chapitre 43 : Nawy
SHAYNE
Shayne était en train de photocopier de multiples registres de civils quand un main se posa sur son épaule. Quand il se tourna, il vit un Colonel venir se ranger à ses côtés.
- Shayne, comment sont tes tirs à distance ?
- Je suis Lieutenant-Colonel Sniper... J'espère que mes tirs à distance sont plutôt bons...
Sa raillerie fit mouche et l'homme continua.
- Comment te sentirais-tu pour l'entraînement des futurs tireurs d'aviation ?
Shayne fronça les sourcils et se tourna plus vers lui, grattant au passage sous son atèle qui commençait sérieusement à le gêner. Sa fracture du fémur atteignait un stade de guérison absolument irritant chaque mouvement mêlait douleur à chatouillis. Le fait d'avoir arrêté de prendre des médicaments contre son anévrisme mettait tous ses sens en alerte pour la moindre douleur. Il était aussi plus sensible et plus irritable...
Oui. Encore plus que d'habitude.
- Ce n'est pas aux Snipers de l'armée de l'air de s'en charger ?
- Manque d'effectif.
- À ce point ?
- Alors, tu acceptes ?
- Outre le fait d'être le second choix et que c'est plutôt blessant... Et que bien sûr, ce n'est pas vraiment une question mais plus un ordre...
- Exactement.
Le Lieutenant-Colonel papillons ironiquement des sourcils et s'écria comme une petite fille.
- Yay ! Ce serait avec plaisir !
Le Colonel, ravi, s'éloigna après lui avoir frappé dans le dos et Shayne récupéra ses documents en marmonnant du bout des lèvres.
- Je leur foutrai moi, des ordres... Pas foutu capable de bien s'organiser...
***
Shayne avait à peine fini de mâcher son bout de sandwich qu'il était déjà en train de courir à travers les interminables couloirs de la base militaire. Oui, il courrait malgré son anévrisme cérébral et sa fracture du fémur, mais être en retard pour accueillir son héros, ça...
Vers midi, on lui avait prévenu qui il allait devoir accueillir et il avait manqué de recracher ce qu'il mangeait.
Depuis West Point, depuis son père, depuis Laïthan, il y a eu très peu de militaires qu'il respectait... Mais lui, méritait au moins qu'on arrive à l'heure.
Shayne arriva enfin sur la piste et le doux ronron que provoquaient les hélices des hélicoptères dans le ciel commençait a s'amplifier de plus en plus. Il porta sa main à son front pour pouvoir regarder dans les airs et se mit à sourire. Il était aussi surexcité qu'un enfant à qui on venait de donner un biscuit avant le dîner.
Quand Shayne était encore à West Point et que la révolution faisait rage sur tous les fronts, que les baricades étaient levées et les drapeaux de Bonnie Blue Flag érigés, la légende parlait d'un homme qui avait abandonné son poste pour protéger une offensive militarisée de la part des Américains.
Le fameux jour où tout était allé trop loin.
Le Colonel Heinz Lofter, un haut membre de la première division de cavalerie Américaine, avait entendu que sa patrie, sa Mère, son doux Texas dans lequel il avait grandi haut et fier, se faisait martyriser au front. Des tanks, des troupes, défaisaient les baricades et tyranisaient de leurs armes les révolutionnaires.
L'homme avait alors quitté sa caserne de Fort Hood, prit son bijou de cavalerie et avait protégé les siens au front. Oui, il avait désobéi aux ordres, oui, il était techniquement sous l'uniforme américain, mais en tant que Texan, il avait tout fait. Bien sûr, à la déclaration de l'indépendance, il avait dû rendre ses armoiries et son hélicoptère, à son plus grand désarroi... Mais à ce jour, il était parmi l'un des rares personnes qui avaient reçu l'honneur Quinn. Un prestige de révolutionnaire et d'indépendantiste.
Un héro, quoi !
Shayne se frotta nerveusement les mains tandis que l'armada aérienne commençait doucement à attérir. Certes, la cavalerie Texane n'avait pas le fameux écusson du cheval sur l'avant, mais de nouveaux avaient fait place. Pas moins impressionnant.
L'hélicoptère en tête, celui du Colonel Heinz, était le premier à s'arrêter
et c'était là qu'il sortait, un gros cigare en bouche.
Le Colonel Heinz Lofter.
Il resta un instant accroché aux barres métalliques de son engin avant de sauter sur le sol, remettant proprement son uniforme poussiéreux.
L'homme jeta son mégot et se rapprocha de Shayne qui portait sa main à sa tête, en garde à vous. Comme toute réponse à son salut, il lui assainit un énorme coup dans le bras.
- Mon petit, tu as oublié de te changer ce matin ou quoi ? Qu'est ce que c'est que ce costume de carnaval ? Tu as voulu t'habiller comme ton papounet ? Un rêve de gamin ?
À toutes les premières phrases auxquelles il avait pensé partager avec un homme comme lui, Shayne ne s'attendait vraiment pas à ça. Il en était si choqué qu'il resta silencieux et le Colonel continua, toujours ahuri et condescendant.
- Tu es vraiment Lieutenant-Colonel ?
- Oui, mon Colonel.
- Tu as quel âge, fiston, dis moi un peu.
Alors que Lofter était en train de s'allumer un autre cigare, les autres hommes, haut gradés et non, évacuaient la piste qui retrouvait petit à petit son calme. Shayne passa une main sur sa barbe, pas très compréhensif et répondit.
- J'ai 33 ans...
- 33 ans. T'as 33 ans et t'es déjà aussi haut placé. Ah putain, je m'y ferai jamais ça, vous, la seconde génération avez eu toutes les grâces... Et dire qu'on vous appelait la génération sacrifiée !
En effet. Shayne avait eu toutes les grâces du monde. Il était un enfant du bonheur, avait grandi dans l'amour et la joie !
Le Colonel baissa les yeux vers son uniforme qui présentait toutes ses armoireries de victoires et de service et s'arrêta sur la colombe blanche de Halley.
- Aaaah... Halley, hein ? Finalement, petit, tu es bien plus intéressant que je ne le pensais !
Il lui assainit un autre coup dans le bras avant de s'éloigner à l'intérieur de la base, suivi de ses autres hommes. Shayne le suivit du regard, presque bouche bée.
"Petit" ? Sérieusement ? Finalement, le dicton disait vrai. Ne jamais rencontrer ses heros. Sinon ils finiraient avec un coup de poing dans la tronche.
- Ne faites pas attention à lui, il est grincheux, le matin.
Shayne se retourna soudainement vers une jeune femme qui se tenait en face de lui, un joli sourire sur ses lèvres. Ses boucles brésiliennes flottaient encore un peu à cause du vent des hélices mais son visage doux à la peau foncée lui était quand même adressé.
- Parfait. Encore un grincheux.
- Correction. Un vieux grincheux raciste. Monsieur a fait tout un discours sur ce qu'il pensait des femmes noires avant de m'accepter en copilote.
Grogna la jeune femme en retournant près de l'hélicoptère pour l'arrêter définitivement. L'expression colérique de Shayne se renfrogna et répondit, tout en passant ses mains sur les nouvelles armoireries de la cavalerie Texane.
- Désolé pour ça.
- Pourquoi c'est à vous de vous excuser ? Ce n'est pas vous qui m'avez presque insulté de bonne à tout faire qui avait sa place dans les champs de coton.
- Je m'excuse. Au nom de toute la débilité masculine et blanche.
La tête de la jeune femme dépassa de la portière ouverte et elle sourit de nouveau.
- Je vous aime bien !
Shayne tendit la main pour serrer la sienne et se présenta.
- Lieutenant-Colonel Sniper Carter.
- Capitaine Kellen, pilote du 400 ième bataillon du second régiment de cavalerie aéroporté des forces spéciales. À vos ordres, mon Lieutenant-Colonel.
Shayne et elle se serrèrent la main avant que la Capitaine pilote ne descende enfin et se présenta plus légèrement.
- Mais vous pouvez m'appeler Nawy.
- Nawy ce sera.
- C'est donc avec vous que nous entraineront les petits nouveaux qui se prétendent des experts ?
- Il paraitrait.
- C'est fou, non ? D'en être arrivé à là !
Shayne souffla en guise de réponse. c'était encore plus que fou. La dénommée Nawy attacha ses cheveux bouclés dans son chignon de réglementation et continua tout en traversant les portes d'entrée.
- Faudra-t il commencer du tout début avec ces civils ?
- Non. Ce sont des sélectionnés. Des professionnels de tir, ceux qui ont déjà eu de l'expérience sur un semblant de terrain.
- Et niveau tir en aviation ?
- On sera plusieurs à apprendre...
- Vous êtes...
Elle finit sa phrase en regardant ses insignes d'armée de terre et leva les bras en l'air, agacée.
- C'est du grand n'importe quoi...
- Je confirme. Tu vas devoir travailler avec moi, ça sera vraiment une horrible souffrance.
- N... non ! Ce n'est pas ce que je voulais dire ! Vous...
- Oh, je t'en prie.
Il l'arrêta sur le moment et lui assura.
- Ne me vouvoie pas. C'est insupportable, je n'ai pas 70 ans à la limite de faire une crise cardiaque ! Si je peux t'appeler Nawy, appelle-moi Shayne. On se revoie pour le briefing.
Sur ce, il s'en alla la laissant avec son douc sourire naissant.
Voilà une journée pleine de rebondissements différents.
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