III - Chapitre 28 : A l'aventure, compagnon !
Bonjour bonjour à tous !
Petit poste intempestif parce qu'hier, c'était l'anniversaire de Cédric (tel que moi je l'ai imaginé, on n'a pas la date on sait juste qu'il est né avant le 31 octobre). Et c'était également l'anniversaire de @AneesiE hier, donc joyeux anniversaire en retard !
Le Quatuor du Simoria, c'est terminé ! Et oui et oui, toutes les bonnes choses ont une fin ! Ne vous en faites pas, on les reverra vite - vraiment depuis j'ai vraiment envie de n'écrire QUE CA c'est terrible. Si ça peut vous rassurer, je suis assez contente de ce chapitre quand même
OK le titre c'est TRES CLAIREMENT un délire personnel avec les chansons du Donjon de Naheulbeuk (Une de leurs chanson phare, A l'aventure, compagnon !) - ceux.elles qui connaissent, vous êtes des vrais et je vous respecte.
Pour ceux qui l'ignorent, Le Donjon de Naheulbeuk est originellement une BD/saga audio humoristique qui prend les codes de la fantasy et du jeu de rôle. Ils font des chansons associées (le Naheulband) qui sont clairement pour la plupart complètement barj et déjantées mais j'adore c'est entrainant, frai et trop drôle. Un des meilleurs concerts de ma vie (avec dans les autres parties un groupe trop stylé (Les échos de la terre du milieu et de Westeros je crois) qui reprenait les musiques HP, GOT et SDA, mais vraiment les gars quand ils faisaient le thème du Mordor j'avais des frissons). BREF.
Pour la petite histoire, la chanson de la citation, je la chantais avec une amie pour nous motiver pour finir le cross du collège en 3e. On a fini en se prenant la main et en chantant La vie d'aventurier, si ce n'est pas beau !
BONNE LECTURE !
***
Quand j'aurais mon niveau 10,
J'achèterais des pansements
Pour corriger les erreurs du niveau précédent.
C'est surtout ça la vie d'aventurier,
Je rentre chez moi
Ma carrière est terminée ...
- La vie d'aventurier
Le Naheulband
***
Chapitre 28 : A l'aventure, compagnon !
J'aurais pu rester des heures dans le parc, à moitié dans les bras de Simon à retisser le naturel de nos relations et à expérimenter celles qui m'étaient inconnues. Pouvoir prendre sa main et jouer avec ses longs doigts sans risquer qu'il ne la retire, me moquer d'un épis dans ses cheveux tout en tentant de l'aplatir ou d'aggraver sa coiffure. Le laisser effleurer mon bracelet, jouer avec la pointe de mes boucles, apprécier sa main dans mon dos sans m'interroger sur la signification de son geste ... C'était apaisant. C'était tout ce que j'avais toujours voulu avec Simon – et je n'avais même pas besoin de lui arracher les yeux. Un moment hors du temps, coincé entre les hêtres qui arboraient le parc dans lequel nous avions joués petits. C'était presque ici que tout était né : d'un coup de poing, d'une phrase vexante, d'amitié et d'expériences commune qui nous avaient inexorablement liées l'un à l'autre. C'était pour ce parc que je m'étais accroché à lui à Poudlard : il était la seule personne qui connaissait la gamine de Terre-en-Landes. Et ici, il était le seul à connaître la sorcière.
Malheureusement, une famille nombreuse vint casser notre quiétude vers dix-neuf heures et Simon nous fit transplaner in extremis avant qu'ils n'entrent en masse dans le parc. Nous avions atterri hilare dans son jardin et une fois à l'intérieur c'était Caroline qui avait sonné le glas de notre moment privilégié : ça faisait près d'une heure qu'elle attendait Simon, la nuit commençait à tomber et l'inquiétude la rongeait. J'avais été invitée à rester dîner, mais la présence bougonnante de Caroline et les regards noirs que lui jetaient fréquemment Simon m'avaient empêché de pleinement en profiter. J'avais eu l'impression de me prendre la réalité en pleine figure : tout avait changé mais tout restait pareil. Voldemort n'avait pas disparu, Simon restait meurtri par ses traumatismes et Caroline était une mauvaise cuisinière. Je peinais à finir mes œufs brouillés bien trop cuits et Simon avait à peine fait l'effort de toucher à son assiette. J'avais fini par comprendre qu'il attendait que je parte pour s'enfermer dans sa chambre mais l'impression fut compensée par le baiser qu'il posa sur mon front pour me dire au revoir, bref mais plein de spontanéité. Heureusement que seules les étoiles furent témoins du sourire qui ne quitta pas mes lèvres jusqu'au retour.
Mais j'avais besoin de plus. Besoin de plus pour comprendre, besoin de trouver mes nouvelles limites avec lui, besoin de la sérénité qu'il m'apportait. Malheureusement, le reste de la semaine fut peu propice à cela : il retourna en cours tout le vendredi et je fus occupée le soir avec mes grands-parents paternels – et l'Ancien que mon père avait tenu à inviter car il s'entendait bien avec grand-mère Anne. Inutile de préciser que j'aurais largement préféré dîner avec Simon, Caroline ou non. Le lendemain, j'étais arrivée de bonne heure chez les Bones en espérant le voir quelques minutes avant l'arrivée d'Octavia, mais seule Caroline m'ouvrit quand je frappais à la porte. Simon était déjà parti à l'IRIS, m'apprenait-t-elle avec un soupir.
-Ah oui c'est vrai, il expérimente le samedi matin, me souvins-je en masquant ma déception de mon mieux. Octavia va encore râler sur les archives ...
Caroline me jeta un regard circonspect.
-Octavia ? McLairds ? Mais il n'est pas sorti avec ?
Ça me surprenait de la part de Caroline qu'elle sache cela – et qu'elle se souvienne du nom de la fille qu'avait fréquenté son frère. Je me souvins vaguement que Simon avait rendu la chose publique en fin de cinquième année et qu'à ce moment elle achevait sa septième année. Elle leva les yeux au ciel et réprima un bâillement. Elle était installée sur la table de la cuisine, en robe de chambre et une cuillère tournait seule dans le grand bol de café posé devant une tonne de parchemin.
-Je travaille avec elle sur un projet d'histoire sociologique de la magie, expliquai-je succinctement.
-C'est vrai ? s'étonna distraitement Caroline. Je connaissais sa sœur, elle était dans la même année que moi ... Je crois qu'elle vient de se fiancer, j'avais l'impression que c'était l'unique ambition des filles McLairds ... J'étais bien contente que j'ai appris que Simon l'avait quitté, ça aurait trop fait plaisir à leur père de mettre la main sur l'héritier.
Une pointe d'amertume avait percé sa voix et elle la noya dans une gorgée de café qui embua ses lunettes de vue.
-Tu sais, ça me fait plaisir que tu saches, lança-t-elle de façon abrupte. Que tu comprennes tout. J'ai l'impression qu'on peut enfin en parler plus librement, ça fait un bien fou ...
-Ça t'a tant pesé que ça ?
Caroline me gratifia d'un pauvre sourire.
-Si tu savais ... J'ai quelques souvenirs, moi. De Spencer, de Matthew, de tante Cassie qui prenait Simon dans ses bras ...
Elle reprit une gorgée de café et me fixa par-dessus son bol de ses beaux yeux bleus. Elle n'avait vraiment rien des Bones : un beau petit nez retroussé, une belle chevelure brune mordorée, et cette belle couleur azur dans les prunelles, un bleu plus sombre que celui de sa mère.
-Je sais que ça peut paraître horrible, mais je n'ai jamais pu m'enlever ces images de la tête ... Je n'ai jamais oublié, Vic'. Alors ... je n'ai jamais pu être sa sœur. (Elle essuya un petit ricanement). Vraiment, je sais que je suis horrible ... Simon m'en veut toujours de lui avoir fait sentir cette distance.
-Je ne te trouve pas horrible, assurai-je, néanmoins gênée par la discussion. Je pense juste que ... que c'est une situation très compliquée pour tout le monde.
-C'est le cas de le dire, marmonna-t-elle en repoussant sa franche de cheveux. Difficile de trouver sa place quand le dernier arrivé prend toute la place. L'ironie du sort, c'est qu'on m'a martelé toute mon enfance que les Bones étaient une lignée de femme forte et c'est l'héritier qu'on portait aux nues. Enfin bref ...
Elle se munit de sa plume et ratura une ligne sur son parchemin – sans doute « s'épandre sur son complexe d'infériorité vis-à-vis de son frère/cousin à la meilleure-ennemie de celui-ci ». Elle leva vers moi une mine penaude.
-Désolée, on s'est juste un peu disputé avant qu'ils partent, je suis encore un peu énervée. Tu viens travailler du coup ?
-Oui ... Oui, je vais m'y mettre en attendant Octavia ...
-Comme c'est pratique d'être joueuse de Quidditch et d'avoir tout ce temps, soupira-t-elle en griffonnant une note. Tout ce temps que tu as ... J'aimerais bien avoir des journées de plus de vingt-quatre heures, c'est le premier samedi que je prends depuis six mois ... Mrs. Goldstein croule sous les dossiers, elle travaille à la commission de la sécurité, tu imagines quelle tonne de travail on a ...
-Je vois, soufflai-je avant de me diriger vers la porte. Euh ... J'y vais, tu m'envoies Octavia ?
-Pas de problème ...
Elle s'était plongée dans son parchemin, sa plume dans une main et son bol de café dans l'autre. Je me dépêchai de quitter la pièce, gênée comme tout. Pour une sœur qui prétendait peiner à l'être, elle n'hésitait pas à réemménager presque chez elle pour garder un œil sur Simon. Mais je saisissais tous les problèmes de Caroline liés à la situation : être l'aînée, mais savoir que la place d'héritier revenait au fils d'Edgar plus jeune de deux ans. Être une femme dans une lignée forte mais voir le cadet rafler les tableaux d'honneur. Même cette maison, songeai-je en effleurait les boiseries de la bibliothèque. Simon en était plus que l'héritier : il en était le propriétaire légal. Alors que Caroline était officiellement l'aînée de la fratrie. Le statut de Simon brouiller les lignes dans la famille.
Je poussai un soupir de frustration en sortant la machine à écrire de sa boite. Je ne voulais pas songer à Simon, au fait que je ne l'avais pas vu depuis deux jours et que l'évolution de notre relation me semblait depuis aussi brumeuse qu'un rêve. J'avais besoin de le voir, de le toucher, de me rappeler que c'était réel. J'étalai sur la table les feuillets que j'avais tapé depuis une semaine – le début ma partie sur le rejet sociologique et historique des technologies moldues. Octavia avait tenu à ce que ce soit moi qui le rédige : je l'avais conceptualisé de A à Z, sans la moindre documentation et il prenait un chapitre entier. J'avouais en être assez fière et je n'attendis pas l'arrivée d'Octavia pour me remettre à taper. J'aimais beaucoup la sensation des touches qui s'enfonçaient sous mes doigts et du bruit du marteau qui frappait le feuillet pour y imprimer mes pensées. C'était très primaire, très pur et presque enfantin – et ma fascination expliquait que j'avais mis plus de deux heures à taper la première page. Ça et mon manque d'adresse mais mes doigts se déliaient à mesure des mots. J'avais tapé un feuillet supplémentaire et la bande se remettait en place avec un « clic » jouissif quand Octavia passa la porte, son chapeau de sorcière dans la main.
-Désolée du retard, ma sœur est passée ... j'aurais dû lui dire de venir, elle était amie avec Caroline Bones ... Ouh. (Elle pointa la pile de feuillet que j'avais disposé à l'envers). Je peux lire ça ?
-Je t'en prie. Profites-en pour numéroter les pages, je n'ai pas réussi ...
-Formidable, murmura-t-elle en s'installant de l'autre côté de moi. Et quelle trouvaille ingénieuse cette machine, définitivement !
-Tu remercieras Simon. C'est son cadeau de noël.
Je sentis un sourire effleurer mes lèvres et je les tordis pour qu'il disparaisse. Il paraîtrait inexplicable aux yeux d'une Octavia qui venait de darder un regard intrigué sur moi.
-Vraiment ? Il s'est creusé la tête ... Bon sang, Bennett, je ne répèterais jamais à quel point tu es chanceuse ...
Ce fut un véritable supplice de réprimer le rire qui montait dans ma poitrine quand je me rappelais que Simon n'avait jamais aimé embrasser Octavia ... contrairement à moi. Je savais que mon air devait être peu naturel et je fis mine de chercher une référence dans un grimoire pour éviter d'avoir à affronter son regard. La situation était étrange, compte tenu du fait que j'appréciais de plus en plus Octavia qui se trouvait être l'ex-petite-amie de Simon ... Décidément, on ne faisait rien comme tout le monde.
-Mais en parlant de cet imbécile ... Tu as des nouvelles ?
-Des nouvelles ? répétai-je, toujours retranchée derrière mon livre.
-Oui, de son rencard le jour de la Saint-Valentin ... ça a été ? Il m'a enfin remplacé ?
-Oh !
Je m'apprêtai à abattre mon bouclier et le redressai à la dernière seconde pour masquer mon visage que je savais écarlate. Les images du soir de la Saint-Valentin me revinrent par flash jusqu'à ce que le visage de Simon se rapproche, centimètre par centimètre ... La chaleur de mon visage se diffusa jusque dans mon ventre et mon pied se mit à battre nerveusement contre le parquet.
-Je ne suis pas sûre que ça ait été concluant. Demande-lui quand il reviendra.
-Ah ça compte sur moi, se réjouit-elle en battant des mains.
-Et toi ? Ta fameuse Saint-Valentin ?
J'abaissai le livre de quelques centimètres pour laisser apparaître mon regard mutin. Ce fut à son tour de rougir et de se cacher derrière mes feuillets en feignant d'être absorbée par leur contenu.
-Hum, ça s'est bien passé ... Le restaurant était merveilleux, vraiment c'était un délice et Ulysse a été vraiment charmant ...
-Il est venu avec une centaine de roses ? Il t'a tenu toutes les portes et t'a répété à quel point tu étais sublime dans ta magnifique robe de fille parfaite ?
-Toi, il faut que tu arrêtes de trainer avec Simon Bones, chantonna-t-elle tranquillement. On s'y met ?
J'essuyai un petit rire et fermai enfin mon grimoire pour me remettre à taper. Je réussis à ensorceler mes parchemins pour qu'ils flottent devant moi et que je n'aie pas à toujours baisser la tête pour lire mes notes. Chaque feuillet fut scrupuleusement lu et numéroté par Octavia et lorsqu'elle arriva au dernier que j'avais tapé, elle laissa échapper une petite exclamation impressionnée.
-Hé bien ... Bennett, c'est brillant ...
-Vraiment ? doutai-je en levant les yeux de ma machine. J'avais l'impression d'improviser à chaque mot ...
-C'est ça d'écrire une théorie. C'est nouveau, évidemment que tu tâtonnes et c'est un premier jet ... Mais ... Je savais que tu avais une belle capacité d'analyse, mais je trouve que tu t'es affinée depuis l'année dernière. C'est beaucoup plus carré, beaucoup mieux conceptualisé ...
-Ça c'est parce que je te fréquente beaucoup trop, toi et ton travail incroyablement technique. Et aussi parce que tu as glissé tes connexions dans mes notes.
-Tu as raison, heureusement que je suis là pour ramener de la cohérence à ce projet, plaisanta-t-elle avant de reprendre une mine plus sérieuse. Mais vraiment, Bennett, tu as eu une belle idée. On devrait presque en faire une partie ...
-Il nous faudrait plus de documentation pour ça, juste ma théorie c'est assez léger ...
-Je sais. Râh, je déteste Simon ! Qu'il emballe son Adrianne, qu'elle nous laisse la clef des archives !
J'ouvris de grands yeux qui firent rire Octavia de bon cœur. Elle se méprit évidemment sur les causes de mon choc et se mit à annoter ses propres parties. Nous avions convenues de tout taper à la machine pour que les feuillets soient uniformes, faciles à lire et modernes. La forme était en accord avec le fond : nous avions à apprendre des moldus. Ils nous enrichissaient, contrairement à ce que voulait faire croire Voldemort et ses idées sur l'appauvrissement du sang des sorciers. J'avais presque fini la rédaction de mon chapitre quand une chouette frappa sur la fenêtre derrière Octavia. Elle se leva souplement pour lui ouvrir et l'oiseau entra en un froissement d'aile pour me tendre sa patte. Le parchemin, maladroitement plié, était à mon nom. Je le détachai avec un soupir qui se coinça vite dans ma gorge et faillit m'étrangler.
Des nouvelles de notre escroc domestique. Rejoins-moi à la boutique le plus vite que possible. G.
-Octavia ? Tu veux taper un peu ?
Un sourire incertain s'étira sur ses lèvres et elle contempla la machine comme s'il s'agissait d'une relique précieuse.
-Vraiment ?
-Vraiment, assurai-je en me levant. Le hibou vient de la direction du club, ils ont besoin d'un papier d'aptitude pour le prochain match, j'ai complétement zappé ... De toute manière, on ne peut pas être deux sur cette machine.
-Non, c'est sûr, admit-t-elle et elle la tira vers elle lentement, du bout des doigts. Bon bah ... je te raconterais comment s'est passé le rencard de Simon ...
-C'est ça, commentai-je distraitement. Merci, à la semaine prochaine !
Je sentis la brûlure du regard surpris d'Octavia alors que je fuyais vers la porte, abandonnant derrière moi parchemins et sac à dos. Celui de Caroline fut tout aussi déconcertée lorsque je traversais la cuisine pour atteindre la porte qui menait au jardin dans lequel j'avais l'habitude de transplaner. Ce fut ainsi que je heurtais Simon qui venait de poser le pied sur le perron. Les parchemins qu'il tenait sous le bras jonchèrent le sol et il me jeta un regard exaspéré.
-Vicky !
-Désolée, bredouillai-je, déboussolée. Euh ... ça va ?
Les yeux de Simon papillonnèrent et je me maudis intérieurement. Non seulement je devais me hâter mais en plus c'était l'une des phrases les plus stupides qui m'avait été donnée de prononcer devant lui. Ma gêne devait être palpable parce qu'un sourire amusé s'étira sur ses lèvres.
-Tu vas l'avoir souvent cette couleur de joue ? Genre ce rouge-là ?
-Caroline est juste derrière alors arrête, maugréai-je entre mes dents.
-Non parce que c'est magnifique, vraiment très drôle. Proche du vermillon.
-Rôh ... !
Je le dépassai souplement sans même prendre le temps d'esquisser un geste envers lui – mais il fallait dire que j'étais persuadée que Caroline nous épiait depuis la fenêtre. Simon m'arrêta par le bras en s'esclaffant.
-Où tu vas ? Je te fais fuir ?
-Non, j'ai juste ... une urgence.
Quelque chose dans mon ton fit perdre son sourire à Simon et sa prise sur mon bras se raffermit. Il descendit d'une marche pour se pencher vers moi et chuchoter :
-Une urgence ?
-Simon, soupirai-je en jetant un regard anxieux à la fenêtre. Tu as reçu les mêmes consignes que moi, non ?
Ses lèvres se pincèrent mais je sentais qu'il me concédait ce point. Cloisonner l'information, c'était le maître mot dans l'Ordre du phénix, Tonks me l'avait assez martelé – et Podmore encore plus. Je posai une main rassurante sur mon épaule.
-On se voit après. De toute façon, j'ai laissé Octavia seule chez toi, il faudrait sans doute que je repasse.
-Je vais voir Bill après, ça fait une semaine que je ne suis plus passé là-bas, murmura-t-il, contrarié. Avec Caroline qui rôde, c'est une calamité : elle a carrément emménagé ici, c'est insupportable !
-Alors je viendrais te rendre la vie encore plus insupportable ce soir si tu veux. A toute !
Je lui adressai un dernier sourire et retirai me détachai de sa prise avant qu'elle ne devienne trop intense et qu'il ne me retienne chez lui de force – ou que je cède et finisse par rester avec lui, à continuer de le toucher, de parler et d'explorer la nouvelle relation qui s'ouvrait à nous. J'étais déjà rassurée par ce bref échange, sa simplicité, le sourire initial de Simon, à la fois complice, cynique et incertain. Je n'avais rien rêvé et nous évoluions bel et bien. Alors ce fut soulagée que je dévalais le reste des marches tout en sentant son regard derrière moi. Je courus presque jusqu'à ce que je sente que les entraves qui saucissonnaient ma magie s'envole et la laissai m'emporter au loin.
***
George tenait la caisse de son magasin lorsque j'arrivais, essoufflée par ma course et par la lutte que j'avais dû mener pour atteindre le meuble. La queue s'étirait sur plusieurs mètres et je vis plusieurs clients me jeter un regard haineux quand je m'écroulais contre le comptoir.
-Ah mais quelle efficacité ! se réjouit George en retirant immédiatement son chapeau magenta qui jurait affreusement avec le roux de ses cheveux. C'est pour ça que je t'apprécie, Bennett ! Verity ! Verity, viens me remplacer, je dois m'absenter !
-Toi, tu es d'une discrétion toute épreuve, marmonnai-je.
Le visage de George s'empourpra et il jeta un regard de bête traquée autour de lui avant de m'inviter à le suivre dans son arrière-boutique. Il en alluma les lumières d'un coup de baguette et retira la robe de sorcière magenta pour découvrir des vêtements de moldus – un simple jean et un tee-shirt. C'était la première fois que je voyais George Weasley accoutré de la sorte et cela me causa un tel choc que je m'immobilisai brusquement, les yeux écarquillés. Loin de me remarquer, George babillait tranquillement :
-C'est parfait que tu sois venue si vite ! Ce matin j'avais rendez-vous avec mon fournisseur en corne d'éruptif – très dangereux et très difficile à trouver, ça peut servir d'explosif et dans le contexte actuel Scrimegeour en a interdit la vente ... Bref, on est obligé d'en acheter au marché noir pour certains de nos produits et c'est en trainant les oreilles ... Bennett !
Il avait atteint le fond de son arrière-boutique et s'était retourné pour remarquer que j'évoluais au ralenti entre les tonnes de cartons, trois chaudrons dont un diffusait une vapeur d'œuf pourri devant laquelle je m'étranglais. Il poussa un profond soupir quand je le rejoignis enfin au petit trot.
-Pas trop tôt, il faut qu'on se dépêche. Bref, tout ça pour dire que j'ai entendu que Ding se cacherait en ce moment à Swansea.
-Au Pays de Galles, réalisai-je en me souvenant de notre échec dans les prairies vertes. Et ce n'est pas loin de là où on était ... Où ça à Swansea ?
Un sourire satisfait dévoila les dents de George. Sa canine gauche était mal alignée sur le reste de sa dentition et c'était perturbant.
-Le mieux dans tout ça, c'est qu'il devait de l'argent à mon fournisseur qui s'est empressé de demander l'adresse. Prête pour un transplanage d'escorte, Bennett ?
-Attends. On n'attend pas Tonks ? Ou Podmore ?
-On n'a pas le temps, trancha George en ouvrant sa porte. Alors Bennett ?
Il me tendit la main, mais j'hésitais. Mondingus Fletcher échappait à l'Ordre depuis des semaines malgré les commentaires désobligeant que j'entendais à son propos – ça avait l'air d'être un sorcier parfaitement à ma portée. Mais c'était une véritable anguille et j'ignorais ce que vous allions trouver dans cet entrepôt. Cependant, George semblait confiant et nous piétinions dans notre mission alors je hochai la tête et sortis ma baguette pour être prête. George prit alors mon bras, nous fit sortir devant la courée qui bordait l'arrière-boutique et transplana.
Lorsque je mis de nouveau le pied sur terre, nous étions devant un vieux bâtiment industriel battu par la pluie glacée. Je rabattis précipitamment ma capuche sur ma tête mais il était trop tard : elle comme mes cheveux étaient trempés. Incroyable comme le temps variait de part et d'autre du Canal de Bristol. George me tapota l'épaule et s'en fut immédiatement ouvrir la porte. Je prestai contre son impatience et tentai de le rattraper mais il disparut immédiatement dans le couloir sur lequel elle s'ouvrait. Je le suivis sans attendre, paniquée à l'idée qu'il me sème et entrai à mon tour dans un sinistre hall. Je fronçai du nez, dégoûtée par l'odeur d'urine et de tabac qui s'en dégageait.
-George !
-C'est au deuxième étage !
-Est-ce que tu as l'ébauche d'un plan, au moins ?
George partit d'un petit rire. Il n'avait même pas sorti sa baguette.
-Avec Ding ? Inutile. J'ai travaillé avec lui, je le connais. Je saurais gérer.
Alors pourquoi tu m'as demandé de venir ? songeai-je amèrement alors qu'il prenait l'escalier, les mains dans les poches de son jean et sifflotant joyeusement. Son insouciance me déconcertait et je me dépêchai de grimper le vieil escalier en béton nu pour le rattraper et protéger ses arrières. Il s'essouffla vite – difficile de garder la forme quand on ne faisait plus de Quidditch régulièrement – et je pus le dépasser en deux enjambées. Le deuxième étage était tout aussi lugubre que le Hall, l'odeur d'urine en moins et était éclairé par une toute petite fenêtre en bout de couloir.
-Le numéro 3, me souffla George quand j'avançais de quelques pas. Laisse-moi me montrer, à moi il m'ouvrira ...
-Pas s'il pense que tu es un Mangemort, rétorquai-je, exaspérée. Ou pire, Fol Œil !
Mais George secoua tranquillement la tête, un sourire désabusé aux lèvres et frappa avec confiance la porte sous le numéro 3. Je me plaquai contre le mur et attendis qu'une voix grogne de l'autre côté de la paroi :
-Qui est là ?
-Viens ouvrir, vieille canaille.
Il ne se fit pas attendre et la porte s'ouvrir à la volée, apportant avec elle une odeur accrue de tabac, de souffre et de brûlé. Presque suffocante, je nichai mon nez dans le col de ma cape et serrai ma baguette entre mes doigts, invisible aux yeux de l'occupant plaquée comme je l'étais. Très à l'aise, George ouvrit les bras, comme pour accueillir un vieux frère.
-Ding ! Quel plaisir incroyable de revoir ta vieille tête d'alcoolique.
-T'es lequel, toi ? Et il est où ton double ?
-Tu ne vérifies même pas si je peux être l'un desquels ?
Le long silence qui s'en suivit laissa largement entendre que Mondingus réfléchissait à la signification obscure de la question de George. Celui-ci finit par s'en lasser et trancha :
-George, tu nous as vendu des œufs de doxys pourris cet été et je t'ai obligé à me rembourser.
-Les affaires vont mal, petit, je fais de mon mieux pour survivre ...
La voix était lente, prudente et je l'entendais se trémousser d'un pied à l'autre sur le sol grinçant.
-Qui t'envoie, mon gars ? Ton père ? Lupin ? Fol Œil ? Je rentre pas, moi, j'ai prévenu Pod la dernière fois face au dragon. Trop dangereux. Les gars qui sont morts dans l'entrepôt, j'les connaissais.
Le sourire de George s'estompa légèrement face à ce brusque rappel de l'attaque qu'il avait subi en novembre dernier. Dans le trouble, il fit une erreur et glissa un regard vers moi avant de se fixer à nouveau sur Fletcher. C'était bref, mais l'escroc l'avait perçu car il cingla immédiatement :
-Qui est avec toi ?
-Quoi ? sursauta George en reculant d'un pas. Juste ...
-Bon sang, Weasley !
George n'eut pas le temps de tirer sa baguette qu'un bruit d'explosion émanait de l'intérieur de la pièce et le souffla pour le projeter contre le mur d'en face. Il tomba sur le sol comme une marionnette désarticulée et la porte commença à se refermer. Mu par un très stupide instinct, je coinçai mon pied dans l'ouverture et il se retrouva violemment heurter par le battant. Je ne pus retenir un cri et évacuai la douleur en donnant un coup d'épaule sur la porte. Je m'attendais à une résistance mais je fus au contraire emportée par mon élan et faillis m'étaler de tout mon long sur le lino crasseux de l'appartement. Je repris mon équilibre au moment où un éclair rouge fusait vers moi : je l'esquivai d'un vif mouvement de hanche qui me propulsa devant un homme roux et court sur patte, au regard vide et à l'haleine aux effluves d'alcool et de tabac. Il faisait peine à voir mais il tenait sa baguette fermement. Un nouvel éclair de stupéfixion jaillit de sa baguette mais cette fois je pus parer d'un bouclier puis tenter un sortilège de désarmement. Fletcher esquiva d'un mouvement étonnement souple compte tenu de sa corpulence. Il se retrancha derrière une pile de carton. Je n'avais pas pris le temps d'étudier mon environnement mais maintenant que j'avais une seconde, je constatai que ça tenait plus de l'entrepôt clandestin que de l'appartement. Seules les bouteilles vides et le vieux sofa muni d'une couverture trahissait sa fonction d'habitation, mais le reste de l'espace était occupé par des bocaux, tonneaux et cartons de toutes sortes et de toutes senteurs. Au plafond, je reconnus de longs poils de licornes qui séchaient à côté de feuilles de mandragore. Un véritable atelier de clandestin.
Fletcher restait retranché derrière sa pile de carton, son œil vitreux brillant dans un trou planté sur moi. Il n'attaquait pas et attendait sans doute que je vienne le débusquer. Manque de chance, je n'étais pas de celle-là. Moi aussi je faisais le dos rond en attendant. J'abaissai ma baguette d'un demi-centimètre, le souffle court et la douleur se diffusant dans mon pied. Je déportai mon poids sur l'autre en grimaçant.
-Bon, on est dans le même camp, tentai-je sans trop savoir ce que je faisais. Est-ce qu'on pourrait se parler au lieu de se battre ?
-Toi j'te connais pas, rétorqua sèchement Fletcher. Tu pourrais aussi bien être l'un des leurs ...
-Navrée, mais ils n'acceptent pas de nés-moldu dans leurs rangs.
L'œil visible de Fletcher se plissa. Il paraissait réfléchir assez pour que j'abaisse encore ma garde d'un petit centimètre. Un centimètre de trop : très soudainement, la pile carton vacilla et ils me tombèrent dessus avec fracas. Avec un cri de surprise, je m'accroupis, les bras croisés au-dessus de la tête, à peine assez concentrée pour invoquer un bouclier. Je me pris le coin de l'un d'entre eux sur la tempe avant qu'il ne se déploie et repousse les autres pendant que Fletcher filait vers la sortie. Ensevelie sous les cartons dont certains commençaient à dangereusement fumer, je tentai un sortilège de stupéfixion qui alla se fracasser sur le miroir cassé, juste au-dessus de l'épaule de l'escroc. Le cadre déséquilibré lui tomba dessus et Fletcher trébucha avec un cri de surprise, se prit les pieds dans un riche tapis roulé et s'étala de tout son long. Le carton, lourd et malodorant, qui bloquait ma jambe commençait à me la brûler et je dédaignai Fletcher pour lui jeter un regard inquiet. Il était solidement fermé par du scotch mais il s'échappait de ses quatre coins une fumée jaune qui prenait de plus en plus d'épaisseur. Je la fixai, tétanisée avant d'échanger un regard avec Fletcher. Il s'était figé en remarquant la fumée.
-Sauve qui peut ! s'écria-t-il en se relevant précipitamment.
Il ne s'inquiéta pas de moi lorsque la boite se mit à siffler et que la brûlure devint insupportable sur ma jambe. Je tentai de m'en extraire mais le carton était lourd et brûlant. J'y appuyai mon pied douloureux et donnai un grand coup sans qu'il ne daigne bouger, bloqué par d'autres tombés avec lui autour de moi. A côté, Fletcher avait maladroitement atteint la porte mais au moment sa tentative de fuite fut brisée dans l'œuf.
-Incarcerem !
Des centaines de cordelettes jaillirent du couloir pour solidement l'entraver et Fletcher sautilla deux sauts avant de chuter la tête dans ses splendides tapis. George mit alors la main sur l'embrassure, l'air déboussolé mais un sourire triomphant sur le visage.
-Ah ah !
-Merveilleux ! raillai-je, essoufflée. Viens me sortir de là, maintenant !
Le carton sifflait à présent comme une bouilloire prête à exploser et la fumée jaune me faisait suffoquer et perdre en lucidité. J'étais en train de me débattre pour un peu air quand deux bras me saisirent fermement par les aisselles et me tirèrent en arrière. Je poussai un cri de douleur quand le carton fut trainé avec moi et levai maladroitement ma baguette pour crier :
-Expulso !
Le carton fut projeté contre le mur d'en face et George tomba lorsque son poids cessa de me retenir. Nous fixâmes d'un air horrifié sa fumée devenir d'un rouge semblable aux flammes d'un dragon. Je venais de comprendre pourquoi je m'étais échiné à oublier la magie pour me dégager. Parfois, la magie empirait les choses. George me releva précipitamment et passa un bras autour de ma taille. Il me traina presque jusque la porte et je grimaçai de douleur. Ma jambe brûlée refusait de m'obéir et mon pied douloureux peinait à soutenir mon poids.
-Aïe !
-Tiens bon Bennett ! Locomotor corpus !
La silhouette saucissonnée de Fletcher qui s'agitait comme un asticot fut soulevée dans les airs et George donna un vif coup de baguette pour qu'elle passe par la porte. Le bruit sourd qui nous parvint à travers les sifflements de plus en plus sonores du carton nous indiqua qu'il avait probablement heurté le mur d'en face dans son élan. George ne fut pas plus délicat avec moi et me jeta presque à travers l'embrassure avant de fermer la porte derrière lui. J'atterris sur le sol avec un cri de douleur et au moment où le battant claquait, le bruit d'une explosion suivi de vibration et d'une forte odeur de soufre emplirent l'espace. Je me retournai vivement vers George, horrifiée. Il avait toujours les mains sur la poignée et contemplait le battant fumant à moitié sorti de ses gongs avec une stupeur. Je me penchai pour apercevoir l'intérieur. Les rideaux brûlaient devant la fenêtre ainsi que les tapis luxueux et l'ensemble des matériaux inflammables de la pièce. Sur le pallier, des curieux commençaient à ouvrir leur porte – et si j'en jugeais par le hurlement des télévisions qui se diffusait depuis les intérieurs des appartements, ils étaient tous moldus.
Epuisée et meurtrie, je laissai ma tête aller contre la moquette rêche et usé jusque la corde du couloir. Se faisant, je croisai le regard de Fletcher visible par-dessus son bâillon, étrangement triomphant compte tenu du chaos qui régnait. Un regard qui disait très clairement « débrouillez-vous avec ça, maintenant ! »
***
-Vous êtes des imbéciles.
Fol Œil faisait les cent pas devant nous, sa jambe de bois claquant à intervalle réguliers comme une sentence définitive. Assis sur deux chaises devant lui, George et moi le fixions du regard, lui et ses allés-venus, incapable d'ouvrir la bouche. Mon jean avait été déchiré jusque mon genou pour pouvoir appliquer une pâte qui embaumait l'anis mais qui apaisait incroyablement bien la brûlure. C'était Podmore qui me l'avait appliqué avant de venir se planter derrière Maugrey, ses bras musculeux croisés sur sa poitrine. Dans un coin de la pièce, Fletcher continuait de s'agiter comme une anguille hors de l'eau. Personne ne se souciait de le détacher.
-Des imbéciles, répéta Maugrey, fulminant. Vous vous êtes foutus dans de beaux draps ...
-On a géré, on a oublietté tous les moldus, protesta George.
-Seulement ceux de l'étage, murmurai-je, défaitiste. Pas deux de l'immeuble, ni les passants ... -Ni ceux qui découvriront l'appartement calciné, poursuivit Podmore d'un ton sévère. Et encore moins les membres du Ministère qui dépêcheront nécessairement des délégués devant une explosion suspecte. Ils auront trop peur que ça soupçonne une activité de Mangemort.
-Ce qui veut dire que je vais devoir trainer mes fesses jusqu'au bureau des Aurors pour expliquer ça à Robards, s'écria Maugrey en plantant sur nous ses deux yeux furieux. Pour lui dire que mes gamins ne savent pas faire les choses proprement !
-On n'était pas censé savoir qu'il y aurait des explosifs !
-C'est chez Ding, évidemment qu'il y avait des explosifs, crétin ! grogna Podmore.
Je me massai discrètement la tempe devant l'éclat de leurs voix. Ma tête bourdonnait encore de l'explosion. Je n'en revenais pas d'être à l'origine d'un tel chaos, et tout ça pour ramener au bercail un homme qui était censé appartenir à notre camp ... Des efforts qui me paraissaient futiles et ça faisait pulser dans mes veines une colère sourde qui n'atténuait en rien mon mal de tête.
-Donc vous nous grillez aux yeux du Ministère et peut-être même aux yeux des Mangemorts qui surveillent eux aussi ce genre d'événements suspects, vous détruisez le stock aussi couteux qu'utile de Ding mais je vous félicite, vous nous avez ramené la loque, résuma Maugrey d'un ton débordant d'ironie.
Il donna un petit coup de pied dans la jambe de Fletcher qui lui jeta un regard outré en se tortillant de plus belle.
-Vous savez ce qu'il avait dans doute dans ses affaires, la sale petite fouine ? murmura Maugrey, son œil valide planté sur l'escroc. Quelques affaires à moi qu'il a pensé à voler pendant sa razzia au QG. Ma glace à l'ennemi. Ma malle magique. Tu pensais que tout ça appartenait aux Black, c'est ça Ding ? Et que tu avais des droits dessus ?
Fletcher se contenta de le fixer, le souffle court. Difficile de savoir s'il tremblait ou si le manque de souffle le faisait suffoquer. L'œil de Maugrey était impitoyable.
-C'est de moi que tu te cachais. Tu m'as volé, tu as trahi l'Ordre. Tout ça pour que deux gamins te brûlent ton butin. Une belle morale, n'est-ce pas Pod ?
-Le vol ne paie pas, cita laconiquement Podmore. Amen.
Un sourire sinistre s'étira sur les lèvres de Maugrey. Il s'appuya contre l'antique bibliothèque, ses mains refermées sur le pommeau de sa canne, à fixer Fletcher comme s'il allait le transformer en fouine.
-Mais tous les rats ont leur utilité. Et on a besoin de toi, Ding – comme tu as besoin de nous. Tu sais le nombre de personne qui te cherchaient parce que tu leur devais de l'argent ?
-Décidément, tu te cachais de beaucoup de gens, ricana Podmore.
-Ah. Faisons donc cela. On essuie tes dettes, et je vais faire semblant de te pardonner. A condition que tu utilises ton réseau pour me retrouver les objets que tu as volé ou que tu me répares ce qui est réparable. Tu peux faire ça pour moi Ding ?
Fletcher se dépêcha d'acquiescer avec force et s'en cogna la tête contre les plinthes. Podmore s'avança et enchaina :
-Et on a besoin de tes lumières sur une affaire. On veut ta collaboration pleine et entière, sans condition ni restriction. Ça aussi tu peux le faire Ding ?
De nouveau, il hocha la tête et Podmore échangea un regard avec Maugrey. D'un mouvement souple de baguette, celui-ci libéra Fletcher : les liens se coupèrent en une ligne parfaite et s'affaissèrent sur le sol pendant que l'escroc bondissait sur ses genoux, hors d'haleine.
-Enfin ! Bande de pourris ! Sales gosses ! Comme voulez-vous que j'aide ? Ma baguette a brûlé avec le reste.
Maugrey nous jeta un regard agacé et je me recroquevillais sur ma chaise. A côté de moi, George venait de lever les yeux au ciel dans un geste somptueusement exaspéré et bascula la tête en arrière avec un soupir.
-Je me charge des gamins. Toi avec Pod. On a peut-être de quoi dépanner.
-Allez, lève-toi, grogna Podmore en hissant Fletcher d'un bras par le col. Et par Merlin on va passer par la case douche, tu empestes !
-J'te permets pas ! Tu te souviens de ton état quand tu es revenu d'Azkaban ?
Il en fut quitte pour être malencontreusement envoyé contre le mur du bureau. Face à son gémissement, Podmore esquissa un ricanement et ouvrit la porte. Son ricanement se transforma en véritable rire et il tourna la tête vers nous.
-Hé, vous avez un comité d'accueil !
-Oh non, soupirâmes George et moi en chœur.
Je vrillai une main sur mon visage, épuisée d'avance. Il était parfaitement vraisemblable que Simon soit au QG, il y passait régulièrement ses fins de matinée le samedi, voire la journée. Je jetai un coup d'œil à la jambe tendue devant moi, couverte de pâte verte et mal épilée. Cette dernière constatation faillit arracher une belle flambée sur mes joues.
-Si c'est Bones, dis-lui de rester dans le coin, ordonna Maugrey, confirmant ainsi mon intuition. Il faut que je lui dise deux mots après leur avoir réglé leur compte. Après je lui laisse les miettes de Bennett.
-Alors là, marmonnai-je dans ma main.
L'œil mécanique de Maugrey se vrilla sur moi et j'avalai ma langue. Je glissai un regard inquiet sur la porte que Podmore venait de refermer sur lui avant de me concentrer de nouveau sur l'ancien Auror. Il s'était assis derrière l'imposant bureau d'ébène et consultait de son œil valide un rouleau de parchemin sur lequel s'étendait une colonne de chiffre.
-Avec ces conneries, je vais avoir besoin de liquidité ...
-Bones ? devina George, dubitatif. Il est encore étudiant, qu'est-ce que vous voulez qu'il vous donne ?
Maugrey se fendit d'un ricanement cynique.
-Tu penses qu'on l'a pris pour ses beaux yeux ? C'est un héritier, sa chambre de forte est parmi les plus remplies de Gringrotts ...
-Ce n'est pas le propos, le coupai-je sèchement.
Cette allusion ouverte au véritable statut de Simon me hérissait les poils et je lorgnai l'espace d'une seconde l'expression de George pour être sûre qu'il ne soupçonne pas ce qui se cachait derrière le mot « héritier ». Mais ce que je récoltais, ce fut son regard agacé. Je recentrais la discussion sur nous.
-C'est vrai, admit Maugrey sans quitter le parchemin des yeux. Vous avez quoi à dire pour votre défense ?
-Il fallait qu'on trouve Ding, rappela George avec aigreur. Ça fait des semaines qu'on piétine, la seule chose qu'on sait de Barjow et Beurk c'est que leur commis va mourir d'un cancer du poumon ! Il fallait qu'on avance, qu'on fasse quelque chose, il y en a marre de faire le pied-de-grue dans l'allée des Embrumes en espérant que quelque chose se passe !
Maugrey garda son œil valide sur le parchemin mais darda le mécanique sur George. L'effet était si perturbant que je me trouvais une passion soudaine pour le plafond lambrissé.
-Alors c'est pour ça que tu t'es gardé de parler de ta piste à Podmore qui pourtant était présent au QG ?
-J'ai prévenu Bennett.
Je ne quittais pas le plafond des yeux, mais je sentis le silence se tendre et s'épaissir autour de moi. Mes doigts tripotèrent nerveusement ma montre.
-Le principe de vous mettre en binôme, c'est justement d'éviter ça, Weasley. Que vous fassiez vos coups foireux en solitaire.
-Alors c'est ça, ragea George. Vous ne nous faites pas confiance !
-Non, et on a raison ! Tu vois ce que vous avez provoqué ? Sans vous soucier des conséquences ? Juste pour ramener Ding au bercail ? Qu'est-ce que ce sera face aux Mangemorts si pour ramener Mondingus Fletcher vous faites exploser un appartement !
C'était douloureux comme constat, mais je n'avais pas besoin de Maugrey pour le faire. J'avais eu conscience dès que j'avais lancé mon premier sort d'oubli sur un vieil homme qui ressemblait étrangement à mon grand-père Benedict. Je n'avais jamais travaillé cet enchantement et depuis j'étais hantée par mon dosage. Et s'il avait été inefficace ? Ou pire, si j'avais causé des dommages irréversibles ?
Mais visiblement, George n'avait pas la même vision que moi. Il se leva d'un bond et je fus surprise par l'expression de son visage : fermée, les traits tendus par la colère et sans l'ombre d'un sourire sur les lèvres. C'était la première fois que je voyais l'un des jumeaux si furieux – et pourtant je les avais vu enfermer Graham Montague dans une penderie.
-Alors quoi, on aurait dû continuer de surveiller la boutique jusqu'à ce que mort s'en suive ?
-Tu aurais dû parler de ton tuyau à Pod ! Allez le chercher lui, pas Bennett ! Podmore est là à plein temps pour l'Ordre, il n'a que ça à faire ; Bennett est en seconde ligne, là par intermittence ! Ce n'est pas elle sur qui tu dois compter !
Je me sentis hausser brièvement les sourcils devant la phrase un brin dévalorisante pour moi mais restai coite. Je pensais toujours à la mémoire du pauvre homme et à la baguette de Fletcher. Ollivander était toujours porté disparu : comment retrouverait-il une baguette ?
-Elle s'est très bien débrouillée ! me défendit George.
-Je te l'accorde. Ce n'était pas elle le problème dans cette affaire c'était toi. Tu es impulsif, Weasley et tu cherches à te prouver que tu n'as peur de rien. Dis-moi, mon grand : tu as eu peur devant les Détraqueurs ?
Le visage de George se décomposa complétement et Maugrey esquissa un sourire sadique.
-C'est bien ce que je pensais. Tu as découvert la vraie vie là-bas, Weasley. Tu t'es senti vulnérable et tu essaies de prouver que ce n'est pas le cas. Ce n'est pas en jouant à la tête brûlée que tu nous prouveras que tu es un homme.
-Ce n'est pas ça ! s'exclama George, la mâchoire contractée. Mais je me suis pas engagé pour ...
-Pour quoi ? Surveiller les boutiques, faire des heures de surveillance, s'attaquer aux amis ? Et si, c'est notre job !
-Non ! C'est le job que vous nous donnez parce qu'on est jeune ! C'est du bizutage !
Maugrey frappa du poing sur la table et toute la pièce trembla, moi compris. J'avais conscience d'être coupablement silencieuse et je sentais les regards de plus en plus insistants que George glissait vers moi. Il s'attendait sans doute à ce que je prenne sa défense comme lui avait pris la mienne mais la vérité c'était que j'approuvais chacun des mots de Maugrey. Et ça ne m'avait pas empêché de suivre George.
-Pour qui tu te prends, gamin ? persiffla Fol Œil, les deux yeux braqués sur lui. Tu te penses l'étoffe de tes oncles, peut-être ? Cinq Mangemorts pour les abattre mais ils en sont morts, petit, morts ! Si c'est la gloire que tu veux c'est exactement comme ça que tu vas finir : dans un cimetière ! Tu penses que tu m'as donné envie de te faire confiance, de te confier des tâches plus dangereuses, plus grave ? Mais regarde-toi !
Le vieil homme et le jeune adulte se défièrent quelques secondes du regard. Je me sentais engloutie au milieu de toute cette tension et cette électricité.
-Tu étais déjà sur une mission importante, rappela Maugrey avec sévérité. Ce qui se passe dans cette boutique, ce n'est certainement pas un bal de Mangemort : c'était du sérieux. Ton bizutage, comme tu le dis, était absolument essentiel. Si tu prenais la peine de t'intéresser aux recherches, tu apprendrais que Tonks a appris que Barjow reçoit quotidiennement des liquidités – et des menaces. Pas plus tard qu'hier, Bellatrix Lestrange en personne s'est présentée devant sa boutique. Alors, il est comment le bizutage ?
George ne répondit rien et garda les dents serrées. J'avais l'impression que tout son être s'était vidée de l'adolescent facétieux que j'avais connu à Poudlard et l'idée me donnait envie de pleurer. Maugrey se rassit derrière son bureau et se désintéressa de George devant lui. Peu lui importait de remporter le duel visuel.
-Maintenant, dégage. Je dois dire deux mots à Bennett.
Un tic nerveux agita la joue de George et il n'attendit pas pour faire rapidement volte-face, non sans me lancer d'un ton hargneux :
-Merci du coup de main.
Je fermai les yeux, le cœur lourd alors qu'il quittait la pièce à grand-pas et claquait violemment la porte derrière lui. Je savais que mon silence l'avait pesé autant que les mots de Maugrey mais rien ne m'était venu à l'idée pour le défendre. L'ancien Auror ne m'accordait pas le moindre regard et s'était muni d'une plume pour commencer ses calculs.
-Tu as compris, pas vrai ? Et tu n'as pas eu besoin de moi.
-Non, avouai-je du bout des lèvres. Non, ça m'a semblé ... foireux, dès le départ.
-Alors pourquoi tu as suivi George ?
Je tripotai le bouton de ma montre et décrassai les runes encastrées dans le cadran. Je n'avais jamais songé à les traduire. Celle de gauche signifiait « patiente », j'en étais presque certaine.
-Je n'en sais rien. Il a raison : on patine depuis des semaines, notamment parce qu'on avait besoin de Fletcher. Alors quand il m'a demandé de l'aider, je n'ai pas hésité. J'aurais dû faire quoi, le laisser y aller seul ?
-Non, il aurait sans doute fait pire que mieux, marmonna Maugrey sans cesser de gribouiller. Mais tu n'as pas cherché à prévenir Tonks ou Pod ?
-Tonks travaillait, je le savais. Et Podmore ... (Mes lèvres se pincèrent). Je suis désolée, non ... On devait se presser.
Maugrey cessa d'écrire pour me jeter un long regard pensif. La lueur blafarde des torches se reflétait dans ses cheveux gris pour en arracher des éclats argenté dignes de Dumbledore.
-Je ne sais même pas si je dois t'en vouloir, soupira-t-il, amer. C'est le problème lorsqu'on remplit l'Ordre de membre de seconde ligne – ceux qui ont une activité à côté, qui ne peuvent être là que par période, ponctuellement ... Ce n'est pas le cas de Weasley, il se dégage énormément de temps pour l'Ordre, mais toi tu as ta propre vie à gérer – et il faut que tu la gères, un jour elle pourrait nous être utile. Mais compte-tenu de cela, est-ce que je peux vraiment t'en vouloir de ne pas agir quand tu as l'occasion de le faire ?
Il enroula le parchemin devant lui sur lui-même sans me lâcher du regard.
-Ce n'était pas propre, comme intervention. En plus des conséquences que l'on sait, tu finis blessée. Mais ce n'est pas le pire, dans tout ça. Tu le savais que c'était une mauvaise idée de partir seuls à l'aventure, pas vrai ?
Après quelques instants d'hésitation, je hochai la tête. Les intuitions et les capacités d'analyse de Maugrey m'époustouflaient et en un sens je me retrouvais un peu dans cet esprit psychologique. Il soupira.
-Il faut prendre confiance, Bennett. Prendre confiance pour tenir tête à Weasley. Prendre confiance pour pouvoir partir à l'aventure seule. Parce qu'un jour, tu seras seule et il faudra te débrouiller pour rentrer entière ici. Je ne veux pas avoir Bones sur le dos parce qu'il te sera arrivé quelque chose. J'ai déjà donné avec Edgar la fois où Cassie est rentrée de mission avec la jambe cassée alors qu'elle venait de tomber enceinte.
-Il va falloir arrêter avec ça, rétorquai-je immédiatement. Simon n'est pas prêt d'assumer avec tout le monde, ne le forcez pas. Laissez-moi gérer ce dossier.
Maugrey secoua lentement la tête d'un air désabusé.
-Ah, Bennett ... Si seulement tu avais la même assurance avec tout le monde que tu en as avec ce garçon.
Etrangement, la première image qui me vint à l'esprit fut le baiser que vous avions échangé dans le parc et je sentis mon visage s'empourprer. Mon malaise était accentué par la remarque de Maugrey qui nous renvoyait à une image de couple qui m'était toujours inconfortable. Comme si nous étions Cassiopée et Edgar réincarnés à ses yeux, agencés de manière différente. C'était hautement désagréable. Un sombre sourire retroussa les lèvres fines de Maugrey.
-Mais Remus dit qu'il y a du mieux, il y a donc des motifs d'espoir. Range tes griffes, Bennett, je le laisserais tranquille. Tu veux aller le rejoindre et quand il en aura fini avec toi, dis-lui de passer me voir. L'argent des Croupton dort depuis trop longtemps.
-A vos ordres, marmonnai-je en me levant prudemment.
Maugrey daigna à peine sourire et se replongea dans ses comptes sans attendre. En temps ordinaires, ils étaient tenus par un certain Elphias Doge qui avait malheureusement été envoyé à l'étranger. Je sortis en trainant ma jambe derrière moi et débouchai d'un pas prudent dans le salon. Les éclats de voix me firent rapidement reculer dans l'ombre : George et Fred, en robe magenta de la boutique, faisaient face à leur frère aîné Bill qui s'agitait devant eux avec de grands gestes.
-... Vous avez prévenus ! Attendez que maman l'apprenne ...
-Arrête de mettre maman sur la table, on n'est plus des gosses !
-Vous vous comportez comme tel !
-C'est comme ça depuis dix minutes.
Je sursautai en entendant la voix derrière moi et m'appuyai instinctivement sur ma jambe blessée. Je poussai un gémissement de douleur et un bras fut passée autour de ma taille pour me soutenir. Ce fut en m'appuyant contre son torse que je reconnus Simon. Avec un soupir à mi-chemin entre le soulagement et le désespoir, je laissai aller mon front contre son épaule.
-Salut.
Pendant un affreux instant, Simon resta immobile, statique, acceptant la proximité avec une tension palpable. Puis un soupir s'échappa à son tour de ses lèvres et il passa une main dans mon dos.
-Salut. Comment c'était Swansea ?
-Explosif, tentai-je avec un pâle sourire.
Je m'écartai pour appréhender sa réaction. Lui ne souriait pas : il fixait ma jambe couverte de pâte verte et qui diffusait toujours cette forte odeur d'anis. Gênée, je tentai de tirer les restes éliminés de mon jean pour la couvrir.
-Ce n'est rien, Podmore a dit que ce serait guéri dans deux jours. Il ... il faudra juste que je trouve une excuse pour l'entrainement de lundi.
Je sentis une vague de désespoir m'envahir. J'avais un match samedi prochain, Dalia serait furieuse. Et comment justifier une telle brûlure ? Face au regard insistant de Simon qui ne quittait pas ma jambe, je tentai de le rassurer :
-Je pense que je vais dire que tu as fait une erreur dans tes expérimentations et que tu as enflammé mon jean. Tous ceux qui nous connaissent savent qu'on est capable d'en être réduits à ça ...
-Ne me mêle pas à tes conneries, Vicky, me prévint Simon en détachant enfin les yeux de ma jambe pour le planter sur moi. Surtout que pour le coup ce n'est pas crédible pour deux noises.
-Oui pardon tu ne fais jamais d'erreur ... Aïe !
Il venait de me frapper à l'arrière de la tête et j'y portai la main avec un regard outré. Après ce qui s'était passé ces derniers jours, chacun aurait pu espérer que les coups cesseraient mais les mauvaises habitudes perduraient toujours.
-Simon, je vais bien. J'aurais pu rentrer avec bien pire – et peut-être qu'un jour, l'un de nous deux rentra avec bien pire. Et je viens de sortir de chez Maugrey et j'ai mal à la jambe et je me sens déjà minable : est-ce qu'on peut passer sur l'engueulade qui dit que je suis stupide et moi qui te rappelle que tu l'es tout autant et passer directement à l'engloutissement de chocolat en bonne et due forme ?
-T'es insupportable, marmonna-t-il en levant les yeux au ciel.
-Je sais, tu me l'as déjà dit. Oh, rappelle-moi ce qui s'est passé la dernière fois que tu me l'as dit ?
Ses joues s'échauffèrent pour ma plus grande satisfaction. Je souris mais je sentais qu'il avait des difficultés à pleinement s'épanouir. Malgré mes pitreries, je n'arrivais pas à m'arracher de l'esprit le regard vague du vieil homme quand j'avais jeté le sort d'oubli. Simon parut sentir tous mes non-dits, juste avec ce simple sourire qui n'était que façade. Et il était le plus à même de deviner ce qui se cachait derrière le masque. Son regard s'adoucit alors et la main qui venait de me frapper glissa lentement vers la mienne. Je nouai mes doigts aux siens et une chaleur bienfaisante se diffusa dans ma poitrine.
-Très bien, céda-t-il avec un sourire penaud. On va manger du chocolat.
-On ? répétai-je, vaguement amusée. Je ne crois pas t'avoir invité ...
-Je m'invite tout seul.
Un sourire attendri s'étira sur mes lèvres. L'idée était tentante mais mon regard effleura la porte du bureau que je venais de quitter et l'étouffa dans l'œuf.
-Maugrey t'attend. Il veut parler argent, je crois. Bon sang, j'ai intérêt à avoir un cadeau exceptionnel pour mon anniversaire, monsieur le riche héritier !
-Je savais que tu ne t'intéressais à moi que pour mon compte en banque !
Sa mine faussement indignée m'arracha un éclat de rire et je tirai sur sa main pour l'attirer à moi. Il parut hésiter un instant et jeta un regard circulaire avant de céder et s'incliner doucement sa tête sur moi. J'attendis, statique, les yeux mi-clos comme sur le sofa de la maison des Bones jusqu'à ce que ses lèvres se pressent contre mon front, sur le premier morceau de peau qui fut à leur portée, un peu excentré à gauche. La chaleur se diffusa depuis ce point dans tous mes pores et réchauffa mon cœur meurtri et gelé. La pression s'alourdit et je le sentis presque se reposer sur moi dans ce baiser, sobre, même pas sur les lèvres mais dont je sentais toute la force, toute la sincérité. Un sourire absurde m'échappa quand il se détacha doucement pour poser sa joue contre mon crâne et dans un élan naturel je me laissai aller contre lui. Son souffle lourd se répandait douloureusement dans mes cheveux et faisait voler les mèches folles à intervalle irrégulier.
-Je reviens dans cinq minutes, souffla-t-il en serrant mes doigts. Et après, séance films et chocolat chez les Bennett.
***
Voilà ! Alors verdict de ce chapitre?
Petit point sur la question que je vous avais posée dans l'analyse du Simoria - ceux qui n'ont pas été voir, je demandais si ça dérangeait que j'aille un peu plus loin avec eux.
Pour certains, vous avez été sceptiques, prudents et j'ai entendu vos arguments - notamment celui de "On n'a jamais vu Victoria dans cette situation, ce serait bizarre, on entrerait trop dans son intimité". C'est vrai que ça peut être dérangeant, je le comprends parfaitement : la fanfiction se voulait tout public, ce serait un changement de perspective un peu violent.
Alors j'ai décidé de couper la poire en deux. Il n'y aura pas de lemon à proprement parler ; je vais jouer sur l'avant/après pour détailler, analyser et travailler cet aspect-là, et tout ce qui se passe en dessous de la taille on zappe. Je me réserve le droit d'être explicite sur le buste, peut-être qu'il y aura quelques scènes un peu hot, mais on coupera le moment "crucial" et bien sûr, elles seront là pour le bien de l'histoire, le travail de la relation entre Vic et Simon, la dédramatisation de la sexualité. Et le tout sur l'histoire principale pour ne pas avoir à faire plein d'aller-retours, à la fois pour les lecteurs et pour moi.
ça vous va comme compromis?
(Par contre LDP je pense qu'on ira vraiment plus loin. Je verrais à l'écriture).
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