J'étais assise en tailleur au sol, en train de moudre une plante. De temps à autres, je jetais un coup d'œil sur Laguerra, qui ne s'était pas réveillée depuis que Mendoza l'avait portée près du Grand Condor. La bretteuse nous avait sauvé la vie, mais elle l'avait payé cher : Magon lui avait profondément charcuté les bras, elle avait deux côtes fêlées, et une brûlure probablement causée par l'arme à feu de l'olmèque recouvrait le quart de sa jambe gauche. J'admirais cette femme ; pour son courage, pour toutes les choses qu'elle parvenait à endurer, pour son caractère de feu et son incroyable agilité, et encore, j'en passais ! Elle sortait réellement de l'ordinaire.
Mendoza l'avait allongée sur un tapis dans l'herbe, puis était repartit vers la cité d'Ophir avec Esteban et Pedro, pour tenter de prendre le trésor de la cité avant Ambrosius. Sancho et moi étions restés auprès de Laguerra, moi parce que j'étais la seule à avoir des capacités guérisseuses, et le marin parce qu'il fallait qu'un adulte reste à mes côtés ; quoique le mot "adulte" n'était peut-être pas ce qu'il lui correspondait le plus. En réalité, je soupçonnais plus qu'il avait voulu rester car il avait trop peur des olmèques. Après tout, Pedro lui avait promis de lui ramener sa part du trésor, alors...
Je finis de préparer mon premier remède que j'appliquai à Laguerra sur ses coupures les plus profondes. Satisfaite de mon travail, je décidai ensuite de m'occuper de la brûlure.
- Aller, il faut ramasser des Millepertuis Sancho ! m'exclamé-je en m'adressant au marin, qui jusque-là était occupé à tenter d'attraper un oiseau pour le repas, peine perdue !
- Des Mi-mille... des Mille quoi ?
- Des Millepertuis ! Ce sont des plantes avec de petites fleurs jaunes qui soignent les brûlures, nous en avons besoin pour guérir Laguerra.
- Des pe-petites f-fleurs jaunes ?
- Oui. Ce sont les seules qui poussent ici qui peuvent l'aider.
Sancho acquiesça, et s'en alla chercher la fameuse plante plus loin vers les buissons. Alors que j'avais déjà cueilli une petite dizaine de fleurs, le marin revint vers moi avec un bouquet gigantesque.
- V-voilà ! dit-il, devant mon regard plus que surpris.
- Et bien, tu as vraiment été rapide ! m'étonné-je.
Sancho mit sa cueillette sous mon nez, tout fier, et j'entrepris d'examiner d'un peu plus près ses fleurs. Il y avait quelque chose d'étrange... Quand je finis par trouver, je ne pus m'empêcher d'éclater de rire !
- Bah qu-quoi ? bégaya Sancho.
- Ce ne sont pas des Millepertuis que tu as ramassé, ce sont des Jacobaea vulgaris ! En le donnant à Laguerra, tu ne feras que l'empoisonner !
Sancho se dépêcha de lâcher les fleurs, toute fierté envolée.
- Viens, je vais te montrer ce que sont les Millepertuis, dis-je en le prenant par la main.
Je le conduisis vers un arbre, et, soulevant les branches, je lui révélai enfin fleurissant sur le sol la fameuse plante.
- Regarde Sancho ; la Millepertuis a cinq grands pétales plutôt pointus, alors que la Jacobaea vulgaris ressemble plus à une marguerite jaune, avec des pétales plus petits et plus nombreux ! Tu fais la différence, maintenant ?
- Ta co-connaissance m'épatera t-toujours, Z-Zia !
Je souris au compliment.
- Merci Sancho. Aller, allons guérir Laguerra !
Et nous retournâmes, d'un pas joyeux, vers la bretteuse.
Je ne tardai pas à atténuer les brûlures de la jeune femme. Pour être honnête, j'étais assez fière de moi ! Cependant, je m'inquiétais du fait qu'elle ne se soit toujours pas réveillée. Je vérifiai sa respiration : lente, mais régulière, exactement ce qu'il fallait.
- Elle ne devrait pas tarder à se réveiller, dis-je. Je crois qu'elle a donné beaucoup d'énergie dans son combat ! Elle devait être épuisée.
- Z-Zia ?
- Oui ?
- Pou-pourquoi on aide La-Laguerra, alors que c'est notre adve... notre adve... notre e-ennemie ?
- Quand Mendoza reviendra, tu comprendras vite, crois-moi...
Soudains, j'entendis une vois faible dans mon dos :
- Que... que s'est-il passé ? Où suis-je ?
Laguerra s'était enfin réveillée ! J'allai m'accroupir doucement auprès d'elle.
- Où est... Mendoza ? demanda-t-elle, l'air un peu deçue.
- Ne vous en faites pas, vous êtes en sécurité. Mendoza vous a portée près du Condor, avant de repartir à Ophir.
- QUOI, IL EST À OPHIR ?!! s'écria Laguerra.
Elle voulut se relever, mais je l'en empêchai.
- NON ! Surtout, évitez de bouger. Vous avez deux côtes fêlées, et j'ai beau vous avoir appliqué un cataplasme d'argile blanc, vous en n'en avez pas pour moins de deux semaines de repos !
- DEUX SEMAINES ?!! s'étrangla la bretteuse.
Laguerra finit par se rallonger, résignée.
- Il faut aller aider Mendoza... Il... Je...
- Reposez-vous, Laguerra. Tout va bien se passer.
- Non... Vous n'avez pas conscience du danger... Si Ambrosius met la main sur le trésor, vous êtes perdus...
- Mais quel est ce trésor ?
- C'est la Pierre... la Pierre Philosophale...
- Et de quel danger n'avons-nous pas conscience ?
- Il est écrit...
Laguerra inspira profondément.
- Tomberont dans les entrailles de la terre... ceux qui ne placent pas les deux soleils... Le trésor appartient à la reine, il faut le lui demander...
- Mais d'où vient cette énigme ?
- D'un indice... qu'Ambrosius n'a jamais put lire car je l'ai caché avant qu'il ne puisse le faire...
- Mais...
Avant que je ne puisse achever ma phrase, Laguerra s'évanouit à nouveau, me laissant seule avec mes interrogations.
Tomber dans les entrailles de la terre, si l'on ne place pas les deux soleils... Mais qu'est-ce que cela pouvait-il bien dire ?
Soudain, je blêmis ; les soleils... Mais oui, bien sûr ! Et si ce que je croyais était bel et bien réel, alors Esteban, Mendoza et Pedro couraient un véritable danger !
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