Unusual [Chapitre Unique]

Les rues de Tokyo étaient vraiment de la folie. C'était exactement ce que Se Hun se disait alors qu'il traversait la ville en observant autour de lui la vie tokyoïte. Il y avait trop de choses dans cette ville. Trop de monde, trop d'originalité, trop de traditions. On ne savait plus où donner de la tête et lui encore moins. Pourtant, il allait devoir s'y habituer. Il était là pour six mois et ce n'était pas pour s'amuser.

Oh Se Hun avait 24 ans. Il était né en Corée du Sud mais avait rapidement décidé de faire ses études de journalisme en France. Il était actuellement en dernière année de son master en journalisme d'information et d'investigation et s'il était au Japon, c'était pour le reportage qu'il avait à faire afin de valider son diplôme. Pour cela, il avait un stage de six mois à l'étranger. A l'origine, il aurait voulu le faire dans son pays natal, mais il n'avait pas trouvé de place et avait finalement opté pour un pays proche de la Corée afin de quand même pouvoir aller voir sa famille quelques jours lorsqu'il en aurait du temps.

Il avait donc six mois pour faire un reportage sur n'importe quel sujet qu'il trouverait intéressant et surtout que le jury pourrait apprécier. Enfin ... en réalité, il lui restait un peu plus de quatre mois pour le faire.

Cela faisait maintenant un mois et vingt-quatre jours précisément que Se Hun était arrivé au Japon et il n'avait toujours pas trouvé son sujet de reportage. Pas que le Japon, voire Tokyo, ne soit pas un lieu intéressant. C'était même le contraire le problème. Tout était trop ! Il y avait tellement de traditions et d'excentricité que plus rien ne semblait sortir du lot et taper dans l'œil du futur journaliste. Après tout, qui voulait un énième reportage sur les temples ou sur les bars à chat ? Personne. Et encore moins les personnes qui allaient évaluer son travail, de la même manière qu'ils en avaient déjà évalué des centaines d'autres avant lui.

Il devait donc trouver Le sujet qu'il lui fallait et pour cela, chaque jour, Se Hun parcourait les rues de Tokyo en attendant de tomber sur quelque chose qui saurait capter son attention. Et finalement, il l'aperçut.

Une tête dépassait de la foule. Une tête aux cheveux gris accompagnée d'un appareil photo qui semblait mitrailler ce qui l'entourait. Se Hun ne voyait pas le visage de l'homme, mais il ne put s'empêcher d'avancer vers lui. Il paraissait tellement détonner avec le reste du décor. La ville était en mouvement. Elle était même en train de courir. Et lui était là, en plein milieu, immobile et son objectif rivé vers ce qui semblait être un quelconque bar. On aurait dit qu'il ne faisait pas attention aux gens qui passaient. Peut-être n'avait-il pas remarqué qu'il était entouré. C'était l'impression qu'il donnait en tout cas. Du coup ... il l'intriguait.

Se Hun avançait encore, de plus en plus, se frayant un chemin parmi la foule. Il se fit bousculer. Les gens râlaient après lui. Pendant un moment, il crut même perdre de vue l'autre jeune homme malgré sa taille. Puis sans s'en rendre compte, alors qu'il était en train de le chercher du regard, il le percuta.

« Zut ! Pardon ! répondit le jeune homme en coréen. Je faisais pas fait attention. Ça va ?
— C'est rien, lui dit Se Hun en regardant pour la première fois le visage de l'autre homme. »

Il était plus jeune qu'il ne l'avait pensé au début. Il devait avoir deux ou trois ans de plus que lui et il était indéniablement beau. Mais ce qui le marqua sur le moment, ce fut l'énorme sourire qui apparut sur ses lèvres.

« Un compère ! Ça fait tellement plaisir ! s'exclama-t-il.
— Comment ? demanda Se Hun incrédule.
— Tu es coréen toi aussi ?! Ça fait toujours plaisir d'en rencontrer pendant mes voyages ! Un excellent moyen pour ne pas devenir nostalgique ! »

Se Hun continua à l'observer, littéralement fasciné. Il parlait d'une voix très grave qui le rendait presque jaloux, lui qui évitait de beaucoup s'exprimer afin qu'on ne lui fasse pas remarquer son cheveu sur la langue. Son appareil photo pendant autour de son cou, il s'exprimait à l'aide de grands gestes sans se départir de son sourire et sans faire attention à la foule qui passait tout près d'eux.

« Désolé ! Je parle trop ! J'ai l'impression que je n'ai pas parlé coréen depuis une éternité. Je m'appelle Park Chan Yeol !
— Oh Se Hun.
— Toi, t'es pas trop causant ! fit remarquer ledit Chan Yeol. Et tu n'as pas l'air d'être habitué à a ville, continua-t-il alors que Se Hun se faisait à nouveau bousculer par un passant.
— Pas tellement, répondit-il simplement.
— Ok ... bon eh bien, ça a été un plaisir. »

Zut ... il allait s'en aller ... pourtant, Se Hun avait l'impression qu'il ne fallait pas qu'il le laisse partir. Pas maintenant en tout cas. Durant ces dernières semaines, pas une seule chose n'avait pu capter son attention à l'exception de Chan Yeol. Il n'avait malheureusement jamais été très causant, son cheveu sur la langue y faisant pour beaucoup, mais il allait devoir faire un pas s'il souhaitait pouvoir en savoir plus sur l'autre jeune homme.

« Je ... vous êtes là depuis longtemps ? demanda-t-il alors. »

Il aurait sûrement pu trouver une meilleure approche, mais après tout, il avait fait une phrase avec sujet, verbe et complément. Un bon début. Mais au vue de l'air déconcerté de Chan Yeol, il avait sûrement dû le prendre au dépourvu.

« Eh bien, ça va faire deux semaines et ceci sans compter mes autres séjours ici.
— Vous ... vous voyagez beaucoup ? »

Il allait sûrement le prendre pour un détraqué ... ou alors quelqu'un qui cherchait à s'immiscer dans sa vie privée ... ou peut-être un psychopathe voulant tout savoir sur sa vie pour pouvoir le stalker et le tuer dans son sommeil ... oui, en gros, un détraqué.

« Ça fait partie de mon métier en fait.
— Très bien ... »

S'il devait être noté sur sa capacité à communiquer avec les gens, il aurait sûrement une note se rapprochant plus du zéro que du vingt. Et au vue du regard de Chan Yeol qui regardait dans tous les sens, probablement pour chercher un moyen de s'enfuir, la note se rapprocherait même plus du moins infini que du zéro.

« Bon eh bien ... je vais y aller alors ... au plaisir hein ! »

Et Chan Yeol fit demi-tour et commença à s'en aller. Se Hun était sur le point de perdre la chance de sa vie. Il sentait que la solution à son problème d'inspiration se trouvait juste là. Il ne pouvait pas le laisser partir comme cela sans rien faire. Pas après tous les efforts qu'il avait fait pour arriver ici et être à deux doigts de décrocher son diplôme.

« Attendez ! cria-t-il en suivant Chan Yeol. »

Contre attente, l'autre homme s'arrêta et se retourna vers lui. Cependant, sa mine était renfrognée et ses bras croisés sur son torse. Finalement, Se Hun se demandait s'il avait eu une bonne idée d'insister. Mais qui ne tentait rien n'avait rien. Sauf qu'il ne pouvait pas se permettre de n'avoir rien.

« Désolé ... Ne me prenez pas pour un mec détraqué ou je en sais pas quoi ... bon, j'avoue que c'est dur à croire. Mais en fait ... ok, je reprends du début. Je m'appelle Oh Se Hun, je suis coréen, j'étudie en France dans une école de journalisme et je dois faire un reportage sur un sujet au choix pour avoir mon diplôme. Sauf que ce sujet, ça fait un mois et demi que je le cherche. Et pour une raison que j'ignore, j'ai l'impression que vous êtes la solution à mon problème. »

Il n'avait sûrement jamais autant parlé en une seule fois de sa vie. Il était à bout de souffle et surtout à deux doigts d'éclater de rire, faire semblant que c'était une farce et partir. Il prit pourtant sur lui pour rester immobile. Il ne put, cependant, s'empêcher de détourner légèrement le regard, comme si cela pouvait avoir une incidence sur la réaction de Chan Yeol. C'était vraiment mal barré pour que celui-ci ne s'enfuie pas en courant. Déjà, s'il ne s'enfuyait pas, c'était une chance. Si en plus il ne partait pas prévenir la police, c'en était une autre. Mais en plus, s'il acceptait de l'aider ? Non, vraiment, il ne fallait pas pousser tatie dans les fougères.

Et pourtant, contre toute attente, un énorme sourire réapparut sur les lèvres de Chan Yeol.

« Il fallait le dire avant ! Mec ! Tu m'as fait flipper ! J'ai cru que tu étais un psychopathe qui prévoyait peut-être de me kidnapper et me vider de mes entrailles dans un coin sombre de la ville ! Suis-moi ! »

Sans se poser plus de questions, Se Hun le suivit. Ils naviguèrent entre les passants. L'étudiant bénit sa grande taille et celle de Chan Yeol, lui permettant de ne pas le perdre dans la foule, chose qui aurait été totalement impossible s'il n'avait fait, ne serait-ce que quelques centimètres de moins.

Il n'avait aucune idée de l'endroit où il le conduisait. Ils étaient actuellement en train de passer dans des petites rues qu'il n'avait jamais empruntées avant et Se Hun commençait à se demander si ce n'était pas lui qui devrait s'inquiéter de finir vidé de ses entrailles dans une rue sombre de Tokyo. Mais finalement, Chan Yeol les fit entrer dans un café qui semblait tout à fait normal jusqu'à ce qu'ils soient accueillis par de la musique et des bruits de boules de billards s'entrechoquant.

« C'est un de mes endroits préférés, lui expliqua Chan Yeol. Je l'ai découvert lors de mon deuxième voyage ici. »

Se Hun hocha la tête. Il ne savait pas trop quoi faire d'autre pour le moment. Il avait surtout envie de lâcher un énorme soupire. Il n'allait pas se faire éventrer en plein milieu de la route. Pas dans les minutes qui suivaient en tout cas. C'était déjà ça.

Ils s'installèrent à une table et commandèrent à boire.

« Bon, alors comme ça, tu es étudiant en journalisme ... Quelle spécialité ? Et niveau ?
— Information et investigation. Je suis à la fin de mon master.
— Et tu as un reportage à faire pour ton diplôme ?
— Oui. Un reportage à faire pendant six mois de stage. Vous acceptez alors ?
— Attend, attend ! Ne mange pas la tartiflette avant d'avoir épluché les patates. Tu ne sais même pas quel est mon métier ! On va d'abord discuter un peu toi et moi et puis on va voir si je peux t'être d'une utilité quelconque. Ne met pas les pâtes avant l'eau, ok ? Discutons.
— Je ... ok ... alors ... vous faîtes quoi comme métier ?
— Pour commencer, oublie les formalités ok ? Fait comme en France, traite-moi comme ton égal. Sinon, pour te répondre, je suis photographe professionnel. Je travaille pour une agence de voyage qui me demande de partir sur leurs destinations pour prendre des photos pour leur site internet et pour trouver de nouveaux endroits à ajouter dans leurs propositions.
— Wow, fit Se Hun. C'est génial. Vous ... tu fais ça depuis longtemps ?
— Ça fait cinq ans maintenant. J'ai navigué entre plusieurs formations et petits boulots avant de tomber sur celui-ci.
— Et tu as voyagé dans beaucoup de pays ?
— Au moins une quinzaine je pense, lui répondit Chan Yeol avant de commencer à les énumérer en commentant rapidement quelques destinations. »

Se Hun était impressionné. Chan Yeol avait vu tellement de choses fabuleuses et extraordinaires. Lui qui n'avait fait que la France et le Japon, et dans les deux cas, sans pour autant explorer plus que cela l'endroit où il logeait, il avait l'impression de se retrouver face à un grand explorateur. Une sorte de Christophe Colomb des temps modernes couplé à un Yann Arthus Bertrand coréen. Il paraissait même trop ...

« Parfait ... chuchota-il en fixant Chan Yeol du regard.
— Tu disais ? lui demanda l'autre homme en coupant son monologue.
— Je disais que c'était parfait, répondit Se Hun en se reprenant. Tu es ce qu'il me faut. Soit le sujet de mon reportage ! S'il te plaît ? »

Il fallait qu'il accepte. Il n'y avait aucune autre solution envisageable. Il tenait enfin son sujet ! Chan Yeol, photographe professionnel pour agence de voyage. C'était unique. Et surtout le jeune homme en question avait quelque chose ... d'attrayant ? Se Hun ne saurait mettre un adjectif suffisamment proche de ce qu'il pensait réellement. Mais si Chan Yeol acceptait, il aurait bien le temps de trouver l'adjectif parfait.

« Ça peut être cool, dit alors le photographe. Ça consisterait en quoi ? »

Crotte ... il avait accepté ... En quoi cela consistait ? Il n'y avait pas réfléchi ! En même temps, il ne s'était pas attendu à recevoir une réponse positive. Du coup, il ne savait pas comment il allait procéder. Il allait devoir le faire au feeling.

« Je pourrais ... te suivre ? Filmer un peu comment tu travailles. Te poser des questions je pense. Puis je monterai le tout pour en faire un reportage, avec sûrement de la voix off et ...
— Ok, ok. Calme-toi, rit Chan Yeol. Te précipite pas. D'après ce que j'ai compris, il te reste pas mal de temps pour filmer tout ça. Alors pour commencer ... »

Et il se tut. Se Hun aurait pu lui demander pourquoi, mais l'immense sourire, complètement effrayant, de Chan Yeol le coupa dans son élan et lui donnait même envie de fuir. Et lorsqu'il le vit se pencher vers lui, son sourire s'agrandissant encore plus, il eut vraiment peur.

« Avant de filmer, tu ne devrais pas en apprendre un peu plus sur le métier ?
— Euh ... Peut-être ... Enfin, oui je ... suppose ? »

En soi, ce qu'il disait était vrai. C'était même une très bonne idée. C'était mieux de bien connaître son sujet pour en parler ... mais pourquoi est-ce que d'un coup il n'en était pas forcément sûr ?

« Demain, je commence ton initiation, lui dit-il alors avec un sourire espiègle. »

Ok ... il avait définitivement peur.

Se Hun avait payé les boissons. La moindre des choses puisque Chan Yeol acceptait de l'aider. Et une fois qu'ils s'eurent donné un point de rendez-vous et un horaire, chacun partit de son côté, se demandant s'ils allaient vraiment se revoir. Il fallait avouer que pour une première rencontre, l'inquiétude et la peur avaient été très présentes, de quoi rendre une rencontre mémorable, certes, mais pas forcément dans un sens très positif.

Et effectivement. Le lendemain matin, une heure avant le rendez-vous, Se Hun marchait en rond dans sa chambre. Il n'était en aucun cas confiant. Mais ne pas y aller serait renoncé à son sujet de reportage. Sujet dont il était quand même à la recherche depuis quasiment deux mois.

Il prit finalement son courage à deux mains et partit de chez lui. Il avait rendez-vous de l'autre côté de la ville et espérait y arriver à l'heure. Quoi que ... il n'était même pas sûr que Chan Yeol soit là. Si ça se trouvait, il s'était foutu de lui depuis le début.

Se Hun fut alors surpris en voyant l'autre jeune homme l'attendre en face de ce qui ressemblait à un café. Différent de celui de la veille.

« Tient, je me demandais si tu oserais venir ! s'exclama Chan Yeol en l'apercevant. »

Le plus jeune ne répondit pas. De toute façon, il n'y avait rien à répondre, d'autant plus qu'il avait fini par le remarquer la veille, Chan Yeol avait pas mal de répartie.

« Alors, aujourd'hui, je vais faire en sorte que tu sois totalement immergé dans mon métier. Ça ne consiste pas qu'à prendre des photos ! Il s'agit de chercher les meilleurs endroits d'une ville, les tester puis prendre toutes les infos et les prendre en photo si on estime que ça vaut le coup. Alors, tu es prêt à tester une activité pour moi ?
— Est-ce que j'ai le choix ?
— Si tu veux que je t'aide, oh que non tu n'as pas le choix ! Bon, du coup, on va aller dans ce café. Ils ont une activité assez particulière. Mais tu vas voir, ça va être vraiment cool. »

Se Hun se demandait pour qui cette activité serait cool. Et au vu du sourire de Chan Yeol, il avait sa réponse. Pourtant, il rentra quand même dans le café, d'un pas déterminé et sans attendre Chan Yeol, il dit au premier employé qu'il vit qu'il voulait participer à l'activité proposée dans ce café. Il ne savait pas du tout ce qui allait lui arriver, mais il sentait que plus vite il le faisait, mieux ce serait.

Et il eut bien fait. Enfin ... question de point de vue.

Si on allait dans le sens « plus vte c'est fait, mieux c'est » effectivement, il avait eu raison d'y aller tête baissée le plus rapidement possible. Mais si on allait dans le sens de « il faut d'abord se renseigner pour savoir si on veut réellement le faire », peut-être que Se Hun ne se serait pas retrouvé affublé d'une robe de maid en plein milieu d'un café maid. Et Chan Yeol qui était littéralement plié de rire dans un coin du café.

« Et il est content en plus ... bouffon !
— Vous avez dit ? demanda la patronne du café qui lui montrait les ficelles de son métier.
— Rien du tout, ne vous inquiétez pas. Je vous écoute. »

En dehors de la tenue, l'activité fut intéressante bien qu'il eût envie à plusieurs reprises de renverser « accidentellement » un café ou deux sur Chan Yeol qui prenait des photos, toujours aussi hilares.

Il put se changer une heure plus tard.

« J'espère que tu as ce qu'il te faut, ronchonna-t-il.
— Nickel ! J'ai de quoi rire lorsque je serai triste !
— Je te parle de ton boulot !
— Ah ... ça ... »

Se Hun le sentait mal.

« En fait ... je voulais voir si tu étais sérieux par rapport à ce reportage que tu dois faire. Du coup, j'ai demandé à la patronne si un ami à moi pouvait découvrir le métier pendant une heure ...
— Tu veux dire ... que je me suis déguisé ... pour rien ?
— Mais non, pas pour rien, réagit tout de suite Chan Yeol. Disons que tu m'as convaincu d'accepter ta proposition. »

Il allait le défoncer. Vraiment. Il s'était foutu de lui et bien qu'il semblât un peu gêné par cela, Se Hun voyait parfaitement qu'il était heureux de son idée. Et le pire dans tout cela, c'était qu'il semblait vraiment se rendre compte que le plus jeune ne pourrait rien lui dire. Il avait besoin de son sujet.

« J'espère que tu as apprécié ce moment d'amusement, déclara Chan Yeol sans prêter attention au regard noir que lui jeta Se Hun. Parce que maintenant, on va passer aux choses sérieuses ! Autrement dit, je t'emmène au premier vrai endroit de la journée ! »

Heureusement pour Se Hun, Chan Yeol l'emmena dans un autre café à thème mais se contenta là-bas de lui expliquer ce qu'il cherchait en priorité pour l'agence de voyage.

« Il faut des lieux atypiques ou alors qui accrochent le regard. Ce genre d'endroit où quand on le voit en photo, on se dit « je veux y aller ». Il faut des activités insolites, des choses qui fassent rêver. Des activités dont on se dit « je veux les faire ». Du merveilleux. De l'insolite. C'est le maître mot de ce métier ! Les gens aiment l'IN.SO.LI.TE. »

Chan Yeol semblait passionné. Et son visage fascina Se Hun. Il était définitivement le meilleur sujet pour son reportage. Il rendrait bien à l'écran.

Se Hun observa alors Chan Yeol lui expliquer de quelle manière il choisissait ses angles de vue, lui parler de l'appareil qu'il utilisait, de ce qu'il attendait d'une photo. Le plus jeune prit quelques notes, se promettant de filmer l'autre homme lors d'une interview pour parfaire le reportage.

Il put faire quelques photos à la place de Chan Yeol afin d'appréhender l'appareil, bien qu'il ne fût pas étranger à ce genre de machine. Mais l'expertise de l'autre homme était un véritable plus.

Une fois que Chan Yeol s'estima satisfait du nombre de photos faites, il embarqua Se Hun chez lui pour une session de montage photo. Alors qu'il retoucha certaines photos, améliorant la luminosité, les recadrant, etc., il lui expliqua qu'habituellement, il faisait du montage maximum un jour sur deux, prenant des journées entières pour s'en occuper, préférant accorder certains jours à l'exploration des villes uniquement, sans se soucier des montages. Mais souhaitant profiter de la journée entière pour faire comprendre à Se Hun son métier, il avait préféré faire une exception à la règle.

Après ça, Se Hun rentra chez lui, le numéro de Chan Yeol en poche et un prochain rendez-vous pour la fin de semaine, de quoi lui laisser du temps pour réfléchir à son reportage.

Il voulait filmer tous les aspects du métier de Chan Yeol. Les recherches, les photos, les retouches. Il voulait aussi communiquer la passion du jeune homme. Pour être honnête, il le sentait bien. Il était sur la bonne voie. Il fallait juste maintenant qu'il survive aux prochaines idées de Chan Yeol.

La fin de la deuxième semaine, Se Hun commençait à bien apprécier Chan Yeol. Il l'avait emmené à Akihabara, le quartier électronique de Tokyo et s'était extasié devant toutes les vitrines de magasins, les prenant toutes en photo comme un véritable touriste. Le plus jeune avait trouvé cela assez drôle, sachant qu'il savait pertinemment que ce n'était pas la première fois que le photographe venait dans ce quartier.

« Tu es sûr que prendre ce truc en photo est utile ? demanda Se Hun en montrant la énième route que le photographe prenait en photo.
— Chut ! Comme on dit, c'est pas au cuistot qu'on apprend à faire la blanquette de veau. Chaque photo est prise pour une bonne raison. Alors maintenant, continue à filmer et observe le maître. »

Cela avait fait sourire Se Hun derrière sa caméra. Chan Yeol avait une manière de parler toujours très enjouée et souvent tournée vers la nourriture. Voire tout le temps tournée vers la nourriture. Mais la joie du photographe était beaucoup trop communicative ce jour là pour qu'il ne lui dise quoi que ce soit d'autre. Il continua alors à lui suivre à travers les magasins et les salles d'arcade, un sourire caché derrière sa caméra.

Une routine se mit en place au bout d'un mois et demi. En début de semaine, Se Hun rejoignait Chan Yeol pour une petite _ grande _ vadrouille dans le centre de Tokyo dans lequel ils vivaient mille activités toutes aussi insolites les unes que les autres. Puis en milieu de semaines, ils se rejoignaient là où logeait le photographe afin que celui-ci lui montre de quelle manière il choisissait les photos à envoyer à son boss et comment il les travaillait. Pendant ces moments-là, Se Hun mettait sa caméra sur un trépied et la laissait filmer jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de place. Ce qui faisait que le reste de la semaine, l'étudiant travaillait sur son reportage, découpant, collant, ajustant la luminosité, etc. Bref, sa semaine était chargée.

Le montage lui prenait énormément de temps car il devait être minutieux aux détails, mais pas que. Si cela lui prenait du temps, c'était aussi parce qu'il prenait énormément de temps à revisionner les rushs qu'il avait. Il pensait alors au photographe et se demandait souvent avec un sourire où est-ce qu'il comptait l'emmener la fois d'après.

En voyant certains morceaux du dernier tournage, il ne put s'empêcher de rire. Ils tournaient depuis sept semaines et cette fois-ci, Chan Yeol l'avait emmené faire des photos. De vraies photos physiques. Mais plus exactement dans des Purikura, les célèbres photomatons japonais. Ils avaient d'abord pris quelques photos et séquences vidéo de l'endroit qu'ils avaient choisi avant que Chan Yeol n'attrape Se Hun par le bras et le pousse à entrer dans une cabine avec lui.

« Le mieux dans ce job, c'est quand on teste les activités ! Alors, sourit ! »

Ils avaient alors pris des photos tous les deux. Se Hun avait pu en garder une. On le voyait, le visage neutre mais les yeux rieurs, à côté d'un Chan Yeol au sourire éclatant. Ils _ ou plutôt Chan Yeol _ avaient rajouté des petites décorations sur les photos et avaient joué avec les filtres jusqu'à ce qu'un petit incident arrive.

« Oh bordel ! T'as plus d'yeux ! s'exclama Chan Yeol en éclatant de rire. Je crois qu'on a abusé ! Et regarde, moi ! On dirait que j'ai un œil qui coupe du bois et l'autre qui l'empile ! »

Son téléphone sonna, le faisant sursauter. Il l'attrapa rapidement, se doutant de l'identité de la personne qui l'appelait, et eut un sourire à cette idée.

« Allo ?
— J'ai une activité de dingue ! Un truc bien insolite que tout le monde adorera. Tu veux essayer ?
— Bien sûr ! Je suis là pour ça non ?
— Non, ce que je veux dire c'est ... est-ce que tu es partant pour laisser ta caméra chez toi aujourd'hui et juste venir t'éclater avec moi ? »

La demande soudaine surprit Se Hun. Il lui demandait simplement de ... sortir ? De faire une activité avec lui comme avec un ami.

Il était vrai que désormais ils s'entendaient bien tous les deux. Mais, malgré cela, il ne s'était pas attendu à cela.

« Alors ? répéta Chan Yeol.
— Ok ! Où et quand ? »

Après tout, qu'est-ce qu'il perdait à y aller ? Le montage pouvait bien attendre un jour en supplémentaire. Il était même en avance sur son programme. Alors quand Chan Yeol lui annonça qu'il était déjà sur place et qu'il lui enverrait l'adresse par sms, il ne perdit pas une minute de plus pour le rejoindre.

L'adresse indiquait simplement le centre d'Akihabara. Rien de plus. Et c'était assez étrange. Mais lorsqu'il arriva au point de rendez-vous, Se Hun ne fut en aucun cas déçu.

« C'est réellement ce que je pense ? demanda Se Hun.
— Si tu penses à une course de marche nordique habillée en Pokémon, malheureusement, non, ce n'est pas ça. »

Se Hun avait tendance à trouver l'humour de Chan Yeol plutôt lourd et il avait même appris à le lui faire remarquer. Mais là, à la vue des répliques parfaites des véhicules de Mario Cart grandeur nature, insulter le plus âgé ne lui viendrait même pas à la tête. Il avait même plutôt dans l'idée de le serrer dans ses bras s'ils avaient été seuls.

« Seule condition ! annonça Chan Yeol avec un sourire qui n'inspirait pas confiance. JE choisis ton personnage !
— Tout ce que tu veux ! lui répondit Se Hun, avec toujours autant d'étoiles dans les yeux. »

Il aurait pourtant peut-être mieux fait de s'abstenir de répondre aussi précipitamment s'il avait su que parmi tous les personnages de Mario Kart, Chan Yeol lui avait choisi ... La Princesse Peach, bien évidemment.

Il se retrouva alors affublé d'une robe rose et d'une perruque blonde, à bord de son véhicule. Il allait se venger. Chan Yeol ne s'en tirerait pas aussi simplement, d'autant plus que celui-ci avait opté pour le traditionnel Mario. Mais pour cela, il allait d'abord devoir le battre à la course. Heureusement pour lui, il était un adepte des courses de kart alors il n'était pas près de perdre !

... Il avait perdu.

« Avoue, tu fais ça toutes les semaines ! s'insurgea Se Hun en s'approchant de Chan Yeol.
— Peut-être pas toutes les semaines. Mais quand on a un métier comme le mien, on finit par être doué dans pas mal de chose. Tu veux que je te montre ? »

Il se rapprocha soudainement de Se Hun, le surplombant de quelques centimètres, avec un sourire mystérieux au bout des lèvres. Le plus jeune vira au cramoisie et commença à bafouiller.

« Je rigole ! s'exclama Chan Yeol en se tenant le ventre. Ta tête ... Je parle d'UFO Catcher. Je sais pas si tu as déjà eu l'occasion de tester ici. Tu vas voir, c'est quelque chose ! Allez, va te changer, même si le blond te va plutôt bien. »

Il lui fit un clin d'œil avant de partir lui aussi se changer.

Lorsqu'il sortit de son champ de vision, Se Hun se remit à respirer normalement et posa une main sur son cœur. Il ne comprenait pas trop ce qu'il lui arrivait. Lorsque Chan Yeol s'était retrouvé près de lui, il avait senti son cœur s'emballer. Il avait été tellement près. Assez pour ... l'embrasser ?

A cette pensée Se Hun secoua la tête. Il racontait n'importe quoi. Il allait maintenant aller se changer, suivre le photographe jusqu'aux UFO Catcher, le battre à ce jeu et puis rentrer chez lui pour continuer à travailler. Ça, c'était une pensée rationnelle et raisonnable.

Sauf qu'après avoir perdu une certaine somme sans rien gagner, Chan Yeol eut sûrement pitié de lui et lui donna quelques peluches qu'il avait remporté.

« Tient j'en ai beaucoup trop chez moi à force de venir jouer ici. Puis je trouve que ce Rondoudou te ressemble. Mignon. Mais quand tu perds ou que tu n'es pas content, tu donnes l'impression de vouloir gribouiller sur le visage de tout le monde. »

Et là, Se Hun beugua, des peluches plein les bras. Il hésitait entre s'insurger et s'enfuir. A la place, il se mit à rougir _ enfin, il en était quasiment sûr _ et profita de la présence des peluches pour cacher un tant soit peu son visage derrière elles.

Finalement, Chan Yeol prit simplement congé, lui disant qu'il le recontacterait lorsqu'il aurait une autre séance photo. Ni une, ni deux, Se Hun se dépêcha de rentrer chez lui et de cacher la peluche de Rondoudou dans sa valise pour ne plus l'avoir devant les yeux. Il ne voulait plus la voir. Elle le faisait se sentir bizarre et il ne savait pas trop s'il n'aimait pas ou s'il détestait cette sensation. Ce qu'il ne savait pas non plus, c'était s'il avait hâte de revoir Chan Yeol ou si cela l'inquiétait.

Mais il n'eut pas le temps de s'inquiéter plus longtemps avant de recevoir un message lui disant que la journée avait été très bonne et qu'il avait donc rendez-vous pour filmer quatre jours plus tard. Et ces quatre jours furent beaucoup trop long.

Se Hun se rendit compte que sortir faire des activités et filmer Chan Yeol faisaient désormais partie de son quotidien. Tous les jours il sortait ou alors faisait du montage vidéo. Mais là, il était à jour dans ses coupes de rush alors il n'avait plus eu qu'à attendre. Et attendre.

Mais ça avait valu le coup. Jamais encore il n'avait vécu de journée aussi douce que celle-ci.

Chan Yeol l'avait emmené dans un bar à chouettes.

Se Hun avait déjà fréquenté des bars à chats et il ne l'avouerait que sous la torture, mais il avait presque eu l'envie de ne jamais quitter cet endroit. Là, c'était différent. Il y avait clairement 90% de chance pour qu'il ne s'en aille jamais. Il était entouré de chouettes _ logique _ et il n'avait jamais rien vu d'aussi attendrissant. Il avait littéralement envie de toutes les caresser mais il était en train de filmer et il ne devait pas s'arrêter.

A travers l'objectif, il voyait un Chan Yeol heureux qui mitraillait chaque chouette en leur parlant comme s'il s'adresser à des mannequins, leur demandant leur meilleur profil, de ne plus bouger, leur disant qu'elles étaient magnifiques, parfaites.

C'était ... attendrissant.

Mais Se Hun aussi voulait les caresser. Il finit alors par laisser sa caméra sur son trépied _ trépied acheté à l'occasion d'un karaoké lors de la troisième semaine de tournage _ pour rejoindre le photographe.

« C'est tellement adorable, s'extasia-t-il en lissant les plumes d'une chouette.
— Il n'y a rien de plus adorable, c'est vrai. »

Ils s'amusèrent avec les chouettes pendant encore un moment avant de partir manger. Se Hun voyait que Chan Yeol était légèrement mal à l'aise. Il semblait lui cacher quelque chose. Et avant qu'il ne puisse lui demander quoi, l'autre jeune homme parla.

« Je retourna chez moi dans deux semaines, annonça-t-il de but en blanc. »

Deux semaines ? C'était tellement peu.

« La semaine prochaine, j'ai encore un endroit à prendre en photo puis j'ai une semaine pour plier bagage.
— Et ... tu pars où après ?
— Je ne sais pas encore.
— Oh ... Et ce dernier endroit ? C'est quoi ?
— C'est le Temple Gotokuji, célèbre pour ses milliers de chats porte-bonheur.
— D'accord ... »

Et ce fut tout. Ils finirent de manger, se donnèrent rendez-vous pour le lendemain, journée traitement des photos, puis la semaine d'après pour aller au temple.

Contrairement à toutes les autres sorties, le cœur de Se Hun n'était pas à la joie. Il filmait la progression de Chan Yeol sans pouvoir le quitter des yeux un seul instant. Il n'arrivait pas à se dire que dans quelques heures, ils allaient chacun partir de leur côté et ne lus se voir. C'était ... bizarre. Et ça lui faisait mal au cœur. Bien plus qu'il n'aurait pu l'imaginer au début de cette aventure.

Et chacun rentra chez soi.

Se Hun regardait son téléphone toutes les cinq minutes. Il ne tenait plus en place. Cela faisait déjà quatre jours depuis la dernière séance avec Chan Yeol et ... bon sang, il lui manquait. Il n'avait rien eu depuis. Ni appel, ni message. Rien. Peut-être aurait-il dû le contacter lui-même, mais il avait peur. Mais peur de quoi ? De se faire repousser parce que c'était bon, le travail était terminé et le photographe estimait sûrement qu'ils n'avaient plus à se revoir ? Qu'est-ce qui serait le plus douloureux ? Ne plus revoir Chan Yeol ou se rendre compte que celui-ci ne ressentait pas l'envie de le recontacter ?

En temps normal, Se Hun aurait dit que savoir qu'il était le seul en manque l'aurait plus blessé. Mais là ...

Il avait passé les quatre derniers jours à passer en boucle les mêmes scènes de son reportage. Celles où on voyait le mieux le visage de Chan Yeol.

Au début, il n'avait pas trop compris ce qu'il lui arrivait. Mais lorsqu'en ouvrant sa valise, il retomba sur le Rondoudou que Chan Yeol lui avait donné, il ne put éviter plus longtemps la vérité.

Chan Yeol l'attirait et ce depuis le premier jour sûrement. Depuis qu'il avait vu dépasser de la foule une personne qui semblait hors du monde, immobile dans la foule pressée. Une personne qu'il avait appris à connaître, qui l'avait fait rire, lui avait fait peur, qui s'était montré drôle, taquin là où les autres étaient sérieux.

Oui, Se Hun était indéniablement attiré par cette personne ... insolite.

Alors désormais, si on lui demandait ce qui serait le plus dur entre ne plus voir Chan Yeol et apprendre qu'il ne comptait pas pour lui ... Se Hun choisirait la première solution.

Ce fut pourquoi, pour la première fois de sa vie, Se Hun fit le premier pas. Il attrapa son téléphone et composa son message.

Se Hun : J'ai oublié de faire ton interview vidéo ... peut-on se voir ?

Voilà, c'était envoyé. Bon, il était vrai qu'il aurait pu trouver mieux comme nouvelle approche, mais il avait au moins pris son courage à deux mains et recontacté le journaliste.

Deux heures plus tard. Il n'avait toujours pas de réponse. Peut-être était-il déjà reparti ? Il ne lui avait pas donné la date précise de son départ, seulement la semaine. Alors peut-être était-il parti en début de semaine ? Qu'est-ce qu'il allait pouvoir faire si c'était le cas ? C'était la première fois qu'il était comme ça, qu'il voulait autant revoir une personne à l'exception de sa famille. Et ça allait se terminer comme ça ? Se terminer sur rien ?

Mais finalement, son téléphone sonna. Sans attendre plus longtemps, Se Hun se jeta sur son téléphone et souffla de soulagement en voyant le nom de Chan Yeol s'afficher sur l'écran.

Chan Yeol : Je suis disponible cet après-midi. Vient chez moi quand tu peux.

Dès qu'il le pouvait ? Il ne fallut pas le répéter deux fois à Se Hun pour qu'il prépare ses affaires pour tourner et qu'il aille chez Chan Yeol.

Le trajet jusque l'appartement parut interminable. Se Hun courut presque en sortant du métro. Il avait l'impression d'avoir déjà perdu trop de temps. Et pourtant, en même temps, il se demandait ce qu'il pourrait bien dire au photographe. « Salut ... tu m'as manqué » ? « J'étais obligé de te voir avant que tu partes » ? Mais lorsque la porte s'ouvrit et qu'il se retrouva face à Chan Yeol, rien de tout cela ne put sortir.

« Salut, lui dit le plus vieux. »

La voix grave de Chan Yeol fit frissonner Se Hun. Ça aussi, ça lui avait manqué.

« Salut ... je ...
— Vient ! Met tout en place, j'arrive tout de suite. Faut que je me fasse beau, le coupa-t-il en lui adressant un clin d'œil. »

Bon. Très bien. D'abord on allait filmer, puis on allait aviser.

Alors Se Hun filma. Il posa plusieurs questions à Chan Yeol. Plus qu'il n'en avait prévu même. Juste de quoi remplir sa carte mémoire dans sa totalité et de rester encore un peu plus longtemps avec lui.

Et Se Hun rangea ses affaires, prêt à partir. Simplement. Alors qu'il fermait sa sacoche, il avait réfléchi. A quoi bon. A quoi bon se faire plus de mal. Il pouvait très bien dire à Chan Yeol qu'il lui plaisait. Et après ? Chacun allait repartir dans son pays et c'était tout ? Est-ce que prendre le risque de souffrir plus que nécessaire pour une journée de joie était raisonnable ? Il n'en était pas sûr.

Alors il mit son sac sur le dos et avec un sourire qu'il voulait heureux, il salua Chan Yeol et ouvrit la porte de l'appartement.

Qui se referma brusquement.

Se Hun sursauta et riva son regard sur la main qui maintenant la porte close. Il se retourna et tomba nez à nez avec la personne dont il voulait désespérément s'éloigner. Et il semblait différent de d'habitude. Il n'avait pas son grand sourire aux lèvres et aux yeux. Là, son visage ne reflétait ... rien.

« Je ne comprends pas, lui dit-il alors. »

Sauf que Se Hun non plus ne comprenait pas. Que voulait dire Chan Yeol ?

« On a passé plusieurs semaines géniales. On est sorti pour des raisons professionnelles mais aussi simplement pour sortir et s'amuser. On s'entend bien. Et j'ai même l'impression que ça se passe encore mieux que ça. Tu sembles réagir quand je m'approche. Quand je te parle. Je me dis que je suis sur la bonne voie, qu'il se passe réellement quelque chose entre nous. Puis on a fait la dernière activité. Je me suis dit que je m'étais fait des idées mais tu m'as renvoyé un message. Alors j'ai cru que ... peut-être ... Enfin, je ne comprends plus rien. Tu vas réellement partir de cet appartement comme ça ? »

Se Hun s'était fait une raison en voulant partir d'ici. Mais cette raison se retrouva ébranlée par le regard intense de Chan Yeol qui venait de ... Est-ce qu'il venait réellement de lui dire qu'il lui plaisait ? C'était ... trop beau pour être vrai. Et surtout ... c'était totalement fou. Pensait-il vraiment que quelque chose soit possible entre eux sur le long terme ? C'était impossible.

« Tu vas partir ... lui répondit-il alors dans un murmure. A quoi bon ?
— Redemande moi où je pars.
— Pour quoi faire ? Pour nous prouver que dès que j'aurai passé cette porte, des milliers de kilomètres nous séparerons ?
— Redemande moi, le supplia Chan Yeol.
— Où pars-tu près ? lui demanda-t-il finalement en soupirant, résigné.
— En France, si c'est là que tu seras. Autre part si tu veux aller ailleurs.
— Pourquoi, répondit Se Hun que cette réponse avait plus fait mal qu'autre chose.
— Parce que j'ai envie de savoir si quelque chose est réellement possible entre nous. Tu n'en as pas envie toi ? »

Se Hun laissa tomber sa tête sur l'épaule de Chan Yeol. Il devait prendre une décision. Il savait que l'autre homme lui laissait le champ libre. Il pouvait partir d'ici ou alors accepter. Les cartes étaient entre ses mains. Et ce fut lorsqu'il se redressa et que son regard tomba dans celui du plus grand, un regard contenant tant d'espoir, qu'il prit sa décision. Il s'approcha doucement de l'autre jeune homme et l'embrassa. Doucement. Un simple baiser en surface mais qui suffit à Chan Yeol pour que ses yeux brillent à nouveau.

« Tu te rends compte que c'est insensé j'espère, lui fit remarquer Se Hun après un autre baiser, cette fois initié par Chan Yeol.
— Non, ce n'est pas insensé. Mais peut-être qu'on pourrait dire que c'est ... insolite ? »

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