Chapitre 7 Tirila
Lorsque je me réveille, j'ai encore l'esprit un peu embrumé, comme si j'avais pris un quelconque stupéfiant. Je papillonne des yeux en levant ma main vers ma gorge qui me fait mal. Mes doigts rencontrent une texture lice et froide. J'essaie de prendre des respirations lente et régulière, mais chaque fois, ma peau se frotte au métal.
Je tente de le retirer, mais cela ne fait qu'encercler plus étroitement ma gorge. Je tousse et décide de laisser tomber pour le moment. Je me redresse en sentant une sensation de terre et d'herbe sous mes mains. J'observe autour de moi avec un froncement de sourcil.
Ren se redresse près de moi en se frottant les yeux, puis en secouant la tête pour mieux se réveiller. Je constate qu'il porte, lui aussi, un anneau d'or autour du cou.
Daysie, Chaylor et Synter sont étalés un peu plus loin avec, eux aussi, un rayon jaune qui encercle leur gorge.
– Où est-ce que nous sommes, demande Ren en regardant autour de nous après s'être mis sur pied.
Il me tend la main pour m'aider à me lever et je la prends avant qu'il ne se dirige vers les autres pour les réveiller.
Je lève les yeux vers le ciel, mais quelque chose de transparent, carrelée et légèrement brumeux m'empêche de bien le voir.
– Le roi Coden a dit que nous allions rapidement découvrir l'une des serres dont il parlait. J'imagine que c'est cela.
Je pointe au-dessus de ma tête et Ren lève les yeux dans cette direction.
Chaylor pousse un long bâillement en s'étirant comme si elle venait de passer une bonne nuit de sommeil. Synter se lève et époussette ses vêtements alors que Daysie reste coucher, les yeux fixés sur les rayons qui descendent caresser les arbres et les fleurs autours de nous.
– Nous sommes tombés dans un piège, commence Synter comme si nous ne le savions pas déjà. Il semblerait que le roi ait un esprit aussi léger et résistant que le liège.
– Je savais qu'il mijotait quelque chose, ai-je marmonné en me demandant où se trouve la sortie. Séparons-nous pour connaitre la superficie de cet endroit.
Ren hoche la tête alors que Daysie et Chaylor se lèvent enfin.
– Ren, va avec Chaylor vers le nord. Daysie, tu vas vers l'est et Synter vers l'ouest. J'irai vers le sud.
Chaylor fixe un moment Ren, qui a les bras croisés et une expression sérieuse.
– Est-ce que tu es fort, lui demande la princesse de Sajarez en levant un sourcil interrogateur.
– Les gens en général disent que je le suis, se contant-il de dire avec un haussement d'épaule.
– Crois-tu pouvoir te débrouiller seul, ai-je questionné Synter qui regarde déjà vers l'ouest.
– Bien que je sois né avec une santé fragile comme ma mère, je suis assez éduqué pour calculer les distances de la terre.
– Je... vois, ai-je répondu en regrettant presque de l'avoir interrogé avant de regarder autour de nous. Il faudrait que nous laissions quelque chose ici pour savoir où nous retrouver.
Je regarde vers la forêt au sud-ouest, puis décide d'enlever ma cape de fourrure, qui, je le constate après, est inutile dans cet endroit qui dégage une douce chaleur.
– Nous n'en aurons pas besoin ici, ai-je ajouté en faisant tomber le lourd manteau en peau d'animaux, puis fait de même avec les bottes à mes pieds.
Je tourne les talons vers le sud alors que les autres enlèvent les couches qui les protégeaient du froid, les empilant sur les miennes. L'herbe légèrement humide me rafraichie aussitôt les pieds.
– Il n'y a pas plus agréable que de sentir l'herbe sous ses pieds, ai-je entendu soupirer d'aise Chaylor alors que je m'éloigne, observant et tendant l'oreille pour écouter le moindre bruit.
Lorsque je sors de la petite clairière pour pénétrer dans la forêt, je détecte aussitôt le piaillement d'oiseaux et les bruits furtifs des petits animaux. Tout en marchant, je fais le compte de mes pas, gardant une partie de mon attention sur le paysage qui m'entoure.
J'ai l'impression que cet endroit est une simulation de ce que le roi Coden imaginait de Niloria, mais toute la végétation est trop calculée pour y ressembler. Le gazon est excessivement bien entretenu et, après une certaine distance, je remarque que les arbres, de type étrangement varier pour être normal, sont plantés comme s'il s'agissait uniquement d'un parterre à fleur. Ces dernières semblent tout aussi artificielles, exagérément calculer pour avoir poussé d'elles-mêmes.
Je m'accroupis et reste un instant aussi immobile que possible, fermant les yeux pour mieux écouter.
Il n'y a pas de vent.
Pas même une brise légère.
Et pourtant, dans cet espace restreint, il y a bel et bien des animaux... et s'ils vivent normalement, c'est qu'ils peuvent facilement trouver de l'eau et de la nourriture.
Lorsque j'ouvre les yeux, une famille de loup émerge d'entre les broussailles, un peu plus loin. La femelle presse les trois louveteaux en leur donnant des petites poussées alors que le mâle s'arrête pour me fixer d'un mauvais œil, sur ses gardes.
Je reste où je suis jusqu'à ce que loup parte à reculons, puis je me lève et recommence à compter.
Près de deux mille pas plus loin, j'arrive face à un haut mur de roche noir et gris. Je regarde vers la gauche, puis vers la droite, à la recherche d'une quelconque porte, mais je constate plutôt que l'endroit est beaucoup plus long que large. D'où je me trouve, je peux voir les extrémités, où il y a de haute poutre blanche.
La serre n'est pas aussi grande que je le pensais...
Je tends la main vers la pierre et constate avec surprise qu'une couche transparente et lice me sépare d'elle. Je lève les yeux et remarque que le mur de roche est en réalité une partie d'une très haute tour.
Lorsque je termine mes observations du terrain, je rebrousse chemin. Quand j'arrive à notre point de rencontre, il n'y a que Synter qui est revenu... et cela, s'il est vraiment parti.
– Tu as découvert quelque chose, l'ai-je questionné en essayant de retirer le collier de métal, en vain.
Plus j'essais de le retirer et plus j'ai l'impression qu'il se rétrécie et m'étrangle.
– Il y a plusieurs chemins pour mener au même but. Les surprises peuvent arriver à tout moment, à notre insu. Sur la route que j'ai suivie, il n'y a jamais rien d'inattendu. Notre véritable ennemi est celui qu'on n'a jamais entendu. Il se trouve que ce n'est pas lui, mais nous qui sommes perdus. Il n'attend qu'une chose, nous prendre au dépourvu.
– C'est toi qui me prends toujours par surprise, ai-je grommelé en m'assoyant au sol, ce qui lui tire un sourire fier, comme si sa manière étrange de parler avait pour seul et unique but de décourager les gens autour de lui.
Synter s'installe aussi au sol, non sans avoir étalé sa cape de fourrure sous lui. Je lève les yeux au ciel devant son geste. Je me demande s'il joue la comédie et fait semblant d'être raffiné ou que c'est sa véritable nature.
Daysie nous rejoint d'un pas lent et régulier, puis Ren et Chaylor arrivent. Le premier à une expression ennuyée alors que la princesse de Sajarez s'extasie comme si elle venait d'ouvrir les yeux sur le monde... ce qui, dans un certain cas, est vrai. Elle n'a sans aucun doute jamais quitté le château de Sajarez avant de venir à Yohen.
– Cet endroit est magnifique, s'exclame Chaylor en se laissant tomber sur la pile de cape comme si c'était un futon mal proportionné. Par là-bas, il y a une superbe vue sur une fosse pleine de pique luisant et tout blanc!
– Je crois que c'est ce qu'ils appellent des stalagmites, nous explique Ren alors que Chaylor me regarde avec des yeux brillants. Celles-ci, je le sais à leur couleur, sont faites d'eau dure. Autrement dit, il s'agit de glace.
– De mon côté, il y avait une large rivière synthétique où des animaux allaient s'abreuvoir, dit Daysie en s'installant près de moi.
Quelqu'un tape dans ses mains, mais je sais qu'il ne s'agit d'aucun de nous.
– Vous êtes vraiment brillant pour des animaux, déclare une voix mielleuse et féminine. Très brillant.
Sortant de la forêt du sud-ouest, une jeune femme à la chevelure blonde ondoyante, aux iris sombres et séducteur ainsi qu'à la démarche hautaine, nous observe avec un sourire enjôleur, presque provocateur. Je reconnais tout de suite qu'il s'agit de la sœur du roi. Ils dégagent tous les deux cette sensation de lumière ténébreuse. Une jolie attraction que l'on sait pourtant être néfaste.
– Princesse Rika, l'ai-je salué avec un hochement de tête.
Elle plisse les yeux en me regardant, son sourire rusé flottant toujours sur ses lèvres.
Alors... lorsque le roi faisait allusion au renard... il parlait d'elle.
– Tu dois être la fameuse princesse Tirila. Tu es loin de paraitre aussi féroce et intimidante que ce que nos soldats laissent sous-entendre.
J'eus un rictus dédaigneux, ce qui accentue son sourire hypocrite. C'est sûr qu'il y a une différence entre un combat physique et un combat mental. C'est parce qu'elle ne m'a pas vu combattre qu'elle me sous-estime.
– Sa majesté le roi Coden et vous êtes moins ravissant que ce que j'ai entendu, ai-je menti pour voir sa réaction. Tous les hommes de Dystio sont à vos pieds car ils n'ont pas encore découvert ce qu'est la vraie beauté.
Son sourire se fane et son regard semble viré au noir d'encre, ce que je n'aurais pas cru possible étant donné qu'ils sont déjà très sombres. La princesse Rika s'approche vivement vers nous alors que je me lève, prête à lui donner une raclée s'il le faut.
Un imperceptible sourire traverse ses lèvres luisantes et roses alors qu'elle tend la main vers moi, la paume et les doigts bien ouvert. Ren se précipite pour faire rempart entre nous, me faisant dos. Soudainement, son corps se cambre et il laisse échapper un grognement roque en tombant à genoux.
La princesse de Dystio l'observe se tordre de douleur avec un sourire faquin, les yeux brillant d'un plaisir sadique, la main toujours tendue vers lui.
Je regarde la scène en état de choc, ne comprenant pas ce qui lui arrive si brusquement.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top