Chapitre 49
Nous avons passé l’après-midi tous ensemble, puis, lorsque la nuit est tombée, Raphaël m’a demandé si je voulais rentrer. J’ai accepté mais, avant de partir, j’ai demandé au moins dix fois à Julia si elle était bien certaine que ça irait sans ses parents dans la même maison. Ella a levé les yeux au ciel.
- Je suis grande, maman. Et puis, je ne suis pas toute seule, il y a Diego, Bianca, oncle Émilien et tante Amelia...
- Oui, mais...
- Papa ! Dis à maman que ça ira, elle ne me croit pas !
- Oui, mais Julia... Tu es sûre que ça va aller ? a demandé Raphaël.
Ça m’a rassuré d’entendre que Raphaël n’était plus sûr de sa décision. C’est officiel, nous serons des parents poules ! Julia nous a presque poussés dehors avant de nous claquer la porte au nez.
- Amusez-vous bien !
Nous avons éclaté de rire, puis sommes rentrés chez Raphaël, main dans la main, sans nous lâcher une seule fois (même dans la voiture). Il m’a demandé ce que je voulais manger, et j’ai haussé les épaules. Nous avons cuisiné tous les deux, côte à côte.
- Comment as-tu trouvé ta fille ? j’ai demandé.
Ses yeux verts se sont plongés dans les miens.
- Merveilleuse.
Puis il m’a embrassée, et nous nous sommes dirigés vers la chambre pendant que le repas cuisait dans le four.
- Je t’aime, ai-je murmuré contre sa peau.
- Moi plus encore, Ophélia...
******
Nous regardons un film, ma tête contre son épaule. C’est si agréable de retrouver toutes nos habitudes d’autrefois ! J’ai presque l’impression que nous ne nous sommes jamais quittés... Même si c’est faux.
Raphaël est l’amour de ma vie, et je sais que je suis le sien.
- Au fait, Ophélia... Tu travailles dans une librairie, c’est ça ?
J’acquiesce.
- Et...tu ne voudrais pas reprendre des études ?
J’en reste sans voix. Je n’y avais même pas pensé !
- Mais, Julia...
- Tu n’es plus toute seule, Ophélia. Je suis là. Tu as une idée de ce que tu voudrais faire ?
Je ne réfléchis quasiment pas avant de lancer :
- Je rêvais de devenir orthophoniste, petite.
Je rougis aussitôt. Je ne peux plus me baser sur des rêves inachevés de petite fille ! Raphaël m’embrasse sur les lèvres.
- C’est un beau métier, dit-il simplement.
J’ouvre la bouche comme un poisson hors de l’eau, bouche bée.
- Tu n’essaies même pas de me décourager ?
- Ce sera ton métier, pas le mien. Je n’ai pas à juger ce que tu choisis de faire de ta vie...
Mes yeux se remplissent de larmes, mais je les ravale tant bien que mal. J’ai assez pleuré, et ce n’est plus le moment de pleurer. Il faut avancer.
- Merci, Raphaël, je murmure, les yeux humides.
- De rien, mon amour.
******
Le lendemain matin, je reçois un message d’Émilien alors que nous prenons le petit-déjeuner avec Raphaël.
*Lia, nous partons avec les enfants pendant trois jours au bord de la mer. Profite bien !
Je m’étouffe presque avec ma tartine de pain.
- Quoi ?! je m’écrie, paniquée. Et Julia part avec eux ?!
- Que se passe-t-il ?
- Émilien a décidé d’emmener les enfants au bord de la mer pendant trois jours ! Je ne peux pas rester loin de ma fille pendant trois jours !
Je me précipite dans la chambre et m’habille en quatrième vitesse.
- Ils ne sont peut-être pas encore partis, j’ai peut-être le temps d’aller chez eux avant... Je peux t’emprunter ta voiture ?
Raphaël pose ses mains sur mes bras et m’oblige à le regarder dans les yeux.
- Ophélia, calme-toi. Ils sont déjà partis depuis deux heures, ça ne sert à rien.
- Hein ? Mais...que... Comment es-tu au courant ?
Il soupire puis lève les mains en l’air quand je le fusille du regard.
- Émilien m’en a parlé hier...
- Et tu ne crois pas que tu aurais pu m’en parler avant que j’apprenne ça de cette façon ?
- Ophélia... Émilien voudrait apprendre à connaître Julia et...
Il se racle la gorge. Je hausse les sourcils.
- Et... ?
- Et j’aimerais qu’on profite de ce temps pour nous deux.
Je recule de quelques pas, blessée.
- Sans Julia ? Tu...tu ne l’aimes pas ?
- Ça n’a rien à voir, Ophélia, rien à voir ! S’il te plaît, laisse-moi t’expliquer !
- Il n’y a rien à expliquer, je rétorque en me dirigeant vers la porte d’entrée.
- Ophélia, stop ! Je ne veux pas qu’on se dispute sur un malentendu ! Je ne veux pas que tout ce qu’on a vécu se reproduise ! Ne pars pas, s’il te plaît, et laisse-moi t’expliquer...
J’admets que je me suis assez facilement emportée.
- Très bien. Désolée. Je t’écoute, dans ce cas.
- Ophélia, j’apprends du jour au lendemain que j’ai une fille de six ans. On n’a pas beaucoup profité de notre vie de couple qu’on a déjà une fille ! C’est brutal, pour moi, c’est tout. Je pensais que, tant que Émilien et Amelia emmenaient les enfants au bord de la mer, on pourrait avoir quelques moments à deux... Je ne rejette pas Julia. C’est ma fille, je l’aime, mais j’ai juste besoin de temps. Je voulais simplement du temps pour toi et moi.
J’expire.
- Je me suis emballée trop vite, je suis désolée... Je n’ai jamais été séparée de Julia plus d’une journée, donc ç’a été un petit choc... Pardonne-moi, Raphaël ! Je suis désolée d’avoir pensé que ce serait aussi simple pour toi...
Il me prend les mains.
- Tu ne pouvais pas savoir, Ophélia. Mais, si c’est trop dur pour toi d’être séparée de Julia pendant trois jours, je peux aller la chercher et la ramener. Je sais où ils sont partis...
- Non, Raphaël. Julia m’en voudrait, et puis... Tu as raison. Nous avons besoin de temps pour nous...
Il m’embrasse et je passe mes bras autour de son cou. Puis il écarte ses lèvres des miennes pour me demander :
- Qu’est-ce que tu voudrais faire, aujourd’hui ?
- Je ne sais pas. Et toi ?
- On pourrait aller visiter des maisons.
- Tu as déjà regardé ?
- J’en ai vu quelques-unes. Je suis très exigeant, tu sais. Il faut un grand salon pour pourvoir mettre le piano, une grande cuisine, et plusieurs chambres assez grandes...
- Tu pensais à combien de chambres ?
- Une dizaine ?
Je ris sans pouvoir m’en empêcher, lorsque je remarque qu’il est tout à fait sérieux.
- Tu rigoles, non ?
- Pas du tout. Une chambre pour Julia, une chambre pour nous, une chambre d’amis, et des chambres pour nos futurs enfants !
- Alors, Raphaël... Si on part du principe que tu voulais dix chambres, ça fait sept chambres pour nos futurs enfants potentiels...et je refuse d’avoir sept enfants en plus de Julia !
Je croise les bras.
- Et je ne veux pas que ma maison ressemble à celle d’Émilien, ajouté-je.
Il fronce les sourcils.
- Tu es dure en affaires...
- En affaires ?
- J’aurai bien aimé avoir sept enfants en plus de Julia, moi !
- Merci bien, mais ce n’est pas toi qui les met au monde ! je rétorque. Et puis, on ne va pas garder je ne sais combien de chambres vides en attendant la venue de nos enfants potentiels !
- Bon, d’accord. Quel est ton maximum ?
- D’enfants ?
Il acquiesce.
- Trois enfants, ça me semble plutôt pas mal. Julia est facile à vivre, mais j’ai entendu certains collègues parler de leurs enfants... Il paraît que c’est épuisant !
- Trois, ça va. Alors il faut six chambres !
- Non, Raphaël, cinq chambres. Julia, toi et moi, une chambre d’amis, et deux autres chambres pour les potentiels enfants...
- Ah non ! Je pensais que tu voulais trois enfants en plus de Julia...
Je fronce les sourcils.
- Non ! Trois enfants en comptant Julia ! C’est largement suffisant...
Raphaël fait la moue.
- Mais, trois, ce n’est pas un bon chiffre... Il y en aura un qui sera toujours mis de côté...
- Trois, c’est mon maximum. En comptant déjà Julia. Donc c’est deux. C’est mon dernier mot. Et je ne veux pas trop de chambres vides.
- Il suffit de les remplir en attendant d’avoir les enfants !
- Ah oui ? Et, quand les enfants naissent, on fait comment ? On le met où, le bazar entassé dans les futures chambres ?
- On fera une extension, décide Raphaël.
- Cinq chambres !
- D’accord, ronchonne Raphaël.
Il me sourit, puis m’embrasse.
- Je t’aime. On y va ?
J’attrape mon manteau sur la patère de l’entrée.
- On y va.
******
Nous avons visité beaucoup de maisons, mais aucun coup de cœur. En rentrant, Raphaël s’est écroulé sur le canapé lorsque j’ai eu une idée.
- Je vais peut-être dire une bêtise, mais... Et si on faisait construire une maison ? Notre maison à nous.
Raphaël me regarde, les yeux soudain brillants.
- Je suis d’accord avec ça, mais je préfère faire construire dans une autre ville, si tu es d’accord.
- Tu sais bien que oui !
- Mais il faut trouver une solution en attendant, il ajoute.
- On peut attendre un peu avant de faire construire, et trouver une petite maison en attendant...
- ...notre deuxième enfant !
Mon troisième enfant...
- Je ne...
Un bip m’interrompt soudain. Je consulte mon téléphone avant d’oublier.
*Ophélia, j’espère que tu n’as pas oublié notre rendez-vous. C’est pour demain ; j’avais dit trois jours. J’espère que tu as parlé à Raphaël. Lieu ?
N.
- Oh non ! je m’écrire, paniquée. J’avais complètement oublié cette histoire...
- Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a, Ophélia ?
- Ton frère...ton frère veut nous voir tous les deux. Demain. J’ai oublié de te le dire...
- Il t’a demandé ça quand tu l’as vu la dernière fois ?
- Oui. Il m’a fait du chantage... Si je ne te parlais pas du fait que Julia était ta fille, c’était lui qui s’en chargerait...
- Mais tu m’as tout dit, donc tout va bien.
J’expire.
- C’est vrai. Qu’est-ce que je dis à ton frère ?
- Tu veux bien me montrer son message, s’il te plaît ?
Je lui tends mon téléphone sans un mot. Il fronce les sourcils, puis me demande s’il peut lui répondre. J’acquiesce, et il se met à pianoter sur le petit écran, avant de me rendre mon téléphone.
- Merci.
Je l’éteins et le range dans mon sac, sans même regarder ce que Raphaël a écrit. Je lui fais tellement confiance...
- J’espère que ça ne durera pas trop longtemps, cette discussion avec mon frère. Je veux profiter de toi encore quelques temps...
Je lui souris.
- Moi aussi.
- Tant mieux ! conclut-il en m’embrassant.
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