4 : Fils de Boucher (2/5)
C'était en réalité pour leur enfant que le couple dépensait le plus d'argent,et même si Elvis n'était pas spécialement profiteur, ses parents aimaient bien lui faire des petites surprises de temps à autre,c'était à dire assez souvent. Le jeune adolescent travaillait du mieux qu'il pouvait au lycée, mais tous les matins, il devait se lever assez tôt pour pouvoir s'y rendre à temps, car la maison en était assez éloignée, et comme il était en même temps du style couche-tard, il avait souvent tendance à sombrer dans le sommeil encours. Par chance, ses professeurs avaient jusque-là pu le reprendre à temps avant qu'il ne s'endorme complètement, mais comme en plus de ça il avait hérité de la fainéantise de son père en un peu moins pire, il fournissait depuis la 4ème de moins en moins de travail scolaire, et de quatorze ou seize dans les premières classes de collèges, sa moyenne générale était passée à dix ou onze au lycée, tout juste la moyenne.
Dans son temps libre, le jeune-homme prenait des cours de guitare et de chant pour parfaire sa voix rauque, un atout précieux qui laissait paraître de lui l'image d'un adolescent déjà très viril, et qui annonçait qu'il était en fait déjà fait pour être chanteur dans un groupe de métal. Il passait son temps à écouter ou à jouer de la musique, et quelques fois ses parents l'entendait depuis la cuisine où ils avaient pour habitude de se poser pour fumer leur petite cigarette, les jours où ils étaient tous les deux en repos. Plutôt que de discuter comme un couple communicatif, ils se taisaient et écoutaient le son étouffé de guitare électrique qui provenait de la chambre de leur fils, en tirant la fumée de leur cigarette.
Dans ces moments-là, tout se déroulait à merveille. La petite famille semblait tout-à-fait heureuse, et normale. Mais en réalité, dès que Lucia s'absentait, même pour un court instant, lorsqu'elle revenait plus rien n'allait : Théophile était entrain de finir précipitamment sa énième bouteille d'alcool (quel qu'il soit), et se jetait dans la chambre d'Elvis, saoul. La mère devait donc attendre entre cinq et dix minutes pour intervenir, le temps que son boucher de mari se soit un peu calmé. À partir de ce moment-là, il ne frappait plus son fils sous l'emprise de l'alcoolémie ou même de la colère, mais comme par habitude. Et c'était justement une fois qu'il avait commencé à frapper « par habitude » qu'il fallait intervenir, ou il ne pourrait plus s'arrêter.
Et pourtant aujourd'hui, pour une fois, Elvis avait réussi à se débarrasser de son père. Il l'avait envoyé balader, en faisant en sorte que ce que ce dernier avait fait ne puisse jamais se reproduire. Théophile s'en était allé désemparé, et était parti loin, très loin. Elvis ne savait pas s'il allait revenir, et il ne savait pas non plus comment sa mère réagirait une fois rentrée. Pour se faire pardonner, il décida de préparer le repas. Comme son père était boucher et que sa mère adorait quant à elle la bonne viande bien fraîche, le jeune-homme savait quel genre de plat il lui restait à préparer. Les quelques fois où le père était bien dans sa tête, il avait montré à son fils des outils de qualité pour cuisiner la viande, et des épices, sauces et autres accompagnements irrésistibles pour la rendre encore plus goûteuse.
Dans la famille d'Elvis, manger de la viande à chaque repas était une tradition. Les rosbifs, les filets, les gigots, tout aliment d'origine purement animale prenait le dessus sur les légumes, les féculents, les produits laitiers, et même les desserts. Théophile était conscient que les quelques visiteurs qu'il avait déjà reçu chez lui étaient végétariens et avaient vécu leur pire cauchemar, ainsi ils avaient dû partir avant le repas, mais le boucher s'en était amusé.
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