OS4-Les explorateurs-2

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Galères -  Ashley

Je pédale comme un dératé pour rejoindre la base. C'est toujours de pire en pire. Bon dieu quand cela va-t-il cesser ? Je n'en peux plus !

J'ai eu la mauvaise surprise d'avoir ma chaine volée ce matin. Il m'en restait une vieille rouillée, que je ne m'étais pas résolu à jeter au cas où. J'ai eu du nez car je n'ai plus qu'elle maintenant.

Normalement les vélos sont sécurisés dans la résidence. Ce qui veut dire que c'est un de mes colocataires qui m'a dépouillé, me condamnant à mort. Si j'avais perdu mon travail pour retard, c'est ce qui serait arrivé.

Si je ne peux même plus laisser mon vélo dans l'immeuble de vie que j'occupe, je n'y arriverais pas !

La colocation simple était censée être sure. Ce n'était pas le grand luxe mais juste un lit dans le dortoir, l'accès aux douches dans le quartier ouest, à plus d'une heure de la base.

Je suis en retard, j'ai soif et faim, chaud et les mains noires de cambouis. Pourtant je devrais me réjouir que la base m'ait appelé pour un travail supplémentaire.

Je travaille à la maintenance des câbles électriques de la station et quand ils sont débordés, ils m'appellent pour dépanner dans la préparation des vaisseaux d'exploration. De ce que j'ai compris des râleries de mon chef, ils ont eu deux retours de mission imprévus.

Je suis bon pour la navigation et les calculs, mais bêtement, sauter de trente mètres, je n'ai pas pu ! Manque de chance, c'était la première épreuve des sélections. Pourquoi ? Les explorateurs sont dans des navettes, aucune raison de sauter dans le vide.

En foirant dès la première matinée, outre le fait de m'être ridiculisé, j'ai perdu l'occasion de faire le métier de mes rêves. J'y ai gagné une vie minable, au milieu du danger, pour un salaire de misère.

Ma peur a rayé d'un trait tout mon avenir.

J'arrive en vue de l'altiport. Ce sont E1 et E2 qui sont revenus, les deux meilleures équipes. Dire que nous étions ensemble aux compétitions, qu'ils ont réussi, eux, haut la main ! Un pincement au cœur familier m'étreint la poitrine.

Ils ont eu le mérite de toujours revenir, ce qui n'est pas le cas de tous. Ainsi les explorateurs 3 à 13 ont disparu et ont été remplacés par des petits nouveaux, les explorateurs 52 à 65.

Connaissant mon chef, il va me mettre sur Explorer 1, il y a toujours beaucoup plus de travail avec eux. Ils ne sont pas soigneux de leur matériel. Une rumeur étrange raconte qu'ils n'ont jamais gardé un seul de leur navigateur. Il parait qu'ils ne les supportent pas et les tuent. Ça me parait exagéré comme ragot. C'est marrant alors que c'est le poste dont je rêvais moi.

Je passe la barrière d'accès en croisant les doigts pour être placé sur Explorateur 2, parce qu'à bord il y a mon héros, le colonel Noa Lallemand. Il écrit des récits de leurs aventures, des écrits documentés et des méthodologies appliqués de son travail qui sont des véritables bibles pour moi. Je vénère ce type, qui m'a permis de vivre un peu le métier de mes rêves dans ses livres.

Malheureusement je ne le croiserais jamais, quand les équipes de maintenance ont accès aux vaisseaux, les membres de l'équipage ont depuis longtemps quitté les lieux.

Je rejoins la zone de décontamination et montre mon pass. Mon chef l'officier Blue Palmer, est d'une humeur de dogue. Je masque mes soucis, il ne veut pas savoir, conscient d'avoir un temps de répit grâce à ce job providentiel. Mon torse se soulève sous l'effort que j'ai fourni pour arriver à l'heure. Il termine son café en bavardant avec une responsable du frêt sexy. Je n'ai pas intérêt à le déranger. En attendant qu'il me confie mon job, je lève les yeux pour admirer les anneaux permettant de franchir les espaces interstellaires. Dire que je ne les approcherais jamais et que je ne connaitrais pas la sensation de voler. Je baisse la tête, assailli par une épouvantable nostalgie. Quand ils auront trouvé une nouvelle planète habitable, Terra 2, les autorités déplaceront les habitants pour la repeupler. Ils ont construit des super tankers pour déplacer le maximum de population, sans savoir où aller pour l'instant.

Ce sera par priorité les familles avec enfants, les héros de guerre et les savants, ensuite ils emmèneront ceux qui ont des points de citoyenneté.

J'ai perdu tous les miens, après avoir été fiché pour prostitution.

Sur cette Terre mourante, il ne restera que les abandonnés. Quel avenir pour nous alors ?

Blue me tend mon enveloppe de mission et la paye.

─ Ah te voilà Ash, tu tombes bien ! Putain ils font chier cinq appareils à maintenir en un mois, ils ont bu ! et pourquoi pas dix ! Tu as un mois pour me descendre toutes les données de E1 et ensuite vérifier l'électricité du vaisseau.

Bingo E1 ! Pas de chance !

Je hoche la tête, résigné, c'est beaucoup de travail. Au moins j'aurai un abri, car je compte rester les nuits même si les employés ne sont pas censés y dormir.

J'ai gagné un mois et ensuite, il me faudra trouver une autre colocation ou choisir la mort.

À quoi bon tout cela ? Il me suffirait d'aller réclamer une dose : les suicides sont encouragés mais je reste un lâche. Je me déteste !

Les navettes sont protégées par un dôme anti-glace, nous autres, simple habitant, n'avons pas cette chance.

Dans les news diffusés directement dans le ciel, nous découvrons tous les jours des favelas détruites par des chutes de météorites ou par des typhons orageux avec des grêlons de la taille de brique. Les morts se comptent par centaine. Les survivants hagards remercient leur fragile chance, conscient que leur tour viendra bien trop vite. Seuls y échappent les installations sous bouclier dans les zones protégées.

Si seulement j'avais été foutu de sauter !

La plateforme de maintenance est déjà brulante, alors qu'il n'est que six heures du matin. Le goudron grésille et les odeurs de brulé encombrent les bronches. Il doit faire déjà près de quarante degrés et les températures vont encore monter. J'installe mon vélo dans l'atelier attenant à la navette.

Je connais bien Explorateur 1, j'ai déjà travaillé dessus, l'appareil en est à plus de cent missions ces gars sont indéboulonnables.

Normal ils sont arrivés les trois premiers aux sélections.

Une fois le SAS de sécurité ouvert, je laisse la passerelle d'accès béante. Je préfère l'air de la Terre même étouffant à l'air conditionné du vaisseau. Autant tout renouveler, ce sera mieux pour eux. Les explorateurs, eux, sont coincés avec un air recyclé de longs mois, sauf quand ils en sortent sur des planètes inconnues. J'en frissonne, rien que d'y penser. Ce sont ces gars qu'on envoie dans les destinations les plus dangereuses. Je ne les aime pas, cependant je dois reconnaitre qu'ils sont admirables.

Sur mon boitier de connexion, j'apprends que les colonels se plaignent d'une panne informatique et de défaillances dans les réponses.

Allons bon, qu'est-ce que cela peut bien être ?

Je branche l'ordinateur de bord sur le logiciel de transmission à l'ordinateur central. Je vais tout décharger, en affectant les prélèvements dans les différents laboratoires avant de m'occuper des remises à niveau. C'est ce petit plus qui fait que je suis choisi. Peu d'agents de maintenance peuvent analyser les données et les dispatcher.

L'ordinateur me semble bancal. A tous les coups, ça dure depuis un moment, mais personne n'a voulu s'embêter, sachant que nous sommes payés pour un nombre de jours de travail et si nous dépassons la durée prévue, c'est pour notre pomme.

Je soupire, parce que je vais y passer des heures. De toute façon comme les colonels ont signalés une panne, je suis bon pour la trouver. Sinon en cas de défaillance, je serais jugé coupable de crime de haute trahison.

Je comprends mieux pourquoi on m'a appelé, ce job est un véritable traquenard. Si je ne trouve pas la panne ce sera de ma faute.

Une photo des colonels est affichée sur le mur. Je ne les ai pas vu depuis le jour maudit des sélections, en même temps je n'ai rien vu ce jour-là.

Ils sont superbes tous les trois, le beau blond, le brun costaud et leur chef aux cheveux d'ébène, il parait qu'il est devenu naturellement le leader de toute la promotion.

Je n'ai jamais ce genre de client, cela fait longtemps que je n'ai pas ce que je veux dans mon lit. Je me prostitue pour arrondir les fins de mois. Je facture la pipe trente copec et la totale pour cent. Je suis bien obligé pour me nourrir, puisque mon salaire à la maintenance n'est que de mille cinq cents copec, soit le prix de mon loyer mensuel.

Avant les grands chambardements climatiques les choses étaient si différentes. Je n'ai jamais été un gars veinard, même dans l'époque où je suis né, je n'ai pas eu de chance.

J'allume le premier ordinateur et admire un moment le bordel, dans les fichiers tous mélangés. Ces gars n'ont aucun respect pour ceux qui passent après eux.

Je suis habitué à nettoyer leur merde, donc je reconnais rapidement les données de mesure atmosphérique que j'isole et adresse aux laboratoires d'analyse climatique. J'en ai pour une grosse demi-heure de traitement qui me laisse le temps de faire un état des lieux général de l'appareil.

Je manipule les écrans, les interrupteurs. L'électricité est fonctionnelle partout, l'ordinateur de bord opérationnel. La panne semble venir d'un des ordinateurs de mesure, il me semble de celui qui est bancal. Ce vaisseau est le plus ancien mais reste le meilleur.

Je m'occupe souvent d'explorateur 22 et des nouveaux de 38 à 45. Les vaisseaux sont catastrophiques, beaucoup moins bien conçu. Les fils ont été installés en dépit du bon sens. L'ingénieur en chef surdoué, qui travaillait sur les premières navettes a pris une dose. Un soir en rentrant du travail, il a trouvé sa maison saccagée et sa famille tué par un gang, alors que lui œuvrait pour la survie du monde. Il ne l'a pas supporté.

Les matériaux sont de moins bonnes qualités et ils rentrent de mission avec un nombre incalculable de panne. Puisque j'ai un mois ici je vais en profiter pour étudier le positionnement des fils et j'essaierais d'appliquer cela sur les 38 à 45, la prochaine fois qu'ils arriveront en réparation.

Avant les pauvres gens pouvaient vivre dans la rue sous les dômes, après des drames comme celui de l'ingénieur en chef, les zones sécurisées n'ont été autorisée qu'avec un pass biométrique.

Je ne peux me prostituer qu'en zone dangereuse, les abords des zones protégées sont réservés par les mafias. Aucune chance pour moi d'atteindre cette clientèle.

Parfois quand je songe à toutes les galères de ce monde, je me demande àquoi bon vivre. Et encore je suis avantagé en étant seul, sans aucune personneà charge, ce qui me libère du poids de m'inquiéter pour quelqu'un.

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