-Steph-


« et merde.. »

Il observe le paquet de céréales qui vient de se renverser à ses pieds. Ça l'énerve quand ça arrive. Un peu de maladresse un dimanche matin, alors qu'il n'est pas encore entièrement réveillé, et la moitié de la cuisine qui s'effondre. Il se met alors à quatre patte, non sans galérer un peu, il est pas super sportif non plus, et commence à réparer sa connerie. Parfois, quand y en a qui sont pas trop pleins  de poussière, il souffle dessus, puis il les mange. 

Il est comme ça, lui : tant que la règle des trois secondes n'est pas écoulée, bah il s'en fout. 

Il est toujours par terre, en train de ranger, souffler, manger, quand son téléphone sonne. Faut toujours qu'il chante au mauvais moment, celui la. Avec la voix de Micheal Jackson qui résonne dans la cuisine des 9h43 du dimanche. 

Alors il se lève, 

« Foutu téléphone »

Abandonnant tout les céréales roulant sur le carrelage damné (vachement laid d'ailleurs), et il cherche son téléphone. Il hurle toujours dans ses oreilles, et pourtant pas moyen de le trouver. Ni dans les placards, ni dans le frigo, (après réflection, pourquoi son téléphone serait dans son frigo ?), ni sous la table en compagnie de son petit dej renversant (haha). 

Alors il sort de la cuisine, par ce que le son semble venir du salon , en fait. Effectivement, son canapé s'est transformé en salle de concert, et un des coussin en particulier chante terriblement fort. Il le jette au sol, et trouve enfin son Micheal de poche, qui cesse de hurler au moment même où il l'attrape.

« Fais chier »

Il rappelle, dans sa fiche d'appels récents (c'est le seul d'ailleurs, vu qu'il n'appelle personne) le numéro inconnu qui vient à l'instant de l'appeler lui même, et attend. 

Une sonnerie. 

Il retourne dans la cuisine, le téléphone coincé entre son épaule et son oreille, et se sert un nouveau bol de céréales.

Deuxième sonnerie, troisième, quatrième. 

« Jordan. »

Il fronce les sourcils, et repose sa cuillère. Il connaît pas cette voix. 

« C'est bien moi. En quoi puis-je vous aider ? »

La voix ricane, (hein, hein)

« En rien mon p'tiot. En rien. Mais tu peux M'payer ça, oui oui. Tu peux m'payer. »

La, il ne comprend plus rien. 

«  vous payer ? Monsieur, pouvez vous être plus clair ? On s'connaît ? »

Le mec tousse. Il crache ses poumons plutôt. Les céréales se noient. 

« Et Stéph ? Tu la connais Steph. Et M'mens pas par'c'que j'apprécierais pas trop, tu vois ? »

Steph... 

« Stephanie vous voulez dire ? Ma femme ? »

Et là, le mec se met à hurler. Des cris stridents, vraiment forts. On dirait un fou. On dirait ?

« NON MON P'TIOT SALIGAUD. C'PAS TA FEMME STEPH. C'EST MA PRIPO... PROPRI.. PROPRIÉTÉ T'Y VOIS ? tsss. Qu'est tu m'la piquée ma Steph hein ? Oui, oui. Oui. M'la piquée. Ma fille. B'ein bonne hein ? »

Et merde. Mais un vrai merde cette fois. Un merde paniqué, un merde pour Steph, un merde pour son père, un vieux pervers taré, qu'il a actuellement collé à l'oreille. Elle lui en avait parlé, Steph, elle lui avait tout dit. Mais comme c'est un mec qui s'en fout, il l'avait pas écoutée. Il l'avait pas écoutée...

« 'coute moi p'tit. Ta baraque, elle est bein bonne aussi hein ? Bein bonne, mais j'l'aime pas trop hein ? Ton peignoir non plus d'ailleurs, hein ? Oh, t'y tu peux chercher autours de toi, avec ta tête de paniqué, la. T'y M'verras pas. Mais moi j'te vois. Et j'sais qu't'en as plus pour très longtemps. »

Et puis la, une odeur. Une odeur, une odeur... une vraie saleté, comme en on trouve dans les barbecues entre voisins, les dimanche aprem normaux. Celle qui vous colle aux basques.  Une odeur de fumée. Et alors la, alors la... Ça vous prend à la gorge, et vous pouvez plus respirer. Et alors où vous perdez connaissance, ou vous souffrez un peu plus. Apparement le destin a choisit l'option la plus rude pour lui. Il sent d'abord son nez qui le pique : un peu, d'abord, puis très fort ensuite. Il a l'impression d'imbiber une cigarette gigantesque, qui vient gratter l'intérieur de ses poumons, pour venir s'y installer et poser son nid. Et autours, ça devient noir. Ça passe sous les portes, dans les fenêtres, les p'tits trous dans le mur qu'il devait faire réparer depuis un moment déjà. Il voit plus rien, il pose son téléphone, il commence a courir, il sent la fumée en lui, qui se fraye un chemin sans douceur. Il sent ses yeux le piquer, il trébuche, tombe, se relève, court, trouve la porte, la pousse de toute ses force, et elle bloque. Alors il pousse encore plus, tousse encore plus, et d'un coup, elle cède. Il tombe dans le jardin la tête la première, il se relève tellement vite qu'il tombe encore, il' rachète ses poumons, plié en deux. Fait chaud. 

Et il se recule. A dix mètres. dans sa jolie petite allée du type qui n'a jamais connu la misère. Et il regarde. Effaré. Les flammes qui dévorent sa maison. Il regarde. La bouche ouverte. 

Il regarde leur chambre. Toujours fermée. Elle prend sa douche. 

« Steph... »

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