~ 𝗟𝗲 𝘃𝗲𝗻𝘁 𝘀𝗼𝘂𝗳𝗳𝗹𝗲 𝘀𝘂𝗿 𝗹𝗲𝘀 𝗯𝗿𝗮𝗶𝘀𝗲𝘀 𝗹𝗼𝗿𝘀𝗾𝘂𝗲 𝗹𝗲 𝗽𝗲𝘂𝗽𝗹𝗲 𝘀𝗲 𝗹𝗲̀𝘃𝗲 ~

"Un moment heureux. J'en ai eu, des moments heureux. Mais un moment mémorablement heureux ? Aussi une victoire ? Moins débile que l'euphorie que je ressens en me disant que je vais vivre chez mon père l'année prochaine ? Moins débile que mes victoires lorsque ma mère fait des réf à Harry Potter et m'offre des habits de la collection ? Moins niais que mon sourire quand ma sœur m'offre des dessins Harry Potter alors qu'elle déteste ça ? Moins niais que ma joie quand j'ai reçu des chaussettes Harry Potter ? À croire que je me prends pour Dobby.

J'y ai réfléchi pas mal de fois. D'abord ma victoire chez le crêpier. Et puis ça m'est venu. Ma première manif.

C'est quand on s'entretue qu'on est faibles, tu sais quand on est uni·e·s, on est invincibles !, Invincibles, Kalune.

Manif pour une vraie Loi Climat. J'ai hésité à y aller. Ma mère est contre. Mais j'étais chez mon père. Et j'ai 16 ans. Alors j'y suis allé·e avec lui. Je pense que je peux dire que c'était un des plus beaux jours de ma vie.

C'était un moment... Magique. Intense. Hors du temps. Et pourtant bien réel.

La batucada, les gens, les slogans, l'ambiance. Et moi, au milieu de tout ça, à l'insu de ma mère. Présenté·e pour la première fois à des gens en tant que la personne que je suis. En tant que Sacha. En tant qu'ado. Pas en tant que fils ou fille. En tant qu'iel ou il. Et tant que manifestant·e. J'étais enfin exactement là où je devais et voulais être. J'ai pensé à mae pote, ellui aussi en train de faire une manif mais à 200 kilomètres de là. J'ai pensé à toutes ces fois où ul (c'est son pronom) me parlait pendant des heures ses journées et ses week-end passés en manif puis avec ses copaines. Et là, c'était moi qui y étais ! Je n'avais pas besoin d'imaginer, j'étais aux premières loges, j'étais dans la foule, je criais, je scandais, je marchais, je manifestais ! Je souriais.

Il ne me manquait plus que les copaines. Je les ai vite trouvé·e·s. Je n'ai parlé à la plupart que pendant 30 secondes, le temps de dire mon prénom et mes pronoms et pourtant, j'avais le sentiment d'être chez moi. Iels m'avaient accepté·e à bras ouverts. Des jeunes d'YFC, Youth For Climate, un mouvement écolo mais aussi féministe, décolonialiste, anticapitaliste et LGBTQIA+friendly. J'ai été tellement bien accepté·e que je suis allé·e à l'appart d'un des gens, où iels se réunissaient ! Je ne connaissais que 2 personnes. Très, très vite fait. Une pour en avoir entendu parler, l'autre pour l'avoir déjà croisée. Je n'ai pas beaucoup parlé, surtout écouté. Jamais je ne m'étais senti·e aussi à l'aise chez un·e inconnu·e, et encore moins entouré·e d'inconnu·e·s. J'étais de la famille.

Et finalement, penser à cette victoire m'amène à une autre. Toujours dans le domaine de l'écologie, d'ailleurs. Toujours à l'insu de ma mère. Toujours chez mon père. Ma première action.

Oh, action est un grand mot. Je n'ai pas fait comme ce qu'on fait certain·e·s l'après-midi, je ne me suis pas collé·e aux vitrines d'H&M et Zara pour dénoncer l'exploitation des Ouighours pour la fabrication de leurs vêtements, ni aux vitrines de Jennyfer et Princesse Tam Tam pour dénoncer les standards de beauté féminins. Non, je suis juste allé·e dans la rue avec un petit groupe et on a collé des autocollants discrètement sur les gouttières déjà recouvertes de pubs délavées. Enfin, quand je dis "on", c'est surtout elleux. Je n'ai pas collé un seul autocollant ! Juré ! Aaah, la domination matriarcale...

Et pourtant, j'avais trouvé ça génial. J'avais en rencontré les gens dont me parlait mae pote. J'ai eu le sentiment, encore une fois, d'être au cœur de l'action. D'être une roue de l'engrenage.

Cette sensation d'être complet·ète, d'être exactement là où il faut être, je vous souhaite de la connaître. Cette fierté de pouvoir dire "J'étais là, j'ai vu, j'ai fait", d'être une minuscule goutte au milieu de la vague, je vous souhaite de la connaître.

Préparez-vous. Le monde change. Il doit changer. Vous faites partie de ce changement. Vous pouvez être un·e de celleux qui se seront battu·e·s pour avoir des petits-enfants sur une terre qui n'agonise pas. Vous pouvez faire pencher la balance. Le monde en a besoin, l'humanité en a besoin, la nature en a besoin, vous en avez besoin.

Nous en avons besoin.

Ne nous regardez pas, rejoignez-nous.

C'est elleux qui sont à plaindre, parce qu'iels peuvent nous tuer mais ies ne peuvent pas nous vaincre., Invincibles, Kalune."

Un p'tit témoignage de SachaLePtitGenie