ARTHUR B. ; ouïe gelée
ARTHUR BROUSSARD
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Il faisait froid, cette nuit-là. Le vent soufflait par bourrasques, la température frôlait le zéro. Pourtant, le cœur d'Arthur était chaud.
Il n'aurait pu désirer meilleure soirée. Eliott se sentait mieux, Lucas s'épanouissait, Yann s'était éclaté, Basile était heureux. Et, par-dessus tout, aucun d'eux n'avait remarqué. Aucun acouphène n'était venu le perturber, et Arthur se surprit à penser que peut-être tout cela faisait maintenant partie du passé.
Seulement, il arrive souvent que le passé remonte à la surface.
Un coup. Un simple coup suffit. Au sol, inconscient. Un son strident qui sonnait et sonnait incessamment. Une douleur fulgurante, foudroyante sur sa tempe. Le sang acide qui s'écoulait sur ses lèvres, sur sa langue.
Le sifflement s'estompa, se transforma en un imperceptible bruissement.
De la neige. Flocons gelés qui se logeaient sur son visage tuméfié, dans ses oreilles dévastées. Un film de Noël qui avait mal tourné. Arthur ouvrit les yeux, se leva. Il marcha. Le son ne revenait pas. Ce même bruit de fond, ce bourdonnement suraigu surplombait les moteurs des voitures, le souffle du vent.
Le poids du monde sur ses épaules, Arthur menaçait de chavirer. Il avançait, à demi-mort ; son ouïe partie semblait avoir emporté avec elle chacun de ses sens. Le manque le tirait plus bas que terre. Où étaient-ils passés ? Où les sons s'étaient-ils envolés ?
Enfermé dans une boîte hermétique où l'air lui manquait, Arthur suffoquait. Il essayait de se rappeler, de se remémorer ce que ça faisait d'entendre les klaxons et les voix et les rires et la vie. Il ne le pouvait.
Il ne le pourrait peut-être plus jamais.
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