ARTHUR BROUSSARD

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 Arthur ne pensait pas qu'un jour le bruit de Paris lui manquerait. Toutes ces choses qu'il avait pris l'habitude de détester : les moteurs, les klaxons par milliers, les cris la nuit d'adolescents défoncés. Son alarme qui sonnait à sept heures chaque matin. La musique insupportable qu'écoutait sa mère dans son bain. Toutes ces choses qui, dorénavant, lui paraissaient bien loin. Un vague souvenir, que seuls ses rêves parvenaient à reproduire. Et quand la réalité le tirait de ceux-ci, que le sommeil s'évaporait, que la vie recommençait ; alors, le silence revenait.

Les jours passaient, s'écoulaient, disparaissaient avec le soleil qui se couchait ; mais le Silence, lui, persistait. Un virus incurable, une plaie incapable de cicatriser, un horrible cauchemar qui ne cessait de le hanter. Un nuage noir qui le surplombait, à chaque pas qu'il faisait, et qui ne semblait pas près de s'en aller.

Pourtant, Arthur continuait d'espérer. Il continuait de prendre son traitement, se concentrait avidement, sans se soucier du nombre d'heures qui lui restait avant que son ouïe fût définitivement condamnée. Deux ou trois jours.

Cela en faisait quatre, maintenant. Quatre jours. Et, pour la première fois depuis ce qui lui semblait être des lustres, Arthur pouvait entendre. Son téléphone beuglait la mélodie de son alarme insupportable, mais il était incapable de ressentir l'envie de le fracasser au sol. Il ne le pouvait ; autrement, qu'est-ce qui lui prouverait qu'il entendait, qu'il n'était pas en train de rêver ?

Arthur ouvrit les yeux mais se fit aveugler par le feu que son cœur pompait. Une joie intense et euphorique telle qu'il n'en avait jamais expérimenté. Une douce chaleur qui se propageait, de sa tête jusque ses pieds. Il entendait ! Ses pieds touchèrent le sol alors que son esprit s'envolait.

Puis, soudain, il chuta.

Une chute longue, lente, fatale. Aucune issue. Juste son corps et son âme qui plongeaient en piqué dans le néant d'un ciel gris d'orage.

Son enceinte. Volume au maximum. Retentissait si fort que même ses voisins devaient l'entendre. Quand lui n'entendait qu'un murmure...

Il n'entendait pas.

Une journée de plus perdue dans le silence.

Demain, quand il se réveillerait, peut-être aurait-il plus de chance.