Chapitre 4.4
(...)
Instinctivement, elle replongea dans la baignoire, manquant au passage de se ramasser une nouvelle fois comme une merde et évitant de justesse de se fracturer le coccyx pour de bon.
Mortifiée, elle sentit la colère l'envahir quand l'éclat de rire du jeune homme résonna dans toute la pièce.
— Que... qu'est-ce que tu fous là ?
Il ne lui répondit pas tout de suite. Il fallait déjà qu'il arrête de rire, le pauvre. Et ce n'était pas gagné.
— Ah Mac... répondit-il enfin les yeux pétillants de malice. Quelle grâce ! Quelle élégance naturelle tu mets dans tout ce que tu fais. Je suis... subjugué !
Plus sûr qu'une dizaine de poignards lancés avec l'intention de blesser, ses remarques moqueuses l'atteignirent en pleine poitrine.
Mais à quoi tu t'attendais, au juste ? Qu'il se transforme en gentleman après avoir couché avec toi ? Qu'il devienne... gentil et attentionné ?
Non, ce n'était pas Liam, elle le savait. Mais...
Mais quoi ? Il te déteste depuis qu'il a treize ans ! Sept ans de haine que tu as toi-même alimenté, ma pauvre fille ! Alors arrête de chialer !
— Casse-toi...
Elle avait murmuré, mais l'amertume de sa voix la surprit tout autant que lui et elle eut au moins la satisfaction de voir toutes traces d'amusement quitter le visage du jeune homme.
— Liha...
— Tu m'as entendue, Ruadhan, le coupa-t-elle d'une voix plus ferme. Dégage !
Elle était vraiment en colère contre lui. Cet abruti avait réussi à gâcher la seule vraie bonne nouvelle de sa journée. Cela faisait des jours qu'elle ne s'était pas sentie aussi heureuse, bordel ! Pourquoi fallait-il toujours qu'il fracasse tout ?
— Fous le camp ! cria-t-elle de plus en plus énervée. Tu m'entends ? Bouge ! Dégage ! Sors d'ici ou...
— Ou quoi ? la coupa-t-il d'une voix dure.
Elle avait bien conscience de virer complètement hystérique, mais elle s'en fichait. Liam l'avait blessée dans son amour-propre. Encore. Sauf que cette fois-ci, elle avait beaucoup plus de mal à l'accepter.
— Ou j'enlève un ou deux de ces fichus bracelets et je t'envoie valdinguer moi-même hors de cette pièce !
— Essaye...
Non mais il est sérieux, là ? Il venait vraiment de la provoquer ? Eh bien, il allait voir de quel bois elle se chauffait !
Rageusement, elle tenta de retirer l'un des bracelets qui lui encerclait le poignet. Elle n'en n'eut pas le temps. Sans qu'elle l'ait vu bouger, Liam était déjà sur elle et la vision qui la frappa dès qu'il la toucha l'empêcha de continuer.
Bien que de nature complètement différente de la précédente, cette dernière n'en était pas moins explicite et ce qu'elle vit la secoua bien plus que n'importe laquelle des visions qu'elle avait eues jusqu'à présent. Elle les montrait, Liam et elle, en train de s'affronter sur les flancs d'une montagne enneigée, le vent hurlant dans leurs oreilles. Tous les deux se faisaient face, une épée à la main. Le visage de Liam reflétait la douleur, la peine et la colère, mais le sien n'était qu'un masque de haine. Elle pleurait de rage, il la suppliait. Elle hurlait, il criait. Elle se ruait sur lui pour l'attaquer, il ne faisait qu'esquiver...
Quand elle reprit pied dans la réalité, toute la colère qu'elle avait ressentie envers le jeune homme était retombée.
Liam était toujours près d'elle, accroupi devant la baignoire dans laquelle elle s'était recroquevillée, ses mains enserrant ses bras comme deux petits étaux.
— Lâche-moi... murmura-t-elle ébranlée par ce qu'elle venait de voir.
Loin de faire ce qu'elle lui demandait, il la hissa hors de la baignoire et la plaqua contre son torse.
Alors, pour être honnête, elle était encore sous le choc de la vision. Mais la conscience aigüe de chaque parcelle de son corps nu entrant en contact avec le sien la tira miraculeusement de sa torpeur.
— Je... que... qu'est-ce que tu fais ? parvint-elle néanmoins à balbutier en tentant de le repousser.
Oui, bon... Elle n'y allait pas vraiment franchement.
Elle était toujours un peu en colère contre lui – il l'avait quand même sacrément blessée en se comportant comme un abruti – mais le choc de la vision écrasait largement son sentiment d'amertume. Et puis – devait-elle le répéter ? – elle avait tendance à ne plus réussir à réfléchir correctement quand il la touchait.
— Je ne te laisserai jamais en arriver à me haïr à ce point, Mac... Je te le promets.
Sa voix n'était qu'un murmure. Lui aussi semblait plutôt ébranlé par cette vision. Son souffle chaud caressait le haut de son crâne. Il la tenait toujours serrée contre lui, mais elle n'avait pas osé lever le visage vers le sien et croiser son regard.
— Ça, Ruadhan, c'est bien la dernière chose que tu peux me promettre... rétorqua-t-elle d'une voix plus amère qu'elle ne l'aurait voulu en continuant de fixer ses doigts posés sur son torse.
Sous ses paumes, elle sentit les muscles du jeune homme se contracter et il resserra l'emprise de ses mains sur ses bras.
— Liha... gémit-il d'une voix désolée.
Ah non ! Non, non, non !
Elle ne voulait absolument pas de sa pitié ! C'était encore plus humiliant que de subir ses sarcasmes et ses remarques pourries !
— T'es qu'un pauvre con, Ruadhan ! siffla-t-elle les dents serrées en tentant une nouvelle fois de le repousser, sans lever les yeux.
— Je sais.
Sa voix était dure. Aussi dure que tous les muscles de son corps qui s'étaient contractés sous l'insulte et qu'elle sentait sous ses mains, sous sa poitrine, sous son ventre et ses jambes nues.
— Regarde-moi.
— Non.
Les mains de Liam se crispèrent davantage, avant de lâcher prise et de glisser lentement dans son dos, la faisant frissonner malgré elle. L'une de ses mains se cala dans le creux de ses reins, l'autre remonta le long de sa hanche, frôla sa poitrine, caressa son épaule et sa clavicule et s'immobilisa dans sa nuque.
— Regarde-moi, murmura-t-il une nouvelle fois d'une voix rauque.
Tout son corps était en feu. Elle était couverte de frissons de la pointe des orteils jusqu'à la racine des cheveux, mais elle tint bon. Il était hors de question qu'elle cède devant lui, qu'elle lui donne la satisfaction de voir le pouvoir qu'il avait sur elle. Le pouvoir de la faire passer des rires aux larmes. De la joie à la peine. De l'amour à la haine. Le pouvoir de la sauver, de la rendre plus heureuse qu'elle ne l'avait jamais été. Celui de la blesser aussi, de lui faire mal plus que n'importe qui d'autre sur cette terre.
Liam la rendait folle. Dans tous les sens du terme. Folle de joie, folle d'amour, folle de plaisir. Folle de rage, folle de haine, folle de douleur...
C'était beaucoup trop de pouvoir pour un seul homme et si elle le regardait – dans l'état émotionnel précaire dans lequel elle se trouvait – elle était bien capable de tout lui balancer.
Oh par les Quatre ! Elle était à deux doigts de lui jeter au visage qu'elle l'aimait, qu'elle l'aimait déjà quand elle les avait liés, qu'elle l'avait toujours aimé et qu'elle l'aimait encore, même quand il se comportait comme le parfait salaud qu'il avait toujours été.
Pathétique, hein ? Ouais, ouais... Elle savait.
Mais elle en avait parfois marre de lutter. Si elle lui avouait tout, il gagnait. Il triompherait pendant quoi ? Une semaine ? Un mois ? Deux, tout au plus ? Puis il finirait par se lasser, par se sentir gêné pour cette petite chose fragile qu'il était devenu bien trop facile d'humilier. Alors, il lui ficherait la paix et elle pourrait tranquillement recoller les morceaux de son cœur brisé.
Parfait. Le plan idéal.
Laisse tomber, Lihanna. Cette petite guéguerre avec Liam te bouffe bien trop d'énergie. Concentre-toi sur les choses vraiment importantes ! Mets de côté ta fierté, ton amour-propre et ton stupide esprit de compétition et dis-lui ! Lève les yeux et dis-lui !
— Regarde-moi !
Liam commençait à s'énerver. Il devait en avoir marre de se répéter.
Bien fait...
— Non, répondit-elle enfin.
Bon, apparemment, elle n'était pas encore prête pour les aveux...
— Une dernière fois, Ruadhan, lâche-moi. Ou je te donne un coup de genou bien placé.
Le jeune homme poussa un long soupir irrité, mais il la lâcha.
— Pourquoi faut-il toujours que tu te comportes comme une sale garce hargneuse et têtue ? souffla-t-il agacé.
— Parce que tu te comportes toujours comme un sale enfoiré, rétorqua-t-elle en le repoussant.
Elle y avait mis tant de force que Liam ne parvint pas à garder l'équilibre. Il dérapa sur le sol mouillé et tomba lourdement sur les fesses en poussant un cri de surprise, de rage et de douleur mêlées.
Libérée de la proximité troublante du corps du jeune homme, Lihanna récupéra immédiatement toutes ses facultés. Y compris celle consistant à être capable de réfléchir sans être obnubilée par l'envie furieuse qu'elle avait de tout envoyer valser pour coucher avec lui.
Oui, oui... Encore une fois, tout cela était vraiment... pathétique.
Elle profita du bref moment de confusion dans lequel Liam se trouvait pour s'éloigner de lui, attraper une serviette dans laquelle elle se drapa et filer comme une fusée vers la porte de la salle de bain. Mais le jeune homme fut plus rapide. Il se releva lestement et se rua sur elle, la rattrapant juste avant qu'elle ne lui claque la porte au nez. Il la saisit par le bras, la retourna pour qu'elle lui fasse face et la plaqua contre le mur, faisant barrière de son corps.
Bon... Au moins, cette fois, elle n'était plus entièrement nue contre lui.
Mouais... Ce n'était pas ce petit bout de serviette blanche et verte qui allait l'empêcher de sentir la chaleur et la force du corps du jeune homme pressé contre le sien.
Elle chercha une nouvelle fois à le repousser sans le regarder – hé, hé... elle devenait forte à ce jeu-là – mais il lui immobilisa les poignets et les plaqua à leur tour contre le mur, au-dessus de sa tête.
Cette fois-ci, elle leva le visage vers le sien pour le foudroyer du regard.
Ses yeux gris aussi lançaient des éclairs et ils s'affrontèrent ainsi pendant de longues minutes, le souffle court, la respiration haletante. Liam avait la mâchoire crispée et elle n'arrêtait pas de se tortiller pour essayer de se dégager.
Mais arrête de bouger, ma pauvre fille ! Non seulement t'es en train de t'exciter toute seule, mais en plus, ton pauvre petit bout de tissu ne résistera pas longtemps à ta danse du ventre...
Devant le bon sens de sa propre constatation, elle cessa brusquement de se débattre et Liam se détendit légèrement.
— Lâche-m...
— J'avais envie de toi.
— Lâ...
Que...
Son cœur manqua un battement et sa respiration se bloqua.
Mais... bordel... Qu'est-ce qu'il venait de dire ?
(...)
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