Men in black
Une décharge électrique dans l’estomac sortit Thomas de sa torpeur. Autour de lui, se tenaient cinq hommes, aussi tout de noir vêtus. Certains étaient armés de ce qui semblait être des mitraillettes, et l’homme juste en face de lui, tenaient une sorte de Taser en forme de matraque. Il remarqua aussi une autre personne, en train de bidouiller son terminal informatique, et après quelques secondes sortit la fameuse carte mémoire de l’ordinateur. L’homme avec la matraque électrique s’adressa à lui.
— Monsieur Thomas Jefferson ? Vous avez été pris en flagrant délit de détention de données illégales. Veuillez-nous suivre sans faire d’histoire.
— Monsieur…
Thomas n’eut pas le temps de terminer sa phrase. Il reçut une décharge électrique, qui lui parcourut tout le corps. Un cri de douleur s’échappa de sa gorge. C’est à ce moment qu’il remarqua le sigle sur les blousons des hommes qui le menaçaient : Un œil, comme celui qu’il avait vu sur le vieux billet, et dessous était marqué ASE Security.
— Écoutez, Monsieur…
Il n’eut de nouveau pas le temps de parler. La décharge électrique qu’il reçut fut encore plus violente que la précédente.
— Je vous avais dit sans faire d’histoire ! Emmenez-le !
Un des hommes lui mit une sorte de sac noir sur la tête et tira sur une corde qui serra sa gorge afin de fermer le tout. Thomas pouvait à peine respirer et commença à se débattre. Une pluie de coups s’abattit sur lui, jusqu’à ce qu’aucun mouvement ne parvienne de sa part. Ses deux mains furent colsonnées dans son dos, empêchant tout mouvement. Malgré l’entraînement de tueur prodigué par la corporation, Thomas ne put rien faire. Il lui fallait attendre patiemment une opportunité pour qu’il puisse se libérer. Deux hommes le prirent par les épaules et commencèrent à le traîner au sol. Ils firent une pause devant la porte jusqu’à ce qu’ils entendent de la part de quelqu’un dans le couloir leur murmurer : « c’est bon ». Ils traînèrent Thomas dans tout l’immeuble jusqu’à un véhicule, on l’engouffra dans ce qu’il lui semblait être le coffre.
Bizarrement, il n’entendait pas la voix de SVA dans le véhicule, juste quelques petits bruits ressemblant à un pianotage de clavier. Un des hommes exprima juste quelques mots, qui furent : « cible récupérée. Départ pour zone temporaire de détention B43. » Le véhicule se mit en route. Au début, Thomas arrivait à se repérer selon les routes empruntées dans la ville. Mais rapidement celui-ci sortit de la métropole et il n’arriva plus à se repérer. Des tas de pensées submergèrent l’esprit de Thomas. Qui étaient ces hommes ? Il n’avait jamais entendu parler de ASE Security. Il pestait sur lui-même également, d’avoir commis un écart dans la procédure en ayant ramassé cette carte mémoire. Et que pouvait-elle bien contenir ? Qu’est-ce qui semblait si important pour que des hommes armés jusqu’aux dents débarquent comme cela chez lui ? Tout en essayant de desserrer ses liens, Thomas se remémora les événements de la journée, qui le conduisit jusqu’au coffre de cette voiture.
« Monsieur Jefferson, nous avons une nouvelle affaire pour vous. Nous avons identifié un trafiquant de semences. Selon les informations fournies par INDECT2, nous savons qu’il s’apprête à faire un échange aujourd’hui. Nous avons besoin que vous terminiez la personne avant que la transaction ne se fasse. Un autre agent est occupé à enquêter sur le groupe qui trafique nos graines, donc il est impératif que tout se fasse rapidement, et dans la plus grande discrétion, comme nous vous le demandons d’habitude. Les coordonnées de la cible sont en train de vous être transférées sur le réseau. Bonne journée. »
Thomas sortit du bureau du directeur du département d’enquête. « Encore un enfoiré de resquilleur » se dit-il, et machinalement, à voix haute demanda l’accès aux coordonnées du contrevenant. Automatiquement, sa géolocalisation s’afficha sur ses lunettes, et Thomas demanda l’accès aux données personnelles de sa cible. Il s’appelait Jeffrey Korsky, avait quarante-neuf ans (tiens, une des rares personnes ayant survécu à l’épuration en 2016). Thomas se demanda en voyant cela s’il était normal que la moitié des cibles qu’il terminait étaient des êtres humains qui avaient au moins vingt ans au moment du renouveau en cette année fatidique où la société fut entièrement remodelée. Chassant ses pensées, il continua de parcourir le dossier du fraudeur. Il travaillait pour la corporation Deysni, où il s’occupait de l’entretien des bureaux et studios de la métropole. Pas d’enfants, pas de compagne, l’amour de sa vie étant décédé lors du Tsunami qui dévasta New York en 2015. Grand client du Bordel de Madame Jane, où il dépensait principalement tout l’argent qui lui restait après ses besoins vitaux. Bref, visiblement, une petite vie sans histoire.
Thomas consulta l’emploi du temps de Jeffrey pour la journée. Il travaillait jusque midi pour sa pause déjeuner et reprenait à treize heures. Il restait jusqu’au turbin jusqu’aux environ de dix-sept heures ; et visiblement INDECT2 prévoyait qu’il se rendrait chez Madame Jane vers 21h. Rien entre les deux. Un trou de 4h. Thomas se dit que le méfait devrait se commettre dans ses eaux-là ; et il terminera donc la cible dès que possible après qu’elle aura fini son turbin quotidien. Il continua de fouiller dans la vie de Jeffrey, afin d’estimer ses déplacements. Celui-ci se rendait régulièrement dans le district Y98, un des quartiers de la ville à l’abandon, les budgets n’ayant pas été encore approuvés pour sa rénovation. L’avantage pour les contrevenants, c’est que la surveillance d’INDECT2 se limitait aux puces et aux passages de quelques drones, facilement évitables pour les connaisseurs. Pas beaucoup de caméras ni de micros dans le secteur, l’establishment pensant qu’un quartier abandonné ne méritait pas un tel contrôle. Parfait. Thomas savait déjà qu’à partir d’environ 17h30, il serait dans ce quartier-là.
A 17h tapante, Thomas réactiva le traçage par géolocalisation de sa cible. Exactement comme il avait prévu, celle-ci se dirigeait vers le vieux quartier désaffecté. Ce sera une opération facile, pensa-t-il, pas besoin de faire attention à d’éventuels témoins. Il le suivit à bonne distance, histoire de ne pas se faire repérer, SVA maintenant une distance d’une centaine de mètres entre sa cible et lui. Au bout de trente-cinq minutes, la cible avait arrêté tout mouvement. Il sortit de son véhicule, arma son flingue et prépara le silencieux. S’avançant à pas de loup tout en gardant un œil sur le déplacement du resquilleur, Thomas vissa le silencieux sur son arme. Pour être sûr que sa cible soit bien seule il demanda au réseau si d’autres personnes étaient dans le secteur. Personne de localisé à moins de 300 mètres. Parfait. Il contourna le bâtiment en ruine et put apercevoir sa cible. Dans quelques minutes ce serait fini, et il pourra rentrer chez lui. Il dirigea son arme vers sa victime.
— Monsieur Korsky ? En vertu de l’article 23 de la loi sur la protection des biens corporatifs, vous avez été rendu coupable de contrefaçon, recels de biens contrefaits et de trafic de produits illicites. Veuillez vous mettre à genoux pour exécution immédiate de la sentence.
La victime s’exécuta, sans montrer le moindre signe d’hostilité. Elle ne put juste s’empêcher de dire quelques mots avant que la détonation ne retentisse.
— Vous continuez à tuer des innocents. Qui n’ont juste soif que de liberté. Mais vous verrez, bientôt, votre prison dorée va s’effon…
La balle atteignit le centre du front de Jeffrey, qui s’effondra face contre terre. Thomas ne ratait jamais sa cible. Il avait été le meilleur tireur de sa promo et avait reçu plusieurs décorations, lors d’interventions en Syrie et Iran, durant ses années de service au sein des forces spéciales. Un petit resquilleur n’avait aucune chance face à l’arme ultime qu’était Thomas.
Dans le coffre, un bruit et un choc assourdissant troubla ses souvenirs. Quelque chose venait de percuter le véhicule qui l’emmenait dans le centre de détention temporaire.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top