Chapitre 19 : Pas prêt à être lu
(6 novembre 2011, Storybrooke)
Son ordinateur portable sous son bras, Rose se dirigea gaiement vers le Granny's Diner. Mary Margaret devrait y être pour la pause de midi, avant qu'elle ne retourne à s'occuper de sa classe pour l'après-midi. Emma étant à son travail d'adjointe du shérif, Rose avait décidé de se rendre au restaurant pour écrire. Elle avait commencé à taper ce matin, mais avait rapidement trouvé cela un peu déprimant, toute seule dans l'appartement vide.
Mais son sourire disparut en entrant, faisant place à la méfiance lorsqu'elle repéra Regina assise en face de sa colocataire. Elle avait un mauvais pressentiment. Que lui voulait donc le maire si sympathique de la ville ?
Gardant un peu de distance pour ne pas se faire remarquer, elle écouta attentivement la conversation.
« J'aimerai vous parler d'une de mes amies. Kathryn Nolan. » disait Regina avec un faux sourire polie. « Plus précisément, j'aimerai vous parler de son mari, David. » Elle se pencha en avant, toute trace d'amabilité disparue. « Vous n'êtes pas fait l'un pour l'autre, ce n'est pas quelqu'un pour vous. Il est déjà pris, alors trouver un autre homme à séduire. »
« Je n'ai pas cherché à le séduire. » se défendit doucement l'enseignante.
« Ah non ? » rétorqua-t-elle, guère convaincue. « Alors il a quitté sa femme comme ça, sans raison ? »
Rose écarquilla les yeux à cette nouvelle. Mary Margaret avait une expression similaire de choc.
« Il a fait quoi ? » haleta-t-elle de surprise.
Regina se calma légèrement, ses yeux sombres jaugeant la jeune femme devant elle.
« Vous n'étiez pas au courant. »
C'était une déclaration, mais Mary Margaret secoua la tête de toute manière pour confirmer.
« Eh bien je pense que vous le saurez bientôt. Alors écoutez-moi très attentivement, parce que c'est dans votre intérêt. Laissez-le tranquille. Il est extrêment fragile. Il ne sait plus qui il est, ni ce qu'il fait, et vous êtes à deux doigts de gâcher la vie de plusieurs personnes. »
Les paroles avaient l'effet escompté, Mary Margaret se recroquevillant sur elle-même, le regard perdu et coupable. Mais Rose serra la mâchoire, jetant un regard noir à Regina derrière son dos.
Peut-être qu'elle n'avait pas tort, peut-être que Mary Margaret et David devraient s'éviter le temps que ce dernier sache vraiment ce qu'il voulait. Mais qui était Regina pour juger qu'elle devait s'immiscer dans cette histoire ? Cela ne la concernait pas, elle n'avait pas son mot à dire dans cette affaire, bon sang !
De plus, elle appréciait de plus en plus à la gentille institutrice, et elle n'aimait pas la voir se sentir si mal. Elle ne devrait pas prendre tout le blâme d'ailleurs, elle faisait justement des efforts pour éviter David et s'empêcher de commettre une erreur.
« Alors avant de commettre l'irréparable, réfléchissez. Et laissez-le se rappeler qui il est vraiment. » termina Regina, son ton presque menaçant.
Incapable de s'en empêcher, Rose s'avança rapidement jusqu'à leur table et intervint.
« Vous devriez peut-être suivre vos propres conseils, Reggie. » commença-t-elle avec un faux sourire. « David est sa propre personne. C'est vrai, il est amnésique et dans un état fragile, mais ça ne veut pas dire qu'il n'est pas capable de prendre ses propres décisions. Et étant donné qu'aux dernières nouvelles, vous n'êtes pas sa mère, ni sa sœur, ni sa femme, je ne vois pas en quoi vous avez le droit de vous mêler de sa vie. »
Regina se tourna vers elle, ses yeux semblant presque lancer des éclairs. Se levant de sa chaise, elle toisa la brune d'un regard noir.
« Cette affaire ne vous concerne pas, Mlle Booker. Vous n'êtes qu'une vagabonde, un parasite profitant de l'hospitalité de Mlle Blanchard. » rétorqua-t-elle d'un ton venimeux. « Alors faites-nous une faveur, et restez en dehors de ça. »
Elle n'attendit pas de réponse et tourna les talons, sortant du restaurant aussi vite qu'elle était arrivée. Rose lui jeta un regard noir avant de se tourner vers Mary Margaret, qui semblait plus pâle que d'habitude.
Rose comprenait vraiment pourquoi Henry pensait qu'elle était la Méchante Reine. Bien qu'elle pourrait faire aussi une bonne Cruella De Vil avec son apparence si classe et soignée.
« Hé, ne l'écoute pas, ce n'est qu'une pétasse. » dit-elle à l'enseignante en s'asseyant sur le siège en face d'elle, que Regina avait précédemment occupée. Elle savait que ses paroles ne devaient pas beaucoup la consoler, mais elle ne savait pas quoi dire d'autre.
Regina n'avait pas non plus dit des bêtises, mais David avait quitté sa femme apparemment. Donc il avait pris sa décision, ce qui était bien, non ? Il faisait un choix.
La brune ouvrit son ordinateur et reprit son travail d'écriture. Son esprit vagabonda en même temps, tout en jetant des coups d'œil à Mary Margaret par-dessus l'écran. Celle-ci semblait encore perturbé par l'irruption de Regina. Voulant lui faire penser à autre chose, elle souffla à voix haute :
« Faudrait peut-être que je me trouve un travail aussi, ou un truc comme ça. »
Elle s'était vraiment fait la réflexion, à vrai dire. Bien que l'idée ne l'enchantait pas vraiment, avec Emma devenue adjointe du shérif, elle avait beaucoup de temps libre, et même si elle avait maintenant une nouvelle idée de roman à écrire, elle ne pourrait le publier pas avant très longtemps, et elle ne voulait pas qu'Emma soit la seule à aider Mary Margaret à payer le loyer et les courses. Sinon, elle allait vraiment se sentir comme une squatteuse.
« Eh bien...que faisais-tu avant d'arriver à Storybrooke ? » demanda finalement l'enseignante, essayant de ne plus penser à ce qui lui avait dit le maire (comme l'avait espéré Rose).
« Eh bien, j'étais écrivain. Enfin, je suis écrivain mais je n'ai pas écrit ces derniers temps donc on aurait pu plus me qualifier d'auteur, mais là, je commence un nouveau livre. »
« Tu es un auteur ? » répéta Mary Margaret, semblant assez intéressée par cela. « Tu as publié des livres ? »
« Quatre. Un premier "essai" on peut dire, puis une trilogie. Ça ne vaut pas les Harry Potter ou les Hunger Games, mais ils ont leur petit succès et j'ai une petite base de fans. » expliqua Rose avec désinvolture, sans quitter des yeux son écran. Elle posa sa main sur son menton, réfléchissant à voix haute. « Peut-être que je pourrai d'ailleurs faire plusieurs livres de cette nouvelle histoire, bien que c'est encore à creuser. »
« Si tu écris, alors tu n'as pas besoin de trouver un nouveau travail. » déclara Mary Margaret.
« Ce n'est pas ça. Mais maintenant, on vit chez toi, et tandis qu'Emma peut participer aux dépenses avec son nouveau job, ce n'est pas mon cas. J'ai des économies, dont j'en ai dépensé pas mal dans la boutique de Mr Gold, mais ce n'est pas avec ça que je vais pouvoir donner ma participation mensuel au loyer, aux courses, etc. Faudrait que je trouve peut-être un petit boulot, quelque chose dans le genre. En plus, ça me donnera plus d'occupations pendant qu'Emma et toi travaillez. »
« Oh, tu n'as pas besoin de te donner ce mal. Je n'ai jamais eu de problèmes pour ça, et le nouveau travail d'Emma devrait suffire. Tu n'as pas à te sentir obligée d'aider avec ça. »
Rose leva les yeux vers Mary Margaret. Elle commençait à s'habituer à sa générosité, mais son incroyable gentillesse la déconcertait encore parfois.
« C'est vraiment gentil... Mais je vais peut-être chercher quand même, si je ne fais rien, je vais me sentir comme une squatteuse. »
« Eh bien, si ça t'aide à te sentir mieux, je ne suis pas contre un peu d'aide pour les tâches ménagères. » lui proposa Mary Margaret avec un sourire.
« Ok. J'en prends note. »
Se reconcentrant sur son ordinateur, Rose écrivit. Elle avait emmené avec elle son carnet, où elle avait noté tout ce qui leur était arrivé ces derniers jours, depuis qu'elles étaient arrivées à Storybrooke. Elle devrait sans doute aussi emprunter le livre d'Henry... Merde, elle n'avait pas pensé aux droits d'auteur du bouquin du garçon. Après, c'était visiblement un vieux recueil, qui avait probablement eu plusieurs auteurs. Elle espérait qu'il n'y en avait pas d'indiqué, ce serait plus simple.
Elle se demandait comme elle allait gérer la trame principale dans le présent et voir aussi les histoires de chaque personnage de contes à explorer...
Et si elle faisait ça sous forme d'alternance ? Un chapitre dans le présent, un dans le passé ? Cela pourrait fonctionner... Mais il faudrait s'assurer qu'il y ait un lien entre les deux, pour ne pas trop perdre le lecteur.
Elle se mit à taper avec enthousiasme, ce qui n'échappa pas à Mary Margaret.
« Tu commences à écrire ton nouveau livre ? »
« Ouaip. Eh bien, ce sont surtout les bases de l'histoire pour le moment, je note mes idées clés, réfléchis à comment la commencer et comment la terminer, retranscris toutes les notes que j'ai prise ces derniers jours... Mais je vais sans doute commencer le prologue aujourd'hui. Je commence parfois à écrire le début avant d'avoir la fin, car la fin me vient finalement un peu plus tard, quand j'ai déjà un visuel du commencement. »
Mary Margaret acquiesça, écoutant avec attention. C'était clairement la passion de Rose, et cela la faisait sourire de la voir ainsi et de découvrir une autre facette de la jeune femme.
Rose se tut plusieurs secondes avec une expression d'intense réflexion, murmurant des choses dans sa barbe, levant les yeux parfois en regardant dans le vague, avant que son visage s'éclaire et qu'elle se remette à taper sur son ordinateur en souriant.
« Tu as des idées à ce que je vois. » commenta l'institutrice, un léger amusement dans la voix.
« Ouais, et j'avoue que j'en suis plutôt contente. Je pense qu'il y a clairement du potentiel... Oh yes, j'ai déjà pas mal d'idées ! » s'exclama-t-elle, tapant encore un peu sur son clavier à un rythme impressionnant.
Rose s'arrêta, levant la tête alors qu'elle tendait son index en l'air.
« Tu sens ça ? » Elle approcha son index de son nez et inspira exagérément, avant de le tendre à nouveau. « C'est l'odeur de la renommée qui approche ! » déclara-t-elle d'un ton dramatique avant de se reconcentrer sur son ordinateur.
Mary Margaret se pinça les lèvres pour retenir son rire. Elle commençait lentement à s'habituer aux étranges manies de Rose. La femme brune avait un flair pour le dramatique et aimait agir de manière théâtrale de temps en temps, bien qu'elle ne saurait pas dire si c'était pour faire rire les autres ou pour son propre plaisir. Elle dirait un peu des deux.
Emma et elle étaient radicalement différentes, que ce soit physiquement ou en termes de personnalité. Pourtant, elles avaient un lien profond et indéniable qui ne laissait aucun doute sur le fait qu'elles étaient des sœurs. En tout cas, des sœurs en tout sauf le sang.
Elles n'avaient peut-être pas le même caractère, mais elles partageaient la même expérience. Mary Margaret trouvait vraiment beau la façon dont ces deux filles si différentes étaient devenues si proches. Deux orphelines qui s'étaient trouvées l'une l'autre.
Et la distraction qu'elle lui avait donnée lui avait permis d'oublier un instant les paroles du maire...
Sortant de ses pensées, elle vit l'horloge et écarquilla les yeux en se rendant compte qu'elle avait bientôt cours.
« Désolée, il faut que j'y aille, les cours de l'après-midi vont bientôt commencer. » dit-elle en pliant son journal et prenant son sac à main.
« D'accord... Je suis venue jusqu'ici pour avoir un peu de compagnie pendant que j'écris, et finalement, c'est pour qu'on me laisse seul. » commenta la brune.
Les joues de l'enseignante rosirent un peu et elle se sentit brusquement coupable.
« Oh désolée Rose, ce n'est pas du tout pour...je ne voulais pas... »
« Hé relax M&M, je te faisais marcher. » la rassura immédiatement Rose, lui souriant. « Vas-y, tu ne vas pas te faire licencier à cause de mes tendances drama queen. On se verra plus tard. »
Rassurée, Mary Margaret se détendit, sourit à Rose et lui dit au revoir avant de s'éloigner, la jeune femme lui adressant un dernier signe de la main. Même si l'enseignante était partie, elle resta dans le restaurant pour écrire. C'était moins solitaire que dans l'appartement vide, et elle pourrait en profiter pour boire un chocolat chaud. Peut-être qu'elle irait rendre visite à Emma et au shérif plus tard.
Il dût s'écouler une bonne demi-heure, qu'elle passa concentrée sur son ordinateur tout en buvant une gorgée de chocolat chaud de temps en temps, avant qu'une silhouette ne se profile derrière elle.
« Il existe une ville dans le Maine, où tous les personnages de contes que nous connaissons, sont piégés en... »
Rose ferma brusquement son ordinateur, tournant vivement la tête vers l'intrus qui osait lire son texte.
« Hey ! On ne lit pas, ce n'est pas prêt ! » dit-elle avec autorité, plissant les yeux pour paraître plus sévère.
« Pas prêt pour quoi ? » demanda Graham, une étincelle d'amusement dans le regard.
« A être lu ! » rétorqua la brune.
Le shérif leva les mains en signe de reddition.
« Désolé, j'étais curieux, plus particulièrement en y lisant le nom de notre ville. Est-ce votre journal intime ? »
« J'ai une tête à tenir un journal intime pour écrire tout mes petits soucis comme une ado de 13 ans ? » rétorqua-t-elle, son sourire taquin. « Si c'est ce que vous pensez de moi, je dois vous avertir, vous êtes nuls pour lire les gens, Shérif des Bois. »
« Honnêtement, je demandais plutôt parce que justement, cela m'étonnait de vous. » répondit Graham avec un sourire.
Rose sourit en retour, puis décida d'expliquer.
« Je suis écrivain. Et disons que cette petite ville m'a donné de l'inspiration. »
« Eh bien, merci. C'est flatteur envers notre ville endormie. »
« En vue des derniers évènements récents – des nouvelles arrivant en ville, un gars sortant du coma, une mine qui s'effondre et une mission de sauvetage – Storybrooke ne me paraît plus si endormie que ça. »
Graham gloussa.
« Vous n'avez pas tort. »
Rose lui adressa un sourire, avant de se tourner à nouveau vers son ordinateur. Jetant un coup d'œil à Graham, celui-ci comprit rapidement le message et se déplaça sur le côté, de sorte à ce qu'il ne puisse plus lire l'écran. Satisfaite, la jeune femme releva l'écran pour continuer.
Graham se dirigea vers le comptoir et commanda quelque chose, puis se tourna à nouveau vers Rose.
« Je réalise que, contrairement à votre sœur, vous ne m'aviez jamais dit quel était votre métier. » commenta-t-il.
Rose s'arrêta, afficha une expression pensive, avant de regarder le shérif avec malice.
« Et je réalise que vous ne m'avez jamais dit votre nom de famille. »
« Il y a une raison à cela. »
Rose arqua un sourcil, intriguée.
« C'est si grave que ça ? »
Il hésita avant d'avouer :
« C'est Humbert. »
Rose se pinça les lèvres pour ne pas rire. Graham tendit la main vers elle.
« Vous voyez ? C'est pourquoi je ne voulais pas vous le dire. »
Rose secoua la tête en souriant, essayant toujours de retenir son rire. Graham prit un air faussement trahi devant son amusement évident.
« Je comprends pourquoi vous vous présentez comme le shérif Graham. »
« Ouais, c'est ça. » grommela le shérif avec lassitude.
« Vous en faîtes pas. Je garderai votre secret. » lui promit la jeune femme avec un clin d'œil.
« Je vous en suis reconnaissant. »
Elle sourit d'amusement, puis se tourna une nouvelle fois vers son écran.
« Alors, est-ce que Princess Swan fait du bon boulot en tant qu'adjointe, shérif ? » demanda-t-elle en même temps qu'elle tapait sur les touches du clavier.
« Eh bien, on n'a pas encore eu de gros problèmes depuis l'effondrement de la mine, mais jusqu'ici, elle se débrouille bien. » répondit-il, s'asseyant en face d'elle en attendant sa commande. « Alors, de quoi parle donc votre nouveau livre ? »
« Je ne vous pensais pas si curieux, Shérif des Bois. »
« Je ne vous pensais pas si secrète, Mlle Booker. »
Rose lui adressa un sourire espiègle, mais céda. Ce n'est pas comme si c'était vraiment un secret, et...elle réalisa qu'elle commençait à faire confiance à Graham.
« Je suis partie de l'idée d'Henry et de son amour des contes de fée pour raconter nos aventures à Emma et moi depuis notre arrivée dans cette ville, avec un fond de...fantaisie. »
« Intéressant, mais ça ne m'explique pas grand-chose. »
« Eh bien, c'est le but. Déjà, je ne suis encore qu'au départ, et sinon, comment vous garder intéresser, si je vous dévoile déjà tout ? »
Graham sourit, hochant la tête en retour.
« Vous marquez un point. Je suppose que cela prouve que vous avez de l'expérience.»
« Pas mon premier rodéo, non. Et être une amatrice de littérature aide aussi à savoir comment attirer les lecteurs, et à les garder intéressés. »
Elle lui fit un clin d'œil malicieux, auquel il répondit par un sourire en coin. Ruby déposa la commande de Graham, qui la remercia avant de commencer à manger. Il aimait cette petite conversation avec Rose, la femme semblait être une bouffée d'air frais et de nouveauté, avec Emma. C'était comme si sa vie s'était résumée à la même routine ennuyeuse, sans jamais aucun changement, avant leur arrivée. Il était heureux de pouvoir faire la connaissance de quelqu'un de nouveau. Et Rose était clairement en train de devenir une de ses personnes préférées.
Elle était gentille et joviale, drôle et intelligente avec beaucoup de malice, peut-être un peu excentrique, mais cela faisait partie d'elle, et elle n'avait pas peur de le montrer. Elle était authentique, ne se préoccupait pas de ce que les gens pensaient d'elle, et ne laissait personne lui dicter sa conduite, notamment Regina. Il pouvait admirer ça.
Pour autant, elle restait mystérieuse et plutôt secrète sur sa vie (comme Emma à vrai dire). Il devait admettre que cela le rendait curieux.
Piquant une frite de son assiette avec sa fourchette, il demanda :
« C'est pour cette raison que vous êtes devenue écrivain ? A cause de votre amour des livres ? »
« En partie, mais j'ai toujours aimé inventer des histoires. Enfin, surtout pour Emma. Quand nous étions enfants... »
Rose fut songeuse une seconde, quelque chose traversant brièvement son visage avant qu'elle n'affiche à nouveau son sourire habituelle. Même si cela avait été rapide, Graham l'avait remarqué. De la vulnérabilité.
Il réalisa quand Rose parla de sa passion et de son lien avec Emma, qu'il y avait eu un changement. C'était toujours Rose bien sûr, mais il y avait aussi une trace de vulnérabilité dans ses yeux, le regard d'une personne plus fragile émotionnellement qu'elle ne le laissait croire. Les seules autre fois où il avait vu cela chez elle, c'était quand il l'avait empêché de tomber quand la terre tremblait à cause de la mine, et quand Emma s'apprêtait à descendre dans le conduit pour sauver Henry.
« Et vous shérif, était-ce votre vocation, de devenir le rempart contre l'injustice ? » l'interrogea Rose, tout en écrivant un peu plus sur son ordinateur.
« Non, pas vraiment. Je ne suis plus très sûr, à vrai dire. »
Intérieurement, il songea qu'il était vraiment incapable de se souvenir ce qui l'avait poussé à devenir shérif. Ni même depuis combien de temps il occupait ce poste. Il avait l'impression d'avoir toujours été le shérif de Storybrooke. Depuis aussi longtemps qu'il s'en souvienne...
Rose haussa simplement les épaules.
« Ça n'a pas à être forcément une carrière de passion. L'essentiel est que vous vous y sentiez bien. »
Il acquiesça en accord, mais il était maintenant un peu songeur, après la question innocente. Pourquoi ne s'en rappelait-il pas ?
Son air troublé n'échappa pas à la brune. Elle ne savait pas exactement pourquoi sa question anodine avait conduit à cette expression, mais elle se mit à s'en vouloir. Elle avait peut-être posée une question délicate ou raviver un mauvais souvenir involontairement.
« Désolée, si ce n'était pas la question à poser... »
Graham leva les yeux vers elle, s'empressant de la rassurer.
« Oh non, ce n'est pas vous, ne vous en faites pas. Je réfléchissais juste. »
Rose acquiesça lentement, puis posa ses yeux sur l'assiette de Graham. Souriant malicieusement, elle tendit la main et piqua rapidement une frite qu'elle s'empressa de manger. Le shérif regarda son plat puis elle, levant un sourcil.
« Vous auriez pu demander. »
« Oui, mais ça aurait été moins drôle, très chère. » rétorqua-t-elle, rendant sa voix plus aigue alors qu'elle adoptait un ton enfantin.
Graham gloussa légèrement en secouant la tête, tandis que Rose souriait. Elle devait l'admettre, elle appréciait de plus en plus le shérif. C'était un homme bien, sympathique, honnête, et il semblait aimer son sens de l'humour, ni être dérangé par ses excentricités. Et c'était vraiment agréable.
Ils restèrent silencieux pendant que Graham mangeait son déjeuner et que Rose (qui avait déjà mangé) travaillait. Parfois ils échangeaient un mot ou deux, qui conduisaient à une blague ou à Rose qui volait une des frites de Graham. Mais la bonne humeur de Rose s'atténua alors qu'elle faisait face à une grosse hésitation.
Graham, observateur comme il était, remarqua son froncement de sourcil, alors qu'il buvait son café après avoir fini son repas.
« Quelque chose ne va pas ? »
« C'est juste... J'hésite entre deux façons d'introduire l'histoire, et je ne sais pas laquelle choisir et ça me frustre ! Je déteste hésiter sur quelque chose d'aussi idiot ! » grommela-t-elle, passant ses mains dans ses cheveux avec un râle exagérée qui fit sourire Graham d'amusement.
« Je proposerai bien mon aide, mais vu votre réticence à me laisser lire... »
Rose regarda l'homme assis en face d'elle. Habituellement, cela resterait un non catégorique. Elle pourrait demander à Emma, mais même si elle aimait ses textes, sa sœur n'avait pas vraiment la fibre littéraire, et ne pourrait sans doute pas trop l'aider. Probablement qu'elle dirait juste : « les deux sont très bien, fais comme tu veux », ce qui était, bien que gentil, pas très utile.
Henry pourrait peut-être plus aider, vu son amour des contes et qu'il était en partie, auteur de l'histoire. Mais en même temps, c'était encore un enfant, et il était à l'école de toute façon.
La jeune femme se surprit elle-même quand elle suggéra :
« Vous pourriez me dire ce que vous en pensez ? »
Graham lui jeta un coup d'œil surpris.
« Je croyais que ce n'était pas prêt à être lu. » la taquina-t-il.
Rose plissa les yeux quand il reprit ses paroles contre elle.
« Vous avez dit que vous proposeriez bien votre aide si je vous y autorisai. »
« Eh bien, je ne suis pas un expert en littérature, mais je veux bien essayer de vous aider. Bien sûr, seulement si vous voulez. »
Rose se remit à hésiter. Elle ne montrait normalement jamais ses brouillons à personne, sauf à Emma. Elle exagérait quand elle avait dit à Henry que c'était "un privilège sacré", mais ce n'était pas entièrement faux.
Pourtant... Elle voulait faire confiance à Graham. Et bon, étant donné qu'il s'agissait seulement de quelques lignes d'introduction, c'était moins dérangeant que le brouillon d'un chapitre entier.
« Ok, je veux bien un peu d'aide pour me décider. » Elle leva un doigt en précisant. « Pour cette fois. Et n'essayez pas d'en lire plus. »
Graham sourit, levant la main.
« Promis. »
Satisfaite, elle lui fit signe de s'approcher. Graham se leva et se plaça à côté d'elle, se penchant vers l'écran pour lire les lignes en italique pour les distinguer du reste des notes. Il lut la première possibilité.
« Il existe une ville dans le Maine, où tous les personnages de contes de notre enfance, sont piégés entre deux mondes. Ils sont tous sous l'emprise d'une terrible malédiction. Une seule personne connaît la vérité, et une seule personne peut rompre le sort... »
Il lut ensuite la 2e idée de Rose.
« Il était une fois, une Forêt Enchantée où vivait tous les personnages de contes. Nous les connaissons bien, ou du moins, nous le croyons. Un jour, ils se trouvèrent piégés dans un monde où les fins heureuses n'existaient plus. Notre monde. »
Graham relut chacun des paragraphes, réfléchissant tandis que Rose guettait sa réaction. Elle avait croisé les bras dans une tentative de paraître décontracté, mais elle semblait un peu tendue. Redoutait-elle ce qu'il en pensait ?
Honnêtement, Graham pouvait voir que Rose était une auteure talentueuse. C'était deux bonnes accroches qui lui donnaient envie d'en savoir plus. Mais Rose lui avait demandé son avis pour en choisir une.
« Je dirai celui-ci. » décida-t-il finalement, pointant du doigt la deuxième version sur l'écran. « La première possibilité est aussi intéressante, mais je pense que cela fait plus introduction d'une série télévisée que d'un livre. »
Rose relut ses deux textes et sourit.
« Ouais, vous n'avez pas tort. Eh bien, merci, Shérif des Bois. Je vous en dois une. »
« Ce n'est rien. Ou, si vous voulez vraiment me rembourser, vous pouvez le faire en me tenant au courant de votre progression. Cela a piqué ma curiosité. »
« Contente d'avoir déjà gagné un lecteur. »
Graham sourit, avant que ses yeux se posent sur l'horloge accroché en haut d'un mur. Bon sang, le temps était passé plus vite qu'il ne le pensait.
« Je dois retourner au poste. On se revoit peut-être plus tard. »
Il salua Rose, qui lui offrit un sourire en retour et un signe de la main, alors qu'il se dirigeait vers la sortie du restaurant.
« J'y compte bien, Shérif des Bois. »
Une fois l'homme à l'extérieur, Rose se retourna vers son écran, effaçant la 1ère version de son introduction, et écrivit à la suite de la deuxième :
« Voilà comme tout a commencé... »
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Rose se rapproche de Graham...et écrit une nouvelle histoire ! Elle n'a pas la moindre idée à quelle point elle sera longue et compliquée, la pauvre.
J'espère que vous avez aimé et à bientôt dans un nouveau chapitre avec la fin de l'épisode !
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