Chapitre six.

 Cela doit faire quatre jours que ma nouvelle relation avec Harry a débuté. Et chaque matin, j'ai l'impression de découvrir un autre moi, un modèle plus évolué et compréhensif. Je ne dis pas que je suis le parfait ami, loin de là, mais j'ai l'impression que m'être ouvert à quelqu'un de différent de moi m'a rendue... Mieux. Et puis, Harry est si simple d'esprit, je peux lui parler de n'importe quoi il trouvera toujours quelque chose à dire. Il est tellement cultivé, c'est impressionnant. Je l'apprécie énormément, mais de son côté, je ne sais pas. Il ne s'exprime quasiment jamais sur ses sentiments. Il peut me parler de Shakespeare pendant des heures sans jamais ne donner aucun détail sur ses émotions. Ou très peu.
 
«  Bon, à demain Harry. »
«  Oui, passe une bonne soirée Louis. »
«  Toi aussi. Et révise pas troèp. »
«  C'est comme si je te demandais de ne pas fumer trop alors que je sais que tu vas probablement consommer trois cigarettes dans la soirée. »
 
 Je ris et secoue la tête avant de rentrer chez moi. Au fond, il n'a pas tellement tort. Je monte directement dans ma chambre, laisse mon sac tomber au sol et m'allonge sur mon lit tout en prenant une manette de jeu-vidéos. Mon regard tombe sur celle à côté de la mienne, bleue, celle de Zayn. Je me rappelle encore quand on a dû économiser pour l'acheter, à l'époque où il n'y en avait qu'une, parce qu'on n'arrêtait pas de se disputer pour avoir la mienne. Ça remonte à quelques mois et pourtant j'ai l'impression que c'était hier. Des petits souvenirs heureux. Et c'est en y repensant que je me dis que je ne peux pas gâcher une amitié comme la nôtre. C'est vrai, on est si fusionnels lui et moi. On partage pratiquement tout, il a toujours été mon confident, celui à qui je disais mes moindres secrets le soir sous les couvertures ou le matin sur la route de l'école, et ce n'est pas la venue de Harry qui va changer ça. Ou n'importe qui d'autre d'ailleurs. Je soupire et saisis mon portable pour le rechercher. Toutes les fois où on s'est disputés, c'est toujours lui qui faisait le premier pas, parce que j'ai un sale caractère et que je ne supporte pas de reconnaître mes erreurs, mais ce soir, j'ai décidé qu'il en serait autrement.
 
«  Allô ? »
«  Zayn ? C'est Lou. »
«  Mec, je crois que depuis le temps qu'on est amis j'ai eu le temps de t'enregistrer dans mes contacts non ? Et par la même occasion mémoriser ton numéro. »
«  Oui, c'est vrai que c'est bête. »
 
 Me sentant ridicule, je laisse échapper un soupir et m'assois en tailleur sur mon lit. Je ne sais pas par quoi commencer. Je n'ai jamais été doué pour présenter mes excuses, je crois même ne l'ai fait que très rarement. On me le reproche assez souvent d'ailleurs, de ne pas faire d'efforts, de me contenter de laisser les gens se sentir coupables, et je le sais. Je le reconnais. Mais je ne parviens à changer, et ce comportement risque de me faire perdre des amis. Et pire, mon frère.
 
«  Je suis désolé. »
«  Je suis désolé. »
 
 Nos deux phrases sont prononcées en même temps. Exactement. Après une longue minute de silence. Je peux entendre Zayn rire à travers le combiné et rien que ce son me réchauffe le coeur. Je souris à mon tour mais c'est à moi de m'excuser. Je n'aurais pas dû le laisser de côté, l'ignorer pendant des jours simplement parce qu'il s'est comporté en gamin. Puisque... J'ai fait pareil.
 
«  Je m'excuse de ne pas t'avoir envoyé de message après la fête, juste pour te dire que j'allais bien au moins, mais j'étais énervé contre toi et tu me connais quand je suis comme ça, je... »
«  Ne te justifie pas Lou, je suis aussi fautif que toi. Voir plus. Tu as le droit d'avoir les amis que tu veux, là n'est pas le problème. En réalité.... J'avais simplement peur que tu me remplaces avec le premier venu. »
«  Premièrement, tu es mon meilleur ami Zayn, jamais je ne pourrai céder ta place à quelqu'un d'autre, je n'y jamais songé une seule seconde. Tu es le premier, tu passes avant tout le monde. Tu le sais. Et deuxièmement, Harry est un garçon vraiment sympathique. Il n'est pas hautain, et imbu de lui-même comme je le croyais, seulement... Différent. Il faut apprendre à le connaître, c'est tout. »
«  Désolé, je n'aurai pas dû m'emporter comme ça sur toi l'autre jour. Et Styles, je... Je ne le connais pas, alors je ne peux pas me permettre de le juger sur son apparence. » 
«  Arrête de t'excuser. Oui, j'aurai dû raisonner comme ça dès le début, ça lui aurait évité des humiliations en plus. »
«  Tu sais, je pense que si vous êtes amis c'est qu'il t'as pardonné. A moins que ce gars soit masochiste. T'imagine en fait, c'est un psychopathe qui torture sa mère et a tué son père dans le passé ou un truc comme ça ! »
«  Et il cache un corps découpé dans son sac aussi ? Je ris. Un conseil Malik, évite les séries policières le soir avant de dormir. Ce n'est décidément pas bon pour toi. »
«  Je crois que je vais devenir flic. »
«  Je crois que je vais changer de pays avant que tu n'ait ton diplôme. »
 
 Et enfin nous rions tous les deux comme avant. On a jamais eu forcément besoin de grands discours et de beaux mots pour se comprendre lui et moi. On se comprend parfois sans même avoir besoin de se parler. C'est presque... De la télépathie en fait. Il lit en moi et je lis en lui, mais ça reste toujours approximatif bien sûr.
 
«  Tu viens chez moi ce soir ? »
«  Non désolé, je dois garder ma sœur, mes parents sont partis dîner chez des collègues et comme d'habitude quand ils font un truc à deux ils me refourguent la petite. C'est vraiment chiant. Mais tu peux venir si tu veux ? »
«  Je vais devoir te dire non aussi, je dois garder la maison ce soir. Ma mère rentre tard du travail et si je ne suis pas là quand elle revient je vais me faire passer un savon. En plus, je dois ranger la vaisselle et laver ma chambre. »
«  Bonne chance mon gars. »
«  Oh oui, j'en aurai besoin. Pourquoi tu ne viendrais pas Vendredi soir chez moi, disons pour dormir tout le week-end. »
«  Je vois avec mes parents et je te donne la réponse demain. »
«  D'accord. Je souris et me lève de mon litBon, je te laisse, j'ai des corvées à faire. »
«  A demain Lou. »
«  Bonne soirée Zayn. »
 
 Je raccroche mon portable en souriant, soulagé. Ce n'est pas notre première dispute, mais je pense que n'importe quelle amitié doit passer par des moments durs, de distance, pour prouver qu'elle est solide face à un obstacle. Peu importe sa taille. Et je sens, que Zayn et moi on arrivera toujours à escalader ce mur immense qui nous sépare pour se retrouver en haut et tombé tous les deux du même côté. Je pose ma console au sol et descends en cuisine laver quelques plats ainsi que les détritus que j'ai laissé traîner sur la table basse du salon. J'enfile ma veste à capuche, puisque manifestement il a l'air de tomber une averse depuis une bonne heure, et sors jeter les poubelles. Je la glisse dans la benne en métal et regarde par la même occasion s'il n'y aurait pas du courrier dans la boîte aux lettres. Factures, carte postale et magazine mensuel de mode pour ma mère. Je soupire et m'apprête à repartir quand j'entends éternuer derrière moi. Je sursaute et tourne la tête vers la maison voisine. Harry se tient assit sur le perron, abrité par le petit morceau de toit devant sa porte, un livre à la main. Je m'approche de lui en fronçant les sourcils.
 
«  Eh... Tu fais quoi là sous la pluie ? Tu prends une douche ? »
 
 Il a l'air autant surprit que moi et sursaute avant de relever les yeux en fermant son ouvrage rapidement qu'il range dans son sac trempé. Il passe une main sous son nez rouge et secoue la tête. On dirait un enfant de six ans, et entendre sa voix légèrement malade s'élever dans mes oreilles me confirme encore plus la chose.
 
«  Ma mère n'est pas rentré, il n'y a personne chez moi, et je n'ai pas les clés. »
«  Tu n'as pas un double sur toi ? »
«  Elle n'a pas encore eu le temps de passer à la boutique pour les faire. » 
«  Et elle rentre à quelle heure ? »
«  Je ne sais pas. Quand je suis parti ce matin elle dormait encore, normalement elle devrait être rentrée depuis quatorze heures. »
«  Regarde sur ton portable des fois où elle t'aurait prévenu ou... »
«  Il est à l'intérieur. Je l'ai oublié. »
«  Tu ne vas pas rester sous la pluie toute la soirée quand même. Viens, rentre te réchauffer chez moi et t'en profiteras pour lui téléphoner. »
«  Oh mais non, je ne veux pas déranger, je.. »
«  Harry... Je soupire. Ma mère ne rentre que tard dans la soirée et là je commence à devenir aussi détrempé qu'une éponge, alors suis moi. Ce n'est pas une proposition mais une obligation. »
«  Je... D'accord. »
 
 Il ferme son sac qu'il dépose sur son épaule et se lève. Ses cheveux sont encore plus foncés et ébouriffés à cause de la pluie. Sans parler de ses lunettes qui sont couvertes de pluies. Nous marchons rapidement sous l'averse, et je le laisse passer pour se mettre rapidement à l'abri. La chaleur nous fait du bien, même si dehors il ne fait pas tellement froid. C'est simplement la pluie. J'enlève ma veste que je pose sur une chaise et invite Harry à faire de même puisqu'il a l'air trempé jusqu'aux os. Comme la fois où il a failli se noyer à la fête.
 
«  Tu dois être gelé non ? Tu es dehors depuis qu'on est rentrés ? »
«  J'ai un peu froid, oui. Bah je n'ai pas les clés alors j'ai patienté. »
«  Harry Styles tu es complètement dingue. Je soupirai et posa sa veste détrempée près du chauffage. Va prendre une douche, je te prépare de quoi te réchauffer en attendant. »
«  Merci Louis. Vraiment. »
«  Ne me remercie pas pour une chose aussi normale. Tu es plutôt thé ou café ? »
«  Euh... Café. Noir. »
«  D'accord, je dois avoir ça. »
«  Et... Tu aurais... Des affaires sèches à me prêter ? »
«  Oui, bien sûr. Je t'apporte ça dans deux secondes. »
«  Merci encore. »
 
 Je soupire face à son énième remerciement tandis qu'il monte les marches pour accéder à l'étage où se trouve la salle de bain. Je vais rapidement chercher un paquet de café dans la cuisine que je fais passer avant de monter à mon tour dans ma chambre. Je fouille à la recherche de vêtements assez grands pour moi, afin que mon invité ne se sente pas à l'étroit dedans. Une fois chose faite, je me dirige vers la salle de bain, je toque à la porte fermé et après l'accord de la voix grave derrière celle-ci je l'ouvre et dépose les vêtements sur une chaise.
 
«  J'espère qu'ils seront à ta taille, je ne pense pas avoir plus grands. »
«  Ça ira parfaitement, merci. »
«  Tu pourras faire sécher tes vêtements sur le chauffage juste derrière toi, et si jamais ils sont encore humides d'ici ce soir, tu pourras me rendre les miens demain. Il n'y a aucun problème. »
«  D'accord, mais tu sais au pire j'habite juste à côté. »
«  Il suffit d'un coup de vent pour tomber malade. »
«  Pas faux. »
«  Bon... Je te laisse te laver. A tout de suite. »
 
 Il hoche la tête et je quitte la pièce en fermant la porte derrière moi. Une fois dans la cuisine, je commence à ranger la vaisselle sale d'hier soir qui traîne dans l'évier puis je nettoie la table et le plan de travail. Quand ma mère rentre tard du travail, c'est toujours à moi de m'occuper des tâches ménagères et ça dépend des semaines. De l'une à l'autre elle peut changer complètement d'horaires. Parfois, je suis déjà endormi quand elle rentre ou alors elle part tôt le matin et je somnole encore. Du coup, elle et moi, nous ne parlons pas vraiment. On ne passe pas beaucoup de temps ensemble, on n'échange rien. Pourtant, j'aimerai lui parler de mon père, du fait qu'elle se laisse trop marcher sur les pieds mais souvent elle abrège la conversation en disant qu'elle est fatiguée ou alors ça se finit en dispute. Je déteste ces moments-là, et on ne peut pas vraiment compenser avec des instants de complicité puisqu'on ne partage pratiquement rien. Si ce n'est cette maison.

 J'ai vraiment hâte d'avoir mon propre appartement, même si je dois le partager avec un colocataire, ce sera surement moins pire qu'avec ma mère. Peut-être que je pourrai emménager avec Zayn, nous trouver un endroit pas très chère, mais lui est beaucoup trop attaché à sa famille même s'il passe son temps à la critiquer. Ses parents le voient encore comme un petit garçon, alors que les miens me prennent la tête parce que je ne suis passez responsable et mûr pour mon âge, et ses sœurs l'affectionne plus que tout tandis que moi... Je suis fils unique. De toutes manières, je n'aurai jamais eu la force de m'occuper d'une personne en plus, déjà que prendre soin de moi-même c'est compliqué... Mon père n'est jamais là pour me donner un exemple masculin et des repères et ma mère ne s'inquiète même pas de savoir comment se déroule ma vie. Dès que je commence un peu à lui parler de moi, de mon lycée, de mes amis, elle fait la sourde oreille et prétexte qu'elle est occupée. Il n'y a qu'elle et son image qui compte. Son image de femme intelligente, soignée, raffinée et ayant un emploi très bien payé et placé. Elle ne m'a jamais présenté à un seul de ses amis ou collègue et je commence à comprendre qu'elle a honte de moi. De mon apparence, de mon état d'esprit. De tout ce qui me constitue.
 
«  Louis.... Ça fait cinq minutes que tu laves la même assiette, je crois qu'elle est propre non ? »
 
 J'étais tellement absorbé dans mes pensées que je n'ai même pas remarqué la présence de Harry dans la cuisine, il se tient près de la table et me regarde avec une once d'interrogation dans les yeux. Je secoue la tête et pose l'assiette maintenant étincelante dans l'égouttoir. Il doit me prendre pour un idiot. Je prends une tasse dans un des tiroirs afin de lui servir son café noir qu'il m'a demandé. Je lui pose sur la table, il me remercie encore une fois et je lui adresse un fin sourire avant de me préparer un thé.
 
«  C'est une drôle de situation hm ? »
«  Quoi donc ? M'interroge Harry, les sourcils froncés»
«  La dernière fois que tu es venu chez moi je t'ai sauvé de la noyade et là c'est encore à cause de l'eau que tu te retrouves ici. »
«  Ne te vexe pas mais je n'ai pas vraiment envie de me rappeler de ça. »
«  Je comprends... Greg et James te parlent encore ? »
«  Non, ils m'ignorent complètement ou me lance des petites moqueries par moment. Comme avant, je dirais. Et c'est presque mieux.  »
«  Tu devrais te défendre Harry. »
«  Je préfère ne rien dire, je n'ai pas tellement envie de me faire plonger la tête dans la cuvette des toilettes ou des trucs comme ça. »
«  Mais ce n'est pas juste, aucun être humain n'a le droit de se faire traiter de la sorte que ce soit pour sa couleur de peau, ses styles vestimentaires, son orientation sexuelle ou je ne sais quelle autre détail. On est censés être tous égaux non ? Et pourtant il y a encore des imbéciles qui s'amusent à rabaisser les plus faibles plus bas que terre. Ce n'est pas en ignorant les insultes qu'on les contourne, au contraire. Tu les enterre en toi, mais tu sais, elles finiront par ressortir et elles te détruiront. Ne les laisse pas te ronger. Rebelle toi, fais-toi entendre. »
«  Louis, je ne suis pas comme ça. Peut-être que toi si, mais je ne suis pas aussi fort. Je... Je préfère que la situation reste ainsi plutôt que l'aggraver. C'est comme si... Comme si rien ne s'était passé, ni la fête, ni ma presque noyade, et... Ça me convient. Je n'ai pas envie de devenir plus encore la risée de tout le lycée. Dans un an, je ne serai plus ici, tous ces gens je les aurais oubliés, ils seront derrière moi, et j'avancerai en laissant tous les mauvais souvenirs dans cette ville, entre ces murs. Ce n'est pas un problème, je t'assure. »
«  Alors tu comptes te laisser marcher sur les pieds pendant encore des mois ? »
«  C'est le meilleur moyen, je... Je ne veux plus en discuter. Je dois appeler ma mère. »
 
 Après avoir hésité, je soupire et lui indique le téléphone dans le salon. Il me remercie, le prend et s'assoit dans le canapé. Je reste dans la cuisine pour lui permettre d'avoir un peu d'imité, même si d'ici je peux entendre quelques mots ou sa voix. De mon côté, je n'arrive pas à encaisse le fait qu'il veuille se laisser rabaisser de la sorte. Même s'il n'est pas fort, il peut au moins se défendre, pas forcément avec les poings mais avec les mots. Je sais qu'il en a la capacité mais il a juste... Peur. Peur d'affronter l'ennemi. Malheureusement, ce n'est pas dans les livres qu'on apprend à se battre, c'est dans la réalité. Et il ne l'a pas encore compris, ou du moins il ne veut pas essayer. Il préfère la simplicité et se cacher derrière ses livres. Mais au fond, je ne lui reproche pas parce que le monde est vraiment cruel parfois. On en a eu la preuve il y a peu de temps lorsqu'il a failli mourir noyé.

 Une fois que je n'entends plus aucun bruit au salon, je quitte la cuisine pour le rejoindre. Il pose le téléphone sur la table basse et lève les yeux vers moi. Quand bien même ils sont cachés derrière ses grosses lunettes, mais ça lui donne un côté enfantin qu'on ne peut que trouver attachant.
 
«  Alors ? »
«  Elle n'avait pas pu me prévenir, son patron lui a demandé de faire des heures supplémentaires parce qu'il n'avait personne pour remplacer une de ces collègues malades. Mais vu qu'elle est payée le double elle a accepté, elle ne l'a su que ce matin. Et j'étais en cours. Elle rentre vers vingt heures. »
«  Reste ici en attendant. »
«  Tu es certain que ça ne te dérange pas ? »
«  Ma mère travail tard, elle ne rentrera pas avant au moins vingt-trois heures. Puis elle t'adore, alors elle sera ravie de te voir à la maison. »
 
 Finalement, Harry acquiesce après mes nombreuses tentatives de supplications. Je suis content d'avoir un peu de compagnie. Il faut dire que généralement, le Mercredi Zayn reste s'occuper de sa sœur étant donné que ses deux parents travaillent et sortent souvent après le soir. Du coup, je me retrouve seul tout le long de l'après-midi. Je dois avouer que d'un côté ça a ses avantages parce que je n'ai pas d'ordres à exécuter ou bien d'heures précises auxquelles je dois impérativement manger. Mais on s'amuse mieux à deux. Enfin du moins c'est ce que je croyais jusqu'à ce je vois le bouclé ouvrir un livre qu'il vient de sortir de son sac. Je souris légèrement et secoue la tête avant de lui proposer de plutôt regarder un film ou jouer à un jeu vidéo. Il me précise qu'il n'est pas tellement doué pour les jeux à part les échecs ou les dames. Bizarrement, je m'en doutais.
 
«  Je te propose un truc, on va jouer à un jeu vidéo très simple, parce que je n'ai pas d'échec chez moi, et celui qui perd la partie doit répondre à une question de l'autre. Et ainsi de suite. »
«  C'est bizarre comme jeu.. »
«  Tu as qu'à voir ça comme une manière de mieux apprendre à se connaître. Mais si jamais je pose des questions trop personnelles ou indiscrètes tu me le dis d'accord ? »
 
 Il hoche la tête. Je lui fais alors signe de me suivre dans ma chambre puisque ma console est branchée à la télévision là haut. Je file directement lancé le jeu pendant que lui s'installe sur le lit. J'allume ensuite une petite lampe sur ma table de chevet pour avoir un minimum de lumière. Après cela, je ramène deux manettes avec moi sur le lit, je m'allonge sur le ventre afin d'être face à l'écran et en tend une à Harry. Il hésite un instant avant de la prendre. Je lui explique ensuite les bases du jeu, ce n'est simplement qu'un duel de course de voiture. Le plus rapide gagne. Il n'y a pas de triches ou de violence. Du moins pas beaucoup. Je trouve cela équitable. Après lui avoir montré les astuces et un exemple de course, nous démarrons. Le jeu commence enfin. Je pensais que ce serait un bon moyen d'à la fois se divertir et se parler. Le résultat est celui que j'espérais. Harry perd la première course, je peux l'entendre râler. Je souris et met la partie sur pause quand nos scores s'affichent.
 
«  C'est de la triche, je ne sais pas jouer à ce genre de jeu moi. »
«  Si on avait joué aux échecs j'aurai pu dire pareil. Ne sois pas un mauvais perdant, tu es excellent en tout, tu peux bien me laisser cette victoire-là. »
«  Bon... Il soupira et je ris une fois de plus. Pose ta question. »
«  Hm. Tu n'as pas des lentilles ? »
«  Dans mon sac, si, mais... Pourquoi cette question ? »
«  Non mais c'est juste que... Je te trouve mieux sans. »
«  Ah ? Il rougit. »
«  Ça te dérange de les mettre ? Pour ce soir au moins. »
«  C'est une question normalement. Dit-il en souriant doucement»
«  S'il te plait Harry, ça me ferait plaisir. Vraiment. »
 
 Il soupire faiblement puis se lève avant d'aller fouiller dans son sac de cours, il me demande où se trouve la salle de bain, je lui indique la pièce à côté, il s'y réfugie pendant quelques minutes avant de revenir. Ses lunettes entre les mains qu'il va ranger dans leur boite avant de venir s'assoir à côté de moi. Timide. Assez mal à l'aise. Son visage paraît beaucoup plus fin. Je détourne le regard et active les manettes lorsqu'il me rejoint dans le lit. Nous commençons à jouer. Il perd encore une fois.
 
«  Deuxième question. T'énerve pas ou te vexe pas hein, mais... Pourquoi tu t'habilles comme ça ? »
«  Je... Je ne sais pas. »
«  Tu n'as jamais pensé à changer de style ? »
«  Je ne sais pas, non. Je suppose, je n'ai jamais... Osé. »
«  Tu penses que tu aimerais devenir quelqu'un d'autre en apparence ? »
«  Louis, ça fait plus d'une question-là... »
«   Tu pourras m'en poser autant que tu veux quand tu gagneras. »
«  Oui, j'aimerai changer. Il souffle et baisse la tête. Les moqueries m'agacent mais... Je ne sais pas ce qui me conviendrait. »
«  Tu veux de l'aide ? »
«  Vraiment ? Il se retourne vers moi, étonné. »
«  Oui, j'aime aider les gens pour choisir leurs vêtements. »
«  C'est vraiment gentil mais... Je ne veux pas avoir le même style que toi, enfin il est bien c'est pas ça, mais c'est trop... Original pour moi, tu vois ? »
«  Je comprends. T'inquiète pas je n'allais pas te transformer en gothique non plus. Juste un petit relooking. Déjà, ne plaque plus tes cheveux en arrière, les boucles te vont nettement mieux. »
«  Merci.. »
 
 Il rougit encore. Je m'allonge sur mon ventre afin de mieux voir l'écran de télé, lui reste en tailleur. Je pense que les slims lui iraient bien, c'est un garçon fin, et ça mettrait son corps en valeur, puis les chemises lui vont bien aussi, mais autant mettre tout de suite à la poubelle les pulls à grand-père et les souliers d'écoliers. Les converses, ou des boots lui conviendraient parfaitement. Après, il faut que ça lui plaise aussi. Je ne veux pas le forcer à porter des vêtements qui ne lui plaisent pas. Je sais qu'il n'a pas une bonne estime de lui physiquement, et que les remarques des autres ne l'aident en rien, mais je veux qu'il s'assume. Qu'il comprenne qu'il peut être beau, encore plus que maintenant. Je reporte mon attention sur l'écran, le jeu recommence, et à mon grand étonnement, c'est lui qui gagne la partie.
 
«  Bien joué Styles ! »
«  La manette devait être contrôlée je pense, je ne sais même pas comment j'ai fait ça. »
«  En tout cas c'est à ton tour de poser des questions. »
«  Oui ! Il sourit comme un enfant, c'est vraiment beau à voir. Pourquoi tu me détestais en début d'année ? »
 
 La question me pose un froid. J'ai l'impression de prendre une claque. Je reste silencieux quelques secondes. Je ne sais pas vraiment quoi dire, c'est à mon tour de me sentir gêné par la situation. Lui, me regarde et attend ma réponse avec impatience. Qu'est-ce que je pourrai bien lui dire moi ? Je ne sais même pas complètement les raisons de cette haine. Mais il a besoin de la vérité et je le comprend.
 
«  Désolé. J'ai vraiment été ignoble avec toi. Je ne pensais pas tout ce que j'ai pu te dire. Ce que les gars de l'équipe ont pu te faire, je trouve ça vraiment enfantin et con. Pour moi les blagues s'arrêtaient à se moquer de ton style, pas à jeter tes affaires dans des poubelles ou te faire du mal physiquement. Et déjà je trouvais ça vraiment répugnant. Je ne sais pas pourquoi j'ai agis comme ça. Tu étais si... Parfait. Tu as un an de moins que moi, et tu t'es déjà construit un avenir solide, moi je sais même pas ce que je prévois pour demain. Tu vois ? T'as quelque chose de concret, mais j'ai... Je n'ai rien. Tu vas surement passer en fac l'année prochaine, et moi je vais redoubler. C'est sûr. Ma mère n'arrêtait pas de te prendre comme exemple afin que je devienne aussi intelligent et ambitieux que toi. Mais ce n'est pas moi. Je ne suis pas comme ça. Je ne peux pas. Je veux être différent. Au fond, ce n'était pas vraiment contre toi, mais plutôt contre moi. Je me détestais et j'ai passé ma haine sur toi. C'est compliqué je sais mais... »
«  Non, je comprends. Ne t'excuse pas, j'avais juste besoin de savoir parce que... Parce que j'ai tout fait pour qu'en s'entendre, pour qu'on devienne amis. Et j'avais l'impression d'avoir fait quelque chose de mal tu vois ? »
«  Ce n'est pas toi Harry. Tu es quelqu'un de bien, de vraiment sympathique. Tu es intelligent et cultivé. En fait, tu avais juste besoin de quelqu'un mais j'étais trop aveuglé par ma haine pour le voir. J'aurai du venir vers toi avant, ça aurait évité tout ça. »
«  La soirée ce n'était pas de ta faute, j'ai voulu y aller par moi-même. Pour je ne sais quelle raison stupide d'ailleurs. Tu n'y es absolument pour rien. J'ai simplement voulu faire le malin, m'intégrer et je pensais que ce serait un bon moyen. Je n'ai pas réfléchis sur ce coup-là. Et... Tu m'as sauvé la vie. Je te dois tout alors... Faisons comme si rien avant cela ne s'était passé. On repart à zéro, on efface tout, d'accord ? »

Je lui souris et hoche la tête. Il me tend la main pour conclure notre pacte, je secoue la tête et m'approche de lui afin de le prendre dans mes bras. Il met quelque secondes avant de s'en rendre compte. Il est étonné de cet élan je crois. De mon côté, je suis heureux. Heureux qu'il me propose une telle opportunité alors que je lui ai fait subir les pires misères et les pires moqueries en début d'année. Je pensais qu'au fond il ne me pardonnerait jamais, qu'il m'en voudrait toujours un peu. Mais quand je sens ses bras passer également – avec douceur- autour de ma taille, je sais que tout a changé. Nous allons effacer nos mauvais démons, tout ce qui nous hantent et allons écrire notre propre histoire. Une nouvelle, et bien meilleure cette fois-ci.

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