Chap 13 : pdv Jill (présent)
Chaque matin, j'ouvrais les yeux péniblement, douloureusement.
Je ne voulais pourtant pas les ouvrir, je ne voulais plus de cette réalité détestable. Réalité que je ne cessais de rejeter en bloc, mais qui me retombait dessus à chaque fois.
Jour après jour, nuit après nuit.
Inlassablement.
Lorsque j'ouvrais les yeux, ce cauchemar éveillé me frappait de plein fouet. Moi, j'étais toujours là mais plus elle. Comment vivre avec ça ? À quoi bon se réveiller ? À quoi bon continuer de me lever ? Le choc de son absence me coupait violemment la respiration, me faisait suffoquer. Parfois, je toussais si fort que j'avais envie de vomir.
Mon âme nauséeuse ne s'habituerait jamais à ce réveil brutal.
Souvent, je restais là, allongée dans mon lit pendant des heures, à fixer le plafond. Je me forçais à ne penser à rien, à oublier tout ce qui me torturait. J'écoutais le silence, englobée par cette chaleur rassurante que me procurait la couette moelleuse.
Parfois, j'enviais Gall qui avait l'énergie de sortir de son lit chaque matin pour se rendre à son travail. Un jour, il ne s'était plus laissé le choix, se forçant à avancer, à affronter cette douleur vive et lancinante. Il semblait y arriver alors que moi j'étais inapte à continuer ma vie comme avant.
Je n'avais pas envie de me lever, de déambuler dans la maison, de faire ma toilette, de peigner mes cheveux. Je n'avais plus envie de nettoyer notre foyer, de ranger, de cuisiner. Ce quotidien m'indifférait et me rebutait.
Alors, je restais là à attendre que quelque chose se passe.
Mais il ne se passait jamais rien.
Parfois, je voulais ne plus jamais penser à tout ça. Je souhaitais oublier, tout oublier. Condamner à jamais la porte de mes souvenirs pour ne plus me rappeler ce manque insupportable.
Certains jours, j'hésitais même à mettre le pied dehors.
Le ciel bordé de nuages dessinait les traits de mon enfant perdu. Sur le trottoir, je sursautais lorsque, dans les cris des enfants, je croyais percevoir la voix chantante de ma fille. Ma jolie Hailie. Au détour d'une rue, je distinguais une belle chevelure bouclée et cela me tétanisait automatiquement.
Mais ce n'était jamais elle.
Hailie apparaissait partout puis m'échappait aussitôt. Toutes ces désillusions me faisaient mal, m'épuisaient, me martyrisaient.
Chercher en vain.
Attendre à s'en rendre malade.
Espérer, désespérer pour espérer de nouveau.
J'aimerais tant voir le bout du tunnel, l'atteindre même en rampant, essoufflée, à bout de force, mais l'atteindre une bonne fois pour toutes.
J'aimerais savoir ce qu'il s'était passé ce fameux mercredi. Savoir ce qu'il s'était passé pour enfin être libérée.
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