Chapitre 8
- Bonjour, Alexander.
Alec se redressa précipitamment. Magnus, le Magnus qui n'était pas du tout censé être là, se tenait devant lui, ses yeux de chat lançant des éclairs de colère. Tendant des vêtements à la version plus jeune que lui, sans pour autant poser le regard sur lui, il lui dit froidement dans un Indonésien parfait :
- Laisse-nous !
- Magnus, je... Commença Alec.
- Ne te fatigue pas, Alexander, je n'ai pas l'intention de discuter avec toi.
- Il n'a pas l'air de t'aimer tant que ça. Déclara le jeune Magnus à un Alec très mal à l'aise.
Ce dernier le fusilla du regard. Il ne l'aidait pas là...
- On ne t'a pas demandé ton avis, toi ! Lui répondit le Magnus plus âgé. Et il me semble t'avoir demandé de nous laisser !
Alexander remarqua que Magnus ne regardait pas son double, préférant visiblement poser son regard n'importe où plutôt que sur lui.
- Je ressemble vraiment à ça dans le futur ?
Magnus soupira, exaspéré.
- Sors...
- J'ai plein de questions ! Fit le plus jeune sans prêter attention à l'ordre de son aîné.
- Je pense que tu devrais sortir... Lui conseilla Alec.
Mais le jeune sorcier ne semblait pas vouloir obéir. D'un claquement de doigt, il s'habilla et s'avança vers l'autre version de lui en boitant.
- Non, non, non ! Tu ne peux pas te présenter devant moi et ne pas répondre à mes questions ! Je veux dire, ma vie serait plus simple si tu me disais déjà les trucs moches qui vont encore m'arriver ! C'est un peu comme si tu étais mon frère jumeau ! J'ai toujours voulu avoir un...
Magnus l'empoigna par le col de sa veste et pour la première fois, le regarda dans les yeux.
- Écoute-moi bien, je ne suis pas ton frère, je suis toi ! Un toi beaucoup, beaucoup, plus puissant ! Alors je te conseille de m'obéir et de débarrasser le plancher !
- Ou sinon quoi ? Tu vas me tuer ? Vas-y, mais toi et moi on semble plutôt lié !
- Je prends le risque !
- Magnus, arrête, lâche-le ! S'interposa Alec en les séparant.
Il s'adressa ensuite au plus jeune.
- Laisse-nous seul, s'il te plaît. S'il te plaît... Répéta-t-il.
La version jeune de Magnus obéit enfin, mais prit soin de lancer un sourire narquois à la plus âgée.
Il sortit de la tente et s'éloigna de quelques mètres avant de s'appuyer contre un arbre et de se glisser contre le tronc. Il laissa alors tomber le masque qu'il avait revêtit à l'arrivée de son lui futur, et fondit en larmes. Depuis quand il n'avait pas pleuré comme ça ? Probablement des années... Il s'était juré de ne plus rien laisser l'atteindre à ce point. Mais ces derniers jours, non ces dernières semaines, avaient été difficiles. Et les dernières heures avaient été cauchemardesques. Il regarda autour de lui, perdu. Il était seul, entièrement seul, dans un pays qui n'était pas le sien. La famille qui s'était construite en arrivant dans ce pays, venait de périr dans les flammes. Penser à eux ne fit que redoubler ses pleurs. Il avait beau avoir essayé de donner le change devant le néphilim et le futur lui, ce n'était qu'une façade. Il était sous le choc, il avait du mal à croire en la véracité des derniers événements. Ils ne pouvaient pas tous être morts... Malheureusement, au fil des minutes, la réalité finissait par s'imposait irrévocablement à lui, et en cet instant, il ne souhaitait qu'une chose : être le loin de ce monde.
PDV Alec
Si seulement j'avais pu me construire un trou et m'y cacher à vie... Honteux, je remis mon tee-shirt sous le regard dégoûté de Magnus. En le voyant en cet instant, je me rendis compte à quel point j'avais été stupide et à quel point j'avais merdé en beauté...
- Je... Commençais-je, mais il me coupa froidement.
- Épargne-moi tes excuses. Ce n'est ni le moment, ni l'endroit. On s'en va.
- Non, on ne peut pas partir !
- Alexander, ton immortalité, là, tout de suite, j'en ai rien à foutre !
Je sursautai. L'entendre me parler, parler comme ça tout court d'ailleurs, était rare. Très rare.
- Magnus, je...
- Non, stop ! Circus nous attend..
- C'est lui qui t'a emmené ici ?! Demandais-je surpris.
- Oui. Je ne lui ai pas laissé le choix.
- Magnus, on ne peut pas partir !
- Alexander, sérieusement, je ne te le redirai pas une autre...
- Non, toi écoute-moi ! Le coupais-je. Il y a un problème avec Catarina !
Alors qu'il s'était déjà détourné de moi, il se retourna brusquement.
- Comment ça il y a un problème avec Catarina ?! Me demanda-t-il, inquiet.
- Il...Il y a eu un incendie au refuge... Une attaque plus précisément, et elle... Elle a disparu. Les autres sont tous...
- Morts. Oui, je sais, j'étais là. Mais Catarina est sorti avec moi !
- Non... Pas là...
Il ferma les yeux. Lorsqu'il les rouvrit, son regard n'était que froideur. A cet instant, je compris que j'avais commis l'erreur de trop...
PDV Magnus (jeune)
Des pas se rapprochèrent de moi. Mon cœur s'accéléra. Je n'étais pas en état de me battre. Me relevant difficilement à cause de ma jambe blessée, j'évaluais la situation. Je ne pouvais ni me défendre, ni fuir. En somme, j'étais dans une situation désespérée...
- Tu crois aller où comme ça ? Demanda une voix que je connaissais parfaitement, alors que j'avais déjà commencé à m'éloigner de cet endroit.
Stoppant mon chemin, je me retournais et faillis fondre en larmes à nouveau.
- Circus... Murmurais-je d'une voix faible.
Mon ami se tenait devant moi, les sourcils froncés et la tête légèrement penchée sur le côté. Son visage recouvert de suie lui donnait un air encore plus étrange que d'habitude.
- Circus... Tu es vivant...
- Il en faut plus pour me tuer... Me répondit-il.
- Circus... Ils... Ils sont tous morts... Archi, il...
Ma voix se brisa et voulant avancer vers Circus, j'appuyais un peu trop sur ma jambe. J'essayais, en vain, de retenir un gémissement de douleur, et vacillais. Circus me retint de justesse.
- Doucement... Me fit-il en me refaisant asseoir contre l'arbre. Montre-moi ta jambe...
Il enleva le bandage de fortune qu'Alec m'avait fait, et me lança un regard désapprobateur.
- Tu te soignes comme les terrestres ! Me reprocha-t-il.
- Tu les appelles comme ça toi aussi maintenant ?
- Je les ai toujours appelé comme ça ! Tu as juste passé trop de temps avec Archi ! On se demande ce qui t'a appris d'ailleurs, vu que tu ne sais même pas pratiquer un sort de guérison, et que tu ne penses même pas à créer un portail pour...
- Il est mort, Circus.... Sanglotais-je, à bout de forces. Il est mort... Ils sont tous morts... Et Catarina elle... Elle...
- Je sais ! On va la retrouver ! Mais je dois d'abord soigner ta jambe ! Ce n'est pas joli à voir...
Positionnant ses mains au-dessus de ma blessure, la frôlant presque, il fit passer des flammes magiques dessus. Leur douce chaleur me fit du bien. Un instant plus tard, ce n'était plus que souvenir. Il passa ensuite sa main sur ma joue.
- Je suis là, ça va aller. On va retrouver Cat'...
- Tu sais où elle est ?
- Oui... Et j'ai besoin que tu contrôles tes pouvoirs. Et que tu les utilises à pleine puissance.
- Je ne suis pas aussi puissant que tu le crois. Je ne sais pas pourquoi vous avez toujours cru ça...
- Parce qu'on a vu tes yeux. On sait qui est ton père.
- Asmodée...Murmurais-je.
Il haussa les sourcils, surpris. Visiblement, il ne s'attendait pas à ce que je connaisse cette information.
- Comment l'as-tu su ?
- Longue histoire... J'ai eu une semaine un peu compliquée.
Je décidais de ne pas lui révéler que quelques mètres plus loin se tenaient le moi du futur et Alexander. Alexander... Je me surpris à souhaiter la présence de ce néphilim auprès de moi... Par bonheur, Circus ne s'attarda pas sur le sujet.
- Peu importe comment tu l'as su de toute manière... Puis c'est plus simple que tu le saches déjà.
- Pourquoi ?
- Parce que tu vas le rencontrer !
PDV Alec
Magnus ne me parlait pas. Il ne me regardait même pas. Je m'étais assis sur le lit, en attendant que Circus se pointe pour nous ramener dans notre temps. Heureusement qu'il était censé nous attendre celui-là... De toute manière, je n'avais pas l'intention de rentrer... Je ne comprenais pas ce qui m'arrivait, mais tout mon être me hurlait de retourner auprès d'un Magnus bien différent que celui qui se tenait actuellement près de moi. Je me pris la tête dans les mains. Qu'est-ce qu'il m'arrivait ?!
- Tu l'aimes ? Me demanda soudain Magnus, froidement.
- Bien sûr ! Tout comme je t'aime toi ! Je te rappelle que lui, c'est TOI ! M'énervais-je.
- Alors tu ne m'aimes pas. Parce que non, lui et moi on n'est pas pareil. Il n'y a rien de plus différent que lui et moi.
J'eus une exclamation de dédain.
- Tu te détestes tellement... Pourquoi ? Lui demandais-je en encrant mes yeux dans les siens. Pourquoi cette haine envers toi-même ?
- Fais-moi confiance, Alexander, si tu restes ici, tu le détesteras autant que moi. Je n'ai pas toujours été le gentil sorcier que tu as devant toi.
- Toi gentil ? Tu as de la chance que Simon ne soit pas là pour te contredire...
- Ce n'est pas parce que la plupart du temps les gens me sont indifférents, et je précise que depuis qu'il m'a sauvé la vie, ce n'est plus le cas de Simon, que cela fait de moi une personne... mauvaise. Or le gamin que tu as eu devant les yeux, lui, il l'est. Les gens qui lui sont indifférents, il les tue. Point. Il ne se pose pas plus de questions.
- N'importe quoi... Soupirais-je, ne pouvant pas croire en ce qui me disait. Qu'est-ce qui s'est passé ? Des gens ont été tués et tu t'en sens responsable, c'est ça ?
Il soupira.
- Je te montrerai, mais on doit rentrer.
- Ouais... Tu me montreras... Faut déjà que ce cher Circus se pointe !
- Il a plutôt intérêt !
- Et Catarina ? Tu la laisses tomber ?
Son visage s'assombrit.
- Je vais m'en occuper. Mais je vais d'abord m'assurer que tu rentres.
J'allais répliquer lorsque Circus entra enfin sous la tente. Il lança un regard à Magnus qui le saisit aussitôt par le col de sa veste d'Arlequin.
- Tu as réussi à changer le passé, tu es fier de toi ?! Lui fit-il avec haine.
Circus se dégagea et lui renvoya son regard.
- Je préfère définitivement l'autre version de toi !
- Je te jure que si Catarina...
- Je veille sur elle, ne t'en fais pas ! Et le passé n'a pas changé! Catarina n'est jamais sortie avec toi de cet incendie.
- Bien sûr que si !
- Non... Tu n'en as juste aucun souvenir. Tu te sens tellement coupable de ce que tu as fait cette nuit-là, que la chronologie des événements s'est embrouillée dans ta tête !
- Tu mens...
- Non. Non, je ne mens pas. Je n'aurais jamais permis que le passé soit changé.
- Mais tu le changes forcément par la présence d'Alexander !
- Vraiment ?
Circus sourit, lui donnant encore plus l'air d'un fou.
- Les Frères Silencieux ont vraiment fait du bon travail...
- Je peux savoir de quoi vous parlez ou vous allez longtemps faire comme si je n'existais pas ?! Fini-je par lancer, agacé.
Encore des choses que je ne savais pas...
- Non. Tu ne peux pas. Me répondit Magnus sans un regard.
- Dans ce cas je reste ici, parce que ton autre toi est bien plus bavard !
Il ignora ma remarque et ordonna à Circus de me ramener. Ce dernier me lança un regard qui signifiait clairement qu'il n'en avait pas l'intention.
- Circus... Ramène-nous, maintenant ! Lui ordonna Magnus à nouveau, semblant lui aussi avoir compris que les intentions du sorcier n'étaient pas tout à fait les mêmes que les siennes.
Circus ne me quittait pas du regard, semblant réfléchir. Il claqua alors des doigts et le temps sembla s'arrêter.
- Qu'est-ce que...
- Je n'ai pas beaucoup de temps, je ne peux pas m'amuser à ça trop longtemps mais... Écoute-moi, le moi du passé a emmené ton petit copain rencontrer son père. Magnus a dû te dire qu'il n'en garde pas un bon souvenir, et à fortes raisons. Tu dois les retrouver... Ta présence est essentielle.
- Pourquoi ?
- Parce que dans le cas contraire, on est tous morts !
A suivre
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