Je Ne T'attendrai Pas (ZoLu)
"Ça fait dix ans."
Depuis maintenant deux heures, je suis assis sur une chaise, à côté de la seule fenêtre de mon petit appartement, observant avec lassitude les passants. De temps à autre, je relisais le message que j'avais envoyé à mon petit-ami. "Ça fait dix ans" : ce ne sont que quatre mots, mais ils ont détruit ma vie.
Parfois, quand j'en avais le courage, je relisais sa réponse. Il y avait aussi quatre mots, mais c'étaient les quatre mots les plus douloureux du monde. De mon monde. Le monde que je me suis construit pendant ces dix ans, tout en sachant qu'à la fin de la décennie, il s'effondrerait sans doute.
Non en fait, j'ai bêtement cru qu'il ne le ferait pas. J'ai toujours été naïf, alors je me disais que ça irait. Que je vivrais comme ça pour toujours. Et je crois que de toute ma famille, j'étais le seul à l'avoir pensé.
Je poussais un soupire, et jetais un coup d'œil à ma montre. Mon avion allait décoller dans une heure, pour la France. Ça représentait beaucoup d'heures de vol, mais ça ne me dérangeait pas. Quoi qu'il en soit, il me fallait me rendre à l'aéroport maintenant. Je fermais les volets, vérifiais une dernière fois que je n'avais rien oublié, puis je pris ma valise et sortis. Je fermais le verrou derrière moi, et glissais la clé dans la boîte au lettres de mon ancienne propriétaire.
Je parviens à attraper un taxi dans la rue, et lui demandais de m'emmener à l'aéroport. Durant le trajet, je me laissais allé à ressasser ce qu'avait été ma vie jusque-là.
Mon nom est Monkey D Luffy. Dans ma famille, on a une tradition un peu étrange, que je n'ai jamais compris, mais que je n'avais pas le choix de respecter. Tous les Monkey D ont un devoir : celui de changer de pays tous les dix ans. Et il n'y avait absolument aucune exception.
Moi, je suis né au Brésil, là où mon père a rencontré ma mère. Il est partit vivre en Allemagne, pour une raison quelconque, lorsque j'avais trois ans. Je ne me souviens pas des adieux, je me rappelle seulement de la tristesse de ma mère.
Mon père aurait pu revenir, dix ans après. Rien ne l'en empêchait, si ce n'est une chose : il aurait fallu que ma mère l'attende. Si l'on n'avait pas de "point d'encrage" dans un pays où on a vécu pendant 10 ans, on ne peut pas y retourner. Mais s'il y a une personne prête à nous attendre dix ans, alors oui, on peut y revenir autant de fois qu'il nous plaît.
Mama' avait essayé de l'attendre, mais avec le temps, l'amour s'est effacé. Elle a fait d'autres rencontres, et même si elle n'a pas oublié mon père, elle a tourné la page. Il ne lui en a pas voulu, il s'y attendait je pense. Alors il est allé s'installer au Canada. Il me donnait toujours de ses nouvelles.
Quand j'ai eu dix ans, j'ai quitté le Brésil pour venir m'installer à Tokyo, avec mon grand-père, qui y était depuis deux ans. Naturellement, il est partit à mes dix-huit ans, mais maintenant, je peux voyager seul.
Ces dix ans que j'ai passé au Japon ont été les plus belles de ma courte vie. Et quand je pense que tout est fini, je me dis que ce seront sans doute à jamais les seules plus belles.
J'étais arrivé depuis trois mois lorsque je l'ai rencontré. Roronoa Zoro, celui qui est devenu mon petit-ami le jour de mes 15 ans, après une déclaration maladroite de sa part et un baiser si passionné de la mienne que c'était un souvenir intarissable dans mon cœur.
Zoro était plus grand que moi, et plus musclé aussi. Il pratiquait le kendo depuis qu'il savait marcher, n'avait aucun sens de l'orientation, et faisait peur à la majorité des gens qui croisaient son regard. Il était unique à mes yeux, il l'avait toujours été. Et de l'amitié à l'amour, notre relation s'est renforcée au fil des ans. À chaque épreuve de ma vie, il a été là pour moi. J'ai fais au mieux pour en faire autant de mon côté.
Je ne lui ai jamais caché mon destin. Il savait qu'on n'avait que 10 ans a passer ensemble. Il m'avait juste répondu "OK", et ça a suffi à me faire croire qu'il m'attendait toujours. Je pensais qu'il était l'exception, le seul homme qui serait assez fort, ou plutôt assez fou, pour être prêt à attendre un amant pendant 10 ans sans être absolument certain qu'il allait revenir.
Quand il me parlait de nous, il n'allait jamais plus loin que 10 ans. On a fait des projets, dont la plupart ont été concrétisés. Mais après la limite, c'était le flou total.
Est-ce qu'on continue d'être un couple ? Est-ce qu'on se sépare ? Est-ce qu'on attend de voir ? Dois-je l'appeler tous les jours ? Lui écrire de temps en temps ? Qu'est-ce qu'il attend de moi ? Est-il prêt à faire ce que j'attends de lui ?
J'avais des réponses, mais c'était celles que j'espérais, et maintenant, j'étais certain qu'elles n'étaient pas les bonnes. Zoro m'en avait donné la confirmation il y a deux heures, avec son message, ses quatre mots.
"Je ne t'attendrai pas."
C'était clair. Et je le comprenais. Il avait raison. Personne ne serait capable d'attendre dix ans, comme ça. Enfin, peut-être qu'il y en avait, mais alors, ils étaient aussi courageux qu'aimant. Zoro était les deux, je n'en doutais pas. Mais pouvais-je vraiment lui imposer cette souffrance, moi qui l'aime tant ? Mieux valait qu'il refasse sa vie, avec quelqu'un qui sera toujours avec lui. Je souffrais seul dans mon coin, mais au moins en me disant qu'il est passé autre chose. Comme mes parents.
J'arrivais en vue de l'aéroport, et je refoulais un léger gémissement de douleur. Aussi loin que je m'en souviennent, je n'ai jamais été aussi misérable. Heureusement que je n'ai aucun proche là pour me voir dans cet état. Le taxi se gara sur le parking, et après avoir payé la course, je sortis du véhicule. Ma valise en main, je restais de longues et interminables minutes devant les portes.
Et si pour une fois, quelqu'un dérogeait à la règle ? Et si pour une fois, par amour, je laissais tomber cette tradition absurde pour vivre comme je l'entendais ?
Non, ce ne serait pas respectueux envers ma famille. Mon père et mon grand-père, qui depuis des années, subissent eux aussi ce devoir. Le moins que je puisse faire pour les soutenir, c'est de m'y plier la tête haute.
Même si je déteste vivre enchaîné.
Je pris une grande inspiration, et avançait vers les portes. Tranquillement, je les passais pour entrer dans l'aéroport. Je vérifiais que mon vol n'avait pas été reporté, avant de commencer à me diriger pour l'embarcation.
Et puis, il m'a appelé.
-Luffy !
Je me suis retourné, et mon cœur a fais un énorme bond en le voyant courir vers moi.
-Zoro...
-Putain, j'ai cru que j'allais te rater ! J'ai eu peur que tu sois déjà monté.
Je le regardais sans comprendre. Il s'arrêta pour reprendre son souffle, et je restais là, hébété, à le regarder faire. Peut-être était-il venu me dire au revoir. Il se redressa, et croisa les bras sur son torse.
-Je suis allé chez toi, mais tu étais déjà parti. T'aurais pu me donner l'heure de ton vol.
-Je ne pensais pas que tu voulais le savoir.
-Baka ! Tu ne croyais tout de même pas que j'allais te laisser partir comme ça.
Je clignais des yeux, et il soupira, avant de se masser la nuque en détournant le regard.
-Tu m'as pris de court. Je ne savais pas que tu partais aujourd'hui. J'ai dû tout faire en vitesse, et le fait que les rues changent sans arrêt de place n'a pas aidé. Mais je pense être prêt.
-On fait quoi alors ? On se sert la main, ou je peux te faire un câlin ?
-Hein ?
Il me regarda comme si je lui avais annoncé que je comptais devenir végétarien. Je fis la moue et baissais légèrement la tête.
-Tu préfères qu'on ne se dise pas adieu...
-De quoi tu parles ?
-Tu as dis que tu n'attendrais pas, Zoro.
-C'est vrai. Je ne le ferai pas.
-Alors je ne reviendrai pas vivre ici. Tu n'es pas mon point d'encrage.
-Luffy, tu me connais. C'est pas mon genre d'attendre pour rien.
Je frissonnais, mais fis au mieux pour ne pas lui montrer que ça me blessait.
-Oui, je sais...
-J'ai pas envie de patienter dix ans pour un mec qui n'est pas sûr de revenir. Même si ce mec, c'est toi.
-Je comprends.
-Je ne t'attendrai pas Luffy, et je n'en ai pas besoin. Parce que je viens avec toi.
Surpris, je relevais la tête vers lui. Il se tourna légèrement, me laissant voir le gros sac qu'il avait sur le dos.
-J'ai fais mes adieux à ma famille. Je suis prêt à partir.
-Zoro...tu peux pas...
-Y a rien qui me l'interdit.
-Mais...tu as toujours vécu ici !
-Je ne veux pas rester si tu n'es pas avec moi. Je m'en moque de ne pas savoir où on va, tant que j'y vais avec toi.
Il hocha la tête d'un air déterminé. Le sourire qui avait quitté mes lèvres depuis l'envoi de mon message ce matin revint, plus brillant que jamais. Je lâchais mes affaire et lui sautais au cou pour l'embrasser et le remercier. Il répondit à mon étreinte avec force. Puis il me lâcha, m'adressa un sourire espiègle, et partit en courant devant, se dirigeant vers l'hôtesse chargée de nous faire embarquer. J'éclatais de rire et m'empressais de le rattraper.
Finalement, le mieux dans une aventure, c'est de pouvoir la passer avec ceux qu'on aime, non ? Pas besoin de point de retour si j'ai tout ce dont j'ai besoin avec moi. Zoro est tout ce dont j'ai besoin. Alors j'ai plutôt intérêt à ne pas le faire attendre.
***
Petit texte écrit sur un coup de tête. Je n'avais pas d'idée pour le développer plus, et comme je ne voulais pas faire un OS creux, je me suis contenté de ça et j'ai écris.
En espérant que ça vous ait plu !
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