23.

Louis.

31 Décembre.

C'est Harry qui ouvre la porte, un sourire fend mes lèvres et la surprise se lit sur son visage. Je crois qu'il ne s'attendait pas du tout à nous voir ici ce soir, Zayn et moi, mais quand je suis venu au salon de thé après Noël, elle m'a prise à part pour me proposer de venir à la soirée du nouvel an qu'elle organisait chez elle et m'a précisé que je pouvais ramener mon colocataire si je voulais. Je lui ai dit que je devais lui en parler avant, même si je savais que mon meilleur ami n'allait pas refuser une occasion de faire la fête, c'est toujours mieux que de boire à deux dans notre appartement.

Harry cligne des paupières, je ris, Zayn lui serre la main pour le saluer et je lui fais un petit signe. Il nous laisse entrer. Zayn ne connaît personne à part Harry, mais il va tout de même dire bonjour à tout le monde, il n'a jamais eu de mal à aller vers les autres et faire de nouvelles rencontres.

Je me retrouve seul avec Harry dans l'entrée, ses yeux sont rivés sur moi et je remarque les traces brillantes illuminateur sur ses pommettes qui les rendent plus saillantes encore. Mais il est beau. Il est tellement beau, le vert de ses yeux ressort grâce à sa chemise blanche, dont quelques boutons sont ouverts sur son torse, et son pantalon bleu ciel d'été.

Il est tellement beau que j'en oublie de respirer.

C'est sa voix qui me ramène sur terre, il me demande :

– Pourquoi tu es là ?

Un sourire traverse mes lèvres. Quand j'ai confirmé à Lili ma présence, après avoir échangé nos numéros ce jour là au salon de thé, elle m'a spécifiquement demandé de ne rien dire à Harry, que ce serait une surprise, et je crois que ça lui fait plaisir.

J'espère.

– Oh, je peux repartir si tu veux ?

– Non !

Il secoue la tête tandis que je montre la porte de la main en essayant de ne pas sourire trop fort. Comme je recule d'un pas pour faire mine de partir, il se rapproche de moi, un tout petit peu, mais ça suffit à me faire monter la chaleur aux joues.

Et je n'ai encore rien bu.

– Non, il reprend plus doucement, excuse moi, je voulais dire... je ne savais pas que tu allais venir.

– C'est le principe d'une surprise Harry.

Son rire résonne à mes oreilles et vibre à l'intérieur de tout mon corps. Il me regarde avec tellement de douceur dans ses yeux que j'ai envie de le serrer dans mes bras et ne plus jamais le lâcher.

- Mais c'était l'idée de Lili, elle a tout organisé.

Harry acquiesce, il fait tourner une bague autour de son doigt, je remarque les deux nouvelles couleurs alternées sur ses ongles. Le rose et le bleu. Je me demande si un jour il arrêtera de devenir plus beau encore à chaque fois que je le vois.

Il passe sa langue entre ses lèvres, je détourne le regard, parce que je commence à le fixer trop longtemps. Lui, ses yeux et sa bouche. Et ça ne devrait pas me faire autant d'effet quand il me dit, plus bas, sur un ton timide :

– Je... je suis quand même content que tu sois venu.

Un sourire fend mes lèvres. Ce ne sera certainement pas le dernier de la soirée.

Je sens toute la sincérité dans sa voix, un fond de timidité aussi. Mes doigts se serrent autour des hanses du sac en plastique car là, à cet instant précis, j'ai vraiment envie de lui prendre la main.

– Moi aussi.

On échange un sourire pendant ce qui semble être une éternité, je crois que j'aurais pu passer des heures à simplement le regarder, je ne m'en lasse pas. Mais les rires au salon me sortent de ma transe, je tourne la tête vers les autres. Zayn discute avec eux, ils s'entendent déjà visiblement tous bien.

– Bon, je vais peut-être aller dire bonjour aux autres.

Je lui fais un clin d'oeil en riant, avant de m'éloigner vers le salon. Harry me suit, tandis que je salue Lili et Noé, que je connais déjà, et la grande fille brune, Yanel, qui se présente comme la petite amie de Lili. Et ce n'est pas compliqué à remarquer, étant donné la manière dont elles se regardent et se sourient.

– On a ramené de la bière et des biscuits, intervient Zayn après les présentations.

– Ah c'est super on attendait plus que vous ! Répond Noé d'un ton enjoué. Les gars, qu'est-ce que vous buvez ?

– Bière pour moi, s'il te plaît.

– Pareil, merci.

Noé s'éclipse vers la cuisine américaine avec Zayn, après qu'il m'ait pris le sac des mains. Ils vont certainement ranger les affaires à deux. Lili me débarrasse de ma veste en jean, qu'elle accroche à côté des autres à l'entrée.

On discute un peu tous les deux, elle me demande si ça ira pour rentrer cette nuit. Je l'avais déjà informé qu'on ne resterait pas dormir avec Zayn, parce qu'on habite à quinze minutes à pied de son appartement, et qu'on ne voulait pas déranger.

Yanel s'occupe de lance la musique sur les enceintes liées à la télévision, Harry ramène un plateau de toasts et un bol avec des biscuits, il s'assoit ensuite dans le canapé et je m'installe à côté de lui. Noé revient avec ma bouteille, je le remercie, Zayn prend place à côté de moi et me jette un regard lourd de sens quand il remarque la personne à ma gauche. Je lui donne un coup de coude et il a du mal à cacher son rire.

Noé ramène d'autres bouteilles sur la table basse, Lili s'assoit dans un fauteuil, Yanel sur ses genoux. Et on commence par discuter tous ensemble, autour d'un premier verre, histoire de faire connaissance. Harry et Yanel ne parlent pas beaucoup, ils sont plutôt discrets tous les deux, au contraire de Lili et Noé qui animent la soirée. Mais tout le monde a l'air de passer un excellent moment.

C'est d'ailleurs Lili qui se lèvent d'abord, environ une heure après, pour se mettre à danser, entraînant sa petite amie avec elle. Yanel lève les yeux au ciel mais la suit dans ses mouvements. Noé sort un paquet de cigarettes de sa poche et nous demande, à Zayn et moi, si on fume. Il se lève et se dirige vers la porte vitrée qui mène au balcon. Mon meilleur ami acquiesce et se met debout à son tour.

D'habitude, je les aurais suivi, mais j'ai toute la soirée pour fumer, et je ne veux pas quitter ma place près d'Harry tout de suite. Ni le laisser seul. Je secoue la tête en disant que je n'ai pas envie de fumer maintenant, Zayn hausse un sourcil dans ma direction mais s'éclipse ensuite sur le balcon.

Une brise d'air frais s'infiltre dans l'appartement et me fait frissonner, Harry me tend le plateau avec les toasts. J'en prends un au houmous et le remercie. Il porte son verre de vodka à ses lèvres, encore une fois, peut-être que je les regarde un peu trop, surtout quand il passe sa langue entre elles.

Pour chasser cette image de mes pensées, j'engloutis le toasts et fixe mon regard sur l'écran de télévision où une version karaoké d'une chanson de Dua Lipa débute à l'écran. Lili se met à chanter à tue tête, accompagné de Noé depuis le balcon, je ris et tourne la tête vers Harry qui est tout aussi amusé que moi.

Au bout de deux minutes, quand ils se sont calmés, je profite de ce moment pour lui demander :

– Dis, tu as réfléchi à l'exposition, tu voudrais y aller quand ?

Harry tourne la tête vers moi et cligne des paupières, le vert de ses yeux n'a jamais été aussi vif. Je sais que je viens de lui offrir le cadeau il y a seulement quelques jours, mais j'ai secrètement très envie d'y être.

– Il faut que je demande à prendre un jour de congé d'abord, mais quand tu le souhaites.

Je passe mon pouce contre le goulot de ma bouteille de bière, elle est presque vide, c'est ma deuxième, j'ai déjà la chaleur qui me monte aux joues, mais je ne crois pas que ce soit à cause de l'alcool.

Après avoir acquiescé, je passe à mon tour ma langue entre mes lèvres, elles sont sèches. Je porte un doigt à ma bouche, mordille un de mes ongles puis ajoute :

– Parce que je... je m'étais dit qu'on pourrait y rester deux jours. C'est à côté de la mer, ce serait pas mal de visiter autour et aller prendre l'air sur la plage, tant qu'à faire ?

– En hiver ?

C'est vrai. Je n'ai pas réfléchi à ça. Harry me regarde avec un sourire en coin, je baisse les yeux et mes joues rougissent davantage. Je me sens très bête d'un coup. Et puis, Harry n'a peut-être pas envie de passer deux jours entiers avec moi.

Déjà honteux, je prends une gorgée de bière, afin de terminer la bouteille, et peut-être me donner un peu de courage. Mais ça ne fait rien.

– Je ne sais pas, je réponds en haussant les épaules, on est pas obligé c'est juste... une idée. Je ne suis jamais allé là bas, et je n'ai pas vu la mer depuis des années. Je crois que la dernière fois, c'était quand on est allé en vacances dans le sud avec notre mère, un ou deux ans avant qu'elle ne commence à tomber malade...

– D'accord, ça ne me dérange pas.

Les mots d'Harry me font relever la tête vers lui, il me sourit, et je donnerais tout pour voir ça chaque jour. Je ne peux pas m'empêcher de sourire, moi aussi.

– Vraiment ?

– Oui, et puis c'est joli comme endroit.

– Tu t'y es déjà rendu ?

– Quand j'étais plus jeune, oui, quelques fois... c'était mes vacances à moi.

Il hésite sur la fin de sa phrase, je sens qu'il y a un autre sens derrière ses mots, mais je ne lui demande pas. Je n'ai pas envie que les étoiles disparaissent de son regard. A la place, je tape doucement mes doigts contre son genou et lui dis :

– Je compte sur toi pour me montrer tous les beaux endroits, dans ce cas.

Son sourire répond au mien, mon coeur fait un drôle de saut dans ma poitrine. Je pose ma bouteille vide sur la table basse et appuie mon dos contre le fond du canapé.

– Tu sais s'il y a des hôtels où on pourrait passer la nuit ?

– Il me semble, je ne suis pas certain, il doit y en avoir un à quelques mètres de la plage.

– Ah oui c'est génial ça ! Je me renseignerais.

Si en plus de visiter la mer, je peux la voir ou l'entendre depuis la chambre d'hôtel ce serait un rêve. Ma mère adorait s'y rendre, respirer l'air là bas, écouter le bruit des vagues, se faire bronzer en lisant un livre pendant qu'on jouait dans le sable.

Elle nous achetait toujours une glace à chacun après une baignade, et sur le retour on chantait tous ensemble dans la voiture. Je me souviens d'une chose surtout, ma mère n'arrêtait jamais de sourire. Et ce sourire était le remède à tous les maux.

– Mais comme tu as dépensé pour les billets, je souhaite payer notre nuit.

– C'était un cadeau, Harry.

Son regard ne quitte pas mon visage, il hausse un sourcil, l'air de dire qu'il ne changera pas d'avis. Mais je crois qu'à sa place je ferais la même chose. Je lève les yeux au ciel, exagérément, et croise les bras sur ma poitrine.

– Très bien, je suppose que je peux te laisser payer notre séjour.

– Promis ?

Quand je tourne la tête vers lui, il tend son petit doigt vers moi, mon sourire s'agrandit, je pouffe mais lie mon auriculaire au sien. Et je lui réponds en le regardant dans les yeux :

– Oui, promis.

Ma réponse lui fait plaisir, il sourit en me montrant ses dents et ses fossettes. Je recule ma main et prends ma bouteille vide, puis je lui demande, pour vite changer de sujet avant d'avoir envie de l'embrasser plus que de raison :

– Tu veux à boire ?

– Non merci, il montre son verre, j'en ai encore.

J'acquiesce, Lili a rejoint les garçons sur le balcon, Yanel me remplace près d'Harry. Une fois en cuisine, je me sers une vodka redbull, avec une bonne dose d'alcool parce que j'ai vraiment besoin de penser à autre chose qu'à la bouche d'Harry que j'ai tant envie d'embrasser.

Quand je reviens, Zayn est rentré, je vais fumer dehors avec Lili et Noé, ils sont vraiment sympathiques et drôles. J'apprends encore un peu à les connaître, ils me parlent de ce qu'ils font dans la vie, Lili me montre les tatouages qu'elle dessine et reproduit sur son corps ou celui des autres, Noé est plus comme un électron libre, il attend de voir où la vie le mènera et je trouve que c'est une belle façon de penser.

– Qui sait, peut-être que dans deux ans, j'aurais tout quitté et je serais à New York ou en Thaïlande.

– Tu seras surtout au chômage ouais.

La remarque de Lili nous fait rire tous les deux, Noé lui jette un regard noir derrière sa cigarette, je tire sur la mienne et les laisse se chamailler encore, même s'ils s'entendent comme frère et sœur. Ils me font penser à ma propre famille. Ce genre de lien qui défie les années.

Une fois ma cigarette terminée, je retourne à l'intérieur, il fait quand même assez frais et je n'ai pas mis ma veste, la peau nue de mes bras frissonne. Je fronce les sourcils lorsque je remarque que Zayn et Harry sont à la cuisine, en train de sourire comme deux complices, au-dessus du téléphone de mon meilleur ami. Il se dépêche de le ranger dans sa poche, l'air de rien, quand je m'approche d'eux.

Harry porte son verre à ses lèvres, son regard posé sur moi, mais ça ne suffit pas à cacher le sourire qui danse sur ses lèvres. Je ne me plains pas, j'aime ça. Beaucoup, même. Mais c'est carrément suspect. Je croise les bras sur ma poitrine.

– Qu'est-ce que vous amuse tant, je peux savoir ?

– T'es bien curieux d'un coup, me lance Zayn, amusé.

– J'ai des raisons de l'être ?

Je hausse un sourcil, et ça le fait rire. Harry tient son verre, le bas de son dos appuyé contre le plan de travail. Il paraît si imposant, grand, mince, élancé et en même temps je sais que je me sentirais sur un nuage s'il me prenait dans ses bras. Il y a chez lui une douceur qui ne s'explique pas.

– Je montrais juste des photos à Harry.

– Des photos ?

– Ouais, de toi, genre quand t'étais gamin.

Bien que je fasse mine d'être excédé, je ne suis pas le moins surprit du monde, je m'y attendais. Zayn attendait la moindre occasion pour se retrouver seul avec Harry et lui parler de moi, sans doute en bien, parce que je connais mon meilleur ami et j'ai confiance en lui, mais j'ai tout de même peur de ce qu'il a pu lui montrer.

– Pardon ? Tu as eu mon accord peut-être ?

– Bah montre lui des photos de moi en échange, je m'en fiche.

Sourire aux lèvres, il vient passer un bras autour de mes épaules et embrasser ma tempe. Je râle, bien que me connaissant, je serais en train de rire avec lui dans moins de quinze minutes. Ce n'était pas une mauvaise attention, je le sais, au contraire, mais je n'aime pas être dans le secret.

Zayn part au salon rejoindre les autres, nous nous retrouvons seuls, Harry et moi, face à face. Il me regarde avec ce sourire qui me fait trembler les genoux, je décroise les bras, les laisse pendre le long de mon corps.

– J'ai besoin de boire.

Ni une ni deux, je m'avance vers le plan de travail avec les bouteilles. Je me serre un verre de vodka redbull, j'en bois trois longues gorgées.

Harry s'est maintenant tourné sur le côté pour être vers moi. Il m'offre un sourire compatissant, le genre de sourire auquel je ne peux pas résister.

– Ce n'est pas méchant tu sais, on parlait des fêtes. Il m'a montré ses photos à Noël, ses sœurs, puis quelques unes de vous qu'il avait dans son téléphone. Et dans sa galerie il est tombé sur deux ou trois de quand tu étais petit.

Je marmonne entre mes dents, ça le fait sourire, c'est déjà ça.

– Tu étais mignon.

– Ne commence pas...

Je râle, mais mes joues rougissent comme jamais, j'essaie de ne pas penser au fait qu'il vient de me dire ouvertement que j'étais mignon.

Avant. J'étais mignon avant.

Ça n'empêche pas mon coeur de s'emballer à l'intérieur de ma poitrine.

J'ai besoin de me concentrer sur autre chose. Je termine mon verre, lui jette un regard entre deux, puis m'en ressers un. Quand il me voit vider celui ci et m'apprêter à m'en servir un troisième, il me prend délicatement mon verre des mains et soupire.

– Louis...

Mon prénom coule sur sa langue, c'est à peine un murmure et pourtant il résonne dans l'intégralité de mon corps, il me court sous la peau, fait frissonner les poils sur la nuque, me retourne l'estomac.

Peut-être que j'ai trop bu.

Peut-être que je suis en train de tomber amoureux de lui.

– Tu veux danser ?

Sa question me ramène à la réalité, je cligne des paupières et regarde autour de moi. J'ai oublié un instant où nous étions, je baisse la tête et hausse les épaules.

– Je ne sais pas danser...

– Ce n'est rien, moi non plus. Et, sincèrement, je crois que Noé est le pire de nous tous.

Un rire sort de ma bouche, j'observe le milieu du salon où, effectivement, il est en train de se déhancher sur de la musique à côté de Lili. Yanel est Zayn sont en pleine discussion dans le canapé.

Quand je repose mes yeux sur Harry, il tend sa main vers moi, le geste est si lent que j'ai le temps de le voir au ralenti, ou c'est parce que je ne dois plus être assez sobre. Mais je n'hésite pas, je la prends. Je n'ai pas envie de résister. Un sourire habille les lèvres d'Harry, il lie nos doigts, et m'emmène au salon, à côté de ses amis.

Et Harry est le pire menteur au monde, parce qu'il est un très bon danseur, il fait juste exprès de ne pas savoir pour me mettre plus à l'aise et me faire rire. Et ça fonctionne. Je ris à en avoir mal au ventre, il garde un moment ma main dans la sienne, me fait tourner autour de moi même, bien que je manque de trébucher, mais ça l'amuse alors je regarde son sourire, et j'ai un peu froid lorsqu'il lâche mes doigts.

Nous continuons de danser pendant trois chansons, peut-être quatre, je ne compte plus, je m'amuse, j'ai chaud, j'ai mal aux joues tant je ris et souris, les fossettes d'Harry ne disparaissent jamais et c'est la plus belle chose qui m'ait été donné de voir.

Puis d'un coup les autres se joignent à nous en criant un décompte, je comprends qu'on va passer à la prochaine année dans quelques secondes, moins de dix. Lorsque le zéro arrive, nous crions tous une bonne année. Zayn est le premier à me serrer dans ses bras, puis tout le monde y passe. Noé augmente la musique, sautille partout, Lili et Yanel partagent leur premier baiser de cette nouvelle année.

Puis Harry me sourit et nos corps se retrouvent dans une embrassade que je n'aurais jamais voulu quitter. Il sent affreusement bon, ses boucles me chatouillent légèrement le visage et ses bras sont à la fois chauds et rassurants. Quand on se détache, nous nous souhaitons d'une même voix :

– Bonne année.

Après ça, j'ai besoin de me poser, de souffler. Harry nous ramène nos verres, je le remercie, je n'ai jamais eu aussi soif. Et envie de prendre l'air. Je ne sais pas quelle heure il est, mais la soirée semble éternelle.

Je m'assois sur la chaise du balcon et m'allume une cigarette. Pendant un instant, je suis seul, j'entends les autres rires au salon, un fond de musique, mais la nuit est calme, silencieuse. Le ciel, gorgé d'étoiles, certaines brillent plus que d'autres.

Puis à un moment, une ombre se dessine sur le sol, je tourne la tête, Harry se tient à l'entrée, il me regarde déjà, me sourit et demande :

– Je peux me joindre à toi ?

Sa voix est basse, comme si nous nous trouvions dans un tout endroit, plus tranquille et secret. J'acquiesce en souriant derrière ma cigarette. Il s'assoit sur la chaise à ma droite pendant que je tire une latte, je passe mon pouce contre ma lèvre inférieure après avoir soufflé la fumée.

Ses joues sont colorées de rose, ses boucles partent dans tous les sens, c'est joli. Il baille un peu, derrière sa main, puis s'excuse. Je lui souris, et demande :

– Tu connais les constellations ?

Harry secoue la tête, mon sourire se creuse davantage tandis que je tape le bout de ma cigarette au-dessus du cendrier.

– Moi non plus.

Nous tournons la tête dans un mouvement synchronisé l'un vers l'autre, nos regards s'accrochent un instant, je crois que je peux voir le reflet de la lune dans le sien, puis nos rires se lient harmonieusement dans l'air.

– J'ai un livre à l'appartement pourtant, sur le ciel, les galaxies et tout ça. Mais je l'ai jamais lu, je crois que j'ai peur de ne rien comprendre, même si ça semble fascinant.

– A mon avis, il me répond d'une voix basse et lente, personne ne pourra jamais comprendre entièrement ce qui se passe là-haut. C'est voué à rester un mystère.

– Tu crois ?

Il acquiesce, le visage tourné vers le ciel. J'observe son profil, la lumière pâle de la lune sur sa peau lisse, il semble figé dans le temps.

Je porte une nouvelle fois ma cigarette à mes lèvres, le bout de mes doigts commence à être froid, mais je ne veux pas bouger. J'ai l'impression que ce moment nous appartient, rien qu'à nous deux, alors je continue de parler.

– Une fois, j'ai lu un article, je ne sais pas si c'est vrai, mais ils disaient que les étoiles étaient en fait les âmes des personnes défuntes. Elles brillent parce qu'elles pensent nous et qu'on pense à elles, tu crois que c'est vrai ?

– Je pense que c'est une magnifique façon de voir le ciel de la nuit, oui.

Nos regards sont fixés sur la voûte immense au-dessus de nos têtes, je me sens tout petit, minuscule, insignifiant en l'observant, ça me donnerait presque le vertige. Toutes ces lumières, tout cet espace et l'inconnu.

– J'ai envie d'y croire, je souris en coin, de croire que ma mère est parmi toutes ces étoiles et qu'elle continue d'exister.

– Moi je suis persuadé qu'elle te te regarde, même quand il fait jour.

– C'est gentil, merci.

Après avoir écrasé ma cigarette, je tourne la tête pour lui sourire. Il me regarde un instant, qui semble durer une éternité, puis tend sa main vers la mienne, posée sur l'accoudoir du siège. Je suis des yeux ce même geste lent que tout à l'heure, avant de danser, et retiens mon souffle lorsqu'il la pose simplement au-dessus.

Je crois que c'est sa façon à lui de me dire je suis là tu n'es pas tout seul moi aussi je te regarde même quand il fait jour

Et je lui souris encore, parce que je suis trop ému pour parler, et lui aussi.

Nous restons un moment, au milieu de ce silence réconfortant, ses doigts sur les miens, doux et brûlants. Je sens que ma paume est moite et je suis, en réalité, assez heureux qu'il ne la tienne pas finalement. Petit à petit, les battements de mon coeur retrouvent un rythme régulier.

– Attends, je dis d'un coup, c'est ça qu'on appelle la bonne étoile non ?

– Je ne sais pas, peut-être oui, il rit doucement, en tout cas elle est sensée te guider et veiller sur toi, une sorte de protection.

– Oh, alors c'est le cas ! C'est certainement étrange dis comme ça, mais je le sens, qu'une part d'elle est présente dans tout ce que je fais, tu vois ce que je veux dire ?

Harry acquiesce et je lis dans ses yeux qu'il me comprend vraiment, que ce n'est pas juste pour me faire plaisir. Ça me donne envie de pleurer. Ou de le prendre dans mes bras.

Mais nous sommes biens comme ça, je n'entends même plus les bruits autour de nous, les voitures dehors, les rires, les voix de nos ami.es à l'intérieur.

Il n'y a qu'Harry partout.

– Je n'aime pas la nuit.

Puis il me confie ça, sans préambule.

Et je l'écoute, comme lui a su le faire.

Et je le regarde, sous une nouvelle lumière.

– Je n'aime pas la nuit parce que je n'aime pas le noir, ça me fait peur... mais vraiment peur, le genre de panique que je ne contrôle pas, les cauchemars, les insomnies et tout ce qui suit. D'une certaine manière, je me sens impuissant, vulnérable, minuscule. Comme si d'une minute à l'autre la nuit allait m'engloutir.

Sa voix est fébrile, basse, il ne me raconte pas seulement un secret, mais une part intime de lui. Je ne réfléchis pas avant de tourner ma main sous la sienne afin d'entrelacer nos doigts, c'est naturel.

– Mais parfois, je regarde les étoiles, et je me dis que tout n'est pas aussi sombre que je le pense. Qu'il y a quand même des moyens d'avoir de la lumière.

Je ne sais pas où j'ai puisé ce courage, mais je penche la tête, très doucement, et hésite un instant, avant de la poser sur son épaule. Il ne dit rien, il ne bouge pas, je crois que je l'entends retenir sa respiration une brève seconde, et après le silence nous entoure.

Puis au bout d'un moment je lui dis, dans un chuchotement que lui seul peut entendre :

– Il y a toujours de la lumière Harry, toujours.

Il ne dit rien, mais ses doigts serrent davantage les miens, je ne me concentre que sur ça.

Mon regard voyage d'étoile en étoile, je me sens bien. A ma place.

– Louis ?

– Mhh ?

– Tu dors ?

– Non.

Nos voix ne sont que de doux murmures.

– Ça te dérange ?

– Pas du tout.

Et nous n'avons pas besoin de plus que ça. Ma tête sur son épaule et nos doigts liés.

J'aurais parfaitement pu rester comme ça toute la soirée, m'endormir contre lui. Je crois que nous avons passé un long moment ici, à l'écart du reste du monde, sur notre propre planète.

Mais il se fait tard, et je commence à fatiguer malgré tout.

Nous rentrons à l'intérieur, nos mains se lâchent au dernier moment. Zayn m'informe qu'il est presque deux heures du matin, il doit voir que je suis épuisé, parce qu'il annonce que nous allons rentrer.

Je dis au revoir à Harry en dernier, nous nous souhaitons encore la bonne année, il me sourit et ça suffirait à me faire rester. Mais avant de me défiler, je résiste le plus possible à mon envie et m'approche de lui pour rapidement effleurer sa joue de mes lèvres. C'est à peine si je la touche. Une simple caresse.

Rien que ce contact m'électrise tout le corps. Je rougis, peut-être que lui aussi, je ne sais pas, je n'ose plus le regarder. Je souris et lui fais un petit signe rapide de la main, puis rejoins Zayn qui dit au revoir aux autres dans l'entrée.

Une fois les salutations faites, nous sortons de l'immeuble. Zayn passe un bras sous le mien, nous prenons la route vers l'appartement. Je souris en regardant le sol.

– Toi, t'es amoureux, finit par remarquer mon meilleur ami.

– Non, juste bourré.

Je lèves les yeux vers lui avec un grand sourire qui dévoile mes dents, il pouffe en secouant la tête.

– Ouais ouais, on en reparlera demain quand tu auras retrouvé tes esprits.

– Ne me laisses jamais oublier ce moment.

– D'accord Don Juan.

Un léger rire m'échappe. Nous marchons côte à côte pendant un petit moment, sans rien dire.Dans mon esprit, toute la soirée tourne en boucle dans ma tête, le sourire d'Harry, la chaleur de ses doigts dans les miens, l'éclat de son rire, les étoiles dans ses yeux.

– Tu sais quoi Zayn ?

– Quoi ?

– Il sent bon et il a la peau aussi douce que celle d'un bébé.

Mon meilleur ami me lance un sourire amusé, il hausse un sourcil, puis me demande :

– Louis, tu vas vraiment me parler de lui pendant tout le trajet là ?

– Et en plus, tu as remarqué qu'il a une fossette plus prononcée que l'autre. Et il m'a invité à venir à l'exposition avec lui tu sais, il veut que ce soit moi qui l'accompagne...

Je ne m'arrête pas, Zayn lève les yeux au ciel, mais ne m'interrompt pas, je crois même qu'il m'écoute vraiment.

Un peu plus tard, quand je me couche dans mon lit, je m'endors avec un sourire sur les lèvres, il ne me quitte pas depuis le début de la soirée, et j'ai des rêves plein la tête.

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