Chapitre 6: Entre-songe

- Oh mon Dieu! Tu as de ces cernes! s'écrie Maddy alors que je m'assois à côté d'elle.

- Merci, Einstein. J'avais pas remarqué, je fais d'un ton bougon.

- Si Jess voyait ça, rigole mon amie tout en se vernissant les ongles.

Je la regarde faire pendant quelque secondes sans rien dire et l'informe abruptement, ayant un doute:

- Tu sais qu'on est en cours et pas dans un salon de manucure?

- T'es même pas drôle! fait-elle en soufflant sur ses doigts.

Elle est ridicule... mais je l'adore quand même. Elle a cette énergie positive qui attire tout le monde autour d'elle. Même une fille comme moi du genre morose et dépressive. Je soupire tout en mettant mon menton sur mes avant-bras. Va-t-elle disparaître lorsque l'ennemi se dévoilera?

Je suis stressée, voire même extrêmement angoissée. Je n'ai pas pu dormir de toute la nuit car l'inquiétude m'a gardée éveillée. J'avais beau me retourner dans mon lit, je n'ai pas pu me reposer. En plus que j'ai donné rendez-vous avec l'équipe après les cours...

Je suis éreintée mentalement et physiquement. Je sens que mon angoisse ruiner ma journée de minutes en minutes... Il faut vraiment que j'arrête de me torturer l'esprit et de commencer à réellement enquêter sur la chose qui a déclenché l'Opération Rouge.

Je soupire alors que Maddy commence à fredonner un air qu'elle massacre totalement. Je ferme les yeux deux secondes, tente de soulager mes yeux brûlant de fatigue.

- Lili? j'entends quelqu'un m'appeler.

Redressant brusquement la tête, je découvre avec stupéfaction Gregory devant mon bureau. Il a encore les cheveux devant ses yeux et légèrement rebondis par-dessus ses lunettes. Je tente d'apercevoir son regard, mais il est encore une fois trop bien caché. Je hausse alors un sourcil et dis d'une voix neutre:

- Oui?

Le garçon se gratte la nuque, visiblement mal à l'aise. Après tout, tout le monde dans la classe a les yeux rivés sur nous. Moi-même, même si je m'en fiche un peu, je ne suis pas sereine. Le fait qu'il me parle alors qu'habituellement il m'évite ou m'ignore me fait penser qu'il y a anguille sous roche. J'affiche cependant un léger sourire et il se décide enfin à parler.

- Est-ce qu'on discuter peut... euh... peut discuter toit sur...

Il s'emmêle les pinceaux, c'en est presque mignon. Serait-ce de la timidité? Je le pensais plus je-m'en-foutiste et gothique, avec son look et son attitude. Je glousse silencieusement et finis sa phrase, ayant compris ce qu'il essaie de me demander:

- Oui, je suis disponible. On se verra sur le toit ce midi, alors.

Gregory a l'air soulagé que son message soit passé. Est-ce à cause de ce problème de bégaiement qu'il parle le moins possible? Dans mon cas, je trouve ça un peu adorable. Je n'aime pas trop le genre de mecs qui ont un ton supérieur ou séducteur. On devine clairement que ce n'est pas le coeur qu'ils veulent, mais le beau petit popotin.

Alors que le garçon retourne à sa place, Maddy ricane tout en secouant ses doigts afin de faire sécher le liquide rose les arborant.

- C'était trop naze! s'esclaffe Serena tout en se limant les ongles aussi.

- C'est une manie chez vous, les filles, de se faire les ongles dans une salle de classe? je fais, exaspérée de leur méchante attitude.

Je me détourne et me remets la tête sur les avant-bras. Je ne peux empêcher mes paupières de se fermer. Je laisse la torpeur m'emporter peu à peu. De plus le professeur est absent et la remplaçante, une vieille femme proche de la cinquantaine, se laisse marcher sur les pieds, se faisant même appelée par un surnom ridicule - Jojo. 

Mes yeux se ferment doucement pour ne plus s'ouvrir tout au long du cours.

La noirceur m'entoure. Elle est tellement épaisse que je peux la sentir autour de mon corps. Je dois être en train de rêver. Au bout de quelques minutes, une pièce très sombre se dessine autour de moi. Un trait de lumière commence à filtrer à travers un trou dans le plafond. On aurait dit une caverne, mais je n'en suis pas sûre car l'obscurité est trop profonde.

Que fais-tu dans mon antre, jeune fille?

La voix féminine résonne dans ma tête et je sursaute. Tournant sur moi-même, je ne vois personne. Mes mains tremblent pour une raison qui m'est inconnue et une goutte de sueur glisse le long de mon dos. Serait-ce de la peur qui fait battre follement mon coeur? Il fait aussi très froid. La preuve: je souffle et un nuage de condensation apparaît.

Soupirant, je décide de rejoindre le rayon lumineux. Tout en avançant, je remarque qu'une petite planète identique à la Terre flotte dans les airs, brillante de vie. Plus que je m'approche, plus j'ai chaud et je me sens épuisée. Enfin, plus que je ne le suis déjà.

Brusquement, alors que je tends la main pour toucher la minuscule planète, des chuchotis se font entendre de plus en plus fort.

Maîtresse... se plaint une voix non-identifiable.

Je ne peux pas dire si c'est un homme ou une femme.

Intruse... murmure une seconde, cette fois purement féminine, quoique qu'usée et creuse.

Menace... Elle nous menace... grince une autre.

Du calme, assène violemment une voix à l'intonation supérieure, la même que celle qui m'a appelée jeune fille. Petite chose, que penses-tu de la Terre?

Son ton neutre me donne des frissons dans le dos. J'ai l'impression d'être écrasée par sa voix tant le pouvoir qu'elle dégage est puissant. Pourtant, je repousse ma peur et réponds d'un ton mesuré:

- Que voulez-vous dire?

Soudainement, des centaines de gloussements éclatent aux quatre coins de l'endroit et des yeux blancs sans pupille apparaissent. Des bouches tordues s'ouvrent, se dévoilant, et elles affichent toutes un rictus moqueur. Puis, je vois une main noire pourvue de griffes blanches acérées agripper la petite planète.

Est-ce que les humains ont vraiment le droit de vivre?

Cette conversation prend un tournant pas très rassurant. Je déglutis et rétorque:

- Toutes les créatures ont une place spéciale et irremplaçable dans l'écosyst...

Rien n'est irremplaçable. Il suffit juste d'adaptation.

Je m'éloigne de la main qui écrase à présent la Terre. Celle-ci se désintègre et s'écoule en cendres. La discussion prend décidément un virage très inquiétant. Peu à peu, je sens que je me réveille. Pourtant, j'entends très clairement:

N'oublie pas que tu n'es qu'une simple humaine dont je peux très bien reprendre le pouvoir...

Mon corps tombe brusquement dans le vide et je me lève d'un coup, renversant ma chaise et bousculant mon bureau, posant mes mains à plat dessus pour le stabiliser. Soufflant comme si je venais de courir un marathon, j'aperçois Maddy qui me regarde avec une main sur le coeur et que nous sommes seules dans la salle.

Je frotte doucement mon front légèrement humide et tente avec difficulté de contrôler ma respiration.

- Ça va? J'ai cru faire une crise cardiaque! souffle mon amie en se dirigeant vers la sortie.

Tout en la suivant et lui expliquant que j'ai fait un cauchemar, je réussis à calmer mon esprit paniqué. Ce n'était pas un rêve ordinaire, non. On aurait dit plutôt une conversation entre-songe. C'est une capacité peu rare, mais extrêmement dure à déchiffrer. Ça consiste, en résumé, à avoir une discussion avec quelqu'un pendant ton sommeil, que ce soit avec une personne décédée, quelqu'un que tu n'as pas encore rencontré ou encore un ami d'enfance que tu n'as pas vu depuis des années. Cela peut varier de façon totalement aléatoire.

- Lili?

Je lève les yeux de mon casier et fixe celui qui vient de me sortir de mes pensées. Steven. Il a pris une pose décontractée sur la case voisine et je roule discrètement les yeux. Le pauvre en fait vraiment trop pour une fille qui n'est pas intéressée. Il devrait plutôt se démener pour celles qui ont le béguin pour lui. Personnellement, sans vouloir être méchante, je préférerais me jeter sous un camion que de sortir avec un garçon dont je ne suis pas amoureuse. Il est sympa, mais il n'est pas mon type.

- Ouais? je m'enquis alors qu'il reste là, à me regarder en silence.

Ça me rend presque mal à l'aise. 

- Euh, en fait, je voulais te demander si on pouvait manger ensemble ce midi, tu sais, pour faire connaissance...

Je soupire tout en fermant la porte de mon compartiment, barrant mon cadenas d'une main et tenant la ganse de mon étui dans l'autre.

- Steven, tu sais que toi et moi, ça ne marchera jamais, soufflé-je, me dirigeant vers mon cours d'arts plastiques.

- Mais je t'aime...

- Et je ne t'aime pas. Je suis désolée, j'ajoute d'un ton plus doux.

Je m'arrête et pose une main sur son épaule. Il a un regard triste et je me sens mal d'être aussi dure avec lui, mais mieux vaut lui dire la vérité que le faire poireauter et le blesser. Enfin, après lui avoir adressé un regard désolé, je m'écarte et poursuis mon chemin.

Attention, je ne suis pas une briseuse de coeur et je ne reçois pas tous les jours des déclarations d'amour. Simplement, je ne veux impliquer personne dans mes problèmes personnels. C'est une question de sécurité et je hais plus que tout que des innocents soient blessés devant mes yeux.

Xx×xX

Je suis vraiment désolée pour les quatre jours de retard! Je n'ai pas eu beaucoup accès à Wattpad ces derniers temps pour cause de maladie! ^^' Enfin, là, je suis de retour et pour la peine, samedi et dimanche de cette semaine ne seront pas réservés pour la correction, mais pour l'écriture et la publication! Pour me rattraper un peu... :) 

Bref, j'espère que ce chapitre vous aura plu. Il n'y a pas beaucoup d'actions, à part l'apparition de l'ennemi! ^^' Enfin, la seconde, si on inclut le prologue.

Sinon, pour le terme "entre-songe", je l'ai complètement inventé, n'essayez pas de le chercher sur Google, ça ne sert à rien. :p (Moi-même je l'ai fait et je n'ai rien trouvé...) Sinon, si vous avez des questions sur l"entre-songe", vous n'avez qu'à me le demander en commentaire ou en message privé, ça me fera un plaisir de vous répondre! ^^'

Sur ce, à la prochaine! :)

  『N』『H』『Y』  

P.S.: Préférez-vous que je mette des noms aux chapitres, au lieu de juste l'appeler «Chapitre 6»? Par exemple, pour le chapitre 2, je pourrais le nommer «Le Duel». Enfin, vous m'en direz des nouvelles. ^^'

  『C』『O』『R』『R』『I』『G』『É

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top