35.
Lili.
Samedi 17 Avril.
Yanel et Olivia posent les derniers cartons dans un coin de la pièce, tandis que les garçons ramènent le canapé depuis l'ascenseur. Ils le déposent contre un mur, Noé pousse un soupir, Louis étire son dos et Harry regarde autour de lui. Son nouvel appartement où il va passer sa première nuit ce soir. Cela fait des semaines qu'il attend ce moment avec impatience, il nous parle de ses projets de décorations, il nous montre des photos et je dois avouer qu'il a trouvé un bel endroit qui lui correspond.
Il est à peine onze heures trente, nous venons de terminer le déménagement. Les quelques meubles que Harry a emmené avec lui sont tous ici, nous avons réussi à tout caser dans deux voitures, en faisant deux aller-retour. Olivia s'occupe de brancher tout ce qui touche à l'électricité, notamment le réfrigérateur, la machine à laver et la télévision. Je sors les sandwichs que nous avons préparé de la petite glacière, Louis m'aide à tout disposer sur la table à manger, où traînent quelques affaires.
Nous mangeons tout en mettant en place quelques meubles et affaires. Harry se chargera de déballer le plus gros de ses cartons seul, mais nous l'aidons à disposer son appartement à sa guise et à vider ses affaires dont il a le plus besoin. Yanel met un fond de musique sur son téléphone, Harry ouvre grand la baie vitrée qui mène au petit balcon extérieur, et l'air printanier vient rafraîchir la pièce de séjour baignée dans la lumière.
Comme il est venu laver hier avec Louis, l'appartement sent le propre et le parquet semble briller sous les rayons du soleil. Je fais signe à Yanel de venir m'aider à porter une armoire dans la chambre, elle avale la fin de son sandwich à l'avocat puis se met en face de moi.
– Vous voulez que je le fasse les filles ?
Je hausse un sourcil à la question de Noé qui, bouteille de bière la main, s'avance vers nous. Yanel se redresse, quelques mèches de cheveux noirs tombent de son chignon sur le côté de son visage. Je pose mes poings de chaque côté de mes hanches et lui demande :
– Pourquoi ? Parce que nous ne sommes pas des hommes, nous ne sommes pas capables de porter des meubles ?
– Je n'ai jamais dit ça, il lève les mains en signe de paix, simplement que c'est peut-être trop lourd, même vide ces trucs pèsent des tonnes.
– Merci No, mais on se débrouille très bien. Ne t'en fais pas, si on a besoin d'aide on criera après toi.
Il lève les yeux au ciel et je lui souris fièrement. Sans aucun problème, Yanel et moi portons l'armoire jusqu'à la chambre, que nous posons en face du lit de Harry, près de sa bibliothèque encore vide et des sacs empilés dans un coin.
Yanel rejoint Olivia en cuisine qui termine de sortir de la vaisselle des cartons et je sors avec les garçons qui sont déjà sur le balcon. Louis et Noé fument en discutant, Harry tient son petit ami contre lui et regarde à l'horizon. Je m'approche à sa gauche, et appuie mes coudes sur la rembarre. Il me regarde et m'adresse un sourire. Un vrai sourire, un de ceux que je ne vois pas souvent sur son visage mais qui sont présents ces derniers temps. Et je sais que c'est surtout grâce à Louis.
Harry nous a annoncé la nouvelle il y a quelques semaines, au courant du mois de mars, que Louis et lui s'étaient mis ensemble. Il nous l'a dit de bout en blanc, tandis que nous terminions de nettoyer la cuisine à la fin de notre journée de travail. Ce n'était qu'une question de temps, parce que j'étais persuadé qu'ils allaient finir par dépasser le stade de l'amitié, il y a des gestes et des regards qui n trompent pas.
Je me souviens parfaitement que Noé et moi avions échangé un regard complice avant de venir le serrer dans nos bras en même temps. Il a été étouffé par notre câlin, mais ça l'a fait rire. Et ce n'est pas trop tôt, parce qu'il mérite d'être heureux et Louis est une bonne personne qui lui apportera encore beaucoup de bonheur.
Il y a un lien fort et unique qui les relie, comme celui entre Yanel et moi. Ce genre de relation ne s'explique pas, c'est une évidence. Ils savent se compléter et se comprendre malgré leurs différences, ils n'ont pas besoin de se parler pour communiquer, parfois cela passe par un regard ou un simple geste. Il leur arrive d'échanger des sourires, au cours d'un silence, et c'est de cette manière que l'on reconnaît un véritable amour.
– Alors, je prends la parole au bout d'un petit moment à observer la vue, comment tu te sens ?
– Je suis vraiment très content d'être chez moi.
Je tourne la tête vers lui tandis qu'il resserre son bras autour de Louis, qui lui rit avec Noé, plongés dans leur discussion. Ce ne sont pas des mots jetés en l'air, je n'ai jamais connu Harry aussi lumineux et serein que ces dernières semaines. La main de Louis glisse sur la sienne, posée contre son ventre, et leurs doigts s'entrelacent, c'est presque devenu un réflexe. J'ai aussi ces habitudes avec Yanel, nous ne réfléchissons plus aux gestes que nous avons l'une envers l'autre, ça en devient naturel. Mais ce sont des petites attentions qui continuent de nous toucher.
Harry continue de sourire, je pose une main sur son épaule et me hisse sur la pointe des pieds pour embrasser sa joue affectueusement. Le soleil éclaire une partie de son visage, il plisse les yeux, bientôt fermées, puis profite de la chaleur des rayons sur sa peau. Je laisse ma tête retomber avec légèreté contre son épaule puis je lui dis plus bas :
– Moi aussi je suis très heureuse pour toi Harry, tu le mérites. Et en plus, tu vas avoir ton propre espace pour cuisiner.
– Ouais, intervient Noé, c'est justement ce que je disais à Louis ! Il pourra nous inviter plus souvent à goûter ses préparations comme ça.
Nous tournons tous les deux la tête vers notre ami, assit sur une des deux chaises en fer bleue que Harry a installée sur le balcon avec une table de la même couleur. Il nous a dit qu'il comptait en faire un bel espace de vie extérieur, décorer avec des plantes, ajouter un siège plus confortable pour se reposer ou y lire, accrocher une guirlande lumineuses à la rembarre et faire pousser des tomates cerises et des framboises dans un petit potager.
Tandis que je hausse un sourcil, Harry laisse échapper un léger rire et appuie son menton contre le crâne de Louis. Ses deux bras sont maintenant passés autour de sa taille et Louis, lui aussi, sourit jusqu'aux oreilles en prenant la parole.
– Alors, j'ai dit que j'allais venir chez mon copain régulièrement pour qu'il me fasse à manger, je n'ai jamais parlé une seule seconde de partager un repas avec d'autres personnes que lui.
Nos quatre rires résonnent dans l'air doux du printemps, Noé fait une grimace à Louis puis croise les bras sur son torse, avant de porter la fin de sa cigarette à sa bouche. Harry rit près de l'oreille de Louis, qui sourit encore malicieusement, et lui embrasse la peau à cet endroit.
– Ne vous en faîtes pas, vous êtes tous et toutes les bienvu.es ici. Et je dois vous remercier d'être venu m'aider à tout déménager. Une fois que je serais mieux installé, je vous cuisinerai une de mes nombreuses recettes.
Le sourire aux lèvres, Noé se lève et vient taper dans la main de Harry. Il écrase sa cigarette dans un cendrier qu'il lui a offert pour son emménagement, Louis fait de même. Je rejoins les autres à l'intérieur afin de les laisser à deux un petit moment.
Vers treize heures, après avoir déballé quelques cartons et rangé un peu l'appartement, Olivia nous laisse à cinq et part à son rendez-vous. Nous montons dans la voiture de Harry afin d'aller en ville. Il doit encore acheter des décorations, des plantes et de quoi se nourrir pour le reste week-end au moins.
Nous passons presque trois heures à se balader de boutique en boutique, et même s'il a ses idées en tête Harry écoute nos conseils. Il choisit des ustensiles de cuisine qui lui manquaient, un grand miroir pour sa chambre, une tapisserie à accrocher au-dessus de son canapé, des bougies naturelles dans un magasin artisanal, du nouveau linge de lit, des coussins, un plaid, quelques affiches culinaires pour décorer sa cuisine, une lampe industrielle sur pied, des vases pour empoter les plantes qu'il a sélectionné dans un fleuriste. Et nous terminons notre après-midi shopping en passant au supermarché du coin.
La voiture est chargé, surtout le coffre, mais Harry passe la route du retour à sourire. Louis le regarde comme s'il était la huitième merveille du monde et je le comprends, parce qu'il rayonne. J'ai presque les larmes aux yeux de le voir si heureux, lui qui s'est battu si longtemps contre lui-même, contre des choses dont il ne nous a jamais parlé mais qui le hantent depuis toujours.
C'est un grand changement pour lui, mais un changement dont il avait besoin. Aujourd'hui, il peut enfin commencer un nouveau chapitre de sa vie, et il n'est pas seul, il ne le sera jamais, nous sommes tous là, ses amis et son petit ami.
Une fois dans l'appartement, Yanel et Harry rangent les courses dans le réfrigérateur. Louis fouille parmi les livres dans un carton, Noé et moi choisissons une playlist et nous passons le reste de l'après-midi à ranger et installer des décorations aux murs.
Vers dix neuf heures, Noé propose de se commander une pizza pour ce soir. Louis est le seul qui passe la nuit ici, mais nous restons encore un peu afin de partager une partie de la soirée ensemble. Une fois les choix faits, Noé et Louis partent chercher les commandes à une pizzeria en bas de la rue.
Yanel est devant la télévision, sur son téléphone, et j'aide Harry à disposer un minimum la table. Il a déjà mis certaines de ses plantes dans des vases ou des pots, posés sur des meubles et surtout il a déballé ses ustensiles de cuisine avec le même regard que celui d'un enfant le matin de Noël.
Nous lui avons tous offert un petit quelque chose en guise de cadeau d'emménagement, et j'ai choisi un pêle-mêle de photos de nous quatre, Yanel, Noé, Harry et moi encadrée et qu'il a déjà accroché au mur du salon. Olivia lui a offert une bouilloire, Yanel un diffuseur d'huiles essentielles, Noé un petit meuble pour entreposer ses vinyles et nous connaissons le cadeau de Louis qui attend ce soir pour lui offrir. Mais nous savons déjà que l'idée va ravir Harry.
Quand les pizzas arrivent, nous nous installons pour les manger tant qu'elles sont encore chaudes. Nous partageons les parts entre nous, dans la bonne humeur. Même si nous avons le ventre plein à la fin, Harry va danser avec Noé et Yanel pendant que Louis et moi préférons rester à table pour digérer.
Je termine mon verre d'eau et tourne mon regard vers lui, un sourire danse sur ses lèvres depuis ce matin, il joue avec son briquet en suivant Harry de ses yeux brillants d'amour. Discrètement, je me penche dans sa direction et lui demande plus bas, pour qu'il m'entende au-dessus de la musique mais que cela reste entre nous :
– Tu tiens vraiment à lui hein ?
Il tourne sa tête vers moi, pose son briquet sur la table et je lui souris parce que je connais déjà sa réponse. C'est assez flagrant et n'importe quelle personne qui les verrait agir comme ils l'ont fait aujourd'hui pourrait croire qu'ils sont ensemble depuis des années.
– Oui, son sourire s'étend, mais c'est encore plus fort que ça.
Je le vois inspirer légèrement, tandis que son regard se pose à nouveau sur Harry, il ne semble jamais réellement le quitter, même quand son attention est dirigée ailleurs.
– Je l'aime comme je n'ai jamais aimé personne avant. Quand je le vois sourire comme ça, j'ai envie de le protéger du monde entier, je sais que c'est impossible mais... je suis prêt à décrocher la lune pour lui.
C'est un amour qui brave les tempêtes, un amour qui ne connaît aucune limite. Je crois que je me reconnais un peu en Louis, parce que moi aussi quand je suis tombée amoureuse de Yanel pour la première fois j'ai eu la sensation de flotter au milieu d'un océan d'étoiles. Ce n'est jamais un voyage tranquille, il y a des embûches, des disputes, mais c'est aussi apprendre à ne pas partager le même avis, à faire des concessions, à montrer ses faiblesses.
Et j'ose espérer que Harry trouve en Louis un confident, une personne en qui il place assez de confiance pour vouloir tout lui dire, une personne qui le tiendra dans ses bras, l'embrassera et séchera ses larmes, une épaule sur laquelle pleurer et un amant qui l'aimera tout entier.
Mais je crois que Louis est capable d'aimer jusqu'à son dernier souffle, et même bien après. Harry est plus timide, plus réservé, pour autant je le connais assez pour constater qu'il a changé. Il me paraît plus léger et coloré.
Il lui reste encore du chemin à faire, mais il est sur la bonne voie.
– Il a vraiment de la chance de t'avoir.
– C'est moi qui suis le plus chanceux, souffle Louis avant de me lancer un sourire amusé, j'ai le droit à des pâtisseries et des petits plats presque tous les jours c'est le pied. Que demander de mieux ?
– Tu as raison, j'acquiesce et entre dans son jeu, ma petite amie a le droit à des tatouages gratuits.
– J'avoue que c'est pas mal également. Mais, elle a de la chance de t'avoir aussi, tu es une personne géniale.
– Merci Louis, je te retourne le compliment.
Nous échangeons un sourire complice, il me fait un clin d'oeil et se lève pour aller rejoindre Harry sur la piste de danse improvisée. Ses bras passent autour de sa taille, et il les fait balancer doucement tandis que leurs lèvres souriantes se retrouvent. Yanel me tend sa main, et pour ne pas laisser Noé tout seul, nous nous dansons avec lui au rythme de la musique.
Aux alentours de vingt deux heures, nous nous décidons à rentrer tous les trois. Yanel propose à Noé que nous le raccompagnons comme il est venu à pieds. Et vient le moment des au revoir. Tout le monde s'enlace.
Harry nous regarde tour à tour, un sourire se dessine sur ses lèvres lorsque Louis passe un bras autour de sa hanche afin de le garder contre lui.
– Je ne peux pas assez vous remercier d'avoir été présent aujourd'hui et d'être là pour moi, je vous en suis très reconnaissant.
– C'est normal, c'est à ça que servent les amis.
Ma réponse le fait sourire davantage, il baisse un instant les yeux au sol et se met à jouer avec les bagues autour de ses doigts. Puis, il secoue finalement la tête.
– Oui, mais vous êtes plus que ça. C'est vous ma famille.
Les larmes me montent aux yeux à ses mots, je sais que Harry est toujours très réservé quant à ses sentiments et qu'il nous adresse des paroles aussi sincères me touche en plein coeur.
Nous n'hésitons pas bien longtemps avant de venir le serrer dans nos bras tous les trois en même temps. Louis fait un mouvement pour se reculer et nous laisser ce moment, mais Harry tend son bras et l'attire à son tour dans cette étreinte.
Parce que Louis aussi, d'une certaine manière, est sa famille.
Quand nous nous reculons, je prends le visage de Harry entre mes mains et le regarde droit dans les yeux.
– Harry... Tu peux toujours compter sur nous.
Noé approuve d'un hochement de tête et Yanel d'un sourire. Il nous remercie encore, je lui embrasse la joue et lui dis :
– Allez, profite de ton premier week-end dans ton nouvel appartement. On se voit Lundi au travail.
– Oui, merci, à Lundi vous deux. Et à bientôt Yanel.
Ils s'échangent des signes de main tandis que Harry ouvre la porte d'entrée. Yanel sort les clefs de la voiture de son sac, je me tourne une dernière fois vers eux en sortant dans le couloir.
– Passez une bonne soirée les garçons, je tourne la tête sur la droite, à plus tard Louis !
– Merci Lili. Rentrez bien surtout, faites attention à vous.
Je souris, Yanel me prend la main et nous sortons tous les trois du bâtiment. J'ai le coeur chargé d'émotions, mais surtout de fierté.
Parce que Harry et Louis ont un avenir extraordinaire devant eux.
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