L'ire de Westmore

J'engloutis le petit déjeuner avec une vitesse ahurissante dont je me serais crue incapable, dévorant mes oeufs et asséchant les réserves mondiales de jus de citrouille, pour le terminer avant tout le monde. Une fois la contrainte de la nourriture survolée, j'empoignai mon sac et quittai la table en enjambant le banc. Mes camarades, eux, venaient à peine de s'asseoir. Pour ne prendre aucun risque d'être encore détournée de ma tâche, je jetai en direction de Jedusor un coup d'oeil méfiant. Mais il ne leva pas la tête et ne sembla même pas m'apercevoir. Parfait. Je me dirigeai vers le Hall en allongeant mes pas, alors que des élèves affluaient encore à l'intérieur de la Grande Salle. C'était aujourd'hui que ça devait se passer. Aujourd'hui. Attendre encore serait fatal. Et j'avais bien assez trainé comme ça. Je m'arrêtai au milieu du hall et consultai ma liste de sortilèges. Deux "Iratus" suffiraient... Je la rangeai sans la froisser dans ma poche et cherchai du regard la meilleure cachette. Soudain, je me rendis compte que la meilleure cachette, c'était de ne pas me cacher du tout. J'aperçus des groupes d'élèves assis dans le hall, faisant leurs devoirs, appuyés contre les murs. En sortant innocemment un livre de mon sac, je les imitai, m'installant non loin de la sortie. Assez pour pouvoir entendre sans être remarquée. Le sang battit dans mes tempes. Je n'avais pas intérêt à rater mon coup, ou tout serait fichu. Me munissant de ma jolie baguette en bois de tilleul argenté, j'attendis. J'attendis la fin du petit déjeuner. J'attendis leur arrivée. Et ils arrivèrent. Rubeus Hagrid apparut le premier, venant de l'extérieur du château. Il avait d'hirsutes cheveux encore courts et on pouvait mettre deux filles de mon gabarit dans chaque jambe de son pantalon. Si je ne l'avais pas connu au travers des yeux de Harry, il m'aurait très certainement effrayé. Pas étonnant que Jedusor réussît à le faire virer aussi facilement. Il s'approcha de l'encadrement de la grande porte, les mains dans les poches et la tête baissée. Comme s'il était gêné de se trouver là. Comme s'il n'y était pas à sa place. Il n'eut pas le temps de faire attention à ma présence que Rosemonde Westmore, qui sortit à ce moment de la Grande Salle, happa aussitôt son regard. Rosemonde faisait claquer ses souliers sur les dalles, la tête haute et le visage éclairé d'un grand sourire. Je plissai les yeux. Sa pétition tenue contre sa volumineuse poitrine lui donnait un air de Dolores Ombrage, et ses lunettes extravagantes ainsi que ses cheveux bizarrement ramenés sur le dessus de sa tête, un air de Rita Skeeter. Comment osais-je faire ce genre de comparaison ? Je me grondai moi-même. Cherchais-je à diaboliser Rosemonde Westmore pour me donner meilleure conscience ? Sans aucun doute, mais je n'avais aucunement le droit de le faire. Rosemonde était la "gentille" de l'histoire. De son histoire, du moins.

- Bonjour Rubeus ! salua-t-elle d'un ton joyeux lorsqu'elle arriva au niveau du géant. Comment vas-tu aujourd'hui ?

Elle avait l'air minuscule à côté de lui. Bien que tout parût minuscule à côté de Rubeus Hagrid.

- Salut, marmonna Hagrid. Ouais, ça va et toi ?

Je me demandai quel serait le même moment pour agir...

- À la perfection ! Rien ne pourrait mieux aller !

- Y'a eu... Des nouvelles signatures ?

- Oui ! répondit Rosemonde en brandissant la pétition. Rien que ce matin, on en a récolté une quinzaine ! À ce rythme-là, tu seras revenu ici comme élève dès que le Ministère de la Magie recevra la lettre !

Hagrid s'empara de la pétition et la rapprocha très près de son visage, pour lire les minuscules signatures.

Un frisson me parcourut l'échine. C'est le moment, vas-y ! Je respirai un grand coup et dirigeai discrètement ma baguette en leur direction. Iratus Rosemonde Westmore ! Iratus Rubeus Hagrid !

- Et la lettre, tu l'as commencée ? demanda Hagrid avec un sourire timide.

Je fronçai les sourcils. Il n'avait pas vraiment l'air en colère.

- De rien, rétorqua Rosemonde Westmore, le ton acide.

- Oh, merci Rosemonde, dit Hagrid en hochant la tête. Je me demandai juste si la lettre...

- Non.

Rosemonde plissa les yeux et pinça les lèvres.

- Non, je ne l'ai pas commencé. Je ne m'y suis même pas attelé, continua-t-elle. Mais j'imagine que je vais devoir m'y mettre, non ? Toute seule, étant donné que tu ne peux pas t'en charger toi-même !

Hagrid, d'abord interloqué, resta stupéfait par cette dernière remarque.

- Rosemonde, je voulais juste savoir si je pouvais t'aider...

- M'aider pour quoi ? ricana Rosemonde. Tu ne sais même pas écrire à la plume sans tacher ta feuille !

De toute évidence, le sort marchait parfaitement sur Rosemonde. Son visage commençait à se colorer et sa voix à devenir de plus en plus aigue. Mais Hagrid, lui, y était complètement insensible.

- Quelque chose ne va pas ? demanda Hagrid, inquiet.

- Oh, je ne sais pas, répondit Rosemonde avec une ironie palpable. Rien, je pense, étant donné que tu t'y donnes autant à coeur que moi, dans ce projet.

- Rosemonde, bien sûr que je...

- Parce que j'ai vraiment l'impression de faire tout le travail !

Rosemonde haussa encore d'un ton et quelques élèves tournèrent la tête vers elle, étonnés. Pourquoi Hagrid ne s'énervait-il pas à son tour ? Iratus Rosemonde Westmore ! répétai-je dans ma tête en lui lançant un deuxième maléfice.

- Oui, t'en fais beaucoup, et j't'en suis vraiment reconnaissant mais...

- Mais quoi ? demanda Rosemonde d'une voix forte.

Décidément, le sort ne fonctionnait toujours pas.

- Tu te serais bougé tout seul si je n'avais pas été là ? Mais de quel gros paresseux suis-je en train de prendre le parti ?!

Les éclats de voix de la jeune fille commençaient à interpeler les personnes qui étaient autour, et le géant... Mais voilà ! C'était pour ça que le sortilège de Colère n'atteignait pas Hagrid ! De par son métissage avec les géants, il était beaucoup plus résistant aux sorts que les autres sorciers !

- Qui tourne autour des tables de la Grande Salle pour faire signer ce maudit papier ? (Rosemonde arracha la pétition des mains de Hagrid, qui ne savait plus comment réagir.) C'est moi ! Qui a passé des nuits entières à chercher et rédiger de maudits arguments pour te tirer d'affaire ? C'est moi !

À présent, un petit attroupement entourait les deux élèves.

- Tu sais quel argument j'ai hésité à poser sur le papier ? s'écria Rosemonde, une fureur gonflant en elle.

- Non... chuchota un Hagrid effrayé qui ne voulait surement pas entendre la réponse.

- Que tu étais trop stupide pour trouver par toi-même la Chambre des Secrets !

Un murmure outré parcourra la foule de badauds. Je me demandai si c'était à cause de l'insulte de Westmore ou à cause de la mention de la tristement célèbre Chambre des Secrets.

- Rosemonde ! s'exclama Hagrid, blessé. Qu'est-ce qui t'prend ?!

- Ce qui me prend ?! Il me prend que tu es un gros balourd stupide qui me fait sortir hors de mes gonds !

Je tirai une grimace, désolée pour Hagrid. J'avais prévu qu'ils se disputent tous les deux, pas que seul lui s'en prenne plein la figure.

- Et, visiblement, je ne suis pas la seule à le penser, continua Rosemonde, déchainée. Pourquoi crois-tu que personne ne t'ait défendu auparavant ? Personnellement, je me demande bien comment j'ai pu essayer de te défendre alors que tu as amené une Acromantule dans l'enceinte de l'école !

Rosemonde se tourna vers ses spectateurs.

- Une Acromentule ! s'écria-t-elle pour souligner ses paroles, cherchant l'approbation de quelques élèves. Même si ce n'est pas le monstre de Serpentard, est-ce un animal moins dangereux ?

Parmi les nombreuses têtes, j'aperçus celle de Jedusor. Il s'était arrêté, intéressé par le grabuge, et affichait un demi-sourire satisfait. Le malheur des autres ne pouvait que le rendre heureux. Lorsqu'il baissa son regard et constata ma présence non loin, son sourire s'élargit et il disparut aussitôt de mon champ de vision.

- Arrête ! protesta Hagrid. Tu n'as pas le droit de dire ça d'Ara...

Il se coupa soudainement avant de sortir une énormité.

- En vérité, tu es un vrai danger pour tout le monde ! Tu n'as aucune conscience ! Tu ne prends aucune responsabilité et compte toujours sur les autres pour les prendre à ta place ! Ta place n'est pas à Poudlard, avec les gens normaux !

- Qu'est-ce que ça veux dire ? demanda Hagrid d'un ton abrupt.

- Tu n'es pas normal ! Tu n'es pas comme nous ! C'est parfait si tu reste dans ta cabane, espèce de... espèce de monstre !

Je sursautai à l'insulte. Là c'en était trop. Je voulais briser la pétition, pas Hagrid lui-même. Je cherchai un contre-sortilège dans ma liste, en vain, tandis que Rosemonde finissait de déverser son venin.

- Tu sais quoi ?! Cette pétition, elle n'est pas pour toi ! Elle est pour moi ! Je m'en moque éperdument que tu retournes à Poudlard ou pas, dans l'absolu ! Tout ce que je veux, c'est soutenir un projet à Poudlard pour pouvoir bien me faire voir par le Ministère de la Magie lorsque je voudrais y entrer ! Tu imagines comment je serais demandée comme juge ou avocate si, dès Poudlard, j'avais soutenu des causes à un niveau très sérieux ? (Elle brandit la pétition droit devant Hagrid.) Mais je ne veux plus m'occuper de toi, désormais !

Sur ce, elle déchira la lettre en deux, puis en quatre, et enfin en huit avant de la jeter au sol, les morceaux de parchemins tombant comme de très laids flocons de neige. Elle dissipa la foule en agitant violemment les bras et se précipita vers le grand escalier, qu'elle grimpa quatre à quatre. Les conversations fusèrent soudain, et je ne réussis pas à en percevoir le sens, tant elles étaient nombreuses et bruyantes. Je focalisai mon attention sur Rubeus Hagrid qui, choqué par ce qui venait d'arriver, profita de la sortie de scène de Rosemonde pour s'éclipser plus discrètement. Mon coeur se serra en repensant au visage livide de Hagrid, mais la vue de la pétition qui gisait sur les dalles par morceaux constituait une source de soulagement non négligeable. Il ne me suffisait plus que de faire attention à ce que Rosemonde et Hagrid ne s'adressent plus jamais la parole et le tour serait joué.

Lorsque je me relevai, les élèves qui avaient assistés à la scène retournaient dans la Grande Salle, rependre la nouvelle de ce qui était arrivé. J'éprouvai beaucoup de peine, face à la tournure qu'avait pris les choses. Rosemonde n'aurait jamais dû qualifier Hagrid de "monstre". Ce sujet était beaucoup trop sensible. Mais ce que j'avais fait, je ne comptais pas le défaire. Ainsi allaient les choses, pour le bien commun. Ou, pour reprendre Grindelwald, "pour le plus grand bien"...

Je rangeai mes affaires et quittai discrètement le hall, sans me retourner. Alors que je montais dans les étages, les yeux baissés sur mes souliers noirs, je tombai nez à nez avec Alphard Black.

- Salut, dit-il, le ton joyeux et les yeux brillants.

Je jetai un regard bref par dessus son épaule, mais n'aperçus pas ses deux amis de Serpentard. Il était seul.

- Salut, répondis-je d'une petite voix.

- Ça va ? s'inquiéta-t-il.

Je m'apprêtai à hocher la tête, comme si de rien n'était, mais la secouai de gauche à droite au dernier moment.

- Tu veux en parler ?

Hésitant un instant, je secouai de nouveau la tête de gauche à droite.

- Non, c'est bon, assurai-je.

Alphard s'approcha d'un pas.

- Lacerta, si tu as besoin de quoi que ce soit...

Je m'approchai à mon tour et l'enlaçai sans prévenir. Déversant le flot de mes émotions, j'enfouis ma tête dans son épaule. Alphard n'eut pas besoin de mots pour me comprendre, et enroula ses bras autour de moi, me rendant mon étreinte avec douceur. Sa présence m'apportait un réconfort dont je ne devinai pas difficilement la nature. Je tenais à lui, c'était indubitable. Je ne versai pas de larmes, cependant. Je n'en avais pas besoin, ne ressentant aucune tristesse. Les raisons de mon mal être résidaient en la culpabilité et l'impression de malhonnêteté qui me rongeaient. Et ces sentiments disparaissaient peu à peu dans les bras d'Alphard.

- Ça va mieux ? me demanda-t-il lorsque je me détachai enfin de lui.

Il n'y avait aucune trace de moquerie ou de malice dans sa voix, et il avait l'air absolument sérieux.

- Oui, assurai-je en hochant la tête. Je crois que j'en avais bien besoin...

Un petit rire nerveux s'échappa de ma bouche et il baissa la tête pour me regarder dans les yeux. Son visage si pâle s'illuminait d'un sourire. Soudain, je repensai à mon cauchemar. "Ça ne te dérange pas ? De mentir ?" Je m'en voulais horriblement de devoir lui cacher ma véritable nature.

- Nous n'en avons pas reparlé... commençai-je.

- Tu veux en reparler ? me demanda Alphard, comprenant tout de suite où je voulais en venir.

- Je ne sais pas, avouai-je. C'était la plus belle soirée depuis...

Je m'arrêtai, ne sachant à quoi la comparer. La plus belle soirée avant l'arrivée de Cattus, bien sûr. Je sortis le collier d'Alphard de sous ma chemise.

- Je le porte tous les jours, dis-je en jouant avec le pendentif en forme de lézard.

Alphard me sourit et me prit la main.

- Je n'en doute pas une seconde, affirma-t-il.

- Tu sais quoi ? Je vais beaucoup mieux, maintenant, souris-je. Merci infiniment, Alphard. Je...

Soudain, la grande cloche de l'horloge sonna le début des cours et me coupa dans ma phrase.

- La malédiction de Cendrillon ! éclatai-je de rire.

- À tes souhaits, dit Alphard, qui n'avait rien compris, ce qui me fit redoubler d'hilarité.

Partout autour de nous, nous entendîmes les bruits de pas sonores de foules d'élèves qui arrivaient de tous les côtés. Je lui lâchai la main avec un grand sourire.

- À plus tard, Alphard.

- À plus tard, répéta-t-il tandis que les élèves effluaient et que je disparus de sa vue dans la foule.

La crise de colère subite de Rosemonde Westmore causa un véritable scandale parmi tout ceux qui avaient cru en elle et signé sa pétition.

- Je n'arrive pas à y croire ! s'indigna Sharon à voix basse, en cours de Runes anciennes. Tu te rends compte de ce qu'elle a fait ?!

- Oui, répondis-je d'un faux ton affligé.

Le professeur Moroz, qui enseignait cette matière en plus de l'Etude des Langues à Caractère Magique, tourna la tête en direction de sa classe pour regarder qui parlait. Sharon attendit qu'elle se retourne à nouveau pour continuer :

- L'ingrate ! Elle nous faisait culpabiliser pour qu'on signe sa pétition, mais tout ce qu'elle voulait, c'était un mention spéciale sur son dossier scolaire !

Je hochai la tête, feignant l'irritation.

- Tu l'avais signé, toi ?

- Non, répondis-je en chuchotant.

- Bah, t'as bien fait, grogna Sharon. Elle mérite que plus personne ne la suive, après ce qu'elle a fait.

- De toute façon, elle a déchiré la pétition en miettes, fis-je remarquer en haussant les épaules.

- Ouais, des cinquièmes années m'ont raconté. Elle l'aurait fait devant Hagrid, en plus.

- Quelle horreur !

Je ne pouvais m'empêcher d'être soulagée. Rosemonde Westmore était totalement décrédibilisée. Et comme le sortilège de Colère ne permettait pas de mentir, les raisons peu nobles de Westmore me permirent de déculpabiliser plus encore.

- N'empêche, dit Sharon, tu ne trouves pas bizarre qu'elle se soit mise en colère comme ça, sans aucune raison ?

- Je ne sais pas, mentis-je. Parfois, les gens ont des réactions étranges sans raison particulière...

- C'est curieux, en tout cas.

- Je trouve aussi...

- Ça ne lui ressemble pas...

Sharon fronça les sourcils, cherchant une explication plausible, mais fut forcée d'admettre qu'elle n'en trouvât pas. Je jouai l'innocente encore une fois en faisant l'hypothèse que la raison était peut-être antérieure à la dispute dans le hall. Sharon hocha la tête, visiblement plus convaincue par cet argument, et nous nous reconcentrâmes sur le cours de Runes.

On dit que le soir même, Rosemonde s'était rendue dans la cabane de Hagrid pour s'excuser et tout arranger. On dit également que Hagrid la fit froidement sortir de chez lui, refusant de s'expliquer. On dit qu'il avait vu le véritable visage de Rosemonde, et que ce masque mielleux ne fonctionnerait plus jamais avec lui. Je fus impressionnée de constater l'efficacité de ma méthode, lorsque je cessai d'espionner les conversations des cinquièmes années, dans la salle commune de Serdaigle, alors assise dans un gros fauteuil. Il n'avait suffit que d'une fois à Rosemonde pour perdre la confiance de Hagrid. Et une fois était assez pour la perdre définitivement. Je me mis à regarder les élèves qui allaient et venaient dans la pièce, pensive. Il ne me resterait qu'à voler le souvenir de Dumbledore et tout rentrerait dans l'ordre. Lorsque j'eus terminé de fixer Barnaby Edgecombe, qui descendait lentement les escaliers en colimaçons qui menaient à son dortoir, je me levai et étirai longuement les bras. Il fallait également que je découvre discrètement les aspirations de Jedusor à mon sujet.

Je montai dans mon propre dortoir plus sereine que je n'en étais descendue le matin même. Méfait accompli !

Salut les loulous ! (Peut-être devrais-je enfin me trouver une phrase d'accroche potable...) Comment allez-vous ? Comme vous l'avez vu, Edith a enfin fait quelque chose ! Waaaa ! (*ironie*) Bref, je n'ai pas grand chose à ajouter, alors si vous avez des questions, n'hésitez pas !

Rodnoffyrg 💝

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