❸ Eye Contact
Eleanor n'était jamais descendue dans les sous-sols, alors elle ne savait pas vraiment à quoi s'attendre. Elle était restée à quelques centimètres d'Ernest, angoissée à l'idée de se perdre. Le colonel avait veillé sur sa protégée, n'hésitant pas à la prendre par le poignet et à bousculer des soldats qui se tenait à travers son chemin jusqu'à l'ascenseur.
- Je dois d'abord m'arrêter au premier sous-sol. Tu me suis ?
- Je ne vois pas ce que je peux faire d'autre, maugréa Eleanor en accélérant le pas.
- Tu n'as pas à avoir peur de Barnes.
- Je n'ai pas peur de lui, assura Eleanor.
Elle était curieuse. Elle avait hâte de voir comment il agissait, sa façon de penser, quel style de combat il utilisait. Elle avait lu dans son dossier qu'il pouvait utiliser n'importe quelle arme et conduire tous types d'appareils allant de la moto au quinjet. Une vraie machine de guerre, pensa Eleanor.
Ernest sortit de l'ascenseur, aussitôt suivi de sa protégée. Ils se mirent dans un coin du couloir, et Eleanor regarda autour d'elle. Il y avait beaucoup d'officiers, les sous-sols n'étant autorisés qu'aux personnes ayant le grade supérieur au major. Il y avait quelques aspirants, mais la majorité était des lieutenants et des capitaines.
Eleanor ferma les yeux et baissa la tête, avant de jeter un coup d'œil à l'homme qui se dirigeait vers Ernest.
- Colonel Zola, c'est un plaisir de vous voir, sourit l'homme.
Il avait des cheveux grisonnants, et semblait beaucoup plus vieux qu'Ernest. Mais Eleanor le savait, Alexander Pierce, le Secrétaire du SHIELD, était plus jeune qu'il ne paraissait. Pierce et Ernest échangèrent une poignée de main, tout sourire.
- Vous ne pouvez pas savoir à quel point cette base me manquait.
- Moscou semble bien triste sans vous, avoua Ernest. Mais j'imagine que d'aller boire un verre n'est pas d'actualité ?
- Je regrette, mais ce n'est pas dans mes plans. Nous venons tout juste de décryogéniser le soldat, et on m'attend à New-York. Où est le sergent Petrova ?
- Juste ici, fit Eleanor en relevant la tête.
Le visage stupéfait et légèrement horrifié du secrétaire remplit son cœur de fierté.
- Comment ? Je veux dire... Vous êtes là depuis le début ?
- Oui mon général.
- C'est elle pas vrai ? fit l'homme en se tournant vers Ernest.
Le colonel hocha la tête.
- C'est la première fois que vous la rencontrez ?
- Cette femme est invisible, je n'aurai jamais pensé la rencontrer un jour.
Eleanor dut prendre sur elle même pour ne pas sourire. S'il y avait bien une chose qu'elle adorait chez elle, c'était sa faculté de devenir invisible. Bien sûr, il ne s'agissait pas de pouvoirs magiques ou de super sérums qu'on lui avait injecté. Elle n'avait jamais vraiment réussi à expliquer comment elle le faisait. Peut-être qu'il s'agissait de son physique peu particulier qui lui servait de passe-partout. Tout ce qu'elle savait, c'était qu'à moins qu'on ne fasse vraiment attention, elle n'existait pas.
Pierce la dévisagea avant de se tourner vers Ernest.
- C'est donc elle qui sera la partenaire du soldat ?
- Actuellement, c'est lui qui sera mon partenaire, remarqua Eleanor.
- Tu accordes trop d'importance aux détails, s'amusa Ernest.
Mais dans ses yeux, sa protégée pouvait clairement lire de la réprobation. Ne joue pas ce jeu avec lui. Eleanor hocha imperceptiblement la tête pour lui faire comprendre qu'elle avait saisi le message, et continua :
- En tout cas, j'ai hâte de me mettre à travailler avec lui.
- Vous n'irez pas en mission tout de suite, la retint Pierce, amusé.
- Quoi ?
- Personne ne vous a dit que vous deviez vous assurer de la bonne coopération du soldat ? Quoi qu'il vous en coûte.
Eleanor se tourna vers Ernest, les yeux écarquillés. Le colonel lui fit signe de se calmer et lança au général :
- Ça a été un plaisir Pierce. Appelez-moi la prochaine fois que vous êtes dans le secteur.
Ernest prit Eleanor par l'épaule et la tira vers l'ascenseur. La jeune femme se laissa faire, perdue. Lorsqu'ils se retrouvèrent seuls dans l'ascenseur, elle explosa.
- Est-ce qu'il y a d'autres choses que vous me cachez ? Quoi qu'il m'en coûte ? Je vais devoir l'épouser pendant que vous y êtes, ou porter ses enfants pour en faire des espions hyper-puissants ?
- Tu es trop négative, soupira Ernest en bloquant l'ascenseur. Mais ta colère est légitime.
- Vous me taisez des détails du dossier d'un assassin avec qui je dois travailler. Il a déjà attaqué des agents d'Hydra, mais je ne me suis pas inquiétée parce que je pensais que vous feriez tout pour me protéger ! Je pensais être votre priorité ! Je pensais vous être plus importante qu'Hydra !
Le colonel accusa le coup, les mâchoires serrées. Sa subordonnée tentait vainement de se calmer, mais elle finit par frapper une des parois.
- Tu t'es fait mal ? s'inquiéta-t-il aussitôt.
- Non, ça va, grommela Eleanor en ramenant son poing contre sa poitrine. Faites nous descendre, ou les gens commenceront à se poser des questions.
Ernest obtempéra, mais il profita des quelques secondes qui lui restaient pour glisser à sa subordonnée :
- Tu es toujours ma priorité Eleanor. L'agent Barnes ne te fera pas de mal, je peux te le jurer.
La porte s'ouvrit avant que la jeune femme ne puisse répliquer et elle fut obligée de suivre le colonel à travers le dédale de couloir. Il y avait beaucoup moins de personnes, mais des hurlements effroyables résonnaient autour d'elle.
- Qu'est-ce que..., commença-t-elle en regardant autour.
- C'est le soldat de l'hiver, répondit simplement son supérieur.
Eleanor blêmit mais elle continua de remonter le couloir, se préparant mentalement à la rencontre qui allait suivre.
- Nous serons seuls ? demanda-t-elle.
- Il n'y aura que lui et toi, ainsi que des agents qui s'occuperont de lui. Mais ils sortiront très vite. Il doit t'accorder sa confiance le plus vite possible.
- C'est la première fois que le sergent Barnes travaille avec quelqu'un. Pourquoi ?
Plus ils se rapprochaient de la fin du couloir, plus ses questions lui brûlaient les lèvres.
- Pierce voulait s'assurer que le travail soit fait, lui expliqua Ernest. Hydra est proche de son but, rien ne doit se mettre à travers son chemin. Rappelle-toi...
- La sécurité est plus importante que la liberté, termina Eleanor.
Son rythme cardiaque ralentit et elle se sentit soudain plus sereine. Elle réussit cependant à poser une dernière question, juste devant la porte qui la séparait du soldat.
- Pourquoi moi ?
Ernest s'immobilisa, surpris. Un sourire éclaira son visage.
- Parce que tu es la meilleure.
Il ouvrit la porte et les hurlements s'amplifièrent. Eleanor regarda son mentor une dernière fois et entra dans la pièce, les poings serrés.
Une dizaine de personnes se pressaient autour de machines diverses, et d'autres autour du soldat allongé. Elle reconnut quelques infirmiers, ainsi que des techniciens, et ils s'écartèrent tous de son chemin quand ils la virent arriver. Cependant, il s'agissait pour elle du cadet de ses soucis.
Elle s'approcha du soldat, et le détailla du regard. Des capteurs étaient appliqués contre les tempes et les bras du soldat, et il serrait les dents, les yeux fermés. Il poussait des cris plaintifs, et de la sueur coulait le long de son visage et de son torse nu.
Eleanor le contempla un instant, avant de remarquer que les plaintes de l'homme s'étaient arrêtées. Les capteurs se décollèrent du soldat pour le libérer, et celui-ci se mit à jeter des coups d'œil furtifs autour de lui. Ses cheveux bruns lui collaient au visage et cachaient ses yeux.
Les entraves qui enserraient son torse et ses bras se déclipsèrent, et quand il se redressa, leurs regards se rencontrèrent.
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