Poudlard est plein de revenants

Ce fut en m'enfuyant comme une voleuse, effrayée par la revenante, que, la vision brouillée, je percutai en plein fouet un garçon de haute taille qui arrivait dans le sens inverse.

Jedusor, dit une petite voix à glacer le sang logée quelque part dans ma tête.

Non, lui répondirent mes yeux. C'était Alphard Black. Ses longs cheveux noirs retombaient avec nonchalance autour de son visage. Il marmonna un "pardon" qui ne me convainc absolument pas et tenta de me contourner. Je lui bloquai volontairement et ostensiblement le passage. Je m'étais promis de changer en toute impunité la réputation de Lacerta à l'instant, et voilà que Merlin me testait.

- Recurvite, murmurai-je en visant les mains, puis je me tournai vers le garçon comme si de rien n'était. Bonjour Alphard Black, le saluai-je avec un sourire que je savais absolument adorable.

- Bonjour, répondit-il, le regard fuyant.

- Tu te souviens de moi ? Lacerta Kenneth? Nous avons dansé ensemble au mariage des Prewett.

- Oui je vois. Excuses-moi mais je dois me rendre à la bibliothèque, j'ai des BUSEs à obtenir...

On eut dit que le seul fait de me parler équivalait à la pire des tortures. Un peu d'audace, Edith ! Je lui attrapai le bras avec familiarité et le tirai derrière un pan de mur.

- Pas d'empressement dans ce cas. Je veux juste rétablir certaines choses.

Alphard haussa les sourcils mais ne me repoussa pas.

- Voilà, alors... Est-ce que toi aussi tu me déteste ?

- Pardon ?

Courage. Courage. Courage !

- Est-ce que tu me déteste ? Parce que beaucoup de personnes semblent me détester...

- Oui, beaucoup de personnes te détestent, Kenneth. Mais c'est parce que tu les déteste plus encore. Et depuis quand tu pose ce genre de questions ? Et surtout à moi ?

- Et bien... J'ai décidé de devenir un être humain. Donc je m'excuse pour tout ce que j'ai pu dire, ou faire. 

- Tu es sérieuse? Qu'est-ce qu'il t'arrive, on t'a jeté un sort ?

- Non ! Enfin, oui, je suis sérieuse ! protestai-je.

Un sourire septique apparut sur le visage de Alphard.

- Donc tu me parles de ton plein gré ? Toi ? Toi qui méprise tout ce qui ne te ressemble pas ?

- Oui ! J'ai... hum... changé... Écoute, je ne veux pas passer une sale année (dans l'univers que j'aime le plus au monde) en sachant que tout le monde ne peut pas me blairer...

- C'est une prise de conscience très subite, je dois dire...

- Donc tu ne me déteste pas ?

- Si tu n'es plus le monstre qui traîne avec ma tarée de soeur ainée alors non.

Avec nervosité, je me mis à tordre mes doigts doucement.

- C'est déjà ça, dis-je. Et, euh, Alphard ? Tu ne danses pas si mal que ça.

Alphard ouvrit la bouche mais ce ne fut pas le son de sa voix qui atteint mes oreilles mais celui d'une voix caquetante et passablement désagréable.

- Petits, petits, petits ! s'exclama un petit homme au visage grossier qui voletait au dessus de nous. Vous vous cachiez ?

Peeves eut un rire gras et, comme nous avions l'air de ne pas assez s'amuser selon lui, se mit à nous lancer à la figure toute sorte d'objets qu'il avait dû voler quelque part. Alphard et moi nous enfuîmes aussi vite que je m'étais enfuie de Mimi, zigzagant pour échapper aux projectiles de l'esprit frappeur.

- Et bien, Kenny, Alphy, rev'nez ici ! s'écria Peeves. Hahahaha !

Nous dûmes croiser de pauvres petits Poufsouffle de première année pour que Peeves se rabatte sur une autre proie.

- Ça alors, dit Alphard, essoufflé, lorsque nous nous retrouvâmes hors de la portée du poltergeist. On peut dire qu'il a le chic pour apparaître au bon endroit, au bon moment, lui !

- Que serait la vie sans Peeves ? fis-je remarquer, la respiration haletante.

Voilà la première fois que je rencontrais un des multiples absents de la saga cinématographique et l'impression qu'il m'avait donnée avait été très fidèle à son comportement exécrable si bien décrit dans les livres. Alphard se retourna et poussa un soupir.

- J'ai bien de la chance, ironisa-t-il. Je ne connais qu'un seul chemin qui mène à la bibliothèque et, maintenant, il est en "zone Peeves" !

- C'est une expression bien trouvée, souris-je en me massant un point-de-côté naissant. Tu sais, peut-être que je pourrais te ramener les livres que tu veux de la tour de Serdaigle. Si on enlève les dortoirs, cette endroit, c'est une deuxième bibliothèque, ajoutai-je.

- Non, merci, déclina poliment Alphard. Il y a aussi des livres dans la salle commune de Serpentard. En fait, c'était surtout pour la tranquillité que je voulais y aller... Mrs Pince à beau être jeune et inexpérimentée, elle n'hésite pas à jeter un sort à celui qui parle un peu fort.

Alphard était à Serpentard ! Ce n'était pas une nouvelle si étonnante que ça - Alphard était un Black - mais il ne partageait tellement pas les caractéristiques de sa maison ! J'appris également que Mrs Pince occupait déjà le poste de bibliothécaire cinquante ans avant la scolarité de Harry... À passer autant de temps entourée de livres, voilà pourquoi elle était si... pincée !

- Mince ! m'exclamai-je. Je suis désolée de t'avoir fait perdre encore plus de temps...

- Ça ne fait rien, assura Alphard. Peeves ne tient pas en place. Le couloir sera de nouveau désert en un rien de temps.

Il s'assit par terre, le dos contre le mur de pierre, et sortit un manuel de son sac.

- Bon, je m'excuse encore...

- Ça ne fait rien ! me coupa Alphard.

- Alors dans ce cas, j'y vais ?

- Une dernière chose...

Il leva ses yeux gris vers moi.

- Je n'aurais jamais pensé que tu pouvais être comme ça.

- Comment ? demandai-je, interloquée.

- Sympathique, répondit Alphard.

Il se replongea dans son ouvrage sans plus de bavardages.

Alphard m'avait trouvé sympathique ! Je venais de sauver l'âme de Lacerta... En tout cas, Alphard ne me regarderait plus comme une Acromantule. Il fallait maintenant que je parle à Sharon. Quelque chose me disait qu'elle allait être moins facile à convaincre. Son statut de Sang-Mêlé et ses convictions pro-moldu faisait d'elle une personne bonne mais très anti-Lacerta.

Je descendis un escalier en colimaçon pour rejoindre le rez-de-chaussée. Le cours de botanique étant le dernier cours de la journée. Je ne croisai pas beaucoup d'élèves sur mon chemin, car je devais être une des seuls à ne pas avoir cours à cette heure-ci (c'était, au passage, la première de mes deux uniques heures de trou de toute la semaine). Dans le couloir central, la température faisait chuter le mercure plus bas encore que partout ailleurs dans le château. Je rabattis ma capuche sur le sommet de ma tête et enfilai mon écharpe à la quatrième vitesse - ce n'était pas parce que j'étais une sorcière que je ne pouvais pas attraper la grippe. Je jetai un coup d'oeil au cloitre lorsque je passai devant. La neige ne tombait plus depuis une bonne semaine, et ce qui était au sol maintenant ressemblait plus à une sorte de glace compacte, très glissante.

Soudain, quelqu'un surgit de derrière le grand chêne qui dominait la cour intérieure, suivit par une silhouette floue, brillant dans l'ombre de l'arbre. Jedusor et la Dame Grise étaient facilement reconnaissables, même de loin. Aussitôt, je jetai sur moi-même un sortilège de Désillusion, bien moins efficace qu'une Cape d'Invisibilité, mais assez pour ne pas être aperçue à cette distance. Désormais, il fallait comprendre ce qui se disait...

- Audioratio ! marmonnai-je.

Ce sort, appris dans un livre pas plus tard que la veille, se révélait moins efficace que les oreilles à rallonge de Fred et George, mais m'avait tout de suite tapé à l'oeil. Je tendis l'oreille et tentai de comprendre ce qui se disait.

- ...jour Tom, dit la Dame Grise. Que me vaut le plaisir de ta venue ?

- Bonjour, Helena, dit Jedusor, la voix aussi douce et polie qu'un poison dans du chocolat. Il me tardait de vous voir et de prendre de vos nouvelles...

Je décelai un sourire pâle sur le visage de la revenante.

- Oh, Tom... Tu sais, mon existence n'est pas aussi palpitante que la tienne...

- Je ne sais pas, Helena, la contredit doucement Jedusor. Je ne crois pas, en réalité. Je ne suis qu'un élève tandis que vous...

- Je suis la fille de Rowena Serdaigle, acheva la Dame Grise. Ce n'est pas aussi glorieux qu'on pourrait le penser, ajouta-t-elle, d'être sans cesse dans l'ombre de ses ancêtres.

Jedusor ne dit rien. Non seulement il savait comment parler, mais il savait également comment se taire.

- Vous savez, Tom, vous savez que vous êtes l'un des seuls à qui je n'ai jamais révélé mon nom ? C'est un secret lourd à porter. Parfois, je ne rêve que de me débarrasser de ce stupide surnom de "Dame Grise". Comment réagiriez-vous s'il on venait à oublier votre nom au profit d'un pseudonyme anonyme?

Je refoulai un ricanement. Et bien,Tom ? Comment réagirais-tu si on t'appelais Voldemort - ou pas, dans le cas de tous ceux qui auraient trop peur de toi - et qu'on oubliait le nom de ton moldu de père ? Tu serais triste, non ?

- Comment puis-je le savoir ? Comme vous, sans doute ?

- Sans doute, soupira la Dame Grise en se détournant théâtralement de Jedusor. La vie sous la forme d'un fantôme, ce n'est pas la vie... Ne prends jamais le même chemin que moi, Tom.

- Ne vous blâmez pas, Helena ! la reprit Jedusor - sa patience me scotchait. Tout le monde à le droit d'avoir peur de la mort !

La Dame Grise se retourna vers lui avec fluidité et je pus lui remarquer une expression compatissante, presque surprise par une telle innocence.

- Je n'avais pas peur de la mort, dit Helena à voix basse. Je voulais que l'on ne m'oublie pas. Je voulais que mon existence n'aie pas été vaine, je voulais...

Elle avait haussé la voix mais ne termina pas sa phrase. Ce fut Jedusor qui eut cet honneur.

- Vous vouliez que l'on ne parle pas de vous seulement comme de la fille de Rowena Serdaigle.

- Exactement, acquiesça la Dame Grise. Mais lors de mon retour à Poudlard, sous cette forme, on m'a harcelé. On me demandait si je n'avais pas de rapport avec la disparition de la précieuse relique de ma mère. On ne me parlait que pour ça... Il a fallut plusieurs générations pour que j'obtienne la paix. Comme je regrette cette décision stupide et orgueilleuse. Je n'ai même pas obtenu ce pour quoi je suis dans cette état aujourd'hui. De plus, je dois supporter la vue du Baron chaque jour...

- Le Baron ?

Cette fois, Jedusor n'avait pas pu s'en empêcher. C'était une information trop croustillante pour la laisser filer.

- Le Baron Sanglant, oui. C'est lui qui m'a... tué... murmura la Dame Grise, affolée par ce qu'elle venait de laisser échapper.

Jedusor tenta de s'approcher d'elle mais elle s'éloigna frénétiquement.

- Je n'aurais pas dû dire ça. Il faut que je m'en aille.

- Non, attendez, Helena !

Trop tard. La Dame Grise s'était enfuie, laissant derrière elle l'odeur de l'échec de Jedusor. Elle avait à peine parlé du Diadème Perdu. J'en connaissais un qui allait devoir faire plus d'efforts en matière de patience et de manipulation. Je constatai avec délectation que l'expression neutre et emphatique du jeune homme avait mué en une colère glaciale. Et je vis - ou, tout du moins, crus voir - ses mains aux longs doigts se refermer en un poing serré par le goût acide de sa défaite. Puis, reprenant le dessus sur ses émotions qui débordaient un peu trop de son masque parfait, Jedusor lissa sa cape avec soin et continua son chemin comme si de rien n'était.

DONG ! me surprit l'horloge de la tour nord, qui m'annonçait que j'allais devoir retourner en cours. Toutefois, j'attendis que Jedusor eut été hors de ma vue, ou plutôt moi de la sienne, pour annuler le sortilège de Désillusion et retrouver les jolies petites mains toutes blanches de Lacerta Kenneth.

Je ne dus pas aller bien loin pour rejoindre les serres, et faillis même, à un couloir près, croiser Jedusor. Les élèves attendaient déjà devant. Parmi eux Jedusor, Rosier et quatre Serdaigles de la même année que moi, qui se nommaient respectivement, si je me souvenais bien, Terence Fortarôme, Victor Stebbins, Janice Peakes et Barnaby Edgecombe. Sans plus attendre, le professeur Mandrake, un homme filiforme et émacié portant de longs cheveux gris qui tombaient en rideau sur ses épaules, nous fit entrer. 

  Fini l'espionnage digne du MI6, maintenant, il était l'heure de se battre contre des Tantacula Vénéneuses !


  Bonjour, bonjour, voilà encore un petit chapitre, peu chargé en action, mais ça va venir 😊 Edith se fait de plus en plus facilement à la vie chez les sorciers et quelques personnages reviennent à la charge ! Alphard a un an de moins que Lacerta, voilà pourquoi il parle de BUSE, tandis que Druella et Walburga en ont un de plus. Ca n'éclaire pas grand chose 😏 mais si vous avez des questions, posez-les moi ! ;) N'hésitez pas a commenter !

Rodnoffyrg 💝

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