01 - Une vie


IL était là, juste en face d'elle, appuyé sur ses deux pattes arrières. La fixant droit dans les yeux, inexpressif. Et pourtant si terrible. Peut-être pas en apparence, mais le danger qu'il représentait dépassais l'entendement. La quantité de sang déversée sur sa dense fourrure, titanesque, avait depuis longtemps disparu, laissant ses poils gris pâle refléter la lune, leurs procurant un éclat fantomatique. Mais elle voyait toujours ce liquide rouge et gluant dégouliner de ce corps horrifique, son imagination le recréant avec une facilité déconcertante.

Ils étaient restés immobiles, face à face, depuis une éternité maintenant. Aucuns mouvements. Aucuns bruits. Rien. Juste deux être vivant se fixant. Le prédateur et sa proie, immobiles, acteurs d'une scène surréaliste. Séparés uniquement par un peu d'air et une fine couverture.

Un appareil au chevet du lit émit un léger bip, déchirant le silence qui régnait dans la pièce.

Mais personne ne réagit, trop occupés à se jauger mutuellement, comme si la vision de l'autre leur offrait un bonheur intense. Sauf que ça n'était pas le cas. Elle était terrifiée. Il... la fixait. Aucunes émotions ne transparaissaient dans son attitude. Il ne la menaçait pas. Il ne la calmait pas. Il l'observait, de ces deux yeux d'un vert fluorescent.

Elle ne fuirait pas. Elle ne pouvait pas fuir. Même si elle le pouvait, elle était acculée. Couchée dans, dans un angle de la pièce. Surplombée par la... chose, assise au fond du lit.

Personne ne lui viendrait en aide. Elle était seule, dans une gigantesque maison vide. Tous ceux pour qui elle avait comptés étaient loin. Tout le monde était loin. Elle était seule, au milieu de nulle part, avec la chose la plus mortelle qu'elle connaissait.

Elle avait tout essayé pour lui échapper. Rien n'avait fonctionné. Elle s'était réveillée, l'avait aperçu en face d'elle, avait parfois hurlé. Avait tenté de fuir. De se défendre. Elle avait caché un pistolet sous son coussin, elle avait posé des mines au tour de chez elle.

Elle avait voyagé, ne laissant derrière elle qu'une immense trainée de sang. Des proches, des gens qui voulaient la protégée, parfois des inconnus. La police la suspectait, bien sûr. Certains agents pensaient qu'elle avait élevé un chien de chasse sur drogué, nourris à la chair humaine. Mais, la bête étant toujours introuvable, ils avaient abandonnés les charges. Presque à chaque fois. Elle avait été placée en surveillance, puis sous protection. Mais rien n'y faisait. Il venait, prenait une vie, et partait. Encore et encore.

Elle s'était cachée, engagé des gardes du corps, installé des alarmes, des caméras. Rien n'avait fonctionné. Il était toujours revenu. Et avais pris une vie à chaque fois. C'était la règle. La seule chose qui était resté similaire durant chacune de ses visites. Une âme. Pas un animal. Un être humain. Jamais plus.

Jamais moins.

Elle l'avait compris bien trop tard. Ou peut-être avait-elle refusé de comprendre. Elle l'attirait comme une lampe attire les moustiques. Elle avait cherché, fouillé un nombre de librairies incalculable, sans trouver de témoignages similaires à sa propre histoire. C'était probablement la première à subir ce destin. La bête était liée à elle, et elle seulement. Il venait, prenais une vie, et partait. Il viendra, prendra une vie, et partira.

Il l'avait perpétuellement narguée, s'asseyant sur son lit, attendant qu'elle se réveille, et, après qu'elle l'ait aperçu, courrait vers la personne la plus proche pour l'exécuter, avant que quiconque ne puisse réagir. Peu importe le nombre de sécurité, il apparaissait juste à temps pour qu'elle le voit au réveil, n'avais jamais été touché par les armes de ses assaillants. Les caméras se coupaient toujours à son arrivé. Elle et la victime de la créature étaient les seuls à l'apercevoir, peu importait la situation. Il trouvait toujours une faille.

Elle replaça son regard sur la chose, qui n'avait toujours pas bougée.

Plus maintenant. C'était la dernière fois. Il ne reviendrait pas.

Elle avait compris comment le stopper.

Il était lié à elle, et à personne d'autre.

Elle avait échappé aux gens qui la protégeaient.

Ils étaient seuls.

Personne à des lieux à la ronde.

Il prenait une vie. Pas plus, pas moins.

C'était la seule solution.

Toutes ces années de peines... de douleur, de honte, de culpabilité... Elle ne savait comment elle avait réussis à le supporter. Il était venu pour la première fois le jour de ses dix ans, et était repartit avec sa sœur. Puis était repassé une fois par ans. Pendant vingt-et-un ans. Pas un de plus.

Cependant... rien ne se produisait. Il la fixait. Savourait-il sa victoire ? Hésitait-il ?

Il bougea finalement, arrachant un sursaut à l'unique témoin.

Sa tête pivota lentement vers l'unique fenêtre de la pièce, qui s'était illuminé de lumières clignotantes bleu et rouges. C'est alors qu'elle comprit. Il ne savourait pas sa victoire. Il n'hésitait pas. Il ne cherchait pas à l'intimider, ni à la provoquer.

Il attendait.

Elle ne pourrait pas l'arrêter.

La sonnette de la porte d'entrée retentit.

Il était venu. Prit une vie.

Et repartit.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top