Une famille heureuse

  Je vous présente un petit OS sur le passé de Lacerta, enjoy ☺

  Le soleil brillait agréablement, cet après-midi de mai. Il faisait s'épanouir la nature sans l'écraser sous sa chaleur, et les jeunes feuilles frémissaient sur leurs arbres, au gré d'une brise fraîche et légère. Les oiseaux chantaient. Rouge-gorges, pinsons, moineaux, tous laissaient entendre leurs gazouillis. Dans l'immense jardin de la demeure des Kenneth, l'herbe paraissait même plus verte qu'ailleurs, et les rires d'une fillette éclipsaient la symphonie des oiseaux. Depuis la terrasse, à l'ombre d'un grand parasol, Urania regardait avec amour sa fille courir après les papillons, qui tentait de les attraper avec ses petits doigts. Chaque fois qu'elle en manquait un, elle se lançait à la recherche d'un autre et, lorsqu'elle n'en trouvait pas, Urania en faisait discrètement apparaître un du bout de sa baguette magique.

  - Lacerta n'est-elle pas censée travailler son piano ? demanda une voix. 

  Urania se retourna, surprise. Son mari, Leopold, sortait de la maison et referma la porte-fenêtre derrière lui, sa pipe en ivoire dans la main. 

  - J'ai estimé qu'elle avait bien le droit à une petite pause, répondit Urania en considérant la pipe d'un mauvais oeil - elle détestait l'odeur de la fumée qui s'en échappait. 

  - Tu es trop conciliante, Urania. 

  - Et toi trop dur, Leopold, rétorqua Urania. Notre fille n'a que six ans. Elle mérite bien une enfance agréable. N'as-tu jamais lu Rousseau ? 

  Leopold eut un ricanement et alluma sa pipe d'un coup de baguette magique.

  - Un Moldu, dit-il avec mépris. Français, de surcroît. J'espère que ce n'est pas ce genre de référence que tu donnes à Lacerta.

  - Leopold, je t'en prie. Tu sais très bien que je ne lui aie jamais appris à lire que des écrits de sorciers. Rousseau fait partie de ces multiples connaissances que je garderais à jamais pour moi...

  Au loin, Lacerta poussa un cri d'émerveillement. Les papillons s'étaient réunis au dessus d'elle et battaient les ailes en choeur, comme si leur vol était chorégraphié.

  - C'est toi qui fais ça ? demanda Leopold. 

  - Non, c'est Lacerta. Toute seule. Ses pouvoirs se développent de plus en plus vite, tu ne trouves pas ?

  Tout en caressant sa barbe, Leopold tira une bouffée de fumée de sa pipe.

  - Fantastique, dit-il avec fierté. Elle fera une grande sorcière.

  - Je n'en doute pas une seconde, acquiesça Urania. Qu'en est-il de toi, Leopold ? 

  - De moi ? Que veux-tu dire pas là ?

- Le Ministère ? Tu as réussi à faire passer ta loi ?

Se décidant enfin à s'assoir, Leopold s'installa sur la banquette de jardin, à côté de sa femme.

- Non, avoua-t-il, l'air aussi las que déçu. À quelques voix près. C'est à cause de ce satané Sang-Mêlé de Hopkins ! Il n'a pas arrêté de raconter à qui voulait l'entendre que mon projet était mal conçu et incomplet, tu te rends compte ? S'il savait combien de temps j'ai passé dessus pour le rendre parfait...

- Tu ne le lui as pas dit, ça ?

- Bien sûr que si ! Que crois-tu ?

- Et as-tu pris en compte ses critiques ?

- Comme si je n'avais que ça à faire, de m'occuper des paroles d'un Sang-Mêlé comme lui... Il n'y avait rien à redire sur mon travail !

- Oh, Leopold, rit Urania, ton orgueil te perdra !

- Je n'ai plus qu'à tout recommencer, maintenant...

Leopold eut l'air fortement contrarié.

- Je pourrais t'aider, si tu le souhaites, lui proposa Urania.

- Toi ?

- Oui, moi. Ne me sous-estime pas, Leopold. Je sais beaucoup de choses, malgré les apparences.

- Rousseau, par exemple, dit Leopold en expirant une volute de fumée.

- Je sens très bien la moquerie dans ta voix. Ne sois pas idiot. Tu sais que j'ai les compétences requises pour t'assister.

  Urania lança un regard sévère à son mari qui leva les yeux au ciel.

  - Très bien, Urania, abdiqua-t-il, tu peux m'aider dans mon projet.

  - Parfait, se réjouit-elle. Mais je veux que nos deux noms soient mentionnés dans le dossier. 

  - J'accepte tes conditions, dit Leopold sans protester.

  - Merci...

  Leopold inclina la tête en avant puis ils se turent un instant, surveillant leur fille qui courait parmi les pâquerettes. Les enfants avaient tant de chance de vivre dans l'innocence. Lacerta ne semblait pas se lasser de chahuter dans tous les sens. Elle était si jolie, dans sa petite robe blanche, ses boucles blondes resplendissant à la lumière du soleil. Les papillons avaient repris un comportement normal et la plus grande majorité d'entre eux s'étaient envolés hors de la portée de la fillette. Seuls ceux qui restaient, les magiques, virevoltaient encore avec légèreté autour d'elle comme s'ils ne la percevaient pas. 

  - Je n'ai pas vu Isabel, fit soudainement remarquer Leopold. Où est-elle ?

  - C'est son jour de congé, lui rappela Urania.

  Leopold s'accouda sur un côté de la banquette.

  - Tu as insisté pour  que nous n'ayons pas d'elfe de maison, et nous voilà sans domestique.

  - Isabel est une Cracmole, Leopold. C'est une humaine, elle a sa propre vie. Et tu penserais la même chose que moi des elfes si tu avais subis la présence d'un vieil elfe effrayant durant toute ton enfance. 

  Leopold resta un instant silencieux puis demanda soudainement :

  - Tu as appris, à propos de ton frère ? 

  Urania tourna la tête vers lui, sans comprendre. Pourquoi parlait-il de Calliopus, tout à coup ?

  - Qu'ai-je donc à apprendre à son propos ? 

  - Il va quitter sa femme, annonça Leopold de but en blanc.

  Urania sentit son visage se décomposer. 

  - Excuse-moi ?!

  - Tu m'as bien entendu, soupira Leopold en secouant la tête. Il veux divorcer de Poppée. Je pensais qu'il t'avais prévenu...

  - Mais... balbutia Urania. Mais... Il ne peut pas juste...

  Les mots s'évanouirent dans sa gorge et elle fut alors incapable de prononcer une phrase entière, si bien qu'un seul mot sortit de sa bouche :

  - Pourquoi ? murmura-t-elle, effarée.

  - Une histoire de descendance, marmonna Leopold, visiblement aussi dérangé par la nouvelle qu'Urania. Tu sais bien qu'ils sont mariés depuis plus de huit ans, et qu'ils n'ont toujours pas d'héritiers...

  Urania se mordit la lèvre.

  - Et tu penses que...

  - C'est ce qu'il se raconte, en tout cas. Poppée serait incapable de lui donner un enfant...

  - Sont-ils au moins allés vérifier ces rumeurs auprès d'un guérisseur ?

  - Je n'en sais rien, avoua Leopold. Tu devrais le demander à Calliopus en personne. Ce n'est qu'auprès de lui que tu peux avoir des informations correctes.

  - La question est plutôt délicate à poser...

  - Que veux-tu ? Il ne faut rien affirmer sans preuve. 

  - Mmmh...

  - PÈRE ! PÈRE ! s'exclama la voix de Lacerta, qui courait en leur direction. Depuis quand êtes-vous là ? 

  La fillette se précipita dans les bras de Leopold qui la souleva dans les airs, la pipe toujours coincée entre ses lèvres. Urania les regarda avec tendresse. Dans ses moments-là, tous les problèmes s'évanouissaient. Dans ses moments-là, rien, rien ne pouvais mal se passer...

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