02| (soukoku) Le Bleu De Ses Yeux




Les lumières basculent d'une couleur à l'autre. Les néons aveuglent les yeux les plus fragiles. On distingue à peine les paroles de la musique, bien que le volume ne pourrait pas être plus fort. Dû au simple fait que les centaines de personnes présentes crient plus fort les unes que les autres, qu'hommes et femmes déambulent sur la piste de danse, les joues rougies par l'alcool.
Parmis l'odeur du vomi, de la boisson, de peu importe quelles substances circulent, de la transpiration, des filles embaumées de parfum dans l'espoir que des garçons viennent les renifler, une douce effluve se fait sentir. Une faible odeur, morte, éteinte, sans but ni espoir, sans point de départ ou d'arrivée, sans arôme particulier ou envoûtant, juste une odeur froide et fanée.
Simplement l'odeur de la cigarette d'un homme qui a abandonné la vie.

Dazai était assis au bar, une cigarette presque éteinte dans sa main, et un verre de whisky devant lui.
Il fixait les glaçons fondre lentement dans sa boisson, le regard vide. Les flashs des néons reflétaient dans son verre, apportant des ombres colorées à l'or terné de son alcool.
La musique était trop forte, le monde trop bruyant pour lui. Son esprit était dépourvu de la moindre pensée rationnelle. Sa tête lui faisait mal. Sa peau étouffait sous ses bandages. De l'air. Il lui fallait de l'air.
Mais le corps de Dazai ne fit aucun effort pour bouger. Il restait inerte, seule ses iris brunes persistaient à contempler les reflets luisant dans le whisky qu'il ne buvait même pas. Quel en était l'intérêt? Il pourrait boire jusqu'à en perdre connaissance, oublier ses tourments le temps d'une nuit, mais à quoi bon? Au petit matin, ses peines lui reviendront avec le lever du soleil. Mais pour l'instant, la seule lueur dorée était celle du verre devant ses yeux. L'esprit du brun s'emmêlait. Il pris sa tête entre ses mains. Ses yeux étaient rouges, et picotaient affreusement. Le simple fait qu'aucune des personnes présentes n'était capable de ressentir la moitié de ce qu'il ressentait, qu'il était seul avec ses angoisses, condamné à vivre main dans la main avec ses malheurs, suffisait pour qu'il se retrouve au bord des larmes.

Il pouvait pleurer, si il le souhaitait. Ce serait mis sur le compte de l'alcool, après tout, personne ne prêterait attention aux larmes d'un homme ivre. Mais Dazai n'était pas ivre d'alcool. Il était ivre de chagrin. Vide de boisson, mais rempli d'affliction. L'affection qu'il avait une fois eut pour la vie s'était éteinte en même temps que celui qui lui avait donné le goût de cette affection.
Dazai n'avait plus rien qui le retenait. Il était déjà mort de l'intérieur de toute façon. Il finirait son verre, sa cigarette, rentrerait chez lui, et, au petit matin, si quelqu'un se souciait actuellement de lui, il prendra la peine de sortir son corps de sa baignoire.

Le siège à sa gauche grinça sous un poids qui lui fut soudainement imposé. Dazai gardait les yeux posés sur son verre, sa cigarette coincée entre ses doigts s'éteignait paisiblement. Parmis les cris, les rires, la musique, et ses voix intérieures, Dazai perçut tout de même les voix à sa gauche.

" - Qu'est-ce que je vous sers ?

- Du vin. "

Un dialogue court, mais Dazai désespérait soudainement d'en entendre plus. La faible voix qui se fit entendre résonnait maintenant dans sa tête. "Du vin." Une voix d'une octave parfaite, une bien belle mélodie pour Dazai, une douce voix qui devait cacher bien des secrets, des joies et des tristesses, des pensées, des questions, et, pour une raison quelconque, Dazai aimerait entendre cette voix de nouveau.
Le verre de vin fut déposé sur le comptoir dans un petit bruit. Il pouvait sentir la personne près de lui soulever le verre et le porter à ses lèvres, avant de le reposer dans un autre petit bruit.

Les yeux de Dazai fixaient toujours son verre de whisky, mais son esprit était ailleurs. Il était maintenant plus qu'intrigué par la personne à sa gauche. Et, sur un élan de courage, il tourna la tête vers l'inconnu.

Il fut surpris d'être aceuillit par un bel homme aux cheuveux orangés, dont les mèches lui tombaient sur le visage. Lui aussi, semblait fixer le contenu de son verre, mais d'un regard bien moins déprimé. Il semblait juste... perdu. Perdu. Rien que ça.
Éventuellement, le garçon sentit les yeux de Dazai sur lui et tourna la tête dans sa direction. Le cœur du brun ne manqua pas de tomber dans son estomac. De sublimes yeux bleus étaient maintenant en connection avec les siens. Une véritable œuvre d'art. Ses yeux brillaient comme des éclats d'azur, suspendus entre l'ombre et la lumière, mystérieux et fascinants. Dazai, presque automatiquement, se sentait un peu plus vivant. C'était comme si, le temps d'un instant, il était en paix avec lui même, grâce aux yeux paisibles de ce bel inconnu. Ses iris calmes, d'un bleu pur qui semblait engloutir toute pensée et tout bruit autour d'eux.

Le brun entrouvrit les lèvres, comme pour dire quelque chose, mais aucun mot ne sortait. Sa gorge était nouée. Son seul moyen de communication sur le moment était son regard. Aucun mot n'était dit. Et aucun mots n'étaient à dire. Il était impossible pour Dazai de faire sortir le moindre son, et il n'en avait pas la moindre intention. Plus maintenant.

Il sourit. Un sourire léger, à peine remarquable. Mais sincère. Pour une fois, son sourire était honnête, si les yeux étaient le reflet de l'âme, l'âme de ce roux devait être à couper le souffle. Dazai abandonna son verre et sa cigarette sur place, se leva et pris le chemin de la sortie.

Dans une autre vie, peut-être bien que Dazai aurait fait le premier pas. Peut être qu'il lui aurait parlé. Peut être bien qu'aujourd'hui, ce garçon aux cheuveux orangés et aux yeux azur l'aurait mené vers un tout autre chemin.





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