Jamais

- Gabrielle !

Elle courrait, encore et encore. Tentant toujours d'aller plus vite à chaque seconde. L'épuisement n'avait pas sa place dans son esprit.

- Attention !

Ses muscles réclamaient l'arrêt. Immédiat. Mais elle refusait, continuellement. Elle devait courir. Ne pouvait faire autrement.

- Arrêtes toi !

Elle venait de dépasser la ligne d'arrêt, mais comme toujours, comptait au moins faire un tour supplémentaire. Elle en fit deux.

- Tout de suite !

L'air balayait son visage, refroidissait ses muscles tendus à l'extrême. Elle aurait aimé qu'il efface aussi ses pensées. Comme toujours, rien n'y fit.

- STOP !

Elle s'était arrêtée. Net. Sans ralentir, ses jambes s'étaient emmêlées et voilà qu'elle se retrouvait à même le sol. Elle avait le choix : se recroqueviller comme elle l'aurait fait il y a bien longtemps, ou se relever et ainsi montrer une force qu'elle ne possédait pas afin de cacher sa faiblesse permanente.

Elle se sentit trembler. Trembler de ressentir à nouveau ses bras l'entourer, quand bien même personne n'était à ses côtés.

Jayce, sa meilleure amie - si leur relation accordait toujours ce terme - avait encore accouru. Les mois écoulés n'avait rien arrangé à son état.

Ainsi, depuis bientôt un an elle se laissait dépérir au fil des jours. Cédant perpétuellement aux crises causées par sa voix. Celle qu'elle avait, autrefois, tant aimé entendre. Or, désormais elle ne lui soufflait plus que souvenirs derrière ces mises en garde passées.

- Gabrielle !

Elle ne supportait plus tout cela. Elle devenait incapable de résister. Submergée, elle se laissait délibérément noyer par les vagues frappantes de réalité.

- Attention !

À cette autre époque, qui ne remontait pourtant qu'à quelques mois, il l'avait avertit du danger qu'était l'ignorance. Aujourd'hui, il l'avisait de la noirceur qu'étaient les abîmes dans lesquelles elle plongeait.

- Arrêtes toi !

Elle savait qu'elle devait l'écouter. Seulement, ces paroles ne lui rappelèrent que souffrance, effaçant toute chance d'un jour sortir de cet enfer.

- Tout de suite !

- NON ! Je ne peux pas ! voulait-elle crier. Mais elle demeurait faible. Si faible qu'un jour son manque de volonté la conduirait à la fin de cette lutte, aussi peu acharnée eût-elle été.

- STOP !

Finalement, peut-être était-ce ça, qu'elle recherchait ? La fin de son combat. L'heure de déposer les armes. Le temps de la paix. Le moment de le rejoindre.

Non. Elle lui avait fait une promesse. Il lui avait inculqué l'art du devenir et elle devait en user fièrement.

- Gabrielle !

Une autre voix, celle de Jayce.

- Gabrielle ! Ça va ?! Est-ce que tu peux m'entendre ?

À dire vrai, difficilement. Elle avait été légèrement sonnée, et, hormis sa voix à lui, les autres lui étaient presque inaudible.

Une promesse ! - quelle belle connerie diraient certains. Pourtant, c'était la seule chose qui la retenait. Car, ni sa famille, ni ses amis ne comprenaient ce qu'elle ressentait. Un mal être rongeant avidement quelconque parcelle de son âme meurtrie. Quand bien même Jayce avait-elle tenté à de nombreuses reprises, elle s'était résignée à chercher cette souffrance qui présidait son amie. Et, elle y avait déjà songé tellement de fois, mais sa mort ne bouleverserait pas grand monde hormis peut-être Jayce, mais qui finirait probablement par s'en remettre. En effet, Gabrielle n'avait pas une entente or-norme avec sa sœur et son frère, et encore moins avec sa mère. Le seul être familial dont elle s'était un jour sentie proche avait été son père. Il avait rendu l'âme il y a de cela trois ans d'un infarctus.

〰✴✴✴〰

Une étroite brise,
Un chant lointain,
Un cocktail de bonheur.

Un souffle irradiant,
Une cacophonie excentrique,
Une unité tumultueuse.

〰✴✴✴〰

- Tu devrais y aller.

- Non.

- Je reformule, tu dois y aller.

- Donnes moi une raison. Une raison de le retrouver ainsi d'une manière si éphémère que le coup n'en serra que plus violent. Une raison d'aller veiller ses décombres et redécouvrir ma ruine. Une raison de punir ainsi ma lâcheté consentante et hanter son culte, sa paix éternelle. Une seule et unique raison de raviver ce feu ravageur s'émerveillant gaiement de mes tourments.

- Tu n'y es jamais retournée, et tu es incapable de tourner la page. Ça ne peut plus continuer. Plus en ces conditions. Il faut que ça change, que tu changes.

- Et si je refuse le changement.

- Tu ne peux pas.

- Oh, si. J'ai le choix. Ce jour-là je ne l'avais peut-être pas, mais aujourd'hui j'ai droit de mon sort dans son intégralité.

- Pourquoi...?

- ...

- Pourquoi n'acceptes-tu pas mon aide...?

"Parce qu'il est toujours là, dans ma tête, mes pensées, mon cœur, mes sentiments, mon passé, mon présent, mon avenir, mes désirs..."

〰✴✴✴〰

- Je vais t'avoir !

Il criait à travers champs se rapprochant davantage d'elle à chaque foulées.

- Mais je ne t'appartient pas !

Elle ne fatiguait pas de sa bonne endurance ajoutée à l'euphorie d'un instant interdit.

- Tu crois ?

Bien sûr, elle lui était totalement dévouée. Corps et âme. Elle était sous son emprise et ne cherchait - ne voulait - pas s'en défaire tant elle y demeurait bien, à son aise, chez elle. Il était son pilier principal et sa demeure éternelle.

- Je pense.

Elle jouait avec lui, simplement, naturellement, familièrement. N'imaginant pas une seconde qu'il serait son dernier souvenir, qu'il vivait ses derniers instants.

- Je suis persuadé du contraire

Il l'avait finalement rattrapée et kidnappée entre ses bras. Il s'amusait d'une de ses longues mèches brunes bouclées roulant contre ses doigts calleux propre aux hommes.

- Désolée.

Un sourire malicieux se dessinait sur ses lèvres féminines si attirantes avant qu'elle ne le pousse, chutant avec lui aux côtés des fleurs de champs. Elle roulait sur le côté, dos au sol, la tête penchée vers lui. Ils entrelacèrent leur mains nouant spontanément leurs doigts.

- Tu vas être punie pour ta faute.

Il mentait, bien sûr. Quoiqu'alors sa punition n'avait rien de telle.

- Ah ? Aurais-je fauté au près de vous, mon illustre seigneur ?

C'était l'une de leurs folies. De leurs loisirs. Le seigneur et sa dame.

- En effet, je n'ai jamais vu de fleurs plus charmante que vous. La plus belle parmi les plus belles. Une rose parmi les violettes. Un cœur parmi ses poumons. Un pistil parmi ses étamines. Un pollen parmi des stigm...

Ses connaissances étaient quelques peu emplies. Quelques peu... Ainsi, il usait de son savoir afin de la prendre à son propre jeu.

- D'accord ! Ça va ! J'ai compris ça devrait aller.

Elle l'arrachait de sa tirade plaquant ses mains sur sa bouche, derrière laquelle il souriait franchement. Il la tirait contre lui, baisant tantôt son front, ses tempes, ses pommettes, le coin de ses lippes. Puis, il fixait le ciel bleu. Un bleu pure et intense. Aussi intense que leur amour... Seulement deux ou trois nuages blancs l'habitaient. L'environnement était splendide. Un pré à perte de vue. Des gerbes de pissenlits, de coquelicots, de boutons d'or et autres splendides chefs d'œuvres de mère nature tel que des arums aussi opalescents qu'un lys. Une légère brise caressait leur peaux nues, tandis que les rayons de soleil se chargeaient de les réchauffer. L'odeur de campagne se répandait à travers leurs narines emplissant chaque cellules, globules, et organes de leur être allant jusqu'à toucher le puits de leur âme et déversant paix et sérénité en eux.

- Tu sais, j'étais sérieux. Tu es la plus belle chose qui m'est arrivée et m'est été donnée de voir.

Il était réellement sincère. Propre de vérité. Ses paroles la touchèrent de pleins fouet. Elle en était émue, le cœur au bord des lèvres.

- Alors, s'il te plait. Promets moi une chose.

Une larme s'évadait et roulait le long de sa joue. Il se confessait. Vraiment. S'offrait totalement à elle.

- Quoiqu'il arrive, restes toi même. Ne changes pas. Continues de te battre. D'aller de l'avant comme tu l'as toujours fait. Je t'aime tel que tu es et ne te veux pas autrement. Alors, promets moi.

〰✴✴✴〰

- Pourquoi...? Pourquoi es-tu parti ? Je t'ai promis, mais je n'en ai plus la force...! Je t'en pris, mon amour, reviens moi...! Je ne peux plus vivre ainsi. Je m'étais jurée de ne plus jamais venir me recueillir, et me voilà à te supplier ! Je ne crois pourtant pas aux entités, tu le sais mieux que quiconque. Mais je crois en toi ! Si tu n'es pas capable de tenir ta promesse, pourquoi tiendrais-je la mienne...? Jamais. Jamais je n'ai cesser de penser à toi...! Et toi ? M'as-tu oubliée de là-haut ? Vraiment. Je ne peux plus. Reviens moi ou je te reviendrais... Je t'aime. Saches-le. De tout mon être et ma raison. Rien ne compte plus que toi. Alors... je te supplie de toute mon âme de me revenir. Sinon, qu'elle meure de ton absence...

Son monologue hachée de sanglots s'arrêtaient là. Elle n'avait plus la force de continuer à parler face à une tombe. Sa tombe. Elle était écroulée, renversée d'être revenue dans ce lieu bien paisible où tout s'était joué. Elle réentendait tout comme si l'accident était survenue la veille. Toutefois son absence d'une année se faisait trop ressentir pour confondre les jours. Il lui manquait terriblement, et elle le lui prouvait demeurant près de quatre heures, tantôt pleurant, tantôt s'apaisant contre les souvenirs de cet après-midi merveilleux qu'ils avaient passé ensemble. Leur dernier après-midi...

〰✴✴✴〰

- On devrait y aller.

Il se relevait tendant sa main afin de l'aider à faire de même.

- Tu as raison, il commence à se faire tard.

Il marchèrent un moment main dans la main, se fixant du coin de l'œil ou admirant l'horizon. Le ciel mi-rosé mi-orangé teintait le paysage de couleurs chaudes et chaleureuses, tandis que les capucines embaumaient la prairie accompagnées de chrysanthèmes et clivia navelles. Une bouffée d'air annonçait la fraîcheur de la nuit tombante. Ils arrivèrent en direction des routes campagnardes, approchant de leur petite auto. Ils se lâchèrent la main, prêts à se séparer afin de contourner quelques palissades de bois pour atteindre le véhicule. Cependant, un crissement de pneus les fit réagir.

- Gabrielle !

Il avait hurlé son prénom au bord du désespoir.

- Attention !

Il insistait un peu. Trop, même. Tout se passait si vite.

- Arrêtes toi !

Elle reculait, ne sachant trop quoi faire face à cette automobile roulant droit vers elle.

- Tout de suite !

Elle ne réagissait pas. Elle ne réagissait plus. Même lorsqu'il s'était jeté face à elle, l'enlaçant pour la dernière fois.

- STOP !

Leur étreinte aurait pus être éternelle, s'il ne l'avait pas protégée du contrecoup. Le temps semblait s'être arrêté. Figé. Une scène inimaginable se jouait sous ses yeux papillonnant. Derrière sa migraine douloureuse, elle comprenait. Difficilement, toutefois suffisamment pour assimiler. La clairière n'avait plus rien de splendide à ses yeux. Une horreur. Un massacre. Un cauchemar. Du sang. Partout. Sur ce mains qu'elle sentait poisseuses. Sur ces cheveux qu'elle sentait visqueux. Sur son visage qu'elle sentait strié par l'effroi. Elle vivait la mort de son amant. Son cœur se figeait avant de s'effriter lentement puis de fondre tel les larmes invisibles roulant sur ses joues. Elle rêvait de son subconscient de pleurer. Trop consciente de la situation, elle n'en demeurait pas moins incapable du moindre mouvement. Elle assistait à une abomination détestable. L'air jadis pure et divin était à présent étouffant, trop lourd à respirer. Elle supportait le poids de son affilié tout contre elle. Ses bras inerte cessant de la serrer par la perte de connaissance. Ou la mort. Elle le dévisageait, puis, saisie par la panique de le perdre, avait voulut bouger. Se dégager de son corps. Cependant, seul son bras avait accordé sa demande. Elle hésitait à le toucher. Finalement, avec une délicatesse remarquable, elle déposait sa main tremblante sur sa joue. Il ouvrait les paupières, très doucement. Leurs regards se croisaient une dernière fois. L'étincelle de ses pupilles disparaissait. Il mourrait. Tombait dans les abîmes. Elle était spectatrice de sa chûte. La douleur conservée au fin fond de son esprit débordait. Explosait. Un étau lui brisait le coeur. Soudainement. Violemment. Elle voyait flou, suffoquait. Sa trachée était obstruée puis elle sombrait. À son tour. Son regard se perdait sur ses traits éteints. Ses iris s'assombrissaient avant que ses paupières ne se scellent. L'obscurité. La noirceur. Les abysses. Elle s'échouait véritablement. Elle voulait le rejoindre. Le devait. À tout prix. Quel qu'il soit.

〰✴✴✴〰

- J'ai t'ai perdu. Tu as emporté mon âme dans ta déchéance. J'ai survécu. Je ne le voulais pas, mais j'ai survécu. J'ai lutté au nom de ta promesse. En vain. J'ai vécu, mais je ne pouvais plus. Je ne vivais plus. Pas sans toi. Alors, conduis nous ensemble dans ta décadence...

〰✴✴✴〰

Clarté considérée,
Trêve agréé,
Souffle substitué.

Confusion noyée,
Péché ôté,
Souffrance égarée.

〰✴✴✴〰

- Alors, tu y es finalement allée.

- Admets que tu ne m'a guère laissé le choix.

- Oui, mais tu as l'air de mieux te porter.

- Mieux me porter ? Tu rigoles j'espère. J'ai revécu sa mort ! Une fois n'est pas suffisante ?!

- Ce n'est pas ce que je voulais dire...

- Bien, alors je t'écoute ! Vas-y, expliques moi puisqu'apparemment j'ai mal assimilé la chose !

- Y retourner t'a peut-être permis de passer à autre chose.

- Oh ! En effet je suis tellement passée à autre chose que je ne sais même plus de quoi tu parles ! Hier ? Je suis simplement allée me balader dans un pré où j'y ai de bon souvenirs il y a un an ! Mais avec qui ? Je ne sais pas. Personne sûrement ! Quoi ? L'amour de ma vie ? Mais non jamais je n'ai entendu une chose pareille !

- Gabrielle ! Stop !

- Ah ? Finalement tu n'es pas d'accord ? Je pensais que c'est ce que tu voulais entendre. Non ?

- Gabrielle...

- Non.

- Je suis désolée, je voulais juste... t'aider...

- Tu ne peux rien faire Jayce. Rien.

- Alors dis moi ! Dis moi ce que je dois faire !

- Il n'y a rien à faire. Absolument rien.

- Vraiment ?

- Vraiment.

Car jamais elle ne le recouvrerait. Jamais elle ne retrouverait son visage, ses yeux, ses lippes, sa peau, leurs touchés, leurs baisers, leurs instants passés. Jamais il ne serait remplacé. Jamais il ne serait oublié. Jamais il ne cesserait d'être aimé.

〰✴✴✴〰

Un sentiment d'apaisement. Une tranquillité dominante. Une quiétude reposante. Un silence serein. Un zéphyr accueillant. Une caresse délicate. Une tiédeur vaporeuse. Une cotonnade drapé. Une soierie duveteuse. Un épiderme chaleureux. Un touché familier. Une intimité coutumière.

Elle bat lentement des cils.

Une écume relaxante. Un océan azur. Un ciel bleu. Une brise salée. Un voile satiné. Une cloison lénifiante. Une couche moelleuse. Un souffle reposé. Un corps chaud. Un bras fort.

Elle se retourne doucement.

Une chevelure brune. Des paupières closes. Des traits endormis. Des fossettes attendrissantes. Des lèvres charmantes. Une mâchoire détendue. Un parfum attirant.

Elle pleure d'amour.

Elle rêve. Croit rêver. Dépose sa frêle main contre sa joue. Efflore sa lèvre inférieur. Remonte jusqu'à son front. Elle sourit. Il ouvre les yeux. Leur regards se scellent sans jamais se lâcher. Elle plonge dans ces iris vertes. Se noie dans cette forêt merveilleuse. Des sapins à perte de vue. De la verdure sans fin. Sans fin. Quelques ruisseaux ici et là. Un horizon infini. Infini. Une délicieuse odeur de pin.

- Hey.

Il sourit. Son sourire lui avait tant manqué. Un sourire ravageur et aimant.

- Hey.

Elle répond sans grande conviction pensant le rêve bientôt achevé. Les mots ont été difficilement évacués. Presque étouffés.

- Tu pleures. Qu'y a-t-il ?

Il semblait réel. Tout semblait si réel, après tout.

- C'est un rêve.

Elle souffle presque silencieusement.

- Tu es avec moi. Pour toujours et à jamais. Je ne t'abandonnerais pas.

Il lisait ses craintes dans ses pupilles sans en comprendre la raison.

- Ne promets pas. Ne jures pas.

Elle posait son index contre ses lippes muettes. Puis reprenait :

- Un jour, je t'ai perdu. Tu as emporté mon âme dans ta déchéance. J'ai survécu. Je ne le voulais pas, mais j'ai survécu. J'ai lutté au nom de ta promesse. Cette promesse. En vain. J'ai vécu, mais je ne pouvais plus. Je ne vivais plus. Pas sans toi. Alors, conduis nous ensemble dans ta décadence si l'idée de quitter cet univers, notre univers, te traverse une nouvelle fois l'esprit. Ne me quittes plus. Jamais.

- Jamais.

Il confirmait la serrant tout contre lui. Puis soufflait d'aise et de reddition. Jamais il ne la délaisserait seule dans ce monde. Jamais il ne la quitterait. Pour rien au monde il ne l'abandonnerait. Jamais. Elle était son âme et sa vie. Sans elle, il n'était plus rien. Rien. Jamais il n'accepterait sa souffrance, même de l'au-delà. Jamais.

Jamais.

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