13-Dans la classe espoir
Dylani
─ Non ! Non ! Mais pourquoi vous ne comprenez pas ! Ce n'est pas si compliqué bon sang ! Aucun ne bosse ! Comment voulez-vous y arriver !
Notre prof de math s'énerve. Il leur a donné quelques exercices super simples, qu'aucun n'a faits et ils ne comprennent pas. Il me regarde, désespéré, et je lui fais un geste d'impuissance. Il fait les cent pas à son bureau, écrit les réponses au tableau rageur.
─ Je ne peux pas faire de miracle non plus. Je vais faire bosser Dylani si vous ne voulez pas vous y mettre, conclut-il.
─ Faites ça ! approuve Mic.
Je hoche la tête, conscient d'avoir de la chance d'être entouré. Ils ne me traitent pas comme un fayot. Un sur trente, c'est le ratio de réussite de notre classe.
Le prof de math me demande de rester après les cours et insiste encore pour que j'aille dans la classe élite. Il m'en reparle environ tous les quinze jours, malgré ma réponse toujours négative.
─ Tu as réussi les épreuves de sélection de math haut la main ! Tu te compliques la tâche ! Va travailler avec eux, ils t'entraineront vers le haut !
─ Je ne veux pas aller avec des riches qui me mépriseront. Je n'ai pas besoin des autres.
J'ai un orgueil démesuré, il n'est pas question de me faire rabaisser.
─ Quel têtu ! Qu'est-ce que tu as dans la caboche !
─ Je n'ai rien demandé !
─ Ce serait du gâchis de ne pas te faire travailler plus. Tu serais tellement mieux dans l'autre classe.
─ Je veux rester avec mes copains, je les canalise et vous n'y perdez pas !
Il hoche la tête, vaincu comme à chaque fois par cet argument.
─ C'est vrai que sans toi, la classe serait ingérable.
Ben voilà ! je me demande s'il n'a pas une mémoire de poisson rouge.
Les vacances de Noël approchent, pour moi cela ne changera rien, je ne pars jamais. Au club de science, j'écoute les autres qui parlent de leurs projets, ça à l'air cool.
Avant d'aller à la piscine, je vais au panneau des Post-its checker si tout va bien.
Avec ma touche on s'échange des bêtises, là nous parlons de nos plats préférés. Il n'a pas eu l'air de reconnaitre mon dessin du local à câlin, je vais l'aider, je vais faire le même dessin avec deux mecs qui s'embrassent dedans. Il va comprendre enfin ?
Je m'amuse même du risque de me faire griller en postant une réponse au panneau. Cependant j'ai une excuse en or, je peux prétendre être là comme modérateur.
Je scrute le panneau, essayant de voir s'il n'y a pas de problèmes, quand j'ai un temps d'arrêt, unu a répondu.
J'ai fait la marche citoyenne mais personne ne s'est mis avec moi je fais peur aux autres
Je me demande pourquoi il fait peur ? je ne vois pas ! Alors je lui pose la question par écrit, histoire d'amorcer le dialogue.
Pourquoi tu ferais peur aux autres ? Si tu sais pourquoi ...tu pourrais peut-être faire quelque chose ? ...
Même s'il était explicite, cela ne craint rien. J'ai l'impression que la plupart des élèves ne lisent que les messages pour eux ou les ragots haineux. Ils se mêlent rarement des discussions et ne s'occupent pas des autres. Notre génération est plutôt égoïste.
Après ce papier pour unu et avoir enlever un message contre Vanessa, je réfléchis maussade face à plusieurs nouveautés pas cools. Le gars qui a écrit à Annette a eu une réponse méchante :
Moi je ne t'aime pas tu es un gros naze Nathan Marti
La vache, il y a même son nom de famille. La fille n'a pas fait dans la dentelle !
Je retire le post-it puisqu'il y a le nom de famille, les messages haineux attirent la haine. Enfin je m'occupe d'un autre papier coloré.
Lou est une P**e
OK ! Bordel ! Bon sang ! qu'est-ce qu'il se passe dans notre établissement respectable où la haine est si prolifique, c'est quoi encore cette histoire !
Je cache le message en déposant un post disant que Lou est sympa.
Je reviens ensuite au message qui concerne Nathan en secouant le post-it entre mes doigts. Il n'est pas bien compliqué de deviner que l'émetteur de message doit être cette Annette, à qui il a avoué son amour. Nathan Marti est le rondouillard qui a posé le message d'amour, une copine m'a donné son nom quand je les ai croisés dans les couloirs. Il faut que je l'aide lui aussi et qui est cette Lou ?
Je vais à la piscine en écoutant un cours de préparation à l'entrée en médecine récupéré grâce à Ingrid.
***
Des messages d'insulte envahissent le tableau contre Nathan, encore Vanessa et désormais Lou. C'est du véritable harcèlement, je suis occupé pour retirer des posts hargneux et en poser des sympas pas dessus, mais je me sens seul sur ce coup.
Surtout, un autre désespéré est apparu :
je voudrais tuer tout le monde et je hais les sélections c'est injuste.
Il y a eu les sélections pour les langues européennes pour les secondes. Je me note Patru, quatre en moldave et si je m'occupe de Nathan Marti cela fait aussi cinci (cinq) et puis Vanessa six et Lou sept. Pourquoi c'est à moi de m'occuper de tous ces gens malheureux ? Pourquoi personne d'autre ne s'y colle ?
Alors que je marmonne devant le tableau, une fille obèse arrive à côté de moi. Je la vois poser son post là où j'échange avec Duo. Est-ce que je l'aurai trouvé, ce serait trop beau. Elle repart peu après et j'admire l'écriture similaire. C'est elle ! J'ai trouvé Duo.
Je suis sûre que personne ne m'aime
Je ne connais pas son nom et aucune idée de ce que je vais bien pouvoir répondre à son message.
J'interroge Mehdi sur Lou. Il rigole et je redoute qu'il n'évoque encore mon côté samaritain.
─ Elle a envoyé des photos d'elle, nues, à son petit ami qui n'était pas célibataire. La petite amie officielle les a trouvées et les a balancées à la terre entière.
J'allais demander pourquoi je n'étais pas au courant, Mehdi continue.
─ Tout le monde sait que tu n'es pas intéressé par ce genre de photo.
Je suis doublement surpris, il parle de mon homosexualité ou du fait que je suis psychorigide ? Je décide de passer pour l'instant, ce n'est pas le sujet.
─ Tu as son nom de famille ?
─ Tu vas encore jouer les Don Quichotte !
─ Don Quichotte se battait contre des moulins à vent et perdait ! Moi je me bats contre des gens et je gagne.
─ OK, dis-moi ce que tu veux.
─ Le tel du gars qui a reçu les photos compromettantes. Le nom de famille de la fille.
Je me dirige vers le club informatique, quand je croise justement celle que je voulais voir qui se dirige vers la sortie du lycée avec sa bande de filles. Je me dépêche de lui courir après.
Mariama fait partie d'un groupe de filles bagarreuses. Heureusement, elle m'a à la bonne, car j'ai dépanné sa famille quand ils ont eu un problème de volet roulant et j'ai aussi enlevé un virus sur leur ordi. Ils sont d'origine sénégalaise et sa maman nous fait souvent des gâteaux.
─ Salut Mariama.
─ Encore toi, c'est mon jour de chance.
Je ne relève pas sa remarque.
─ Tu m'avais indiqué Nathan Marti...
─ Oui le naze qui est en train de se prendre une raclée par Annette Gomin.
─ Qui ?
─ Annette Gomin, la reine des pestes de seconde.
Je souris, car je pense que pour beaucoup, c'est Mariama, la reine des pestes, mais bon... apparemment elle a de la concurrence.
─ Ah OK. À l'occasion tu me la montreras cette Annette ?
─ Ça ne va pas être dur ...elle est là-bas. Elle me la désigne du menton. La star de l'école et la reine des garces ! Madame, je sais que je suis belle et classe. Elle s'est fait repérer par Fausto Larconelli, tu vois, il est avec elle.
Je sursaute à ce nom, mon ennemi numéro un, ce mec je le connais de vu. C'est bien celui que je pensais et le bourreau principal de Vanessa. Il porte un jean noir bien coupé, une chemise dépasse sous un pull de marque. Il est brun, souriant, très beau et pourri. La fille aussi est mignonne, vêtue d'une jupe en jean et collant noir, basket blanche et perfecto : coup double !
Ce gars a fait croire à Vanessa qu'il l'aimait bien, pour l'abuser. Il recommence avec une autre. Sauf que celle-là n'est pas dans la classe des espoirs, cela veut dire qu'elle aura peut-être une famille, qui pourra le claquer.
Je ne sais pas encore tout ce que je vais faire de ces infos, je ne désespère pas.
Fausto s'éloigne et va rejoindre un groupe de gars, dont certains qui nagent avec moi.
Je sens que je grince des dents.
Respire un coup, reste calme.
J'ai appris à nager dans une mare à Reims. Les longs mois d'été, on s'ennuyait et il n'y avait que ce plan d'eau interdit à la baignade, insalubre, pour nous, c'était parfait.
Quand je suis arrivé à Bordeaux, ma chance c'est que la piscine a ouvert des sessions pour les jeunes des quartiers et les maitres-nageurs ont vu mon potentiel.
─ Même les lunettes il faut les lui fournir ! gueulaient les autres.
C'est la vérité, je suis un parasite social et il faut tout me fournir !
Depuis ce premier cours qui ne s'est pas bien passé ... je m'entraine avec eux. Je ne sais pas si c'est parce que je suis devenu détective privé et assistant social ou parce que j'ai un correspondant romantique, je réalise qu'ils ont fait amende honorable depuis longtemps et c'est moi qui les snobe.
Cela se vérifie à l'entrainement, le coach nous annonce un programme de travail de deux kilomètres de crawl, puis deux kilomètres de brasse. Je ramène ma gueule comme à chaque fois.
─ Je veux faire du papillon, je prépare les quatre kilomètres en papillon en compétition.
J'aime faire les courses les plus dures. Mes concurrents sont généralement de gros balaises et ma finesse est un avantage non négligeable.
Le prof secoue la tête, amusé.
─ On peut laisser la ligne d'eau cinq à Ani ! propose Stanislas notre capitaine.
─ Oui, fait le coach. Notre petit Ani aime bien ses privilèges !
Je grommèle pour la forme.
─ Tu fais le même entrainement que les autres et après tu ferras ton papillon. Je veux que tu progresses en crawl, tu as de la résistance et tu t'es bien débrouillé sur le cinq cents.
Stanislas m'enlace quand le prof nous appelle pour un debrief. Je me dépêche de le repousser.
─ Pas commode notre petit gars de l'est ! rigole-t-il.
─ On se concentre ! Nous avons des épreuves régionales inter-lycée en mars et on a nos chances. Allez ! on s'applique ! gueule le coach.
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