Chapitre 2


Mia

-  Mademoiselle Town? 

Mon regard qui fixait l'horloge de la salle des pas perdus revint tout à coup à la réalité. 

- Oui? Qu'y-a-t-il ? 

Mon client me regarde avec des yeux tout ronds, encore menottés. 

- C'est l'heure de l'audience, me dit un confrère. J'agrippe ma longue robe noire et m'avance jusqu'à mon client. Je lui chuchote comment répondre face au Juge qui s'adressera aux prévenus lors de l'audience. Les règles d'or politesse et respect. Il hoche un "oui" du signe de la tête et nous entrons dans la salle. Je sens que je vais me retrouver enfermée pendant bien trois heures dans cette salle et j'en ai déjà la migraine. Je suis toujours un peu stressée lorsqu'il s'agit d'être à la défense. Défendre un coupable, inimaginable mais réalisable. A mon échelle je lui assure de pouvoir lui faire avoir la plus petite des peines qu'il mérite. Mais tout reste à la portée du juge qui tranchera le sort final. 

Après bien trois heures avec cinq minutes de pause, c'est l'heure du déjeuner. Mon client ainsi que les autres prévenus sont amenés par les policiers jusqu'à leur cellule où ils y recevront leur repas. Je sors du tribunal histoire de m'aérer l'esprit et de faire un tour. Cette affaire est lourde et semble interminable. 

Je descends les marches en actionnant ma musique dans mes écouteurs histoire de m'évader quelques minutes. Je marche quelques mètres et trouve une petite boulangerie en coin et y prend un sandwich, une boisson et un café. Surtout, c'est l'élément le plus important de ma journée, sans cette dose je crois que je ne tiendrais jamais autant. 

Au moment où je pars jeter mon repas et que je m'avance vers le tribunal une foule de monde se trouve devant les marches. Qu'est-ce qu'il se passe bon sang? Je m'approche et y voit deux de mes confrères, deux policiers et un homme à terre caché par leurs bras. 

- Je peux savoir ce qu'il se passe? Je demande en m'insérant parmi la foule.

- Un prévenu à essayer de s'échapper, me dit une dame de l'accueil du tribunal.

Génial, il ne manquait plus que ça à cette journée. 

- Allez, relève toi ! Dit un policier. Le jeune à l'air tout secoué. 

- Putain, c'est pas vrai, dis-je dans ma barbe. 

Je m'avance jusqu'aux policiers qui maintiennent le jeune homme en question.

- Pouvez-vous me laissez avec mon client deux minutes s'il vous plaît? 

Les deux hommes s'exécutent en levant les yeux au ciel.

- Faites gaffes, il a essayé de s'échapper.

Je soupire. 

- Mais qu'est-ce qui t'as pris? Je demande à mon jeune client. C'est pas avec cette attitude que tu vas t'en sortir, au contraire ça risque d'aggravé ton cas et je ne pourrai pas te sauver la mise comme je le voudrai.

Il souffle et me regarde :

- J'suis désolée maître, c'est juste que j'ai rien fait moi dans cette histoire de stup', on m'a pas laissé le choix. 

- Je te crois, mais c'est pas en voulant t'échapper qu'on va pouvoir clamer ton innocence. Refais plus ça!

Il me répond d'un petit oui innocent puis je fais signe aux deux policiers pas loin de venir le récupérer. 

Cette audience va promettre, et moi, je suis dans de beaux draps. Avec cette action on n'est vraiment pas prêt de s'en sortir... 

*

L'audience se termine vers vingt-et-une heures. Après avoir adressé un dernier mot à mon client que je revois demain je quitte le tribunal vers vingt-et-une heures quarante cinq. Je rejoins ma voiture et m'attends à passer encore trente minutes dans les bouchons, ce qui ne manque pas à l'appel. C'est bien une heure plus tard que j'arrive enfin chez moi. L''électricité est réapparue. Je ferme à clé mon petit chez moi et me dirige directement sous la douche. Une bonne douche bouillante pour effacer cette journée misérable. Je ne sais pas comment je vais pouvoir sauver mon jeune client. Je lui avais pourtant donné toutes les clés pour faire bonne figure, et il a fait tout l'inverse. C'est super. 

Je sors bien dix minutes après. J'enfile un pyjama tout chaud et m'installe devant ma télé avec un bon verre de chocolat chaud. Je zappe les chaînes, il n'y a jamais rien de bien intéressant ou de prenant. Je prends un livre mais mes pensées sont ailleurs. Je suis contrariée par cette journée. Je décide alors d'aller prendre un peu l'air. C'est l'occasion de pouvoir revoir Pete, le chanteur du groupe du bar de ma rue. J'enfile une robe noire, une paire de collant et des bottines noires. Je me maquille légèrement, enfile mon manteau beige et sors de chez moi. 

Quelques minutes à marcher je rejoins enfin le bar. Il n'est pas très plein ce soir. J'entre et salue le barman qui se souvient de moi de la veille. Je salue également le petit bonhomme avec qui j'avais tapé la discute hier et j'aperçois Pete au loin en train de rire avec un groupe de personne, une bière à la main. Je m'avance timidement vers eux. 

- Hey Mia! Tu es venue ! Ça me fait plaisir ! Se réjouit Pete. Je ne pensais pas susciter une telle réaction de sa part mais me voilà flatté.

- Oui, j'ai terminé le boulot plus tôt que prévu, alors je me suis dit pourquoi pas venir faire un coucou !

- Tu as bien fait, j'en suis content. Tu veux boire quelque chose? Je te l'offre!

Je lui souris.

- Allez, si tu insistes je prendrai une bière! Merci beaucoup.

Nous nous dirigeons vers le comptoir. Je passe la première. Je me faufile parmi les personnes qui se trouvent au milieu et je sens sa main effleurée mon dos pour me suivre et ne pas perdre le chemin. Nous voilà enfin au comptoir. Pete me commande ma boisson. 

- Alors, j'aimerais en savoir davantage sur toi, il me dit avec un regard insistant. Je me demande comment fait-il pour me fixer autant alors que moi je détourne sans cesse le regard.

- Que veux-tu savoir? Et pourquoi d'ailleurs? Je demande en esquissant un petit sourire provocateur.

Il sourit à son tour d'un sourire si tendre et craquant à la fois.

- Hum, je sais pas trop. Tes talents de bassiste m'ont bien plu, alors je me dis que si un de ces jours mon bassiste ne peut pas se représenter, je t'aurai toi sous la patte.

J'écarquille les yeux. Il ne perd pas le nord lui.

- Oh d'accord, c'est pour une histoire de business, je vois le genre. 

Il rit nerveusement puis me tapote l'épaule.

- Bien sûr on est comme ça à New-York; tout dans l'opportun tu vois?

Je ris à mon tour.

- Evidemment ! 

- Non, trêve de plaisanterie, t'as l'air sympa puis faut bien que quelqu'un te fasse découvrir les recoins de notre magnifique ville. C'est toujours bien de se sentir un peu accompagné quand on se retrouve loin de ceux qu'on aime. 

Je le regarde comme pour attendre la suite. Sauf qu'il n'y a pas de suite. Mais il a l'air d'en savoir quelque chose sur la distance.

- Tu as l'air de t'y connaître, je lance. Mais ça me fait plaisir que quelqu'un se rende compte que c'est pas tous les jours évident de se retrouver loin de ses proches. Mais je t'avoue qu'avec le boulot que j'ai, je n'ai pas trop le temps de ressentir le manque de mes proches.

- C'est positif alors si tu arrives à occuper ton esprit. Puis tu as trouvé ce petit endroit sympa où que des gens super cool t'aideront à t'intégrer.

- Je ne suis pas sûre que tout ces gens savent que je suis nouvelle ici, dis-je en souriant timidement.

- Le plus important c'est que je le sache, répond-il en me lançant un clin d'œil. Décidément, le clin d'œil est sa marque de fabrique. Vraiment un grand séducteur celui-là. Je présume qu'après chaque représentation il doit rechercher sa proie à mettre dans son lit comme tous rockeur.

Je décide de ne pas répondre à son avance. Je suppose qu'il serait bien trop content qu'une femme rentre dans son jeu.

- Quel âge as-tu Pete Loud? Je demande curieuse pendant qu'il récupère ma bière.

- J'ai 27 ans, je sais on croirait pas, dit-il en se lançant des fleurs.

- Effectivement, j'aurais dit que tu avais 21 ans.

Il reste bouche bée.

- Je ne pensais pas faire aussi gamin que ça mais si tu le dis.

- Je rigole. Tu fais ton âge.

- Et vous charmante Mia Town? Dit-il en faisant sautiller son sourcil droit comme pour me provoquer. 

- J'ai 25 ans. 

- Oh une petite jeune. Lâche-t-il. Plutôt jeune pour déjà être avocate non?

- J'ai suivi un cursus scolaire, j'ai passé mon concours que j'ai réussi du premier coup et me voilà ici.

- Une brillante étudiante. Sympa. Il me fixe de plus bel du regard.

- Et toi? Qu'as-tu fais comme cursus?

- Oh j'ai pas fait d'études moi ma grande, soupire-t-il. 

Il se lève du comptoir. 

- Suis-moi, je vais fumer un coup.

Je le suis de près, ma bière à la main.

- Donc tu n'as pas fait d'études. Et qu'as-tu fais alors? Je lui demande en retenant la porte du bar pour sortir sans me renverser ma boisson sur ma robe mais d'un seul coup, un mec complètement soul me bouscule et toute ma bière finit la première sur ma robe. 

- Fais chier, je lâche, tu peux pas faire attention pauvre type va!

Il rentre dans le bar à moitié déchiré. Pete se retourne, sa cigarette à la main.

- Qu'est-ce qui t'arrives?

- Le type m'a bousculé, j'ai toute ma bière sur ma robe, dis-je énervée. 

- Attends je vais chercher de quoi nettoyer ça. Il met sa cigarette à sa bouche et enlève sa veste en cuir. Tiens mets la pour pas attraper froid. 

Je la porte à mes épaules et y rentre mes bras bien trop petit pour sa grande veste. Il rentre à l'intérieur du bar et ressort avec le type complètement déchiré ainsi que des mouchoirs.

- Reviens plus nous faire chier t'as compris? Il lance en balançant le mec dehors comme si c'était un sac de patate.

- Tiens essaie de nettoyer un peu avec ça.

Je le remercie.

- Tu devrais attacher la veste, tu vas attraper la crève sinon. 

Je termine de nettoyer ma robe et relève la tête lorsque celui-ci prend les deux bouts de la veste qui m'entoure et me l'attache délicatement. Mon poul bat si fort tout à coup, je sens même mes joues devenir brûlante. Heureusement qu'il fait nuit et qu'il n'y a pas beaucoup d'éclairage dans cette rue. 

- Merci Pete.

Il a au moins réussi à esquiver ma question. C'est un mystère vivant, mais j'adore ça. 

- Tu devrais peut-être rentrer, il se fait tard. 

- Oui tu as raison, en plus cette journée a été assez éprouvante.

- Tu veux en parler? Il m'interroge.

- Oh une autre fois, c'est un peu long.

- Comme tu le souhaites. Si ça te tente demain on peut se retrouver devant le bar et on va se manger un truc histoire que tu me racontes ta vie d'avocate éprouvante. Je connais une bonne pizzeria, ça te fera découvrir un peu les lieux.

- Avec grand plaisir.

- Voici mon numéro. Il me tend un bout de papier qu'il range dans sa veste en cuir que je porte toujours. Tu n'as qu'à m'appeler une fois ta journée terminée. Je t'attendrai.

Je lui souris.

- Garde la veste, t'en as plus besoin que moi, finit-il.

Puis j'ouvre la porte de mon immeuble et me retourne vers lui ;

- Merci beaucoup Pete.

Puis je rentre dans mon immeuble direction mon petit lit douillé. Ce mec semble inaccessible et à la fois remplies de tendresse. Il semble avoir des difficultés à parler de lui mais je suis certaine qu'il se cache un homme rempli d'ambition et de choses passionnantes. En attendant je sais juste qu'il chante dans un bar, qu'il a 27 ans et qu'il me fait me sentir toute étrange lorsqu'il est proche de moi. Terrible attirance. Même pas 24 heures que je connais ce petit bout d'homme et me revoilà comme une gamine de quinze ans qui rencontre pour la première fois son premier amour.  

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