant et remplissant des sacs. Je suis devenu un pro des tailles en quelques heures et un pro du pliage rapide aussi. Les arrivages sont fréquents. Je suis surpris aussi du monde qui vient. Je ne pensais pas qu'autant de monde bénéficiait du centre social. Les gens défilent et je bavarde beaucoup, rattrapant mon déficit de plusieurs jours.

J'ai hâte d'avoir ma première paye à la fin du mois, pour me payer quelques trucs.

Il y a eu encore un arrivage d'une mamie avec deux autres survêtements rose à ma taille, je prends ! Parce que ma tante n'a pas de sèche-linge et faire sécher les vêtements à l'air libre est infernalement long.

L'appartement est désert quand je rentre. J'aurais bien été faire du sport en salle, mais jamais ma tante ne me payera de quoi m'inscrire, alors je vais bouger un peu tout en étant utile pour la résidence. Je décide d'aller porter les déchets et les appareils cassés stockés au bas de la résidence. A la place je pourrais y mettre mon vélo.

Un voisin, me regarde me démener avant de venir m'aider avec un chariot. Il s'appelle Joseph et est une encyclopédie de cet immeuble qui s'est détérioré au fil des locataires indélicats.

Le jeudi, j'ai encore joué à l'homme invisible au lycée, le midi je suis retourné sur le stade, dans les gradins du haut. Un gars m'a bousculé dans les couloirs en me disant que je pue, ce qui est faux puisque je me suis douché en arrivant et mon uniforme est propre. Les préjugés sont ancrés en eux et je ne les ferais pas changer d'avis vis-à-vis d'Alistair, enfin je veux dire de moi.

Le vendredi, j'ai été assister aux sélections de baskets. Dire que je comptais les tenter, pour me rapprocher de Damian. C'est toute bête, mais j'adore ce sport et je n'y ai pas joué depuis une semaine.

Le nouveau Barnabé n'y a pas été, mais il a été directement parler avec les joueurs. Il discute avec Damian, me regarde même narquois, ce qui d'ailleurs surprend Damian. Il doit se demander pourquoi Barnabé me nargue et à quoi nous jouons. Je fais semblant de regarder ailleurs, mais je suis horriblement jaloux et déçu.

Ce qui est terrible, c'est que je m'habitue déjà à ma nouvelle vie solitaire. J'aime bien Maria et les gens de la résidence. J'ai dû perdre quelques kilos, car je suis moins serré dans mes fringues et mes articulations sont moins douloureuses.

Le samedi, j'ai été enquêter au port dans la boutique du ticket de caisse que j'ai trouvé dans le casier d'Alistair. Je leur ai demandé s'ils me connaissaient, s'ils savent où est l'atelier de mon père. L'employé secoue la tête en affirmant qu'il ne m'a jamais vu.

J'ai été joué sur le terrain de basket du quartier, avant de me faire virer par une bande de costauds.

Ils m'ont agonisé d'injures, visiblement les gros n'ont pas le droit au sport.

Je rentre furieux à la résidence, elle a une cour intérieure assez grande, mais comme le portail ne ferme pas, on ne se sent pas chez soi. Je vais voir Joseph, en espérant qu'il veuille bien m'aider.

─ Bonne idée, samedi prochain ? J'ai de quoi faire des soudures et je vais réfléchir à ce qu'il nous faut.

Le dimanche au centre social, j'ai reconnu une fille de mon lycée, Celia, nous parlons un moment tous les deux.

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NDA important :

Juste une précision, je réalise qu'on peut penser que cette OS est une critique des personnes grosses. Alors, ce n'est pas de la grossophobie. Je préfère préciser pour qu'il n'y ait pas de doute.

On ne devient pas obèse par gloutonnerie, paresse ou manque de volonté, pour beaucoup il s'agit d'une maladie. Par ailleurs, de nombreuses personnes peuvent parfaitement faire le choix d'être heureuses comme elles sont et c'est très bien ainsi.

Mon histoire parle d'une personne gloutonne et paresseuse, il ne faut juste pas confondre. 

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