4. Maxine
Galvanisé par l'ambiance festive, notre groupe se déchaîne sur la piste. Un DJ a remplacé l'orchestre, et les tubes de l'été règnent désormais sur la plage.
Riley n'a pas menti, son déhanché s'est perfectionné. Il a toujours eu le rythme dans la peau, se mouvant avec naturel et légèreté.
Ce n'est pas mon cas, mais je compense en entamant des chorégraphies calquées sur des clips de K-pop. Les bières et les cocktails me transforment en une membre à part entière des Blackpink.
Hilare, Riley ne me quitte pas des yeux. J'ai au moins le mérite de garder son attention. Cette fluidité dans ses mouvements m'a toujours aguichée.
D'autant que depuis notre altercation à la piscine, je n'ai pas pu ignorer les changements dans sa musculature. Ses pectoraux dessinés, ses abdominaux fermes, l'arrondi de son fessier... Les carottes ont sans doute contribué à cette transformation physique.
Sentir son corps contre le mien provoquerait-il encore le même effet dévastateur ?
Heureusement que les pensées sont inaudibles. Un rire incongru vrombit dans ma gorge, et je me sens flotter au-dessus du sol. Profitant de ce sentiment de liberté, je ferme les yeux et tournoie en levant les bras.
Des mains se calent soudain sur ma taille, puis un parfum de cèdre et de brise marine enivre mes sens.
— Tu vas finir par vomir, Miss toupie, murmure-t-il à mon oreille.
Je roule des yeux, mais ne retire pas ses mains pour autant.
— C'est bon, on ne peut pas danser aussi parfaitement que Mister déhanché.
Des étoiles pétillent dans ses pupilles.
— Oh, non. J'adore quand tu bouges comme si rien ne t'importait.
Rien, mis à part toi.
Émoustillée par ses mots, je colle mon dos à son torse. Il raffermit sa prise sur ma taille, et nos bassins tanguent en rythme. La musique nous transcende, laissant place au langage de nos corps.
Le souffle brûlant de Riley se promène sur ma nuque, puis dans le creux de mon cou. Je frissonne au contact électrisant de ses paumes. Elles ne tardent pas à quitter ma taille pour conquérir mes hanches et mes cuisses.
Puis, il attrape ma main et me fait pivoter. Nous nous retrouvons face à face, noyés dans le regard de l'autre.
Nos jambes s'emmêlent, ravivant dans mon bas-ventre un brasier qui ne s'est jamais vraiment éteint. Ses iris émeraude brillent à la lueur des rayons lunaires tandis qu'un sourire enjôleur pare ses lèvres tentatrices.
Je succombe à leur magnétisme. Mes bras s'enroulent autour de ses larges épaules, puis, lentement, je m'approche jusqu'à réduire l'espace entre nos bouches à quelques millimètres.
Nos respirations erratiques se confondent, et mes paupières se ferment, en attente de retrouver le goût inoubliable de ses baisers.
Toutefois, à mesure que les secondes s'égrènent, je réalise que Riley ne franchira pas le pas.
Lorsque j'ouvre les yeux, les siens débordent d'un mélange de désir et de frustration.
— Riley, embrasse-moi, s'il te plaît, osé-je formuler, au bord de l'implosion.
Hélas, il se recule, puis passe la main dans ses cheveux. Il secoue la tête et inspire profondément. Le regard sombre qu'il m'adresse ensuite me glace le sang.
— Maxine, tu ne peux pas me laisser sans nouvelles pendant quatre ans et débarquer comme si de rien n'était. Et après quoi ? On couche ensemble et tu repars pendant dix ans ?
Interloquée, je me fige sur place. La bile remonte dans mon œsophage.
— Ry, enfin, ce n'est pas...
Ses traits se crispent, et sa mâchoire se met à trembler.
— T'as pas idée comme j'ai morflé. Je t'aimais comme un fou, Max. Et toi, t'as préféré mettre un terme à notre relation sans nous donner une seule chance. Tu peux pas jouer avec mes sentiments. Je ne peux pas revivre ça.
Il serre les poings, puis me tourne le dos avant de quitter la piste en trombe.
— Riley, attends, je n'avais pas l'intention de...
— Désolé, Max. Faut que je prenne du recul, là.
Alors qu'il s'éloigne vers la plage, mon cœur se brise en un million de morceaux. On aura beau le fuir, le passé finit toujours par nous rattraper.
Riley et moi n'avons jamais rompu de manière officielle. À l'époque, j'étais si jeune et si lâche. Mon égoïsme m'a poussé à ne vouloir garder de notre histoire que sa perfection.
Tout paraissait plus facile en utilisant la distance comme excuse. Hélas, ce soir, j'affronte de plein fouet la souffrance que je lui ai infligée. Et elle me broie les entrailles.
La honte me submerge. Un sanglot m'étrangle, puis je ne retiens pas mes larmes. Violentes, elles coulent soudain à flots.
Alertée par mes pleurs, Joyce se précipite à ma rescousse.
— Max, qu'est-ce qui s'est passé ?
Je renifle, peine à retrouver mon souffle.
— J'ai merdé, Joyce... J'aurais... jamais dû le... le laisser sans nouvelles, hoqueté-je. C'est fichu.
Elle caresse doucement mes cheveux, puis m'entraîne hors de la piste.
— Mais, non, ma belle. Ce n'est pas fichu... Tu l'aimes encore ?
Entendre la vérité se matérialiser à voix haute agit comme un coup de poing dans mon estomac. Je hoche vivement la tête, éclatant de nouveau en sanglots.
Mon amie m'enlace, puis murmure:
— Lui aussi il t'aime encore, Max. Figure-toi que le jour où je lui ai annoncé que tu revenais, la première chose qu'il a fait, c'est se rendre à Port Charlotte pour se couper les cheveux.
Intriguée, je me redresse en arquant un sourcil.
— Pourquoi si loin ? Le salon de Glenn était fermé ?
— Non. Juste que celui de Port Charlotte est réputé pour te transformer en un étalon irrésistible.
Nous nous esclaffons aussitôt. Partagée entre le rire et les pleurs, j'imagine tout à fait la scène dans ma tête. Malgré tout ce temps perdu, un soupçon d'espoir se faufile dans mon coeur.
Joyce m'invite à m'asseoir sur un banc, puis m'abandonne quelques secondes avant de revenir avec une bouteille d'eau.
A moitié remise de mes émotions, j'essaie de remettre mes idées en place. Mon amie pose sa main sur mon épaule.
— Tu dois lui parler, Max. Explique-lui pourquoi tu as préféré le ghoster. Et puis, tu n'es pas entièrement en tort, tu le sais.
J'étanche ma soif, puis soupire longuement.
— Je me sens tellement bête d'avoir cru qu'en ignorant ses messages, notre histoire s'étiolerait d'elle-même, et qu'on en souffrirait moins.
— Tu connais mon avis à ce sujet, mais bon... Le passé appartient au passé. Le plus important maintenant, c'est de mettre les points sur les i.
J'acquiesce, triture nerveusement mes doigts.
— Et s'il ne veut plus de moi, Joyce... Je veux dire, même en tant qu'amie. Ca me fait peur.
Un rictus prend forme sur ses lèvres.
— Il voudra toujours de toi, Max. Je vous ai observé toute la journée. Entre vous, y a une chimie extraordinaire. Et ça, depuis le début.
Ses paroles m'insufflent du courage. L'heure est venue d'enfin affronter ce pan de mon passé. J'inspire à plein poumons, puis me relève, décidée. Je balaie les environs du regard.
— Quand ça va pas, tu sais où le trouver, déclare Joyce en désignant du menton un point invisible au bout de la baie.
Je devine immédiatement son allusion.
— Merci infiniment, Jojoy, t'es la meilleure.
Elle m'adresse un dernier sourire.
— Allez, comme dirait Riley, file petite étoile.
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