Bluff

Une ambiance apaisante volait entre nous, l'air frais dans nos cheveux, la température chaude de la saison, je suis assise sur une chaise autour d'une table baignée de soleil. Les filles levaient leur verres au nouvel été qui s'annonçait, plus festif, plus chaud, plus joyeux, laissant notre année scolaire derrière nous. Le tintement du cristal qui s'entrechoque résonne sur la péniche et se mélange avec le rire des autres personnes attablées. Tout le monde semblait heureux, les gens ont le sourire, un visage scintillant qui montre à quel point l'annonce des vacances pouvait jouer sur le moral. Je tourne la tête vers le paysage pour admirer la vue et le soleil qui sillonne l'eau, je suis ailleurs, je suis aux côtés de mes amies physiquement mais le mental n'y est pas. Mes pensées divaguent constamment vers un sujet auquel j'aimerais ne plus penser, parfois je voudrais m'évader, loin, dans un endroit où mon passé et mes pensées ne me rattraperaient pas.

J'aimerai être l'eau calme qui dérive sur le bord de plage, ou sous la coque des bateaux de croisière illuminés de milliers de lumières. Ou bien un oiseau déployant ses ailes pour flâner au dessus des grands jardins, et des étendues de lac réchauffées par le soleil.
Mais la vie est plus cruelle, elle nous donne le droit d'être humain, d'avoir des sentiments et de ressentir des émotions. Pourtant on pourrait prendre ça comme une chance, c'est le cas dans la majeure partie du temps, mais parfois on aimerait ne rien pouvoir ressentir, que certaines émotions ne puissent pas s'infiltrer dans notre cerveau ou dans notre cœur. La douleur, la déception, le regret, la rancoeur, nous brûle de l'intérieur et nous consume à petit feu, car toutes les personnes ne sont pas aptes à surmonter ces obstacles, elles se noient dans leur propre émotions oubliant de sortir la tête de l'eau pour respirer. Le long gouffre qu'est la vie les engloutit sans pitié vers un tunnel sombre dur et froid, qu'est la réalité, et parfois il ne suffit pas de sortir la tête de l'eau pour tout oublier.

J'ai souvent nié la vérité pour tenter de me sentir mieux, mais en réalité c'était pire. Dénier nos sentiments n'est pas la meilleure chose à faire, car ils ont besoin de sortir, de s'exprimer, de nous exploser au visage pour nous faire nous rendre compte des choses. Alors j'ai regardé la réalité en face, accepté mes sentiments et ce qui s'abattait sur moi, malheureusement l'amour aussi peut se montrer plus féroce qu'il n'en a l'air. Et voilà que ce que je redoutais arriva; je suis tombée amoureuse de la mauvaise personne. Sans m'en rendre réellement compte, je me suis petit à petit attachée à toutes ses petites habitudes qui le rendait si unique, je me suis habituée à ses traits du visage, à ses mimiques et à ses paroles. À ses paroles bien trop belles pour qu'il les pense en fin de compte.

Mes amis nous trouvaient beaux ensemble, ils me disaient que c'était un gentil garçon, qu'il m'aimait et qu'il n'y avait pas de doute là dessus. J'avais l'impression d'être la seule à voir en lui un côté qui ne me plaisait pas, comme une partie de lui qui m'en voulait. Il avait ce petit démon posé sur son épaule, qui me regardait sans cesse, avec une rage et une volonté de me faire souffrir quelqu'en soit le moyen. Puis je le voyait lui chuchoter à l'oreille ses désirs et petit à petit mon coeur ne supportait plus, peut-être qu'il ne le faisait pas exprès, qu'il ne s'en rendait pas compte et que c'est moi qui suis trop sensible, c'est fort possible d'ailleurs. Alors au fils du temps j'ai laissé couler, puis on s'est détruit à petit feu, et on a fini par mettre un terme à notre relation. Je me suis toujours dis que le problème n'avait pas été lui, ou moi, mais bien nous. Je pense que nous n'avions pas réussi à nous cerner, et à développer correctement cette relation qui était la nôtre.

- Alors Karol, tu as prévu quoi pour tes vacances ?

Je tourne la tête, la jolie rousse attendait patiemment ma réponse le sourire aux lèvres, sa coupe à la main.

- Oui c'est vrai ça, tu comptes toujours partir au Portugal ? me questionne Valentina.

Je me redresse en croisant mes jambes nues sous la table.

- Non, justement, je pensais qu'on pourrait partir toutes ensemble à Mikonos. avouais-je.

C'était certainement la meilleure chose à faire afin de conclure cette année et cette période un peu trop désastreuse à mon goût. Je sais que mes pensées me hanteraient bien trop si je partais seule, mon esprit aurait le temps de divaguer vers des sujets qui me crispe le bas du ventre.

- T'es sérieuse ? s'écrit Malena les mains agrippées à la table et les yeux ronds.

J'affiche un petit sourire sincère face aux visages de mes amies qui - à l'entente de ma proposition - se sont illuminés.

- Oui, pourquoi pas ? leur souriais-je.

- Mais c'est la meilleure idée que tu pouvais avoir Karol !

Ana claque son verre sur la table et avance sa chaise pour poser ses coudes devant elle, comme pour se préparer à être plus attentive. Le sujet semblait avoir mit d'accord la totalité des filles présentes avec moi sur cette petite péniche baignée de soleil. Quelques sourires c'étaient répandus autour de la table, les filles semblaient emballées par l'idée et s'imaginaient déjà les activités qu'elles pourraient faire au bord de la plage.
Cette nouvelle semblait avoir fait naître une seconde vague d'enthousiasme autour de nous, chacune, le sourire aux lèvres, prônaient de partir à Mikonos avec ses meilleures amies. Je me suis vite invitée au beau milieu de leur débat pour trouver une date à laquelle partir, tandis que les rires et la bonne humeur fusaient à présent presque sur l'ensemble du petit bateau. Comme une ambiance chaleureuse, les personnes réunies ici voulaient oublier leur soucis, oublier qu'il y avait un côté parfois sombre de la vie, juste rire aux éclats et garder le bon, le temps d'une soirée d'été.

Alors je suis là, il est là, à quelques tables de nous. Mes pensées avaient réussi à dériver vers des sujets nouveaux, comme un nouvel horizon. Mais lorsqu'on essayait de se convaincre que l'on pouvait bien vivre l'un sans l'autre, j'ai reçu;

« C'est du bluff, tu sais qu'on aimerait se retrouver »

***

Fin.

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