Chapitre 7 : Laguerra

J'ouvris doucement les yeux. Les souvenirs de ce qui s'était passé affluèrent soudain : mon duel avec Magon, mon évanouissement, mon réveil où Zia me soignait et où je lui avais révélé l'énigme, et... mon second évanouissement. Mes pensées se dirigèrent automatiquement vers Mendoza.

- IL EST À OPHIR ! m'écrié-je à voix haute en me relevant brutalement.

Je fus prise d'un vertige douloureux qui m'obligea à me rassoir doucement. Je regardai autour de moi. Mais où était Zia ?

- A-ah Lague-erra !

Je tournai la tête pour voir Sancho arriver en courant.

- Vous n'auriez p-pas vu Z-Zia ?

Je me retins de lui faire remarquer que je dormais jusque-là. Cela n'en valait pas la peine.

- Non, dis-je seulement.

Voilà, réponse simple et courte pour les gens possédant une capacité de raisonnement courte.

- B-bon... souffla Sancho en affichant une mine déconfite.

Sachant que je ne tirerais plus rien de lui, je me mis sur pieds, bien décidée à aller prêter main forte aux autres membres de l'équipe. J'espère seulement que Zia a pu sauver ses amis en comprenant au moins la première partie de l'énigme...

- Sancho ! Sancho !

Ah. L'autre marin, qui, il me semblait, s'appelait Pedro, déboulait à présent vers nous.

- C'EST UNE CATASTROOOOOOPHE ! criait le marin.

- Que se passe-t-il ? m'enquis-je.

Pedro sursauta en entendant ma voix.

- Euh... C'est, c'est...

- Parle !

Mon ton commençait à devenir agressif à cause de l'inquiétude. Mendoza... Décidément, tu me mets dans tous mes états !

- Il... euh, comment dire, bégaya Pedro. En fait...

Le marin se mit à exécuter des mimiques ridicules en même temps de débiter à toute vitesse :

- On est arrivé dans la cité mais y'a eu un lézard et Ambrosius nous a vu et Gaspard a été battu par Mendoza et Esteban et parti poursuivre Tirias et Ambrosius sauf que Zia est arrivée pour nous annoncer un danger et du coup elle et Mendoza sont partis vers Esteban et à moi ils m'ont dit de partir au Condor mais sur la route j'ai entendu un gros "boum" venu d'Ophir et...

- Un gros "boum" ?

Je sentais la pression me presser les poumons, et bientôt, une nouvelle émotion que je n'avais pas ressenti depuis longtemps vint s'ajouter : la peur.

- Il faut que je les rejoigne, frémis-je tout en tentant de ne pas laisser mes émotions transparaître.

- Pardon ? demanda Pedro qui avait dû mal entendre.

Je ne pris pas la peine de lui répondre et couru en direction d'Ophir.

Je ne tardai pas à arriver à l'entrée de la cité. Je me précipitai à l'intérieur, présentant que quelque choses de grave était arrivé. Je sentis mon cœur bondir dans ma poitrine lorsque j'aperçu Mendoza. Il avait l'air soucieux, paniqué même, devant un grand mur d'orichalque. Il était d'ailleurs tellement préoccupé qu'il ne m'entendit pas arriver, et sursauta quand je m'adressai à lui :

- Que s'est-il passé ?

J'arborais une expression dénuée d'émotions ; c'était comme un bouclier pour moi, qui me protégeait de sentiments que je ne comprenais pas. Mendoza se retourna vers moi et me fixa. Je pu lire dans ses yeux le soulagement de voir que j'allais bien. Nos regards restèrent immergés l'un dans l'autre un moment. Un mur invisible composé d'un mélange de timidité et de crainte s'était érigé entre nous, qu'aucun n'osait briser. Je finis par rompre le contact en baissant les yeux, puis je concentrai ma vue sur le mur en face.

- Esteban et Zia sont emprisonnés à l'intérieur de ce couloir, murmura Mendoza quand je fus arrivée à son niveau. Je...

Il s'interrompît un instant, comme incertain de vouloir continuer. Il reprit au bout d'un temps, d'une voix plus fébrile :

- Je suis terriblement inquiet pour eux... Tout à l'heure, je les ais entendu crier, comme si... comme si...

Il baissa la tête. Je fus tentée un instant de lui prendre la main, mais je m'en abstins ; ce geste aurait été peut-être un peu déplacé dans de telles circonstances. De plus, je ne savais toujours pas s'il m'avait pardonné ce que je lui avais dis dans la nef. Ça avait dû énormément le blesser...

- Tout va bien ?

Cette fois, c'est Mendoza qui me surprit avec sa voix.

- Je suppose, soufflé-je, évitant soigneusement son regard. Mais ce n'est pas de moi qu'il faut s'inquiéter, il faut trouver un moyen de rejoindre Zia et Esteban. Tu as une piste ?

J'avais repris mon masque impassible.

- Il y a bien un passage qui pourrait peut-être nous aider, mais il est trop haut, et aucun escalier peut nous y mener, soupira Mendoza.

Il est tellement beau, tellement... Bon sang, concentre-toi Isabella !

Je regardai partout autour de moi. Il devait forcément y avoir un moyen de quitter cette salle !

- Es-tu sûr que le couloir s'est refermé des deux côté ? lui demandé-je. Peut-être qu'il ne s'est condamné que face à nous.

- J'en suis certain.

Je me reculai un peu pour mieux voir le passage dont le capitaine avait parlé ; il était très haut, effectivement. Peut-être à dix ou quinze mètres de hauteur. En observant un peu plus les alentours, une idée me vint soudain.

- Donne-moi ta main, dis-je seulement.

- Pardon ?

- Tu vois ces grands poteaux, là-bas ? Je peux y enrouler mon fouet pour nous faire monter vers ton passage.

- Mais tu n'as pas de fouet, Ambrosius t'a pris tes armes.

Je ris.

- Ah, celui-là, il se croit vraiment plus intelligent que les autres ! m'exclamé-je en sortant d'une poche dissimulée dans mon pantalon le fouet en question.

Mendoza rit à son tour.

- Tu es vraiment imprévisible Laguerra, dit-t-il. Et c'est ça qui fait tout ton charme.

Je priai intérieurement pour qu'il n'ait pas vu mes joues rougir.

- J'ai peut-être une alternative à ton idée, ajouta le capitaine en me soulevant soudain du sol.

Surprise, je lâchai un petit cri. Mendoza passa sa main gauche sous mon dos, et la droite, sous mes cuisses. En bref : il me portait comme une princesse.

- Qu'est-ce que tu...

Il ne me laissa pas le temps d'achever ma phrase, laquelle de toute façon, je n'aurai pas su comment finir, et enroula mon fouet autour de l'un des poteaux. Attendez... Mon fouet ? Quand me l'avait-il pris ? Bon sang, avec lui, je manque de prudence ! Tu parles d'une espionne...

Sentir les mains de Mendoza contre mon dos, son souffle chaud sur mon visage... Nous étions tellement proches, que je fus tentée un instant de poser mes lèvres sur les siennes. Seulement, il restait encore quelque chose à régler...

- Mendoza ?

- Oui ?

- Je voulais te dire, je...

J'interrompis ma phrase un instant, cherchant la bonne formulation, avant de souffler :

- Je suis désolée. J'ai conscience que... que je t'ai beaucoup blessé dans la nef. Mais lorsque j'ai vu Magon s'attaquer à toi, je me devais d'intervenir. Et j'ai compris que mon existence sans toi...

Je marquai encore un instant de pause :

- ... n'aurait plus aucun sens.

Mendoza resta coi un instant, l'air très touché par mes mots, avant de murmurer :

- Tu es toute pardonnée, Laguerra.

Il avait prononcé ce nom comme une caresse. Je lui fis un sourire, qu'il me rendit.

- Allons aider les élus, dit Mendoza.

Et prenant de l'élan, il nous emporta dans les airs.

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