Déprimée, je me mis à marcher rapidement sur le trottoir. Je n'avais que quelques kilomètres à parcourir et je connaissais par cœur le chemin du retour.

J'hésitai à appeler ma maman pour qu'elle vienne me chercher, mais je changeai d'avis. Je n'étais plus une petite fille. Je pouvais bien me débrouiller toute seule. J'espérais tellement que celle-ci le réalise enfin. Lui téléphoner aurait tout l'effet contraire.

Puis, ce soir-là, j'étais tellement triste. Chelsea me manquait. J'avais besoin de rassembler mes idées pour y voir plus clair, pour faire le point sur ce qu'il venait de se produire. Je n'y comprenais rien.

Pourquoi ma meilleure amie m'avait-elle laissée tomber ? J'aurais tellement aimé aller avec elle et Madison faire du shopping. Elles auraient bien pu attendre une demi-heure pour me proposer de venir. Pourquoi Chelsea était-elle partie comme cela, sans même envoyer un texto ?

Chelsea était plutôt du genre jaloux et possessif avec ses potes, pourquoi me faisait-elle un coup qu'elle n'aurait jamais supporté que je lui fasse ?

Puis, je pensai à Théo qui avait été si gentil avec moi. Avait-il eu envie de me raccompagner ? Il avait semblé inquiet pour moi. Je n'étais pas parvenue à déchiffrer ses sentiments. Je n'aimais pas rentrer seule, mais je n'aurais jamais osé lui demander de me tenir compagnie jusqu'à la maison. Jamais. Les autres allaient encore se faire des idées. Je n'avais pas envie que des rumeurs circulent à notre sujet.

Pourtant, avec Théo, c'était vraiment différent. J'avais l'impression qu'il me parlait toujours avec beaucoup de respect et de gentillesse. Existait-il encore sur cette planète des garçons polis et attentionnés ? J'avais du mal à y croire quand je faisais le bilan des gars de mon lycée.

Peu importait, Théo m'avait laissée partir toute seule. Peut-être que je me faisais des idées ? Il devait sûrement s'en moquer complètement sinon il m'aurait retenue, pas vrai ?

Plongée dans mes réflexions, j'atteins bientôt la maison de monsieur Herbert, mais aujourd'hui était un tout autre jour. Je n'avais pas envie de le saluer. Je n'avais pas le cœur à lui faire signe. J'étais préoccupée. Tout tournait dans ma tête. C'était pire qu'un tour de carrousel.

Chelsea.

Théo.

Maman.

Grand-père.

Je me sentais perdue et seule.

Alors que je longeai la haie du vieil homme, je levai les yeux vers la fenêtre éclairée de sa maison délabrée. Un craquement derrière moi me fit sursauter. Je me retournai violemment, le cœur battant.

Rien. 

Juste le trottoir désert.

Le souffle court, je me remis en route, hésitant à courir. Effrayée, je finis par me mettre à compter tout bas le nombre de pas que je faisais.

1...2....3....4

11....23....32 ...49

Je continuai à marcher rapidement, laissant libre cours à mes réflexions.

Si j'avais écouté mon cœur à cet instant, j'aurais rebroussé chemin afin de rejoindre Théo ou j'aurais rattrapé Chelsea sans lui demander son avis.

Mais je continuai à marcher sans me retourner, sans savoir que ce serait la dernière fois que je passerais devant la maison de Mr Herbert.

J'aurais tellement voulu le savoir.